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Ewa

Les nouveaux défis du Grand Paris Express

Calendrier mis a jour suite aux arbitrages gouvernementaux de fevrier 2018

La moitié de la vérité


« Depuis le lancement de ce projet magnifique en 2009, on a beaucoup promis, je ne suis pas sûr qu’on ait toujours dit la vérité. » Le 22 février, le Premier ministre a voulu au contraire tenir un « langage de vérité » sur le Grand Paris Express (GPE). Il était temps. Et, c’est vrai, il s’est engagé sur ce chemin. Mais il n’est pas allé au bout.

Edouard Philippe a rappelé que les neuf kilomètres de la ligne 14 ont été réalisés en neuf ans, alors qu’on veut aujourd’hui réaliser 200 km en 20 ans… Le métro parisien, de plus est assez peu profond. Entre 10 et 25 mètres. Pour le GPE, on sera plutôt entre 30 ou 40 m. Parfois même à 50. Plus compliqué. Plus long. Plus cher.

Un kilomètre par an, c’est ce qu’on a fait récemment. Dix kilomètres par an, c’est ce qu’on veut faire. A Shanghai ce ne serait pas un problème : on y a construit 588 km en moins de 30 ans. Riyad ou Doha pourraient relever ce défi. Paris au début du siècle dernier n’en était pas loin. La première ligne a été inaugurée en 1900, comme il se doit pour les jeux Olympiques. En 1913, à la veille de la guerre, le réseau comptait huit lignes, totalisant 91 km, réalisés en quinze ans. Six kilomètres par an.

Dans le Grand Paris d’aujourd’hui, qui peut y croire ? La promesse est énorme. Elle est maintenue. Elle ne sera pas tenue. Certes, le Premier ministre a usé dans son discours d’une commodité éprouvée : « à l’horizon 2030 ». Elisabeth Borne, la ministre des Transports, en précisant le calendrier n’y a pas eu recours. Le calendrier décidé le 22 février consiste donc à décaler, au sein d’une plage de temps officiellement inchangée, toute une masse de 2022 à 2024, une autre de 2024 à 2027, et le reste à 2030.

En 2024, du fait de ce décalage, sur un total d’environ 200 km, ce ne sont plus, selon nos estimations à la louche, 120 km qui devraient être ouverts aux voyageurs en 2024, mais 70 km. Cela paraît plus raisonnable. Tout de même, 70 km à finir dans les six ans qui viennent alors que le premier tunnelier n’a pas encore commencé à creuser… Et 130 km dans les six ans qui suivent…

En fait, comme on ne peut pas aller plus vite que la musique, après 2024, il risque de rester bien plus de 130 km à réaliser. Ce qui rend l’objectif 2030 encore plus farfelu. Le calendrier avancé le 22 février est, selon le Premier ministre, « extrêmement tendu, réaliste, tenable mais déjà tendu ». Tenable ? Non.
La vérité du 22 février n’est pas la vérité vraie, que permettent de cerner les financements disponibles, les marchés passés, les capacités du BTP ou l’avancement des chantiers en cours. C’est la vérité recevable. Celle qui ne fait pas trop perdre la face aux maires qui vont retourner devant les électeurs en 2020. Ou aux présidents de conseil départementaux dont le sort est lié aux élections de 2021. Ou à l’Etat, qui est après tout la source du projet et des promesses inconsidérées.

Et pourtant, cette demi-vérité, les élus la reçoivent très mal. Déjà, en 2012, quand il avait énoncé des choses semblables dans un rapport remis au gouvernement, Pascal Auzannet avait eu droit « au goudron et aux plumes ». Il l’a rappelé vendredi dernier devant le club VR&T.  Même bronca cette année. Au lendemain du 22 février, les présidents de conseil départementaux, de gauche, de droite, et Valérie Pécresse ont dénoncé dans un communiqué commun un « scandale d’Etat ». Les communiqués propres à chacun sont moins violents. Mais tous ensemble, les grands élus sont intenables. Si scandale d’Etat il y a, il n’est pas d’aujourd’hui, où l’on commence à raconter moins de calembredaines. Mais d’hier, quand l’Etat et la région ont tout promis et que tout le monde a fait semblant d’y croire ou s’est pris au jeu. Ils n’ont pas eu tort. On était dans une logique performative : énoncer le projet, c’était le rendre irréversible. Mais on est allé trop loin dans les promesses. D’où la difficulté d’atterrir.

F. D.

 

Décisions et déceptions

Ligne 14 Nord
Saint-Lazare – Mairie-de-Saint-Ouen – Saint-Denis-Pleyel
8 km. 40 000 voyageurs/heure à l’heure de pointe.
Anciennes dates :
Saint-Lazare – Mairie-de-Saint-Ouen : 2019
Mairie-de-Saint-Ouen – Saint-Denis-Pleyel : 2023
Nouvelles dates :
Saint-Lazare – Mairie-de-Saint-Ouen : 2020
Mairie-de-Saint-Ouen – Saint-Denis-Pleyel : 2024

Le prolongement nord de la ligne 14, de Saint-Lazare à Mairie-de-Saint-Ouen (5,8 km), était programmé par la RATP, maître d’ouvrage. Indépendant du GPE, il est essentiel au dispositif. Ce tronçon était récemment annoncé pour 2019. Mais, comme l’a rappelé Edouard Philippe, « un peu avant l’été 2016, la réalisation des parois moulées dans le cadre du prolongement de la ligne 14 avait conduit à une entrée de 30 000 à 40 000 mètres cubes d’eau et retardé le chantier d’environ 18 mois ». La RATP a revu les plannings pour résorber en partie ce retard, d’ordinaire estimé à environ treize mois. Quoi qu’il en soit, on annonce aujourd’hui le prolongement pour l’été 2020.

Un retard très gênant pour les usagers de la ligne 13, pleine à craquer au nord, qui comptent sur la 14 pour respirer. 1 800 personnes exigeantes viennent de s’ajouter à ces usagers : le conseil régional d’Ile-de-France, qui s’installe en ce début d’année dans son nouveau siège, près de la station Mairie-de-Saint-Ouen, aujourd’hui desservie par la seule ligne 13. Valérie Pécresse pendait la crémaillère vendredi 9 mars. Si l’on avait respecté le premier calendrier, on aurait pu se rendre à la fête par la ligne 14 : le prolongement devait initialement être terminé « à l’horizon 2017 »

La suite, de Mairie-de-Saint-Ouen à Carrefour-Pleyel (environ 2 km), prévue par la loi Grand Paris, est du ressort de la SGP. D’un point de vue opérationnel, cette séparation de maîtres d’ouvrage n’est pas ce qu’il y a de plus efficace. Cette dernière section était prévue en 2023. Cela reste le cas, même si elle figure avec le tronc commun de la 16 et 17 dans un ensemble de lignes prévu pour 2024. A priori, à temps pour les JO.

 

 

calendrier mis a jour suite aux arbitrages gouvernementaux de fevrier 2018 1

Ligne 14 Sud
Olympiades – Aéroport-d’Orly
14 km. 300 000 voyageurs/jour
Ancienne date : 2024
Nouvelle date : sans changement

Bien venue pour les jeux Olympiques (pas seulement, heureusement), cette ligne est censée être terminée au printemps 2024. Pas de marge. Il y avait donc une extrême urgence à passer les marchés de génie civil. Or ils ont été bloqués pendant plusieurs mois, le temps que le gouvernement revoie tout le dispositif. Le conseil de surveillance de la SGP, le 13 février, a adopté un budget provisoire permettant de notifier les marchés urgents.
Pour la 14 Sud c’est la RATP qui les passe, la SGP lui ayant confié la maîtrise d’ouvrage. Mais il fallait aussi certaines signatures de la SGP. Bref c’est parti, et les premiers marchés de génie civil ont été passés par la RATP.
Lot 1 à Léon Grosse/Solétanche Bachy.
Lot 2 à Dodin Campenon Bernard/ Vinci Construction France /Vinci Construction Grands Projets/Spie Batignolles PPCI/Spie Fondations/ Botte Fondations.
Lot 3 et 4 non encore attribués.
La RATP en fait état dans un communiqué du 8 mars et se fixe pour objectif de faire de la ligne 14 « un axe essentiel pour les jeux Olympiques et Paralympiques de Paris en 2024 ». Conformément au calendrier officiel inchangé mais peu vraisemblable.

 

Ligne 15 Sud
Pont-de-Sèvres – Noisy-Champs
33 km. 300 000 voyageurs/jour
Ancienne date : 2022
Nouvelle date : 2024

calendrier mis a jour suite aux arbitrages gouvernementaux de fevrier 2018 4
C’était un secret de Polichinelle. La 15 Sud, techniquement, ne pouvait pas être prête en 2022. La SGP a maintenu jusqu’au bout la fiction. Le Premier ministre a fait de cette ligne l’exemple de ce qu’il voulait éviter : « en 2014, elle était annoncée pour 2020, un an plus tard elle a été décalée en 2022 et […] elle n’arrivera pas avant 2024, ça n’est pas admissible, je pense qu’il eût été préférable de prendre dès le début les marges raisonnables. » Il serait bien venu de le faire aujourd’hui aussi. Certes, le Premier ministre n’annonce 2024 qu’avec la plus grande prudence. Des professionnels affirment plus directement : avant 2025, ce n’est pas tenable. Mais le Val-de-Marne s’en sort plutôt bien. Il y aura des retards dans l’exécution des travaux, et les riverains vont en pâtir, mais au moins tout est enclenché. Pour la ligne 15 Sud, ou pour le prolongement sud de la ligne 14. Pas surprenant. Le département, dès l’origine, a remarquablement travaillé le sujet. Et fait dans le cadre de l’association Orbival l’unité entre la droite et les communistes, entre Jacques J.-P. Martin et Christian Favier, pour porter un projet qui a toujours été présent dans les nombreux avatars du métro du Grand Paris.

 

Ligne 15 Ouest
Pont-de-Sèvres – Saint-Denis-Pleyel
20 km. 600 000 voyageurs/jour
Anciennes dates :
Pont-de-Sèvres – Nanterre : 2025
Nanterre – Saint Denis-Pleyel : 2027
Nouvelle date :
2030 (on n’annonce plus de phasage)

calendrier mis a jour suite aux arbitrages gouvernementaux de fevrier 2018 3

Cinq ans dans la vue, c’est beaucoup pour un chantier qui n’a pas commencé. Les raisons de financement et de lissage selon les capacités industrielles sont sans doute fondamentales. Elisabeth Borne parle de « complexités inédites » des futurs travaux. C’est vague. Mais elle donne un exemple : « La construction d’une gare sous le quartier de La Défense. » Prévue sous les quelques milliers de tonnes de béton du centre commercial des Quatre-Temps dont il va falloir reprendre les fondations, cette gare est très compliquée à réaliser. Selon un professionnel, elle l’est plus encore que celle d’Eole qui nécessite la reprise, aujourd’hui en cours, des fondations des bâtiments abrités par le voile de béton du Cnit.

Les usagers de l’AUT IDF regrettent vivement le report de la 15 Ouest. Pour deux raisons. La première vaut aussi pour la 15 Est : boucler la boucle de la 15 est ce qui permet le mieux de désaturer l’ensemble du métro parisien. C’était d’ailleurs l’un des objectifs du projet Métrophérique de la RATP dont, à l’issue d’une histoire compliquée, la ligne 15 reprend pour l’essentiel le tracé. Deuxième raison, c’est à l’ouest que les besoins sont le plus importants. 600 000 voyageurs/jour attendus : c’est deux fois plus que la 15 Sud. La 15 Ouest passe par la Défense. Quand on a dit ça, vu la structure de l’emploi en Ile-de-France, on a à peu près tout dit.

 

calendrier mis a jour suite aux arbitrages gouvernementaux de fevrier 2018 2

Ligne 15 Est
Saint-Denis-Pleyel – Champigny-Centre
23 km. 300 000 voyageurs/jour
Anciennes dates :
Saint-Denis-Pleyel – Rosny-Bois-Perrier : 2025
Rosny-Bois-Perrier – Noisy-Centre : 2027
Nouvelle date : 2030 (on n’annonce plus de phasage)

Même retard à l’est qu’à l’ouest. Elisabeth Borne parle de « risques géologiques particuliers dans la plaine centrale de Seine-Saint-Denis ». Ce retard n’a pas la même incidence qu’à l’ouest. Il ne s’agit pas, avec cette branche, de répondre à une très forte demande de transport, mais de permettre à la Seine-Saint-Denis d’être mieux reliée aux bassins d’emploi. Très important mais, en termes d’offre. Le département déplore donc le retard. Rappelons que cette ligne, grosso modo projetée par le réseau Métrophérique de la RATP, n’avait pas été retenue par Christian Blanc, et n’avait même pas été esquissée par le projet Arc Express du Conseil régional. Et n’avait pas été portée par le conseil départemental alors communiste. Le PC craignait, avec le métro et la relation directe avec la Défense, un bouleversement sociologique du département… que souhaitait au contraire Claude Bartolone, devenu en 2008 président de la Seine-Saint-Denis. La ligne, ajoutée grâce à l’accord Etat-région de 2011, est dessinée dans la foulée. Pas tout à fait le même poids que la 15 Sud historiquement portée par le Val-de-Marne.

 

 

 

Ligne 16
Saint-Denis-Pleyel – Clichy-Montfermeil – Noisy-Champs
29 km (y compris le tronc commun avec la 17 d’environ 5 km). 200 000 voyageurs/jour
Ancienne date : 2024
Nouvelles dates :
Saint-Denis-Pleyel – Clichy-Montfermeil : 2024
Clichy-Montfermeil – Noisy-Champs : 2030

calendrier mis a jour suite aux arbitrages gouvernementaux de fevrier 2018 5

« Si l’arrivée de la gare à Clichy-Montfermeil a été bien été confirmée pour 2024, quid du reste de la ligne ? Phaser la ligne 16 et ne pas la relier à la 15 Sud serait un véritable non-sens en termes d’exploitation et financiers », dit Stéphane Troussel.
Officiellement, il n’est pas question de ne pas aller au bout. Mais on fait étape à Clichy-Montfermeil. En 2024, ce qui est très ambitieux. Mais politiquement, on ne peut pas dire le contraire. La desserte de Clichy-sous-Bois et de Montfermeil, c’est un marqueur fort du projet de métro du Grand Paris, depuis Nicolas Sarkozy et Christian Blanc jusqu’à Emmanuel Macron. Le président de la République, à Clichy-sous-Bois le 13 novembre dernier, a lui-même confirmé l’objectif 2024. On peut penser que la réalité des travaux en décidera autrement. Il faudra déjà, en partant vers l’est depuis la gare Saint-Denis-Pleyel, pousser assez vite au-delà du tronc commun de la 16 et de la 17, quasiment jusqu’à Aulnay, pour rejoindre le centre de maintenance du matériel, sans lequel ni la 16 ni la 17 ne pourraient fonctionner… En tout cas la 16 est bel et bien partie. Un énorme lot de génie civil de 1,7 milliard, a été attribué en février par la SGP à un groupement de génie civil emmené par Eiffage.
Ligne 17
Saint-Denis-Pleyel – Le Mesnil-Amelot
20 km (sans compter le tronc commun avec la 16 de 5 km ni le tronçon de la seule 17 desservant Le Bourget). 130 000 à 160 000 voyageurs/jour
Anciennes dates :
jusqu’à CDG : 2024
CDG – Mesnil-Amelot : 2030
Nouvelles dates :
Saint-Denis-Pleyel – Le Bourget-Aéroport (sous réserve) : 2024
Le Bourget-Aéroport (ou débranchement du tronc commun) – Triangle-de-Gonesse : 2027
Triangle-de-Gonesse – Le Mesnil-Amelot : 2030

calendrier mis a jour suite aux arbitrages gouvernementaux de fevrier 2018 6
Pour Stéphane Troussel, « bien que la desserte des sites olympiques soit en grande partie confirmée, elle ne l’est pas en totalité. Or, ne pas réaliser la gare du Bourget-Aéroport pour les Jeux revient à tuer le village des Médias et l’opportunité d’urbaniser un quartier aujourd’hui trop routier. Cette desserte n’est pas une option technique, c’est une nécessité ». Sur la carte du gouvernement, la desserte de l’aéroport du Bourget est prévue pour 2024. Mais en pointillés. Car on saura bientôt, dit Elisabeth Borne, « s’il est techniquement possible de desservir la gare du Bourget-Aéroport pour les jeux Olympiques, les sites du Village Médias et du centre principal des médias étant situés à proximité ». Et « si tel n’est pas le cas ces sites seront desservis par un système de navettes ». Avancer l’hypothèse, n’est-ce pas déjà la retenir ?

Au-delà de l’aéroport du Bourget, la ligne 17 doit aller jusqu’au triangle de Gonesse. Arrivée maintenant prévue en 2027 au lieu de 2024. Protestation de Marie-Christine Cavecchi qui regrette que la seule gare du Grand Paris située dans le département du Val-d’Oise, qu’elle préside, prenne trois ans dans la vue. De son côté, l’urbanisation du Triangle de Gonesse joue de malheur. Le 6 mars, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, saisi par des associations de défense de l’environnement, a annulé l’arrêté préfectoral créant la Zone d’aménagement concertée (ZAC), indispensable à la création du complexe de commerces et de loisirs Europacity, de 800 000 m² de bureaux ou de la gare du Grand Paris Express. L’urbanisation du Triangle et le métro vont de pair, chacun justifie l’autre et les deux vont mal.

Au-delà de Gonesse, Roissy est promis en 2030 et non plus en 2024. La Seine-Saint-Denis déplore « une mauvaise nouvelle pour le territoire. Cette ligne permet de répondre aux besoins de desserte locale du bassin d’emplois de Roissy ». Un argument que contestent certains spécialistes du transport, pour qui ce bassin d’emplois étant vaste et dispersé, la solution métro n’est pas la plus adaptée. Pour sa part, du fait du faible trafic attendu, la Fnaut juge « incompréhensible le maintien de l’intégralité » de la ligne 17.

Quant à la desserte de l’aéroport, il y a bien une solution de rechange (mais coûteuse pour l’usager), qui, comme la ligne 17, figure dans le dossier de candidature de la France aux JO : le CDG Express. Pas sûr non plus que cette promesse soit honorée.

 

Ligne 18
Aéroport-d’Orly – Versailles-Chantiers
35 km. 100 000 voyageurs/jour
Anciennes dates :
jusqu’au CEA-Saint-Aubin : 2024
CEA-Saint-Aubin – Versailles : 2030
Nouvelles dates :
jusqu’au CEA Saint-Aubin : 2027
CEA-Saint-Aubin – Versailles : sans changement

calendrier mis a jour suite aux arbitrages gouvernementaux de fevrier 2018 7
C’est le sujet le plus délicat. Ailleurs, les territoires se sont approprié le projet et peuvent se batte pour l’avoir, plus ou moins tôt, plus ou moins tard. Pour la 18, ce n’est pas le cas. Il n’y a pas d’unité dans le territoire. Déjà, l’accord « historique » du 26 janvier 2011 soulignait que la ligne faisait l’objet d’un désaccord, l’Etat voulant un métro, le conseil régional, sous la pression très forte des écologistes, demandant un BHNS. Les oppositions sont toujours là. Et localement fortes. Un jour un collectif de chercheurs demande le métro comme promis, un autre, le lendemain, met en cause sa légitimité. Et, quand bien même métro il y devrait y avoir, le gabarit retenu – celui du métro parisien – ne convainc pas tout le monde. Ni, le choix de passer sous les champs, etc. Des défenseurs de l’environnement contestent avec de sérieux arguments le projet. Les grands élus tiennent. A commencer par la présidente de la région, élue des Yvelines et ancienne ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, très attentive au développement du territoire de Saclay. Selon elle « sur le plateau, la colère gronde ».
A l’issue d’une réunion de travail avec le préfet de région, Valérie Pécresse et François Durovray (président du conseil départemental de l’Essonne) ont rappelé qu’à leurs yeux « s’il est indispensable d’accompagner le développement du plateau par des solutions de desserte locale de type bus, il est illusoire d’imaginer que cela suffirait à remplacer un métro, seul à même d’assurer une desserte efficace depuis Paris et le développement de ce grand pôle ». Ils demandent au gouvernement d’utiliser « des pistes d’optimisation possible pour une mise en service anticipée de la ligne ».
Grégoire de Lasteyrie, maire de Palaiseau, et président de l’Union des élus pour la ligne 18, « demande un rétroplanning opérationnel précis de la réalisation de la ligne 18 ». Et veut revoir le projet d’aménagement du plateau : « Il n’est pas possible de poursuivre l’urbanisation du plateau de Saclay au même rythme après le report de la ligne 18. »
On dit le ministère des Transports opposé à une ligne que le trafic escompté ne justifie pas. Un tramway ? Mais la loi Grand Paris indique un métro. En reviendra-t-on à une piste avancée en son temps par Pascal Auzannet, le prolongement d’Orlyval ? Ou à la solution cousine, celle d’un Val en PPP, esquissée par la RATP, du temps de Pierre Mongin, avec Bouygues et Siemens ? Keolis, aussi l’an dernier, avait invité à revoir cette ligne, ainsi que d’autres, en ayant plus largement recours au viaduc. Politiquement, techniquement, la ligne 18 n’est toujours pas bien calée.

 

Sept mots-clés

Dépassement
Passer de 25 à 35 milliards d’euros (à la louche) c’est ce qui a fait bondir le gouvernement et a valu à la SGP de se faire étriller par la Cour des comptes. Cela dit, comme le fait remarquer Bertrand Lemoine, ancien directeur général de l’Atelier international du Grand Paris, lors de la dernière séance du Club VR&T, des dépassements de cet ordre sont monnaie courante. En se fondant sur les travaux d’un chercheur danois qui a examiné 85 grands projets dans le monde, Bertrand Lemoine rappelle qu’en moyenne, pour un coût estimé à 1, on arrive à 1,45. Ce n’est pas une raison pour s’en satisfaire, mais la sous-estimation des coûts, comme la surestimation des retombées économiques ou de la vitesse de réalisation font partie du jeu. Et permettent de se lancer un projet qui sinon ne sortirait pas… Le problème avec le Grand Paris, c’est qu’on est passé de 1 à 1,3 avant que les travaux aient vraiment commencé.

Economies
Le Premier ministre souhaite que l’on parvienne à une économie d’environ 10 % par rapport aux estimations actuelles. Pas facile, car tout n’a pas été compris dans le devis. Il a cité quatre gares dont les travaux d’interconnexion n’ont pas été intégrés. S’il doit encore gonfler, comment dans l’autre sens le faire baisser ?
Il y a une piste qu’évoque volontiers Valérie Pécresse : renoncer aux gares cathédrales. Politiquement difficile depuis qu’on a fait rêver les maires avec de somptueuses maquettes. Cela peut-il rapporter beaucoup ? Grosso modo, les gares représentent le tiers du coût du génie civil. Et, sur ce tiers, l’émergence ne représente qu’environ 15 %. La partie émergée de l’iceberg. Le gros de la masse et des coûts est ailleurs : la « boîte de la gare », les quais et les sorties avec leurs escalators, sorties coûteuses, puisqu’on est en profondeur… Sur ces sujets, la grosse économie a déjà été faite à la suite du rapport Auzannet et du choix de rames courtes et donc de quais courts pour les lignes 16 et 17.
Reste que le coût des gares a été gonflé par le choix qu’a fait la SGP de ne pas les standardiser, en privilégiant paradoxalement une esthétique municipale plutôt que métropolitaine. Leur entretien en sera rendu plus coûteux. Un bon connaisseur de la ligne 14 invite à se méfier des « moutons à cinq pattes ». Changer un carreau de la belle « lentille », station Saint-Lazare, coûte 4 000 euros (chiffre dont nous avons demandé la confirmation à la RATP sans avoir jusqu’à présent de réponse).
Reste d’autres pistes d’économies. Augmenter la part des lignes construites en viaduc, qui est d’aujourd’hui 10 % du total. C’est ce qu’a proposé Keolis pour les lignes 16, 17 et 18 dans une contribution sur l’optimisation des coûts du Grand Paris Express. On pourrait faire sur les tronçons concernés une économie d’environ 30 à 40 % en génie civil.

Effectifs
Le Premier ministre a confirmé ce qu’il avait déjà dit. L’effectif de la SGP est aujourd’hui plafonné à 200 personnes. Il faut plus de monde pour qu’elle puisse pleinement jouer son rôle de maître d’ouvrage. C’est un point sur lequel insistent particulièrement Christian Favier, le président communiste du Val-de-Marne, ou Jacques Baudrier, conseiller PC de Paris et grand connaisseur du dossier. Des communistes qui veulent qu’une société publique recrute c’est dans l’ordre des choses. Mais il s’agit en l’occurrence de recruter pour mieux gérer. Dépenser des millions d’euros en salaires, pour éviter d’en payer des centaines auprès d’entreprises trop peu contrôlées. Faire en sorte que la volonté d’économiser ne conduise pas à dégrader le projet : en supprimant des sorties de métro moins nombreuses ou en renonçant à des interconnexions.

Financement
On ne présente plus Gilles Carrez qui, sans surprise, a été chargé par le gouvernement de prévoir le nouveau financement. On pensait que le 22 février, le Premier ministre présenterait, avec le calendrier, une solution pour le financement des surcoûts. Ce n’a pas été le cas. Mais le député LR chargé du dossier ne semble pas inquiet. La solution de recettes affectées perçues en Ile-de-France lui semble toujours la bonne. En fait, la seule. Impossible de faire payer des travaux que l’on dit pharaoniques à l’ensemble du pays. Trop risqué de s’en remettre à l’annualité budgétaire. Quant aux promesses de l’Etat, on sait ce qu’elles valent : l’Etat devait apporter 4 milliards, puis a dit qu’il n’en donnerait qu’un et finalement n’a rien versé. On devrait donc garder la solution des taxes franciliennes affectées et ajouter quelque 200 millions aux 550 millions aujourd’hui perçus. Mais sur qui vont-elles peser, selon quel dosage  ? Les personnes ? Les m² de bureaux ? Les nuitées des hôtels ?

Gouvernance
Philippe Yvin, président du directoire de la SGP depuis quatre ans (décret du 20 février 2014) va être remplacé. A l’heure où nous écrivons, le nom de son successeur n’est pas connu. En tout cas, pas de nous, même si quelques noms nous parviennent. La décision ne devrait pas être prise avant le prochain conseil de surveillance de la SGP, le 22 mars. Mais la gouvernance ne se résume pas au nom du président du directoire. Avoir un conseil de surveillance où siègent, de droit, les présidents de conseil départementaux et la présidente du conseil régional, tous chauds partisans du projet, est-ce la meilleure idée ? La Cour des comptes en doute : « La composition du Conseil de surveillance qui avait répondu à l’objectif initial de parvenir à élaborer un projet consensuel à l’égard des grands élus d’Ile-de-France, tout en garantissant la majorité aux représentants de l’Etat, ne lui apporte pas l’expertise nécessaire sur les sujets techniques et financiers. »
Oublis
Les travaux d’intermodalité de quatre gares n’ont pas été intégrés. Sur les quatre, trois n’ont pas été étudiées. C’est le Premier ministre qui le dit, sans donner la liste de ces gares. Il s’agit de Bry-Villiers-Champigny, de la correspondance de Saint-Denis-Pleyel avec la ligne H, de Verts-de-Maisons et de Bois-Colombes. Seule cette dernière a été étudiée. Cette carence, c’est ce qu’il reste d’une ignorance générale des coûts d’intermodalité, dénoncée par l’exécutif régional du temps de Jean-Paul Huchon, et particulièrement par Pierre Serne. Ce qui avait permis de sous-estimer la facture.
Prolongement
On ne parle pas du prolongement de la ligne 11 de Rosny-Bois-Perrier à Noisy-Champs. Les pointillés qui la font aujourd’hui figurer sur les cartes semblent lui promettre les calendes grecques. Cette ancienne branche d’une provisoire ligne orange a été retirée de l’enveloppe SGP pour devenir le prolongement d’une ligne de métro RATP. Une façon qu’avait trouvée la RATP de renforcer sa présence dans le jeu, et de se consoler d’avoir été privée d’une ligne 14 prolongée jusqu’à Roissy. Une ligne prolongée, c’est de l’exploitation assurée sans appel d’offres, au moins jusqu’en 2039. Un premier prolongement de la 11, jusqu’à Rosny-Bois-Perrier, est en cours. La RATP est censée automatiser la ligne, à l’occasion du prolongement suivant. Une étape qu’on dit socialement délicate. Les négociations ne sont pas près de s’ouvrir.

Ewa

Thierry Mallet : « En France, nous avons de nouvelles opportunités de croissance »

thierry mallet

Thierry Mallet était, le 8 février, l’invité du Club Ville Rail & Transports. L’occasion pour les participants de poser leurs questions au PDG de Transdev. Des Assises de la mobilité à la concurrence des bus en Ile-de-France, en passant par les TER, les cars Macron, les expériences de véhicules électriques à Rouen, le péage urbain, les bus électriques aux Pays-Bas et en France…

 

Cela fait un an et demi que vous avez pris les rênes de l’entreprise. Quel état des lieux pouvez-vous dresser ?

bus Transdev Pays-Bas
Transdev est présent dans 18 pays en plus de la France. (Ci-dessus, à Amsterdam où l’exploitant fait circuler 300 bus électriques.)

« Transdev, c’est 83 000 hommes et femmes qui transportent dix millions de personnes chaque jour. L’entreprise a réalisé 6,7 milliards d’euros de CA l’an passé, dont 63 % à l’international [résultats de 2016, ceux de 2017 étant attendus en mars, NDLR]. La France reste son premier marché, avec 34 000 salariés et 19 000 véhicules, puis arrivent les Etats-Unis, l’Allemagne où Transdev est le deuxième opérateur ferroviaire régional, les Pays-Bas où nous faisons circuler 300 bus électriques. Nous sommes aussi présents en Suède, en Australie, en Nouvelle-Zélande… dans 18 pays, sans la France. En France, les Assises de la mobilité, la future loi d’orientation et l’ouverture du fer à la concurrence vont nous offrir des opportunités de croissance. C’est en France que beaucoup d’innovations sont mises en œuvre avant

Land de Saxe Anhalt Transdev © Transportrail
Côté ferroviaire, l’exploitant fera jouer son expérience internationale. Il est par exemple le deuxième opérateur ferroviaire régional en Allemagne (ici dans le Land de Saxe-Anhald).

d’être exportées. Mais il arrive aussi qu’on y importe le savoir-faire d’autres pays, comme l’électromobilité des Pays-Bas ou le yield managment, l’expérience clients des Etats-Unis. »

Vous avez comme actionnaires la Caisse des dépôts et Veolia qui veut se retirer. On pensait que cette question d’actionnariat serait réglée l’an dernier, elle ne l’est pas, où en est-on ?
« La Caisse des dépôts détient 70 % de notre capital. C’est un actionnaire historique et un partenaire fort qui nous accompagne dans notre développement. D’ailleurs, le transport est clairement dans la feuille de route du nouveau directeur général de la Caisse. Veolia a, en revanche, annoncé depuis longtemps sa volonté de sortir de notre capital. Il faut lui trouver un remplaçant, en prenant le temps de trouver le bon partenaire. Cela pourrait être un industriel qui nous permettrait d’accélérer notre croissance à l’international. Veolia a aussi la possibilité de demander à la Caisse de lui racheter ses parts fin 2018. D’ici à la fin de l’année, il faut que ce soit réglé. »

Rapports Duron, Spinetta et projet de loi mobilité, qu’en attendez-vous ?
« La démarche des Assises a été extrêmement positive. En partant du terrain, elle a permis de faire connaître des solutions et de remonter des idées. En ce qui concerne les infrastructures, la priorité doit être mise sur la mobilité du quotidien et l’entretien du réseau existant. Nous sommes en phase avec le gouvernement et attendons qu’il fasse des choix, car il n’y a rien de pire que les non-choix. Or, le rapport Duron c’est un menu avec plusieurs options. Il va falloir trancher. Mais la question est bien posée. Il faut remettre à niveau le réseau ferré et routier. L’enjeu ce sont les financements. Je pense qu’avant d’en chercher de nouveaux, il faut chercher à faire des économies. Rajouter de nouvelles taxes n’est pas le bon mode de fonctionnement. On a besoin d’un cadre financier clair. Pour cela il faut préserver le versement transport sans l’augmenter. Il faut jouer sur plus d’efficacité dans l’exploitation. Moduler les tarifs en faisant payer davantage les usagers, quitte à accorder la gratuité à certaines classes sociales. Les péages urbains sont aussi une piste intéressante. Quand on regarde l’exemple de Stockholm, l’argent du péage urbain a servi à renforcer les transports publics. Et cela peut être une solution pour lutter contre l’autosolisme. C’est un moyen intelligent d’organiser la ville. On peut mettre en place un système de tarification intelligent et social avec le digital. Le fer paye pour l’usage du rail, l’automobile paye les autoroutes. En ville, il y a une bataille pour l’usage de l’espace urbain. Pourquoi ne pas faire payer l’entrée des villes ? En augmentant le tarif des infractions au stationnement on est arrivé à faire payer davantage les gens qui jusque-là ne le payaient pas, et certains ont renoncé à leur voiture pour ne pas avoir à payer 25 euros de parking par jour. Cela a libéré des places pour se garer. Et a eu un effet positif. C’est une première brique vers l’instauration d’un péage. »

Comment améliorer l’offre dans les déserts de mobilité ?
« 40 % de la population ne bénéficient pas d’offre de transport. Il y a deux catégories de déserts de mobilité. Il y a les zones périurbaines, où des gens qui travaillent dans les métropoles sont allés habiter pour faire des économies, mais où, faute de transport, ils sont obligés de posséder deux voitures. L’enjeu est de prendre en charge ces zones. Une solution a émergé aux Assises de la mobilité, celle de la gare autoroutière de Briis-sous-Forges (91), qui permet aux habitants de rejoindre par bus la gare de Massy TGV et RER en laissant leur voiture au parking, avec un départ toutes les cinq minutes. Cela a permis de recréer de la densité et de remettre du cadencement, indispensable pour que le multimodal fonctionne.

Les autres déserts de mobilité, ce sont les zones rurales pour lesquelles il faut inventer des solutions, notamment autour de mobilités solidaires. On pourrait s’inspirer de ce village néerlandais où, en tant qu’opérateur, nous formons des chauffeurs bénévoles et mettons à disposition des véhicules dix places pour transporter les gens à la demande. Cela s’appelle le door bus. Il y a aussi plus de covoiturage à organiser. On pourrait aussi mutualiser le transport médical pour le déplacement des habitants. Et il faut des plateformes pour que les gens soient au courant des possibilités offertes. Il n’y a pas de solution unique. A chaque territoire ses caractéristiques et ses solutions à inventer. »

Concernant la mise en concurrence du TER, vous souhaitiez, il y a un an, que l’on se lance rapidement dans une expérimentation, sans attendre que tout soit réglé. Il n’y a toujours pas eu d’expérimentation. Où en est-on ?
« Plus que d’expérimentation, on a besoin d’anticipation. L’ouverture à la concurrence est prévue pour 2023. Si on ouvre en 2020, ce sera bien. Mais il y a des sujets qui ne sont pas encore réglés comme l’accès à l’information et aux données. Il faut aussi regarder les enjeux de transfert de matériel roulant, d’accès aux dépôts et organiser les transferts de personnel. On a travaillé sur la façon d’assurer les transferts des équipes SNCF vers un nouvel opérateur. On devrait disposer cette année d’une loi d’ouverture à la concurrence pour commencer à anticiper. L’objectif de tout cela, c’est l’amélioration de la qualité de service. Aujourd’hui, lors de chaque appel d’offres, on veut plus de monde transporté pour moins cher. A nous de trouver des solutions en faisant des rabattements, des cadencements, en renforçant certaines lignes ou en les remplaçant par des cars. Il y a de vrais gains à chercher dans l’organisation du fer. »

Quel est l’intérêt d’ouvrir à la concurrence ?
« L’ouverture à la concurrence, si elle est bien faite, permet de réduire les coûts. En Allemagne le prix du train-km régional est de neuf euros contre 18 euros en France. C’est une grosse différence. S’il n’a pas de mise en concurrence, il n’y aura pas de pression et les efforts nécessaires pour réduire les coûts ne seront pas faits. Si on ouvre à la concurrence, cela se fera, mais pas instantanément. Il faudra du temps. Il y a un transfert obligatoire du personnel à réaliser, mais pas des conditions de travail. On peut trouver des gains de productivité en faisant plus avec les mêmes équipes. »

ZOE véhicule autonome Rouen Transdev
C’est à Rouen que Renault et Transdev vont expérimenter un service de transport à la demande sur route ouverte réalisé avec un véhicule autonome.

Parlez-nous de votre expérience de mise à disposition de véhicules électriques pour tous à Rouen ?

« Transdev et Renault vont expérimenter un service de transport à la demande avec des ZOE autonomes sur route ouverte. L’objectif est de regarder la réaction des gens et de tester la technologie en milieu non dédié. C’est une étape pour aller vers le robot-taxi. La prochaine étape sera un système où les véhicules ne seront pas indépendants des infrastructures. Où celles-ci leur donneront des informations afin d’assurer un niveau de sécurité maximale. C’est ce qu’on veut mettre au point à Rouen. »

Pour les applications, vous dites vouloir lutter contre Google. Comment ?
« L’application Moovizy à Saint-Etienne a pour objectif de rendre les déplacements intermodaux plus faciles. Moovizy inclut transport public, train, voiture, parking, permet d’acheter des billets, donne de l’info… l’application est utilisée par 35 000 utilisateurs/jour, le même niveau que Google. Ce qui prouve que si on colle au terrain, qu’on bénéficie du nom du réseau local et qu’on fait un produit adapté, on peut avoir un service bien meilleur que ce que propose Google qui reste global. L’enjeu c’est la mobilité locale. »

On a assisté à la concentration du marché des cars longue distance. Que compte faire Transdev ?
« C’est un marché important, un vrai succès commercial. Il y avait une vraie demande de mobilité. Le service proposé est de haut niveau, avec des cars confortables équipés de Wi-Fi. Les gens sont ravis. Certes le niveau de prix est très bas, 4 centimes du km, mais c’est un marché important à mi-chemin entre transport privé et public. Transdev n’a pas envie d’en sortir. »

En IDF vous êtes candidat ou vous le serez sur tous les appels d’offres, les prochains trams, le câble, CDG Express, le métro du Grand Paris Express. Comment et pourquoi être candidat partout ?
« L’Ile-de-France est une région importante pour Transdev qui y réalise 550 millions d’euros de CA, soit 10 % de son activité. C’est une zone où il y a peu d’appels d’offres. Il n’y a donc rien d’étonnant à se positionner partout. On va voir s’il y a une vraie volonté de l’Etat d’ouvrir à la concurrence. »

Pour le Grand paris express, vous serez face à la RATP et Keolis, deux géants du métro automatique, ce qui n’est pas votre cas. Allez-vous passer des alliances ?
« Vous le saurez le moment venu. Nous ferons en sorte d’avoir une bonne proposition. »

Quelle est votre approche du marché international ?
« C’est un axe de développement logique. La France et les Pays-Bas sont des marchés matures où la croissance attendue est faible. Et puis il y a l’Allemagne, les Etats-Unis, le Canada, l’Asie, où nous avons une capacité à grandir plus importante, où il y a des projets « Greenfield ». En France, cela faisait longtemps qu’il n’y avait pas eu d’opportunités. Nous espérons profiter du Grand Paris Express, mais notre croissance à l’international sera supérieure à celle de la France. »

Pour gagner de nouveaux marchés à l’international, avez-vous une stratégie d’alliance ou d’achat de concurrents ?
« Sur des territoires neufs, un rachat peut avoir du sens. Mais si cela ne crée pas de synergie, ce n’est pas la voie naturelle. On préfère l’appel d’offres. On a racheté un opérateur de rail et de ferry à Stockholm. Nous n’avons pas fait de grosses acquisitions. »
Un mot pour conclure ?
« Avec la loi mobilité et le début d’ouverture à la concurrence, la mobilité est à un moment clé de son évolution. Dans les prochaines années, les modes lourds vont rester dominants, car on ne pourra pas les remplacer par des véhicules autonomes. Mais leur arrivée va poser la question du transport et de l’espace urbain. Cela va amener des débats passionnants. »
Propos recueillis par Valérie Chrzavzez-Flunkert

Ewa

Syndicats. Le rendez-vous du 15 mars

Manifestation grève syndicats
Greve de Juin 2014 - greve ferroviaire 
Rassemblement CGT aux Invalides le 17 Juin 2014

Si, le 14 mars le gouvernement persiste dans sa volonté de légiférer par ordonnances, les quatre syndicats représentatifs de la SNCF, CGT Cheminots, Unsa-Ferroviaire, SUD Rail et CFDT Cheminots appelleront à faire grève dès le lendemain.

Elisabeth Borne va recevoir le jeudi 1er mars, à séparément, les représentants des quatre syndicats représentatifs de la SNCF :  CGT-Cheminots, Unsa Ferroviaire, SUD Rail, CFDT Ferroviaire,  ainsi que FO Cheminots. Des entretiens qui vont prendre l’essentiel de la journée de la ministre, de 8h30 jusqu’au milieu de l’après midi.

Mardi 27 février, les quatre syndicats représentatifs de la SNCF, CGT Cheminots, Unsa-Ferroviaire, SUD Rail et CFDT Cheminots avaient  décidé, réunis en interfédérale, au lendemain de la déclaration du Premier ministre sur la réforme ferroviaire, du dépôt d’une alerte sociale dès le mercredi 28 février. Le mercredi 14 mars, le gouvernement a prévu d’adopter en conseil des ministres son projet de loi l’habilitant à légiférer par ordonnances sur la réforme de la SNCF. Les syndicats ont arrêté une position commune : si le gouvernement persiste, ils appelleront à une grève reconductible commençant le 15 mars. Les quatre OS, qu’elles soient considérées réformistes (Unsa-ferroviaire, CFDT Cheminots), ou « dures » (CGT Cheminots, SUD-Rail), partagent une grande partie des analyses sur le projet du gouvernement. Pour elles, le statut des cheminots n’est pas un obstacle à un bon fonctionnement de la SNCF.

En revanche, la question de la dette n’est pas traitée par le gouvernement. Quant aux petites lignes, si elles sont à première vue sauvées, c’est pour mieux laisser le soin aux régions de leur faire un sort. Et le recours aux ordonnances ne passe pas. Explications.

 

 
CGT-Cheminots
« Fermement opposée à la concurrence »

La CGT-Cheminots a publié le soir de la déclaration d’Edouard Philippe un communiqué rappelant qu’elle est « fermement opposée à la concurrence ». Le syndicat précise : « Nous réaffirmons que l’ouverture à la concurrence n’est pas gage d’efficacité et de développement pour le mode ferroviaire. Les exemples multiples dans d’autres pays le démontrent. » De plus, le syndicat considère que « l’ouverture à la concurrence n’est pas obligatoire », en se fondant sur le règlement européen OSP, qui autorise le maintien de l’attribution directe des services ferroviaires (sans appel d’offres).

La CGT considère que « le gouvernement doit reprendre intégralement la dette », alors qu’il remet à plus tard son traitement. Pour la CGT, le gouvernement « laisse la responsabilité aux régions de décider du maintien ou non des lignes régionales du réseau ferré national. » En « pleine période de restrictions budgétaires », cela laisse mal augurer de l’avenir des petites lignes.

La CGT exige d’autre part le « retour à une entreprise publique unique et intégrée », pense que le gouvernement « veut liquider purement et simplement le Fret SNCF », sur lequel rien n’est dit. La fédération réaffirme quelle « n’acceptera pas la fin du statut pour les futurs embauchés ». Elle va publier prochainement un rapport sur l’avenir du transport ferroviaire public.

Unsa-Ferroviaire
« C’est presque une provocation »

Roger Dillenseger, président de l’Unsa-ferroviaire, a fait part de ses analyses au Point. Le gouvernement, dit-il « se focalise sur le statut des cheminots, comme si c’était la première urgence à traiter. Nous sommes circonspects. Le ministre parle d’un statut rigide, alors qu’il a quand même été modifié ces dernières années. Ce statut est un équilibre entre les contraintes et les compensations, la question est soulevée de redéfinir cet équilibre. Mais si l’on n’enlève pas les contraintes, on ne touche pas aux compensations, c’est aussi simple que ça. Aujourd’hui, ce n’est pas le statut qui empêche le bon fonctionnement du système ferroviaire. Au contraire, il permet de former, de fidéliser les salariés, de travailler 24 heures sur 24. Une chose que ne permet pas le code du travail…»

Ce qui est pénalisant, ce n’est donc pas le statut, « c’est la question de la dette et du financement global, qui ne sont pas traités. La dette de l’entreprise est liée aux investissements massifs pendant trois décennies dans les lignes à grande vitesse, alors que les petites lignes ont été délaissées. Ce n’est pas un choix de la SNCF, mais un choix de l’Etat. »

Pour les petites lignes justement, Roger Dillenseger « pense que le ministère n’a pas voulu tout mettre sur la table en même temps ». Mais, sur le fond, ce sursis ne lui laisse guère d’espoir : « Le gouvernement affirme qu’il abandonne la fermeture des petites lignes, mais ne propose aucune solution pour financer leur réhabilitation. »

La méthode le choque particulièrement. « La concertation est annoncée, mais elle est accompagnée d’une épée de Damoclès qui pèse au-dessus de nos têtes. Avant même qu’elle ait eu lieu, le ministre prévient que, si le débat venait à se prolonger, le gouvernement devrait “prendre ses responsabilités”. Pour nous, c’est quasi inacceptable. On est à la limite de la démocratie. » Et, alors qu’il juge que « le statut peut évoluer en interne », l’attaque frontale du gouvernement « constitue, pour nous, l’ouverture d’un bras de fer ».
Et de conclure : « Je n’imagine pas que les cheminots restent sans se mobiliser sur une telle annonce, car on touche au cœur sensible du système ferroviaire : le statut. C’est presque une provocation. Nous nous mobiliserons pour le maintien de notre statut. »

SUD-Rail
« La plus grande attaque contre les droits des cheminots »

« Sans surprise, le 27 février, le Premier ministre a lancé la plus grande attaque contre les droits des cheminots depuis bien longtemps », déclare SUD-Rail dans un communiqué. « A coups d’arguments fallacieux, en faisant porter la responsabilité aux travailleurs du rail de décennies de politiques des transports de l’Etat, il annonce vouloir recourir aux ordonnances pour mettre fin au statut des cheminots et rogner sur l’ensemble du contrat social pour payer la facture ! Supprimer le statut, c’est créer une concurrence entre les salariés au sein même d’une SNCF dont le statut d’entreprise publique serait également remis en cause. Pour l’ensemble des cheminots, quel que soit leur service, ce double statut constituerait une pression permanente à la baisse sur les conditions d’emplois des salariés. »

Or, « ces néosalariés (au code du travail comme dit le Premier ministre) seraient transférables et corvéables à merci, sans possibilité de refus. A travers la stigmatisation des cheminots et de leur statut, le gouvernement balaie sous le ­tapis et ne répond pas aux questions centrales du règlement de sa dette ferroviaire et des missions de services publics de SNCF ».
Sur les petites lignes, SUD-Rail considère que, « contrairement au discours rassurant, le réseau secondaire n’est pas sauvé, au contraire, la responsabilité de son maintien est bel et bien transférée aux régions, ce qui dessine un plan de fermeture de bon nombre d’entre elles, faute de financements. La casse sociale qui en résulterait se mesurera à coup de milliers d’emplois cheminots supprimés dans tous les services ! »

CFDT
« Oui, l’entreprise doit évoluer, mais avec les cheminots, pas contre les cheminots »
Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, déclare aux Echos du 27 février : « Le gouvernement pouvait se permettre de procéder par ordonnance sur la réforme du marché du travail, car il l’avait clairement dit pendant la campagne et parce que la réforme est intervenue juste après l’élection. Ce n’est pas le cas pour la SNCF. Si le gouvernement donne le sentiment qu’il se précipite, ça se passera mal. »

Sur le fond, Laurent Berger précise la position de son organisation à propos de la concurrence : « Nous ne la voulions pas mais nous ne sommes pas fermés à regarder les conditions de la mise en œuvre. » Sur la gouvernance, la SNCF, dit-il « doit rester une entreprise publique et, dans ce cas, nous pouvons débattre des évolutions éventuelles ». Pas de casus belli, donc, aux yeux du dirigeant de la CFDT.

Mais tout ce qui tourne autour du statut ne passe pas. « Quant au statut des agents, expliquez-moi en quoi cela nécessite des ordonnances ? Un tel dossier doit être traité par la concertation et la négociation au sein de l’entreprise. Surtout, les difficultés de l’entreprise ne peuvent se résumer au statut des cheminots, après des années de sous-investissement. Oui, l’entreprise doit évoluer, mais avec les cheminots, pas contre les cheminots. Là, on leur présente la réforme en disant :  “Tout cela est un peu de votre responsabilité, alors on va vous remettre au boulot”. Je ne laisserai personne cracher à la figure des cheminots, pareil pour les fonctionnaires. »

Ewa

Lyon lance sa future ligne de métro pour 2030

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La Métropole de Lyon et le Sytral ont présenté l’étude de faisabilité réalisée par Egis pour la future ligne E du métro lyonnais qui… se fera.

« Il y a une vraie volonté fondée sur des arguments forts, a affirmé David Kimelfeld, président de la Métropole, c’est une nécessité de déployer cette ligne » selon Fouziya Bouzerda, présidente du Sytral.

Parmi douze scénarios, deux envisagent la création d’une nouvelle ligne depuis Hôtel-de-Ville ou Bellecour jusqu’au nouveau terminus Alaï, de six à sept kilomètres de long avec cinq et six stations pour un coût « aux environs d’un milliard d’euros ».

Particularités de cette ligne : c’est la première dans l’Ouest lyonnais et elle sera creusée dans la colline de Fourvière pour atteindre le plateau avec un dénivelé de 120 mètres. En avril prochain, le Sytral devrait voter le préprogramme de l’opération et la saisine de la CNDP pour la ligne E prévue en 2030.

C. F.

Ewa

Des bus au bioGNV sur l’aéroport Lyon-Saint Exupéry

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L’aéroport Lyon-Saint Exupéry met en service des bus roulant au bioGNV (gaz naturel produit à partir de déchets organiques agroalimentaires) pour assurer les navettes entre parkings et terminaux. Selon le transporteur prestataire Berthelet, qui a écarté les bus électriques, le bioGNV est mieux adapté au service 19h/24 avec une autonomie de 600 km. Berthelet a également acquis un Navya autonome pour ses grands clients industriels en 2018.

C. F.

Ewa

Espagne : la Renfe cherche un partenaire stratégique pour le fret

(c) Renfe
TRAIN DE FRET ESPAGNOL 
TRANSPORT COMBINE

En mars prochain, la compagnie nationale Renfe doit lancer un appel à assistance pour évaluer sa filiale marchandises et rechercher un « partenaire stratégique » avec lequel elle s’associera. Son « Plan fret » 2017-2023 prévoit un développement ciblé (intermodal, sidérurgie, vrac, automobiles), y compris à l’international. La part modale du rail en Espagne est seulement de 4,9 % et Renfe Mercancias assure 72,7 % des tonnages, lesquels ont diminué de moitié depuis 1980. L’objectif est de constituer pour 2019 un « groupe logistique intégral » sous la forme d’une société mixte où Renfe Mercancias aura la moitié du capital aux côtés du nouveau partenaire qui pourra être un « opérateur ferroviaire, logistique voire un armement naval ».

Ewa

L’Occitanie se dote d’un Gart

Mme Delga préside le Conseil Supérieure de l'Economie Sociale et Solidaire

L’Occitanie est la première région à se doter d’un Groupement des autorités responsables de transports (Gart). Cette nouvelle instance a été mise en place le 9 février à Carcassonne par Jean-Luc Gibelin, vice-président de la région en charge des Transports, en présence de Guy Le Bras, directeur général du Gart national, et de 19 conseils départementaux et AOM/AOT (autorités organisatrices de la mobilité ou des transports) de la région ayant fait le déplacement.

Toutes sont invitées à participer au Gart Occitanie mais seuls les membres du Gart national pourront prétendre à devenir membres du bureau du Gart Occitanie. Le Gart national apportera un appui logistique, administratif, et partagera son expérience de réunion des trois types de collectivités et de fonctionnement paritaire sur le plan politique.

« Comme nous nous y étions engagés au sortir des Etats généraux du rail et de l’intermodalité (Egrim) conduits en 2016, nous poursuivons la démarche de concertation et de coconstruction plébiscitée par les autorités responsables et les usagers, a indiqué Carole Delga, la présidente de la région. Avec ce Gart Occitanie, nous renforçons notre palette d’outils pour un dialogue renouvelé et renforcé avec les territoires et les acteurs des transports car nous sommes convaincus que la connaissance des enjeux locaux, des spécificités territoriales et des attentes du terrain est déterminante pour le déploiement d’un service public adapté, cohérent et pleinement efficace. »

Les deux priorités du Gart Occitanie seront l’élaboration du volet transport du schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires « Occitanie 2040 » et la mise en place d’un titre de transport unique qui occuperont deux commissions de travail. Quatre autres plancheront sur les innovations, nouvelles mobilités, mobilités propres et développement des modes actifs ; les infrastructures ferroviaires et routières ; l’intermodalité ; la sécurité et l’accessibilité. Une assemblée plénière sera réunie deux fois par an, sous la présidence de la région et en présence du Gart national.
Catherine Stern

Ewa

Le gouvernement allemand préconise la gratuité des transports en commun

Tram à Mannheim, Allemagne

Pour lutter contre la pollution dans les grandes villes, Berlin préconise la gratuité des transports en commun. Selon les révélations de la presse allemande, trois ministres allemands (Environnement, Transports et le chef de la chancellerie) ont assuré dans un courrier adressé au commissaire européen à l’environnement, Karmenu Vella, qu’ils avaient « reconsidéré leurs positions sur les mesures antipollution » en constatant « l’urgence de la situation » pour améliorer la qualité de l’air. Berlin répond ainsi aux avertissements de Bruxelles sur le dépassement inquiétant des émissions d’oxydes d’azote (NOx) dans plus de 70 villes allemandes.

Si elle ne prend pas rapidement des mesures appropriées, l’Allemagne risque en effet une plainte devant la Cour de justice de l’Union européenne et, par conséquent, de lourdes amendes. Jusqu’à présent, le gouvernement allemand n’avait jamais évoqué la solution de la gratuité des transports en commun, un choix considéré au « pays de l’automobile » comme une révolution.

Les ONG parlent de « revirement politique à 180° » alors que le gouvernement a toujours défendu la mobilité individuelle. L’objectif est aussi d’éviter des interdictions de circulation automobile qui menacent dans les grandes villes. Le Tribunal fédéral administratif doit se prononcer le 22 février sur le droit des communes à interdire certaines catégories de véhicules dans leur centre-ville. Munich, Hambourg et Stuttgart attendent ce jugement avec impatience pour imposer des restrictions.

Le gouvernement allemand veut tester la gratuité des transports en commun d’abord dans cinq villes polluées d’Allemagne – Bonn, Essen, Herrenberg, Reutlingen et Mannheim (photo). Il risque néanmoins de se confronter à la résistance des communes qui déplorent des réseaux déjà surchargés et préféreraient investir dans les infrastructures et le matériel roulant plutôt que d’augmenter la fréquentation (on évalue l’augmentation des voyageurs à plus de 30 %). Elles attendent surtout des réponses précises sur le mode de financement de l’Etat qui devra compenser les pertes des recettes de la vente de billets qui représentent 50 % du chiffre d’affaires moyen des régies.

Christophe Bourdoiseau

Ewa

« Le retour du vélo dans toutes les grandes villes du monde est une tendance massive »

Photo Héran 1

Entretien avec Frédéric Héran, économiste et urbaniste

 

Frédéric Héran, économiste et urbaniste, est maître de conférences à l’Université de Lille I. Il prône une politique des transports dans la ville, qui amoindrit la part de l’automobile pour faire une place à tous, et se dit convaincu que le nombre de vélos dépassera demain celui des voitures à Paris. Il pointe aussi les limites du développement actuel des vélos en libre service et sans station. Explications.

 

Ville, Rail & Transports. Quelle politique mettre en place, selon vous, pour obtenir un réel report modal en faveur des vélos ?
Frédéric Héran. Avant tout, il faut modérer la circulation automobile. Il faut comprendre qu’une politique de déplacements ne peut se découper en tranches : une pour la voiture, une pour les vélos, une pour les piétons… Tout est complètement lié.

C’est d’ailleurs ce que nous enseigne l’histoire des déplacements urbains, avec l’effondrement puis le retour du vélo, comme l’explique mon livre Le retour de la bicyclette qui met en lumière la croissance actuelle de la pratique du vélo dans les grandes villes occidentales. On a laissé se développer la voiture dans toutes les grandes villes. Mais aujourd’hui, il y a un mouvement très fort, mondial, pour modérer la part de l’automobile et donner de la place aux autres modes.

Prenons l’exemple d’Amsterdam, où on pourrait croire qu’il y a toujours eu des cyclistes. En réalité, on a observé une diminution de leur nombre par trois ou quatre entre les années 50 et le début des années 70. Puis, il y a eu une bagarre des habitants pour reconquérir les rues, permettant son grand retour.
Stockholm aussi où la part des vélos était tombée à 1 % en 1974 a vu cette part remonter à 10 % en 2006. Citons encore Berlin où la part modale des cyclistes s’établissait à 2 % en 1974 et atteint 15 % aujourd’hui. Quant à Paris, où le vélo était à 0,2 % en 1976, il représente désormais 4 ou 5 %.

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Evolution des déplacements mécanisés à Paris en milliers de déplacement par jour. Source : EGT jusqu’en 2010, puis hypothèse de Frédéric Héran au-delà.

 

VR&T. Quelles mesures préconisez-vous pour modérer le trafic automobile ?
F. H. Il faut tout d’abord réduire les vitesses autorisées. A Paris, entre 1992 et 2015 (dernier chiffre connu pour le moment), la vitesse moyenne a reculé de 28 % et tourne aujourd’hui autour de 15,9 km/h.

Il faut ensuite abaisser le volume de trafic. La baisse de la vitesse y contribue déjà, mais il faut aussi réduire les capacités. Si on se réfère à l’Est parisien, on constate que la réduction du nombre de files de circulation a permis de diminuer de moitié le trafic automobile sur les grands boulevards.

Le tram des Maréchaux a également fait reculer de 50 % le nombre de voitures le long des axes où il passe. De même, la fermeture de 3 km de voies sur berges a retiré 43 000 voitures sur cet itinéraire…

Cette politique suscite des protestations mais de nombreuses villes dans le monde ont fait bien pire. A commencer par Strasbourg qui a supprimé le passage de 50 000 voitures en plein centre-ville, en lançant en 1992 les travaux pour son tramway. Les gens étaient inquiets. Aujourd’hui, ils sont satisfaits.

Enfin, il faut rendre le stationnement plus compliqué et plus cher. La décentralisation et la dépénalisation du stationnement qui sont mises en place depuis le 1er janvier représentent une vraie révolution. Ses effets vont être rapidement visibles. Les temps de recherche d’une place de stationnement vont s’effondrer. Cela réduira le trafic automobile d’autant puisque 5 à 10 % des voitures qui circulent en ville sont en réalité à la recherche d’une place pour se garer. Si le trafic diminue effectivement de 5 à 10 %, ce serait énorme ! Avec un risque : que ces nouvelles facilités de circulation incitent d’anciens automobilistes à reprendre leur voiture.

 

VR&T. Que pensez-vous du péage urbain évoqué par les pouvoirs publics ?
F. H. Le péage urbain fait aussi partie des actions possibles. On dit qu’il y a beaucoup de villes qui l’appliquent. Mais lesquelles, à part Milan, Stockholm, Oslo, Bergen et Londres ? En réalité, on les compte sur les doigts d’une main. En revanche, on compte des centaines de villes qui ont « calmé » le trafic automobile.

Le péage urbain fait gagner de l’argent, c’est « modélisable », selon les économistes standards, qui considèrent au contraire que baisser la vitesse est absurde car le temps, c’est de l’argent. Selon moi, il vaut mieux prendre des mesures de restrictions de circulation en zone urbaine car elles sont de nature à apaiser les villes et à les rendre plus attractives.

 

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Source : Certu, La mobilité urbaine en France : enseignement 2000-2010.

 

VR&T. Vous prônez donc la généralisation des zones 30 ?
F. H. C’est très efficace. En France, la première grande ville qui l’a fait est Lorient dès 2011. La seconde ville, un peu plus grande, Grenoble, s’y est mise en 2016. Paris voudrait y arriver en 2020. Beaucoup de villes estiment qu’elles vont y parvenir dans pas longtemps. Finalement, on ne fait que suivre l’Allemagne, qui elle-même n’a fait que suivre les Pays-Bas, dont toutes les villes sont en zone 30. Mais bien sûr, si on réduit le trafic automobile, dans le même temps, il faut développer les transports publics en leur donnant la priorité aux carrefours ou en installant les arrêts de bus au milieu de la chaussée. Il y a d’innombrables mesures comme celles-là qui sont très favorables aux transports publics.

 

VR&T. La prime pour les vélos envisagée par le gouvernement est-elle vraiment efficace ?
F. H. Pour que le vélo se développe, il faut un système complet. Par exemple, il ne peut fonctionner si vous ne pouvez pas le faire réparer. Il y a des villes comme Roubaix, forte de 90 000 habitants, où on ne trouve aucun vélociste.

La solution, ce sont ces ateliers de vélo qui se créent ici ou là. En France, on en comptait six en 2005. Il y en avait 230 en juillet 2017. Ces ateliers se développent à hauteur de +20 à +40 % par an, c’est une explosion ! Ils sont pris en mains par les habitants eux-mêmes qui cherchent des locaux (c’est le plus compliqué), puis s’échangent des outils. C’est convivial et cela existe dans tous les quartiers y compris populaires. Ce n’est donc plus une activité bobo.

 

VR&T. Alors que les pouvoirs publics s’apprêtent à dévoiler leurs solutions pour favoriser le report modal dans la nouvelle loi sur la mobilité, êtes-vous optimiste sur les chances de succès du vélo ?
F. H. Optimiste ? Non, réaliste ! Nous vivons une tendance de fond, une transition écomobile, qui consiste à passer du tout-automobile à des rues pour tous. Cela concerne tous les pays occidentaux, et même la Chine ainsi que les pays émergents. Il n’y a aucun doute là-dessus.

Aux Etats-Unis, depuis dix ans, la part du vélo croît de 10 % par an dans toutes les grandes villes, y compris des villes improbables comme Washington et Chicago. A Londres, qui est partie de plus bas que Paris, la pratique du vélo augmente très vite (3 % de parts) alors que le réseau ne s’y prête pas du tout. Londres pourrait même dépasser Paris prochainement.

La tendance est massive. Ce n’est pas un effet de mode. La pratique de vélo se développe même dans les grandes périphéries. Le mot vélo n’est plus tabou. Il y a dix ans, je ne pensais pas qu’on pourrait revenir aussi facilement à cette situation. Je me suis trompé ! Je suis même surpris de la vitesse à laquelle le vélo se répand. Cela dit, à Paris, le vélo n’atteindra jamais des sommets, puisqu’il a un concurrent redoutable : le métro, qui est le meilleur du monde avec ses stations tous les 500 mètres ! Toutefois, avec une courbe de croissance de 10 % par an tandis que la voiture recule de 3 à 4 % par an, il devrait dépasser le nombre de voitures, peut-être à l’horizon 2030.

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Evolution de l’usage du vélo dans les grandes villes américaines de 2005 à 2014 (déplacements domicile – travail sur trois ans). Source : New York City Department of Transportation, Cycling in the City.

 

 

 

VR&T. Est-ce que l’arrivée de nouveaux acteurs, comme les opérateurs de vélos en libre service et sans station, peut favoriser le report modal ?
F. H. A mon avis, il y a trois coûts cachés dans ce système. D’abord, l’espace public n’est pas gratuit. Il est même onéreux, surtout dans les grandes villes. Il est cher car il faut le construire, le maintenir, le nettoyer, l’éclairer… Toutes les villes se résolvent peu à peu à faire payer cette occupation. Paris notamment veut le faire.

Autre coût : toutes les dégradations, les vols, les incivilités que ces vélos génèrent. La police doit s’en occuper. Cette délinquance est essentiellement juvénile et masculine. Elle est particulièrement forte à Paris qui est la ville la plus dense d’Europe. On y compte donc deux fois plus de délinquants au m² qu’à Londres par exemple. C’est très tentant pour un adolescent de prendre un vélo sans attaches. Les opérateurs ont sous-estimé ce risque.

De plus, les vélos sans station sont dispersés. Il faut les chercher pour les réparer alors que quand il y a des stations, la gestion est beaucoup plus facile.

Enfin, troisième coût, les vélos encombrent l’espace public, ils gênent les passages, les piétons, les restaurateurs, les gestionnaires de réseau… Il y a toujours un moment où on finit par les écarter. Regardez ce qui s’est passé dans certaines villes chinoises où des dizaines de milliers de vélos ont été rassemblés dans un même endroit. Tous ces vélos qui s’accumulent… Nous allons sûrement vivre la même chose. A un moment nous dirons : cela suffit ! Les opérateurs ne s’en occupent pas, ce n’est pas dans leur modèle économique. Ils disent : notre modèle ne coûte rien aux contribuables. Mais évidemment cela a un coût !

 

VR&T. On entend dire que ces opérateurs seraient surtout intéressés par les données qu’ils récoltent auprès des utilisateurs de leur service. Qu’en pensez-vous ?
F. H. Leur modèle économique n’est pas clair. D’où viennent leurs recettes ? Je pense que c’est surtout la caution qu’ils prélèvent auprès des utilisateurs qui les intéressent. Cet argent est placé, parfois sur des marchés risqués, et rapporte des intérêts. Il semble que certains utilisateurs aient un mal fou à la récupérer quand ils renoncent au service…

Quant aux données qu’ils pourraient récolter, je ne suis pas convaincu qu’elles aient un grand intérêt en elles-mêmes et qu’ils puissent en retirer beaucoup d’argent.
VR&T. Comment jugez-vous l’arrivée ratée de Smovengo à Paris ?
F. H. Smovengo a une logique industrielle, ce n’est pas un groupe qui a fait un coup. Il a, semble-t-il, sous-estimé le temps qu’il faudrait pour raccorder et renforcer l’alimentation électrique.

Une fois ces difficultés passées, nous verrons. C’est une société qui innove sans arrêt pour rendre son système plus fiable. Grâce à son système d’accroche, il devrait y avoir beaucoup moins de vols, même si je ne suis pas sûr qu’il arrivera à tenir son objectif de pas plus de 5 % de vols.

Propos recueillis par Marie Hélène Poingt

livre Héran*Le Retour de la bicyclette. Une histoire des déplacements urbains en Europe de 1817 à 2050, La Découverte, Poche, 2014, 256 pages (10 euros).

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Ligne 18 du Grand Paris Express Des prévisions de trafic très sous-estimées

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Par Guy Bourgeois, consultant.

Aujourd’hui, des voix s’élèvent pour remettre en cause la décision de construire la ligne 18 du métro du Grand Paris Express et son objectif de désenclavement du plateau de Saclay. Elles s’appuient pour ce faire sur les prévisions de trafic réalisées à la demande des pouvoirs publics par les équipes de modélisation franciliennes à l’occasion des dossiers d’expertise et de contre-expertise du projet.
Je vais montrer que ces prévisions sont très sous-estimées.

Le graphique ci-dessous à gauche représente le « serpent de charge » de la ligne 18 du métro du Grand Paris Express sur le plateau de Saclay, tel qu’il a été initialement produit par la RATP par utilisation du modèle « Global » pour dimensionner la ligne à l’heure de pointe du matin. Le graphique de droite présente le même « serpent de charge » obtenu par le modèle Antonin d’Ile-de-France Mobilités (anciennement Stif).

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« Serpent de charge » de la RATP.                                      « Serpent de charge » du Stif.

 

 

Il s’agit de la prévision de trafic dite « HPM », heure de pointe du matin, tous motifs de déplacement confondus. Dans les deux cas, ces prévisions sont établies à l’horizon 2030, date prévue pour l’ouverture complète de la ligne, les deux modèles ayant pris en compte une prévision d’augmentation de la population et des emplois desservis par la ligne. La prévision d’Ile-de-France Mobilités ne prend plus en compte la station Guyancourt-Université, retirée du projet initial.

Les chiffres diffèrent très sensiblement. Mais les deux modèles arrivent à la même conclusion : la ligne sera utile sur sa partie est, beaucoup moins sur sa partie Ouest.
En regard de ces deux graphiques, je présente les résultats que j’ai obtenus avec Optirel. Optirel (OPTimisation des REseaux Locaux de transports) est un modèle plus particulièrement dédié aux territoires hétérogènes des périphéries urbaines, dont le but est d’aider les décideurs à optimiser les réseaux locaux de transport. Optirel permet de modéliser de façon très détaillée un territoire limité, et notamment les réseaux locaux qui vont permettre le rabattement des voyageurs sur les lignes ferroviaires du réseau structurant et rapide. La question très centrale du choix modal des voyageurs se règle par l’utilisation d’un calculateur d’itinéraires, qui compare les différentes solutions possibles, et permet de ce fait d’introduire de façon pertinente de nouveaux services de mobilité.

Voici donc ci-dessus les quatre serpents de charge obtenus grâce à Optirel. Ils se limitent aux seuls déplacements domicile – travail – pour lesquels les matrices OD ont pu être établies avec une grande précision à partir des données de l’Insee (DADS) de 2012.

Les ordres de grandeur peuvent être comparés avec ceux de la RATP et d’Ile-de-France Mobilités : on peut en effet grosso modo considérer que la moitié des déplacements domicile – travail se produisent à l’heure de pointe du matin, mais que ces déplacements représentent la moitié des déplacements tous motifs confondus. A ce stade, l’augmentation prévisible de la population et des emplois aux abords des stations de la ligne n’a pas été prise en compte. Je reviendrai sur cette importante question.
SC1

 

 

 

 

 

 

SC2

SC3SC4Les quatre graphiques ci-dessus diffèrent par les modalités de rabattement sur la ligne 18, présentées sous forme de quatre scénarios. Dans le premier (SC1), le rabattement se fait uniquement en marche à pied, ce qui constitue une hypothèse très minimaliste. Dans le second (SC2), il se fait grâce à un réseau de bus restructuré ; dans le troisième (SC3), il s’y rajoute une offre de 6 000 places de parkings-relais. Ces deux scénarios SC2 et SC3 sont ceux qui vont encadrer au mieux la réalité. Le quatrième (SC4) fournit une hypothèse maximaliste, dans laquelle le stationnement serait possible sans limite dans les parkings-relais de la ligne : il faudrait pour le réaliser une offre de près de 11 000 places de parkings.
Il est alors frappant de constater que plus le système de rabattement s’améliore, plus la partie ouest de la ligne se remplit.

Il est intéressant de rentrer dans le détail station par station, en regardant comment leur fréquentation varie selon le dispositif de rabattement pris en compte, et en confrontant, station par station, les résultats obtenus par les différents modèles, mais aussi à la réalité du terrain.

Satory
La station n’a de sens que dans la perspective du développement du plateau de Satory. Aujourd’hui, la population résidente est pour l’essentiel composée de militaires qui travaillent sur place, et le nombre d’emplois implantés sur le site est très modeste. Il apparaît par contre que son emplacement est très favorable à des solutions de P+R pour les habitants de Guyancourt et de Buc les plus proches.

Aucun modèle ne peut avoir la prétention de fournir une prévision de trafic correcte pour une telle station. On peut toutefois assurer que si, effectivement, les 45 000 logements et les 30 000 emplois prévus au contrat de développement territorial sont créés à proximité de la station, son trafic deviendra tout à fait comparable aux autres stations de la ligne, ce que ne prévoient, ni le modèle de la RATP, ni le modèle d’Ile-de-France Mobilités.

Guyancourt
Pour moi, ce sera la station la plus chargée de la ligne (en dehors de Versailles-Chantiers et Massy-Palaiseau), et je considère que ni le modèle « Global » de la RATP ni le modèle « Antonin » d’Ile-de-France Mobilités n’ont apprécié convenablement le trafic potentiel de cette station.

Selon la RATP, la ligne se décharge de 1 100 voyageurs dans le sens Massy – Versailles et se charge de 500 voyageurs dans le sens Versailles – Massy. Selon Ile-de-France Mobilités, la ligne se décharge également dans le sens Massy – Versailles, mais seulement de 200 voyageurs, et elle se charge dans le sens Versailles – Massy, mais seulement de 400 voyageurs. Or il y a, dès aujourd’hui, quelque 12 000 emplois dans un cercle de 1,5 km autour de la nouvelle station, dont les 8 000 de l’implantation principale du Technocentre de Renault, situé à 450 m de la station. Et, dans ce même cercle de 1,5 km de rayon, on peut évaluer la population active à 6 000 personnes.

Dans ce secteur de Guyancourt, les déplacements se font très majoritairement vers les Yvelines, les Hauts-de-Seine et Paris, beaucoup moins vers l’Essonne. Avec de telles données, la ligne ne peut que se décharger vers Massy (beaucoup plus de salariés qui viennent de Versailles-Chantiers que d’habitants de Guyancourt-Est qui vont vers l’Essonne), et, inversement, se charger vers Versailles-Chantiers (beaucoup moins de salariés qui viennent de Massy que d’habitants de Guyancourt-Est qui vont vers Versailles). Or les modèles Global et Antonin nous donnent des résultats inverses. Qui plus est, ils nous donnent un total de voyageurs sur le tronçon Guyancourt – Satory étonnamment faible : 2 200 pour la RATP, 1 400 pour Ile-de-France Mobilités. Ces chiffres, qui comprennent aussi les voyageurs en provenance des stations en amont sur la ligne sont inférieurs, à ceux que donne Optirel pour les seules montées à cette station !

Il apparaît en outre que cette station est particulièrement bien située sur le plateau de Saclay pour attirer les rabattements, qu’il s’agisse des réseaux de bus ou des parkings-relais. Elle est incontestablement la station la plus attractive de la ligne en termes de parking-relais, car, sans limitation de capacité, la demande dépasserait 6 000 places.

 

CEA-Saint-Aubin
Les résultats de la RATP et d’Ile-de-France Mobilités sont très différents. Dans le sens Versailles – Massy, pour la RATP la ligne se charge de 800 voyageurs, alors que pour Ile-de-France Mobilités, elle se charge autant qu’elle se décharge. Dans le sens Massy – Versailles, pour la RATP, la ligne se décharge de 100 voyageurs, tandis que pour Ile-de-France Mobilités elle se décharge de 200 voyageurs. Nous savons que dans un rayon d’un peu plus de 1 km autour de la station, se trouvent les 6 000 emplois du CEA de Saclay et quelque 300 emplois au Christ de Saclay. Et on peut évaluer autour de 1 000 la population active voisine de Saint-Aubin, de Villiers-le-Bâcle et du Christ-de-Saclay. La ligne doit donc fortement se décharger au passage de cette station. La prévision de la RATP peut être qualifiée d’invraisemblable. Celle d’Ile-de-France Mobilités réduit l’écart à la réalité.

La station CEA-Saint-Aubin n’est pas très bien située pour bénéficier d’un apport de voyageurs rabattus grâce au réseau de bus. Elle est moins attractive pour accueillir un parking-relais que ses deux stations voisines, mais elle peut bénéficier des restrictions de capacité qu’il faudra imposer aux P+R de Guyancourt-Est et d’Orsay-Gif.

Orsay-Gif
Aujourd’hui, cette station dessert un important potentiel d’emplois, mais une population limitée. Sa position géographique est particulièrement favorable pour l’organisation des rabattements par un réseau de bus restructuré ou par un parking-relais. Elle est en effet à courte distance de la zone la plus peuplée de la vallée de Chevreuse. Il faut noter que ces rabattements seront particulièrement nombreux dans la direction Massy – Versailles : les habitants de la Vallée de Chevreuse ne disposent aujourd’hui d’aucune alternative crédible pour se rendre vers les Yvelines et l’ouest des Hauts-de-Seine, alors que le RER B leur permet de se rendre vers Paris et le sud-est des Hauts-de-Seine. Il faut noter aussi un nombre important de voyageurs (de l’ordre de 500) qui descendront de cette station en provenance de Versailles ou de Saint-Quentin-en-Yvelines pour terminer ensuite leur parcours vers leur destination finale dans la Vallée de Chevreuse en utilisant le réseau de bus.

Dans le sens Massy – Versailles, la RATP prévoit que la ligne se charge autant qu’elle se décharge, alors qu’Ile-de-France Mobilités prévoit qu’elle se décharge de 800 voyageurs : les deux modèles ne prennent pas en compte ce très important potentiel de rabattement. Pour Optirel, la ligne va se charger d’au moins 600 voyageurs.

Dans le sens Versailles – Massy, la RATP prévoit que la ligne se charge de 1 200 voyageurs, tandis que Ile-de-France Mobilités prévoit qu’elle se décharge de 100 voyageurs. Pour Optirel, la ligne doit se décharger d’au moins 300 voyageurs.
Palaiseau
Sur cette station, les trois modèles donnent des résultats convergents. L’explication tient sans doute au fait que le territoire qu’elle dessert est nettement circonscrit et que son positionnement exclut que la station soit utilisée pour y rabattre des lignes de bus ou pour y installer un parking-relais qui n’aurait aucune attractivité.

 

Le cas particulier du plateau de Saclay
Il est particulièrement important de revenir sur la question du développement du plateau de Saclay et de sa prise en compte dans les modèles de la RATP et d’Ile-de-France Mobilités.

En référence aux projets de développement du territoire de l’Etablissement public d’aménagement Paris-Saclay, d’ici 2030, ce sont 80 000 emplois et 120 000 logements qui auront été créés. Si l’on compte prudemment, ce sont au moins 150 000 déplacements domicile – travail qui seront générés à proximité des stations de la ligne 18 par le développement du territoire. Compte tenu de la volonté de plus en plus forte des Franciliens de ne plus être dépendants de la voiture particulière, une hypothèse très modeste est que 20 % de ces déplacements se fassent par utilisation de la ligne 18, soit 60 000 voyageurs par jour pour le seul motif domicile – travail, qui représente environ la moitié des déplacements tous motifs confondus sur une ligne périurbaine comme la ligne 18. Cette évaluation globale, faite sur une hypothèse prudente d’utilisation de la ligne 18, est à mettre en regard des prévisions pour l’ensemble de la ligne : le chiffre prévisionnel de 150 000 voyageurs par jour retenu par la Société du Grand Paris, qui a fortement réévalué la prévision initiale d’Ile-de-France Mobilités de 105 000 voyageurs par jours, apparaît ainsi comme une hypothèse basse.

Il est parfaitement possible d’expliquer pourquoi les modèles Global de la RATP et Antonin d’Ile-de-France Mobilités donnent des résultats aussi contestables.
Ces modèles appartiennent à la famille des modèles dits « à quatre étapes », jusqu’à présent les plus couramment utilisés pour effectuer des prévisions de trafic sur les infrastructures nouvelles. Même si les modalités de mise en œuvre diffèrent quelque peu entre ces deux modèles, leur principe de base reste le même : la région Ile-de-France est découpée en zones élémentaires, des matrices origines – destinations sont fabriquées à partir des données disponibles, les modèles sont « calés » pour représenter au mieux la situation actuelle, notamment le partage modal entre voitures particulières et transport public. Les prévisions sont effectuées en prolongeant les tendances constatées dans le passé.

Trois défauts majeurs permettent d’expliquer la défaillance de ces modèles sur un territoire comme le plateau de Saclay :

– Pour fonctionner correctement, ils font face à une contradiction redoutable : les résultats qu’ils vont livrer seront d’autant plus précis que les zones seront petites et homogènes, mais les traitements statistiques ne seront pertinents que si les données sont quantitativement et qualitativement suffisantes, ce qui n’est possible que si les zones sont suffisamment peuplées.
De ce fait, les auteurs des modèles recherchent le meilleur compromis possible dans le dessin du zonage. Ce mécanisme de zonage a une conséquence inéluctable : dans le centre d’une agglomération, les zones sont petites, homogènes et bien peuplées. Mais dans la périphérie, elles sont grandes, voire étalées, et surtout très hétérogènes. Les procédures statistiques, qui savent traiter correctement des « individus moyens » se déplaçant dans des zones petites et homogènes, se révèlent alors inadaptées dans les grandes zones périurbaines.

– Les modèles ignorent purement et simplement tous les déplacements internes aux différentes zones. Une zone du centre de l’agglomération peut être parcourue en marchant en un temps très réduit, si bien que l’élimination de ces déplacements internes ne prête pas à conséquence. Mais il n’en est pas du tout de même dans une zone périphérique vaste et dans laquelle les déplacements internes se font de façon multimodale. De ce fait – et nous avons vu à quel point cette question est importante pour la ligne 18 – les modèles à quatre étapes qui ont été utilisés ignorent la question de l’organisation des rabattements sur les stations de la ligne.

– Même si les zones sont très hétérogènes, les modèles ne peuvent répartir la population et les emplois à l’intérieur d’une même zone que de façon statistiquement homogène. Ainsi, ces modèles sont dans l’incapacité de déceler une importante concentration d’habitations ou d’emplois à proximité immédiate d’une nouvelle station de métro : on comprend ainsi que ces modèles noient les nouveaux emplois et logements de Satory dans un quartier de Versailles, qu’ils ne voient pas que le Technocentre de Renault et ses 10 000 emplois vont être directement desservis par la station Guyancourt-Est, ou que le CEA de Saclay est juste à côté de la station qui porte pourtant son nom…

Pour conclure, je voudrais souligner que ma critique des modèles Global de la RATP et Antonin d’Ile-de-France Mobilités ne porte que sur leur utilisation dans la grande périphérie de l’Ile-de-France. Pour la partie centrale, dense et homogène du territoire francilien, ces deux modèles sont, sans nul doute, ce que l’on fait de mieux. Mais il serait vraiment regrettable qu’un excès de confiance apporté à des modèles qui ont été poussés aux limites, en dehors de leur champ de pertinence, ait comme conséquence une remise en cause de la décision de construire la ligne 18 du Grand Paris Express !