Un peu plus de deux ans après le lancement de la réforme sur les trains d’équilibre du territoire (TET), c’est l’heure du bilan. Du côté du secrétariat d’Etat aux Transports on estime que le pari qui avait alors été lancé (transférer aux régions la responsabilité de la majeure partie de ces trains lourdement déficitaires) a été gagné. Ce qui était loin d’être évident.
Côté régions, la tonalité est également positive, et on insiste surtout sur le rôle moteur joué par les élus régionaux. La constitution de nouvelles grandes régions, présidées par des personnalités fortes, a certainement permis d’entrer dans le vif du sujet, ce qui n’avait jamais été possible dans le passé malgré plusieurs tentatives pour remettre sur de bons rails ces trains grandes lignes (hors TGV), vieillissants et désertés par les voyageurs (20 % de trafic en moins en cinq ans).
Rappelons qu’en fin d’année dernière, six accords avaient été conclus entre l’Etat et des régions (Normandie, Hauts-de-France, Nouvelle-Aquitaine, Grand-Est, Centre-Val de Loire, Occitanie) au terme de plusieurs mois de négociations. Ces accords vont permettre de transférer 18 lignes sur 24 aux régions. Ce transfert se fera progressivement entre 2017 et 2020, avec des échéances différentes selon les collectivités. Les autres régions n’étaient soit pas concernées par les lignes TET, soit seulement par des bouts de ligne (et dans ce cas, les régions ont ensuite négocié entre elles). Selon le secrétariat d’Etat aux Transports, « les négociations sont donc aujourd’hui terminées ».
Le niveau de déficit des 18 lignes à transférer s’est élevé à 165 millions en 2016. En contrepartie, l’Etat va verser globalement aux régions 53 millions d’euros par an, une fois que l’ensemble des lignes seront reprises, afin de contribuer pour partie au déficit d’exploitation.
Il ne restera donc désormais plus que six lignes « d’équilibre du territoire » sur lesquelles l’Etat va garder la main : trois lignes longue distance et considérées comme « structurantes » pour le territoire (Paris – Orléans – Limoges – Toulouse, Paris – Clermont-Ferrand et Bordeaux – Toulouse – Marseille) et trois autres dites « d’aménagement du territoire » (Nantes – Bordeaux, Tours – Hendaye et Nantes – Lyon).
Les trois liaisons structurantes vont faire l’objet d’un schéma directeur qui définira la consistance de l’offre et les performances à atteindre. Le préfet François Philizot, qui avait déjà mené une mission de concertation sur les TET auprès des régions, coordonnera la démarche. Ces schémas directeurs, qui incluront les travaux à prévoir sur les infrastructures, devraient être prêts courant 2018. La même démarche sera suivie pour les lignes d’aménagement du territoire, mais selon « une procédure plus légère », précise François Philizot.
L’exploitation de ces lignes de jour, ainsi que des trains de nuit maintenus (Paris – Briançon, Paris – Rodez/Latour de Carol auxquels s’ajoutent Paris – Tarbes – Hendaye jusqu’en juillet et Paris – Nice jusqu’en octobre) font l’objet d’une convention qui vient d’être approuvée entre l’Etat et la SNCF jusqu’en 2020. Cette convention va évoluer au fil du temps. « Pour les années 2016-2020, la contribution financière s’élèvera à 1,668 milliard d’euros. Pour 2016, elle correspond à 400 millions d’euros, puis diminuera chaque année grâce aux reprises de lignes par les régions et en tenant compte des efforts de productivité prévus », précise Alain Vidalies. Le secrétaire d’Etat aux Transports reconnaît qu’à la fin de la convention, « il y aura toujours un déficit, mais il sera ramené à environ 250 millions d’euros ». Si cette réforme n’avait pas été lancée, ajoute-t-il, le déficit aurait pu bondir à cette échéance à 550 millions d’euros, d’après les calculs de la commission Duron qui a planché sur les TET.
Deux clauses de revoyure sont prévues par la convention pour mieux coller aux évolutions de l’offre et du trafic. La SNCF devra aussi faire des efforts de productivité et mettre en place une politique commerciale plus dynamique pour attirer les voyageurs. Ce qui passera essentiellement par une politique de petits prix, explique Florence Parly, la directrice générale de SNCF Voyageurs.
Le renouvellement du matériel (un appel à manifestation d’intérêt a été passé à la fin de l’année dernière, lire aussi notre article dans cette même Lettre) devrait aussi aider à rebooster la fréquentation. Au total, l’Etat affirme qu’il va consacrer 3,5 milliards d’euros d’ici à 2025 pour rénover l’ensemble du matériel roulant des TET et des lignes qui seront transférées.
Marie-Hélène Poingt