Entré en fonction en septembre dernier, Thierry Mallet, PDG de Transdev, a trouvé, nous dit-il, un groupe dont les fondamentaux sont bons. « Transdev is back », disait Jean-Marc Janaillac. Thierry Mallet …confirme et veut maintenant, après la phase de redressement conduite par son prédécesseur, repartir à l’offensive. Dans un contexte de vive concurrence entre les groupes français de transport.
VR&T. Comment va se présenter le bilan 2016 ?
T. M. Globalement, le chiffre d’affaires est stable, les gains de contrat compensent les pertes. En termes de rentabilité, nous avons réellement progressé dans les activités de transport public, mais nous n’avons pas tout à fait les résultats attendus dans les activités commerciales. Parmi les actions clés : nous avons donc pris la décision de créer une business line transversale, dédiée à l’ensemble de nos activités B2C, afin d’en définir la stratégie et d’optimiser les outils. Cette business line est confiée à Yann Leriche, qui est également directeur de la Performance du groupe ; il aura notamment la responsabilité directe des activités commerciales aux Etats Unis et au Royaume-Uni. Sur ces marchés, nous devons faire évoluer nos business models face à Uber qui reste très agressif.
VR&T. Quels objectifs précis vous êtes-vous fixés ?
T. M. Nous nous sommes fixé des objectifs de croissance, dont nous communiquerons les chiffres plus tard. En France, il est clair que l’ouverture à la concurrence du rail régional nous offrira des opportunités de croissance, et que le marché classique du transit est plus mature. En Allemagne ou en Suède, par contre, les marchés sont en pleine évolution et nous pouvons envisager une croissance importante, tout comme aux Etats-Unis ou en Australie. En Asie, nous en parlerons plus tard car je vais bientôt aller visiter nos opérations et échanger avec les équipes sur les opportunités.
VR&T. Et sur le ferroviaire ?
T. M. J’observe que, depuis qu’il y a eu l’ouverture à la concurrence en Allemagne, l’activité de la Deutsche Bahn a progressé alors qu’elle ne détient plus que 75 % du marché car celui-ci s’est développé fortement avec la concurrence. DB, dans un rapport explique une amélioration de 50 % de sa productivité depuis l’ouverture du marché (croissance de l’offre de 30 % pour un coût total réduit de 20 %). La concurrence a clairement bénéficié à tous les acteurs.
Il me semble donc urgent d’ouvrir de manière intelligente le marché en France, comme l’Allemagne ou la Suède ont su le faire.
VR&T. Comment peut-on progresser ?
T. M. Première idée, il faut absolument disposer, dès 2017, d’un cadre pour lancer rapidement des expérimentations qui démarreront en 2019 – c’est le délai nécessaire pour lancer des appels d’offres et choisir les opérateurs.
Deuxième idée, il faut regarder ce qui s’est passé en Allemagne ou en Suède, puisqu’on dispose d’exemples réussis d’ouverture.
Troisième idée, il ne faut pas que le social soit le point bloquant. Il y a un statut ? Il faut le garder, et faire en sorte que les personnes rejoignent l’expérimentation, de préférence, sur la base du volontariat. Nous allons être orientés à les faire travailler de façon différente.
Je pense que comme en Allemagne, cela bénéficiera aussi à l’acteur historique, c’est-à-dire, à la SNCF.
VR&T. Après l’intervention récente de Jean-Pierre Farandou, quelle est votre position sur le métro du Grand Paris ?
T. M. Je suis plus réservé que Jean-Pierre Farandou. Mais, puisqu’on a décidé qu’il y a un gestionnaire d’infrastructure, il me semble essentiel de bien déterminer son rôle, versus celui des exploitants. Deux députés, fin 2014, Yves Albarello et Alexis Bachelay [chargés du suivi de la loi Grand Paris, NDLR], ont d’ailleurs souligné qu’il fallait définir les rôles de chacun de façon précise. Nous avons fait des propositions en ce sens, de façon à ce que le rôle de l’exploitant soit suffisamment attractif. Il y a une partie de la maintenance du matériel que nous pouvons assurer, une partie de la supervision, une partie du fonctionnement. Nous sommes prêts à ouvrir cette discussion avec le Stif, le ministère des Transports et les différents acteurs concernés. La concurrence appelée de ses vœux par Keolis est essentielle, et j’y souscris totalement, mais nous souhaitons que celle-ci puisse s’exercer de la même façon sur l’ensemble des réseaux, et notamment sur les tangentielles, aujourd’hui attribuées à la SNCF, en tant que réseau ferré, et sous-traitées à Keolis, sa filiale.
VR&T. La réforme ferroviaire actuelle vous convient-elle ?
T. M. Dans la réforme ferroviaire, il faut bien distinguer les activités mobilité des autres activités. Les activités de mobilité sont appelées à devenir concurrentielles et doivent être complètement distinctes de celles qui sont appelées à être « de bien public », donc mutualisées et régulées : c’est-à-dire la partie réseau et la partie gares, cette dernière pourrait rejoindre la partie réseau.
Propos recueillis par François Dumont et Marie-Hélène Poingt
L' intégralité de l'entretien paraîtra dans le numéro de janvier 2017 de VR&T.