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Ewa

Les nouveaux défis d’Alstom

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Un peu plus de 16 mois après l’acquisition de Bombardier Transports par Alstom, Henri Poupart-Lafarge a dressé le 15 juin, devant le Club VRT, un premier bilan de ce qui a déjà été réalisé en termes de synergies et d’homogénéisation de la gamme. Le PDG d’Alstom parie sur les atouts du ferroviaire pour aider à la transition énergétique, même s’il reste encore des défis à relever en termes d’approvisionnement, de recrutement ou de réussites industrielles.

 

Après l’acquisition de Bombardier Transport, c’est l’heure de l’accélération de la transformation pour Alstom. Et des nouveaux défis. L’acquisition de son concurrent, il y a plus de 16 mois, a fait doubler la taille du groupe. Avec 15,7 milliards d’euros de chiffre d’affaires, il se place sur le marché de la construction ferroviaire derrière le Chinois CCRC (20 milliards d’euros), mais loin devant l’Allemand Siemens, (9 milliards d’euros de chiffre d’affaires).

« Alstom compte 75 000 employés, dont 20 000 ingénieurs, répartis dans 70 pays », détaille son PDG, Henri Poupart-Lafarge. Avec 44 000 collaborateurs, l’Europe reste son principal marché et la France représente le coeur historique de son activité : dans l’Hexagone, Alstom emploie 12 500 salariés, dont 5 000 ingénieurs, répartis sur 17 sites.

« Alstom se développe sur l’ensemble des continents, au plus près de ses clients. Ce qui est unique. Aucun de nos concurrents n’a cette proximité », souligne son dirigeant qui poursuit : « La globalisation doit aller de pair avec une proximité des marchés. Notre concurrent CRRC l’a compris et essaie de s’implanter dans différents pays avec plus ou moins de succès. »

Cette proximité permet au constructeur français de répondre aux demandes des Etats qui imposent un quota de productions locales. Le groupe a ainsi pu vendre un métro conçu à 80 % en Inde, avec des fournisseurs locaux, tout comme il peut répondre aux exigences des Etats-Unis imposant que 95 % d’un train soit produit localement. « En France, nous recourons à des fournisseurs français et la grande majorité des pièces proviennent de fournisseurs produisant en France », précise encore Henri Poupart-Lafarge.

 

ALSTOM SE DÉVELOPPE SUR L’ENSEMBLE DES CONTINENTS, AU PLUS PRÈS DE SES CLIENTS. AUCUN DE NOS CONCURRENTS N’A CETTE PROXIMITÉ

 

Plus de 180 milliards d’opportunités commerciales

Alstom, qui a une base installée de plus de 150 000 véhicules et réalise la maintenance de 30 000 d’entre eux, a engrangé pour 81 milliards d’euros de commandes. Selon son patron, le marché du ferroviaire est tiré par la croissance économique, l’urbanisation et la nécessaire transformation écologique. Les politiques environnementales menées à travers le monde, poussent à aller vers une mobilité plus durable, contribuant à la relance du ferroviaire, mode de transport le plus respectueux de l’environnement, que ce soit en matière d’émissions de CO2, de consommation d’énergie ou d’occupation des sols.

Le PDG d’Alstom a identifié plus de 180 milliards d’euros d’opportunités commerciales.

 

Complémentarité géographique

En intégrant Bombardier, « ce qui s’est fait rapidement », Alstom a amélioré sa couverture géographique. « Notre stratégie est d’être présent sur tous les marchés. Or, il nous manquait des pièces au puzzle. Alstom n’était pas au Mexique, ce que l’intégration de Bombardier Transport a permis de corriger, tout comme cela nous a permis d’atteindre la taille critique en Amérique du Nord et de compléter notre présence en Europe », indique le PDG.

Grâce à Bombardier, Alstom s’est renforcé en Allemagne, où il compte désormais 11 000 collaborateurs. Ce qui le place en position de premier constructeur allemand. « L’acquisition de Bombardier nous a permis d’avoir une couverture géographique plus homogène et d’avoir accès à une technologie qu’on n’avait pas chez Alstom, notamment en ce qui concerne les locomotives de fret », se félicite Henri Poupart-Lafarge, en rappelant qu’Alstom n’avait pas vendu de locomotives de fret en Europe depuis des années.

La complémentarité de Bombardier est aussi notable sur le marché des tramways. Si Alstom est très présent en France, où le groupe va ouvrir une nouvelle ligne de production à La Rochelle, Bombardier l’était davantage sur la partie allemande, avec des gammes différentes qui seront conservées.

 

Convergence des produits

Le dirigeant assure qu’il n’y a pas de sites redondants, mais qu’une convergence des produits s’impose. « Pour le tramway, la plateforme d’Alstom va couvrir l’ensemble des besoins, aluminium et acier. On va continuer à servir l’ensemble du marché, avec tous les trains, mais avec une plateforme conçue différemment. Pour la signalisation, nous servirons l’ensemble du marché, en proposant prioritairement la solution technique d’Alstom. La convergence des produits va prendre trois à quatre ans. A terme, il y aura une homogénéité de la gamme proposée aux clients », explique-t-il.

Et de rappeler que certains contrats récupérés auprès de Bombardier étaient déficitaires, « en raison de difficultés opérationnelles solubles. Nous avions une vision claire de la situation, les problèmes étaient identifiés et nous allons travailler sur le fond à les résoudre ».

Si Henri Poupart-Lafarge admet que l’investissement nécessaire pour la remise à niveau de Bombardier a été plus important que prévu, le dirigeant préfère mettre en avant le fait que 90 % des clients de Bombardier sont satisfaits de la façon dont Alstom a intégré les projets du constructeur : « Nous avons un outil industriel que nous avons remis à niveau et nous regardons l’avenir. » Le groupe a par ailleurs saisi la Cour de Justice pour obtenir un arbitrage sur les conditions de rachat de Bombardier Transport, estimant que le vendeur s’était rendu coupable de manquement à certaines dispositions contractuelles de l’accord de vente. Mais Henri Poupart-Lafarge refuse de s’épancher : « Cela fait partie de la vie des affaires. »

Reste un mot d’ordre : l’excellence opérationnelle pour continuer à se développer. « Il nous faut à présent travailler pour que toutes les usines et tous les centres de développement fonctionnent de manière homogène, avec le même niveau d’exigence et de performance », poursuit le dirigeant. A propos des sites de Bombardier, il y a, ajoute-t-il, « énormément de travail de mise à niveau à réaliser. »

Pour autoriser la reprise de Bombardier, la Commission européenne a exigé la cession du site de production de Reichshoffen en Alsace, où sont construits les trains Régiolis. « Le site sera cédé, mais nous nous assurerons que la SNCF aura une continuité du service de Régiolis. »

 

LE SITE DE REICHSHOFFEN SERA CÉDÉ, MAIS NOUS NOUS ASSURERONS QUE LA SNCF AURA UNE CONTINUITÉ DU SERVICE RÉGIOLIS

 

Conflit ukrainien

L’invasion en Ukraine n’est pas sans conséquences pour Alstom, qui a cherché avant tout à « mettre en sécurité » ses salariés (une trentaine) avec leurs familles.

Le groupe voudrait aussi se défaire de sa participation de 20 % dans le constructeur russe TMH, qui dessert principalement le « marché local ». Mais pas facile dans le contexte actuel. En attendant, cela l’a obligé à déprécier dans ses comptes cette participation à hauteur de 441 millions d’euros.

Le conflit en Ukraine a aussi eu des effets en France, en particulier pour le site de Belfort. Alors que les salariés comptaient sur un contrat d’un montant de 880 millions d’euros, qui leur aurait permis de construire 130 locomotives à livrer en Ukraine, la guerre a suspendu le projet et brouillé la visibilité sur l’avenir. Henri Poupart-Lafarge explique : « Le site de Belfort est fragile, parce qu’il travaille à la fois sur le fret et le TGV. Or, si le TGV a une continuité de production assurée avec la nouvelle génération du TGV M, le fret est malade en France. Ce qui contraint Belfort à vivre avec des contrats exports. C’est moins confortable. »

 

Crise des approvisionnements et inflation

A ces difficultés s’ajoute la crise des approvisionnements. Un défi, qui « se concentre sur les composants électroniques, dont la pénurie existait déjà avant le début du conflit », précise Henri Poupart-Lafarge. « Bien que le ferroviaire n’utilise que 1 % de composants dans le monde, il est stratégique d’en avoir, car leur pénurie peut fragiliser de grands projets », même si « jusqu’à présent, nous avons peu d’impact ».

Et de poursuivre : « On pensait que la crise serait résolue en 2022. Désormais on table plutôt sur 2023, voire 2024. Nous nous battons quotidiennement pour trouver les composants dont nous avons besoin. »

Les conséquences de l’inflation représentent un autre défi à relever. « Au-delà de l’inflation, c’est son irruption rapide et brutale qui nous conduit à un changement de paradigme. Dans des pays comme l’Inde où l’inflation existait déjà, on vivait avec. En Europe personne n’avait prévu son retour et tous nos contrats n’étaient pas outillés pour y faire face. Nous vivons une période d’ajustement et devons instaurer des clauses d’indexation pour nous protéger », explique le patron d’Alstom, en précisant toutefois que « la plupart des pays sont couverts », dont la France.

7 500 postes à pourvoir

Le secteur reste un gros pourvoyeur d’emplois. Alstom a prévu 7 500 embauches en 2022, dont plus de 1 000 en France, « des ingénieurs, mais pas seulement », précise son PDG. Le groupe est à la recherche de talents, notamment dans le numérique.

Pour attirer les candidats, le groupe table sur la quête de sens des salariés. « Cela fait 25 ans que je suis chez Alstom et je vois de plus en plus d’ingénieurs choisir de nous rejoindre, plutôt que de s’orienter vers le secteur de l’automobile. Parce ce qu’ils veulent aider à relever l’enjeu environnemental en allant travailler dans une entreprise qui cherche à trouver des solutions. »

Le groupe s’efforce de faire connaître ses métiers.

Car dans ce secteur la concurrence est rude et des entreprises comme Google viennent parfois débaucher les salariés du digital. « C’est nouveau. Recruter et fidéliser est un défi, mais nous avons des atouts : une couverture mondiale offrant des opportunités de mobilité et un power branding », détaille Henri Poupart-Lafarge qui reconnaît que sur des marchés où il y a pénurie de main-d’oeuvre, comme en France, le groupe peine à trouver les effectifs nécessaires. Selon lui, cela fait partie des défis d’aujourd’hui.

 

Technologies plus vertes

Le train doit être un acteur de la décarbonation. Alstom y travaille. « Nous sommes persuadés que le rail est la solution aux problèmes environnementaux. Mais pour favoriser le transfert modal, il faut être attractif pour les passagers et il faut améliorer les performances des trains. Il faut aussi chercher à optimiser les infrastructures qui sont très coûteuses, en ayant recours au digital dans un but d’optimisation. »

Le groupe cherche aussi à améliorer l’efficacité énergétique de ses trains. « On s’assure que chaque nouvelle génération de nos produits permet des économies par rapport aux précédentes, en travaillant sur l’écoconception. »

Le constructeur travaille sur des solutions électriques, notamment dans le fret qu’Alstom veut contribuer à développer. Non seulement en Europe, mais aussi au-delà : l’Inde par exemple veut tripler son trafic fret et a un projet d’électrification des lignes. Ou l’Amérique du Nord, où Alstom veut accompagner la transition énergétique du fret ferroviaire. « Un défi, car 99 % du réseau n’est pas électrifié. Les trains sont tractés par des locomotives à diesel », rappelle le président d’Alstom.

En Europe, où 50 % du réseau ferré n’est pas électrifié, Alstom veut proposer des trains à batterie permettant d’assurer la partie du trajet non électrifié, avec une autonomie d’une centaine de kilomètres. Pour des trajets plus longs « il faudra recourir à l’hydrogène », ajoute le président d’Alstom qui précise que moins une ligne est dense, plus l’hydrogène fait sens, car cela ne nécessite pas d’investissements lourds.

 

Les promesses de l’hydrogène

Pour faciliter la migration du diesel vers des technologies plus vertes, Alstom, a mis au point un train à hydrogène, le Coradia iLint, et devrait faire circuler des trains à hydrogène en Allemagne cette année. Il a noué un partenariat avec Engie, prévoyant l’approvisionnement en hydrogène renouvelable d’un système de piles à combustible pour des locomotives destinées au fret ferroviaire en Europe.

Henri Poupart-Lafarge insiste sur la nécessité de réduire le prix de l’hydrogène vert, qui coûte encore trois fois plus cher que le diesel. « C’est le défi de la transition écologique. L’économie du futur sera à l’hydrogène ou ne sera pas. Il ne faut pas prendre de retard là-dessus », prévient-il, avant de pointer tout ce qui va dans le bon sens. « Il y a des milliards d’investissements réalisés dans la transformation écologique en hydrogène. Le monde se prépare à une économie à l’hydrogène. »

 

C’EST LE DÉFI DE LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE. L’ÉCONOMIE DU FUTUR SERA À L’HYDROGÈNE OU NE SERA PAS

 

Armé pour affronter l’avenir

« Avec la reprise de Bombardier, nous avons la fondation d’un groupe extrêmement solide, présent partout dans le monde. Ce qui lui permet de s’adapter à la géopolitique et d’équilibrer ses différents pôles en faisant preuve de résilience », assure avec confiance Henri Poupart-Lafarge, déterminé à faire de son groupe un acteur contribuant à rendre possible la suppression des voitures thermiques d’ici à 2035. « Si on remplace la flotte automobile actuelle par une flotte de véhicules électriques, on ne parviendra pas à atteindre l’objectif de zéro carbone. Pour y arriver, il faut un transfert modal et augmenter considérablement la part du ferroviaire », prévient-il. « Ce qui implique que l’industrie ferroviaire accélère l’innovation pour rendre le train plus attractif, en continuant à améliorer et développer les réseaux et les services pour répondre à l’enjeu de transition énergétique. Il y a un énorme chantier en jeu. » Et de conclure : « A nous d’être au rendez-vous ! »

 

 


Les révolutions technologiques, du TGV M aux métros

Deux catégories de produits fournis par Alstom sont à la veille d’un changement de génération : les trains à grande vitesse, avec les premières rames de TGV M, et les applications du CBTC (contrôle des trains basé sur la communication) aux métros automatiques, avec la solution Urbalis Fluence.

Pour Henri Poupart-Lafarge, le TGV M représente « une révolution technologique développée avec la SNCF, en partant d’une feuille blanche ». Et Fluence, que le groupe va déployer à Lille avant la ligne 18 du Grand Paris, est « une solution sans personne à bord, avec une révolution du système de signalisation, qui met de l’intelligence dans le train et lui permet de communiquer avec d’autres trains pour gagner en efficacité et faire passer davantage de trafic ».


L’aventure Aptis

Alstom qui avait contribué au design d’Aptis, un autobus 100 % électrique, a décidé de le retirer du marché. « Nous en étions très fier, mais il n’a pas trouvé son marché. On ne nous en achetait pas suffisamment. Le bus électrique n’a pas décollé aussi vite qu’on pensait. Notre véhicule était peut-être trop révolutionnaire. C’est un échec et une déception. On a perdu de l’argent, mais la page est tournée », explique Henri Poupart-Lafarge.


Des retards à relativiser

Initialement prévus pour la mi-2021, les RER NG pour les lignes D et E qu’Alstom devait livrer n’arriveront finalement pas avant mi-2023. Henri Poupart-Lafarge refuse de commenter : « C’est un terrain de discussion commercial avec les clients. » Il relativise : « Nous avons 800 projets, soit 80 milliards de carnets de commandes à travers le monde sur les trois à quatre ans. Notre but est de fournir le meilleur matériel en termes d’économie, d’énergie, le plus tôt possible, avec la qualité requise en prenant en compte la vie des affaires qui a ses complexités : le Covid, les problèmes d’approvisionnement… »

Ewa

MaaS : l’enjeu de la standardisation

©VRT

Porté par les collectivités et les entreprises de transport, le MaaS (Mobility as a Service) semble promis à un bel avenir : il doit devenir le sésame d’une mobilité facilitée, permettant de réserver et de payer son déplacement d’un seul clic sans se soucier du mode de transport ou de l’exploitant. Mais, malgré cet enthousiasme, bien des questions se posent encore. Quel bilan peut-on dresser ? Quels sont les axes de développement ? Où en est la standardisation ? Les invités à la conférence sur le MaaS, organisée le 19 mai par Ville, Rail & Transports, ont apporté les premières réponses.

 

Alors qu’une centaine d’initiatives ont essaimé en France autour du MaaS, la question de dresser un premier bilan se pose. Aurélien Cottet, directeur commercial international d’Instant System, note une certaine ambivalence, notamment au niveau des attentes. « Il y a beaucoup d’initiatives qui s’avèrent parfois trop ambitieuses alors qu’il faut y aller pas à pas », affirme-t-il. Citant la courbe de Gartner (courbe d’adoption de nouvelles technologies établies par le cabinet de conseil Gartner), il estime que la phase de désillusion n’est pas arrivée, puisqu’on en est encore au niveau de l’établissement de « pilotes ». « Il n’y a pas encore de vraie opération », constate cet ancien coordinateur de projet MaaS chez Transdev.

Aurélien Cottet rappelle que Transdev est actionnaire de MaaS Global, l’une des premières sociétés à avoir développé et déployé un vrai MaaS opérationnel à Helsinki. « Quand MaaS Global s’est lancé en 2017, ses équipes visaient un déploiement dans 30 villes en 2018. Or, en 2022, ils sont présents dans cinq à six villes. »

IL Y A BEAUCOUP D’INITIATIVES QUI S’AVÈRENT PARFOIS TROP AMBITIEUSES ALORS QU’IL FAUT Y ALLER PAS À PAS Aurélien Cottet

Complexités locales

La complexité de chaque projet local a été largement sous-estimée et les expériences ne sont pas facilement transposables d’une ville à l’autre, chaque service de mobilité locale possédant son propre système d’information et ses propres moyens de fonctionner. Instant System travaille actuellement au développement de solutions MaaS à Bruxelles ou en Ile-de-France avec IDFM.

Pour Eric Alix, président de RATP Smart System, il semble trop tôt pour parler de bilan alors que l’heure du MaaS vient tout juste de démarrer en France. « L’acte fondateur ne date que du 1er juillet 2021 conformément à la LOM. Cela démarre donc tout juste en France. Beaucoup d’acteurs doivent passer des contrats, mais il faut auparavant les définir, nous n’en sommes encore qu’aux prémices », lance-t-il.

 

Intégration des données

Des expériences de MaaS sont lancées, les chantiers de standardisation des données transports sont donc encore loin d’être achevés. Nicolas Cosson, président de Hove (né du rapprochement de Kisio Digital et Kisio Consulting), considère que l’on sous-estime le nombre de données différentes et la complexité à les intégrer. « Le MaaS a besoin de la brique transports en commun, mais cela ne suffit pas car ce n’est qu’une famille de données », souligne-t-il, en détaillant les trois « grandes familles » de données : en plus des transports publics (trains, bus, tramways, métros, mais aussi des moyens moins répandus comme les navettes fluviales ou les funiculaires), un second groupe rassemble la voiture et tous ses usages potentiels comme l’autopartage, l’autosolisme, les taxis et VTC, auxquels s’ajoutent les mobilités douces avec les trottinettes et vélos (en libre service ou en propre), le transport à la demande, dynamique ou non, et « tout ce qui concerne le stationnement et les pôles d’échanges multimodaux et intermodaux, gares pour garer un vélo sécurisé et les stations de covoiturage ».

Comme les voyages ne s’effectuent en général pas de gare à gare, mais d’une adresse à une autre, il faut maîtriser d’autres types de données, poursuit Nicolas Cosson : on peut les trouver par exemple dans OpenStreetMap ou bien chez Google avec StreetView, en attendant une hypothétique entité française capable de fournir une solution made in France. Ces données constituent la troisième famille mise en place pour concevoir un itinéraire en tenant compte des informations sur la voirie (par exemple la déclivité, utile si l’on est en situation de handicap), ou d’autres éléments qui entrent en ligne de compte en termes de fréquentation et de trafic, comme la météo et des événements (manifestations ou épreuves sportives de type JO). « Toutes ces données vont donner un premier niveau d’information, mais cela ne constitue que le premier étage de la fusée, car on n’a pas encore parlé de réservation, paiement et dématérialisation des billets », résume Nicolas Cosson.

 

Quatre étages de la fusée MaaS

Alexandre Cabanis, directeur marketing d’Ubitransport, complète : « Il y a un consensus sur les quatre étages de la fusée, le premier étant effectivement le calculateur d’itinéraire, avec les difficultés évoquées. Le deuxième étage est constitué par la vente mono-modale. Il faut que les acteurs qui la proposent depuis leur application disposent d’un outil capable de gérer l’ensemble de la gamme tarifaire du réseau, pour ne pas vendre qu’un simple titre au plein tarif mais potentiellement 48 titres différents en fonction du profil implicite ou explicite de voyageur ! »

D’autres difficultés s’ajoutent avec les deux derniers « étages » de la fusée MaaS, constitués de la vente intermodale et enfin de toutes les initiatives permettant de faire cesser l’autosolisme. « Les régions ont raison d’être gourmandes en termes de fonctionnalités à apporter à leurs usagers. Mais, pour la vente intermodale, qui consiste à vendre en un acte une trottinette, un bus et un bateau, il faut que les trois opérateurs se soient déjà mis d’accord pour gérer les compensations et les moyens de les rétribuer en retour. Quant au dernier niveau, c’est encore plus flou », prévient-il.

 

Mon Compte Mobilité pour simplifier

Côté utilisateurs, les chantiers avancent aussi. Le programme « Mon Compte Mobilité » (MOB), animé par La Fabrique des Mobilités, doit permettre de défricher la complexité. « C’est un des résultats attendus sur le programme des Certificats d’économie d’énergie, à destination des citoyens, et des entreprises qui sont concernées, avec l’application du forfait mobilité durable dans le cadre de la LOM », explique Julie Braka, cheffe de projet à La Fabrique des Mobilités sur la standardisation des interfaces MaaS.

L’ACTE FONDATEUR POUR LE MAAS NE DATE QUE DU 1er JUILLET 2021 CONFORMÉMENT À LA LOM. CELA DÉMARRE DONC TOUT JUSTE EN FRANCEa “ Eric Alix

Le programme MOB doit permettre de simplifier la gestion des « surcouches d’aides locales », en commençant par leur recensement. « IDFM est par exemple incapable de citer toutes les aides qui sont mises en place sur son territoire, car ces aides sont financées par les collectivités locales. Notre but consiste à aider les citoyens à s’y retrouver dans ce mille-feuille d’aides tout en simplifiant les démarches, afin de ne pas fournir 10 fois les mêmes documents comme des justificatifs CAF ou le permis de conduire. »

Le MaaS a besoin de la brique transports en commun, mais cela ne suffit pas car ce n’est qu’une famille de données “ Nicolas Cosson

 

Distribution des titres

Eric Alix considère pour sa part que le premier « étage » – le calculateur d’itinéraires – est à peu près cerné, même s’il reste des difficultés pour le déployer sur de nombreux territoires. « Nous disposons déjà de beaucoup de données disponibles en temps réel pour le transport en commun. L’acquisition de Mappy nous a, de plus, permis d’avoir une vision transverse des données du monde automobile, même s’il nous manque encore les données en temps réel, raison pour laquelle nous avons un contrat avec TomTom. Cela nous permet de faire énormément de progrès sur l’information voyageurs. »

Le dirigeant ajoute que les difficultés apparaissent pour l’ouverture de la distribution des titres. « C’est le coeur du sujet. Il faut appréhender la façon dont on s’intègre d’un point de vue client et quels termes régissent notre relation. Si on veut que le MaaS passe à grande échelle, tous les acteurs doivent veiller à ce que leurs systèmes d’information voyageurs puissent s’interfacer les uns avec les autres, grâce à des API compatibles, c’est ce qui s’appelle l’API based economy. »

 

Compatibilité des API

La compatibilité des API est effectivement centrale, mais les acteurs sont-ils prêts à ouvrir toutes les données ? Aurélien Cottet a remarqué que, dans la plupart des projets MaaS où différents modes doivent s’intégrer, les API sont souvent incomplètes.

« Lorsqu’il s’agit de savoir où se trouve une trottinette ou une voiture en autopartage, les acteurs sont enclins à partager ce type de données. Ils sont beaucoup plus réticents à aller plus loin, surtout lorsqu’il s’agit de s’intégrer dans une application tierce. La crainte de perdre le client final est toujours présente pour les opérateurs privés. »

Il considère que les problématiques techniques se résoudront fatalement dès lors que les acteurs se mettront tous d’accord d’un point de vue commercial. « La véritable première problématique consiste à se mettre d’accord commercialement afin de gagner potentiellement plus de clients. Car beaucoup d’utilisateurs, qui ont l’application des transports en commun, n’ont pas envie de télécharger une application supplémentaire, ou de mettre leur carte bancaire, pour utiliser une trottinette. Cela constitue un frein certain. Or tous ceux qui ont joué le jeu ont augmenté leur part d’utilisation de leur propre service », a-t-il constaté, notamment dans les villes ayant imposé aux opérateurs de mobilités privées d’ouvrir leurs données avec des API compatibles. « Le jour où on aura cela en Europe, ce sera beaucoup plus simple, un service de mobilité utilisé localement pourra être utilisé partout ailleurs avec la même facilité », insiste-t-il.

 

Norme imposée… ou pas

Selon Alexandre Cabanis, « c’est souvent le chemin de la norme imposée par le haut qui est plus efficace, quand elle n’est pas imposée légalement par l’Etat, comme en Norvège ou en Suisse où toute l’information voyageurs et la distribution de titres ont été centralisées. Ce qui a permis de couvrir les niveaux 1 à 3 du Maas en cinq ans ». Pour les industriels ou les entreprises qui apportent des services digitaux, les enjeux restent toutefois importants, puisqu’un seul acteur aura le rôle de coordinateur, et la lutte sera serrée pour l’obtenir, précise-t-il. « Le MaaS signifie également qu’un seul acteur aura cette place. Il y a donc des enjeux business importants », poursuit-il.

Nicolas Cosson ne croit pas à la norme imposée mais plutôt à la force de l’exemple. « Une partie de notre code est open source aujourd’hui, c’est une manière de partager les choses sans les imposer. Les gens peuvent jouer avec des jeux de données, regarder ce qu’on peut en faire sur une application, c’est un bon moyen de partage. »

Et de poursuivre : « C’est peut-être naïf mais notre mission consiste à favoriser l’usage de mobilités durables, inclusives et partagées. On ne le fait pas uniquement pour de l’intérêt financier, mais aussi parce que l’on considère que c’est un bien communautaire. On travaille au développement de biens numériques communs pour lutter contre l’autosolisme, et on pourrait aussi envisager de faire de la qualification autour de l’empreinte carbone en signalant les gains réalisés en termes de gain de CO2 lorsque l’on utilise d’autres moyens que la voiture pour se déplacer. Ce qui permettrait même de se comparer par rapport à des collègues de travail. »

 

Faiblesse des budgets

La normalisation est également attendue côté opérateurs, notamment pour des raisons budgétaires. Aurélien Cottet souligne la faiblesse des budgets accordés aux projets MaaS lorsqu’ils sont gérés par des autorités publiques sous délégation. « Il faut arriver à pouvoir en vivre alors que les projets sont complexes. La normalisation va enlever de la complexité. Nous avons ainsi été appelés pour un projet en Egypte, où nous avions la possibilité d’imposer nos conditions en tant qu’intégrateur, ce qui a permis une intégration plus facile et plus rapide », estime-t-il.

Si les acteurs de la mobilité sont priés de coopérer, les régions françaises pourraient également jouer le jeu en évitant de développer chacune de leur côté leur propre SIM (système d’informations multimodales), suggère Nicolas Cosson. Et d’expliquer : « Chaque région ou commune tient à développer sa propre application qui ne communique pas avec celle du voisin, avec une tarification qui ne communiquera pas non plus. Il y a un vrai questionnement d’un point de vue politique : la notion de couverture nationale est peu présente, mis à part pour la SNCF et IDFM qui disposent d’une très grande couverture. »

 

Standardisation communautaire ou universaliste

Deux logiques s’affrontent généralement à propos de la standardisation, observe Julie Braka. La première, dite communautaire, démarre avec un nombre limité d’acteurs – qui peuvent relever des secteurs privés ou publics – et qui vont rechercher un plus petit dénominateur commun avec l’idée d’avancer très vite pour répondre à une problématique identifiée par ces mêmes acteurs. C’est typiquement l’exemple du standard GTFS qui a été commencé par Google. « Le GTFS est devenu un standard de fait car il est facile à utiliser. Il a même été détourné plusieurs fois, à tel point qu’il a fallu mettre en place un système pour le réorganiser avec Mobility data car on s’y retrouvait plus. »

IL FAUT QUE LES ACTEURS QUI PROPOSENT LA FUSÉE MAAS DEPUIS LEUR APPLICATION DISPOSENT D’UN OUTIL CAPABLE DE GÉRER L’ENSEMBLE DE LA GAMME TARIFAIRE DU RÉSEAU “ Alexandre Cabanis

Un autre exemple, plus franco-français, provient du covoiturage. « C’était compliqué au départ car il a fallu se mettre d’accord sur la gouvernance, mais aujourd’hui nous sommes dans une phase plus technique, avec la rédaction d’une première version d’API attendue pour le mois de juin 2022, et avec l’objectif d’aller sur du normatif par la suite. Il a fallu commencer à poser ce minimum en partant d’un historique, le fameux standard covoiturage de la région Ile-de-France, sans détruire le travail de certains opérateurs. Ce sont des petits acteurs sans moyens incroyables pour développer, mais ils ont besoin de plus d’usagers pour arriver à une masse critique qui leur fait défaut. Ils se sont donc mis d’accord entre concurrents, car ils ont besoin de ces standards pour aller sur de nouveaux territoires. » La seconde démarche, plus exhaustive, appelée universaliste, est beaucoup plus large puisqu’elle cherche à répondre à un nombre d’usages très importants, « mais elle aura du mal à se diffuser car elle s’avère souvent trop complexe », affirme Julie Braka. C’est le cas du format comme NeTEx « qui est extrêmement complexe et fait peur à beaucoup d’acteurs, notamment ceux des nouvelles mobilités et les collectivités qui n’ont pas les moyens de gérer une telle complexité car elle répond à tous les cas d’usages. Il faut aussi rendre possible son utilisation, car elle représente 1 500 pages ». Selon elle, ces deux démarches ne sont pas incompatibles : « Nous avons besoin des deux démarches et qu’elles aillent l’une vers l’autre. » Et de conclure : « Nous avons besoin d’informations de qualité, sinon nous n’arriverons pas à faire du MaaS car nous perdrons beaucoup d’acteurs en cours de route ».

Eric Alix ajoute que les enjeux du MaaS dépassent les échanges d’informations, même s’ils en constituent le socle. « L’API based economy c’est la base, parce que l’intégration est plus facile et coûte moins cher à chacune des parties. Mais le Maas c’est aussi une plateforme : il faut aller chercher des clients en masse, leur faire découvrir les services et les accompagner dans le développement de l’usage. » Autrement dit, « il faut peut-être faire le programme qui va faire de l’incentive au report modal et communiquer avec les nouvelles offres des partenaires, il y a un très gros volet opération. Si on fait le MaaS à l’échelle, il faut vraiment compléter l’approche technique avec l’approche opérationnelle et la gouvernance, car il s’agit de contribuer à une politique de mobilité sur un territoire ».

Les objectifs du MaaS sont en effet ambitieux, puisqu’il s’agit de convaincre in fine l’utilisateur de laisser sa voiture au garage. Mais le chemin est semé de chausse-trapes, notamment celles destinées à protéger le marché de la concurrence.

En Europe, ce phénomène peut s’expliquer d’un point de vue historique, rappelle Alexandre Cabanis. Et de citer une certaine tendance à compliquer les échanges pour aller d’un pays à l’autre, comme l’écartement des rails ou des réseaux électriques différents, afin de dissuader une éventuelle agression d’un pays ennemi. « Cette volonté de protéger le marché se heurte à la réalité des modèles économiques des entreprises, qui ont besoin de distribuer leurs produits sur le plus de territoires possible. Aujourd’hui, dans la monétique utilisée dans les bus, on retrouve d’un côté certains pays où il est facile d’utiliser sa carte Visa ou Mastercard pour circuler, alors que dans d’autres, comme la France ou l’Espagne, il y a des barrières à l’entrée. C’est pour cela que dans certains cas, le fait d’avoir une norme imposée, c’est une aubaine », estime-t-il.

Pour l’information voyageurs, c’est l’inverse. « Le marché français a toujours utilisé des formats simples, qui sont le GTFS et GTFS-RT (en temps réel), alors que l’Europe, pour résister aux GAFA, essaye de développer un autre format plus riche et plus compliqué qui s’appelle le NeTEx et sa version temps réel qui est le SIRI. On n’en est pas encore à une imposition formelle car les deux systèmes peuvent coexister, mais si demain les normes NeTEx et SIRI étaient imposées, ce serait une opportunité pour les industriels de pouvoir se déployer facilement dans tous les pays. »

Pour Aurélien Cottet, les entreprises de la billettique avaient jusqu’à présent tendance à avoir leur propre système fermé. « Il n’y avait pas de problématique de digital et d’ouverture à des tiers car il s’agissait de ticket, puis de cartes. Avec les titres sur téléphones portables, les billetticiens historiques voient leurs prés carrés mis à mal. La ville de Sydney avait un opérateur américain, Cubic, qui ne voulait pas ouvrir son système. La ville a déclaré qu’elle était prête à abandonner tout le dispositif pour prendre un acteur prêt à le faire. En six mois, Cubic a créé une API alors que cela semblait impossible avant », témoigne-t-il.

La pression ne marche pas toujours. En Allemagne du nord, les acteurs de la billettique ont réussi à imposer deux systèmes qui fonctionnent en parallèle et l’opérateur doit mixer les deux pour effectuer son bilan comptable. Parfois, la contrainte ne vient pas d’une autorité organisatrice des mobilités mais d’un élément extérieur, comme la Covid-19. « Plus personne ne voulait toucher un bouton et mettre ses doigts nulle part, alors qu’avant les opérateurs étaient très attachés au geste de validation et de lutte contre la fraude », se souvient Nicolas Cosson. La pandémie a permis un développement express du SMS ticketing, du paiement par mobile ou par QR code. « En France, 70 réseaux opérés par Keolis sont désormais équipés de systèmes de paiement par mobile et QR code », indique-t-il.

Finalement, comme Alexandre Cabanis le résume, « il y avait effectivement une culture où chacun maîtrisait un réseau avec sa gamme tarifaire et était le seul maître à bord, mais depuis une dizaine d’années il y a eu une première ouverture avec Calypso avec l’opérabilité billettique ». Avec la LOM, les billetticiens se sont adaptés autour des API. « Mais la question derrière, c’est quelle API ? La mienne ou la vôtre ? On revient toujours au problème de gouvernance, au rapport de force entre acteurs », expose-t-il. Eric Alix acquiesce. Et pose une autre question : « Lorsque deux parties doivent s’intégrer, on doit définir l’endroit où commence l’une et finit l’autre. Par exemple qui prend en charge la billettique et le SAV ? »

 

Business model

La LOM est restée assez discrète sur la façon dont les modèles économiques peuvent se mettre en place en matière de partage des données. Aussi, la question du business model peut se poser. Alexandre Cabanis rappelle qu’il y a en effet une mise à disposition de vente par des tiers par le biais d’API, « contre une somme modique ». Et de préciser : « Si on utilise mon tuyau 15 fois, cela fera 15 appels API qui valent tant de centimes. Mais les acteurs industriels ne vont pas marger dessus, ils ne feront que compenser le coût. En revanche, en mettant à disposition mon propre tuyau, je vais surtout récupérer, en contrepartie, des données. C’est le nerf de la guerre, qui concentre le plus de valeur. C’est pour cela qu’il y a autant de batailles, non pas autour du standard ou de la norme utilisée, mais du tuyau qui sera utilisé », avance-t-il.

NOUS VOULONS AIDER LES CITOYENS À S’Y RETROUVER DANS CE MILLE-FEUILLE D’AIDES TOUT EN SIMPLIFIANT LES DÉMARCHES, AFIN DE NE PAS FOURNIR 10 FOIS LES MÊMES DOCUMENTS Julie Braka

Aurelien Cottet signale de son côté qu’en Belgique et aux Pays-Bas, les entreprises doivent réaliser un rapport sur l’empreinte carbone de mobilité de leurs employés (toutes les sociétés en Belgique et celles comptant plus de 250 employés aux Pays Bas). « Le business model est ici purement fiscal. Il est possible que d’autres pays européens imposent à leur tour ce type de rapport d’empreinte carbone, que cela soit pour les déplacements domicile-travail ou pour les déplacements professionnels », prévient-il.

Une question taraude tous les acteurs du MaaS. Un acteur comme Google arrivera-t-il à imposer son standard, comme il l’a fait pour l’information voyageurs ? Aurélien Cottet indique que Google y songe déjà, puisque l’entreprise gère ses projets MaaS par sa filiale Google Pay, dédiée au système de paiement, plutôt que par Google Maps, dédiée au calculateur d’itinéraires. La carte de paiement deviendrait ainsi le sésame de la mobilité, à condition d’être liée à un calculateur multimodal d’itinéraires. Alexandre Cabanis poursuit : « Ce sera le prochain gros changement de paradigme dans le MaaS. L’utilisateur n’aura besoin que d’une carte bancaire pour voyager, en validant chaque étape tout en ayant la garantie d’être prélevé au meilleur tarif possible en fin de journée. L’open payment est peut-être l’avenir du MaaS », lance-t-il. A condition que les acteurs se soient mis d’accord pour refacturer et répartir entre eux les recettes de manière équitable.

 

 


Démarches de standardisation

Quel positionnement les acteurs de la mobilité doivent-ils adopter dans leurs démarches de standardisation ? Selon Aurélien Cottet, la situation évolue vite. « Il y a deux ou trois ans, les acteurs des trottinettes et vélos partagés ne voulaient pas nous voir, mais ils ont commencé à comprendre que les villes allaient reprendre la main sur la mobilité de leurs territoires, et maintenant, tous ces acteurs tapent à notre porte. La standardisation va s’effectuer de fait car tous les acteurs qui exercent sur la voie publique devront avoir un droit de pouvoir opérer et, ce droit, c’est la collectivité qui la donne », témoigne-t-il. Julie Braka insiste pour sa part sur l’intérêt de recourir à un acteur neutre, comme la Fabrique des Mobilités, pour assurer le succès d’une démarche de standardisation. « Nous ne vendons pas de la mobilité, mais nous sommes là pour mettre ces acteurs autour de la table, on fait de la facilitation, ce n’est pas un moment facile, on doit trier entre ce qu’on prend et ce qu’on jette dans le standard. »

Comment parvenir à un consensus ? Et comment proposer un standard qui permette de répondre à un maximum de cas d’usage sans pour autant créer une usine à gaz ?

Il faut agir avec pragmatisme, répond Alexandre Cabanis, en citant deux exemples. « La norme Intercode, censée régir le fonctionnement des systèmes billettique, a été bâtie sur une telle règle du consensus qu’elle est devenue un mille-feuille absurde. A contrario, si l’on prend le marché du covoiturage en France, les trois plus gros acteurs se sont rapidement mis d’accord pour avoir un standard qui fonctionne entre eux, pour ensuite l’adapter afin qu’il rentre dans une norme officielle. »

Julie Braka insiste : « Dans notre démarche, il arrive un moment où on doit forcer les acteurs à prendre une décision pour éviter de créer un projet complètement hors-sol. Il faut arriver à une V1, quitte à faire une V2 ensuite. »


S’inspirer des exemples européens

Interrogée sur l’existence de projets MaaS en Europe, Julie Braka cite la démarche Tomp API, initiée par le gouvernement néerlandais. « Il n’y a pas d’organisation officielle, mais des acteurs qui travaillent ensemble pour mettre en place un standard reposant sur des blocs fonctionnels. Le gouvernement a indiqué qu’il était d’accord pour financer sept MaaS à condition d’avoir un standard pour ne pas avoir à financer sept MaaS différents, qui ont été mis en place dans des villes aux contextes différents ». Aurélien Cottet ajoute que la Suisse dispose déjà de plusieurs projets grâce au ticketing, « ils sont plus pragmatiques, mais c’est plus simple car le pays est plus petit », et que l’Allemagne, désormais convaincue, a initié des démarches dans plusieurs villes, avec l’appui de la Deutsche Bahn. Le Royaume-Uni a pour sa part lancé des appels d’offres dans plusieurs régions, et des expériences démarrent également en Italie et en Espagne.

Ewa

Comment harmoniser le transport ferroviaire avec de multiples acteurs ?

gpr conf 2022

Qui dit ouverture à la concurrence, dit multiplication des acteurs. Comment faire en sorte que les voyageurs effectuent un trajet « sans couture », sans se poser de questions sur le transporteur aux commandes ? C’est ce thème qui a été abordé lors de la table ronde organisée le 12 mai en amont de la cérémonie de la remise des Grands Prix des Régions.

Alors que l’ouverture à la concurrence des TER se prépare de plus en plus activement, les associations d’usagers s’inquiètent d’un risque de « morcellement ferroviaire ». Elles redoutent la mise en place de tarifications très différentes d’une région à l’autre, de correspondances pas toujours adaptées ou de la multiplication d’applications locales.

L’arrivée de nouveaux opérateurs va conduire à de nombreuses transformations, reconnaît Jean-Aimé Mougenot, le directeur TER délégué de SNCF Voyageurs. Pour assurer une qualité de service élevée aux voyageurs, il juge essentiel d’innover. « Il ne faut pas continuer à travailler comme avant, mais faire en sorte que les Régions puissent développer et adapter leur offre afin de répondre à des besoins qui évoluent », conseille-t-il. Certaines Régions ont commencé à le faire. Pour prendre en compte les changements de comportements suscités par la crise sanitaire, l’Occitanie propose par exemple des abonnements financièrement intéressants pour ceux qui télétravaillent trois jours par semaine. La Région a aussi lancé un dispositif de post-paiement à destination des moins de 26 ans les incitant à prendre le train, avec un système de tarification dégressif. Jean-Aimé Mougenot plaide pour la personnalisation du service, clé selon lui de la réussite du transport de demain. Pour répondre à cette attente, les régions Normandie et Grand Est développent un outil permettant de renseigner par SMS les voyageurs du TER, avant, pendant et après leurs voyages.

 » LA PERSONNALISATION DU SERVICE EST LA CLÉ DE LA RÉUSSITE DU TRANSPORT DE DEMAIN  » Jean-Aimé Mougenot

De son côté, SNCF Voyageurs a conçu une plateforme proposant un service de transport à la demande en partenariat avec des chauffeurs payés à la prestation. L’objectif est d’offrir une solution aux habitants des zones peu denses. L’outil est expérimenté par les Pays de la Loire.

Transdev, qui a remporté un des deux lots de TER mis en concurrence par la région Sud sur l’axe Marseille – Toulon – Nice (la SNCF a remporté le lot Etoile de Nice) prépare la transition à venir avec la SNCF et la Région. Claude Steinmetz, le directeur ferroviaire de Transdev, rappelle que l’objectif est d’offrir plus de qualité, de fluidité et une totale transparence à l’usager. Il insiste sur la nécessité de réussir le transfert des 163 cheminots qui seront affectés au service ferroviaire qu’assurera à partir de 2025 Transdev. Une préoccupation sociale partagée par la SNCF, qui devra également réaliser le transfert de 600 salariés pour exploiter, à partir de 2024, l’Etoile de Nice, via sa filière SNCF Sud Azur.

A la recherche de standards pour créer de la valeur

Pas concerné pour le moment par la reprise d’une ligne ferroviaire, Didier Cazelles le directeur général adjoint de Keolis France, sait déjà, en tant qu’exploitant routier de lignes régulières, à quel point une billettique harmonisée est importante. « Nous sommes multiopérateurs et dans certaines régions il y a un système d’incitation lié aux recettes. Mais pour le client c’est transparent : il n’y a qu’une marque et une billettique commune. Le fait qu’il y ait plusieurs opérateurs reste invisible pour l’usager », explique-t-il. « Dans une logique de Délégation de Service Public avec une responsabilité d’opération de marketing de conquête et d’innovation, nous faisons des pilotes d’Open paiement sur carte bancaire ou Smartphone que les Régions peuvent ensuite élargir avec l’ensemble des opérateurs », poursuit-il. Harmoniser la billettique est une nécessité, souligne Didier Cazelles qui invite les opérateurs travaillant sur un même réseau à réaliser un travail de coordination pour y parvenir. L’objectif commun, rappelle-t-il, est de reconquérir les 10 % de clients qui ne sont toujours pas revenus à bord du transport public du fait de la crise sanitaire.

Pour y parvenir, il faut, poursuit-il, faciliter le parcours client, mettre au point des standards de service plus exigeants et personnaliser davantage les voyages. La gestion des données le rend possible. A la Région de l’organiser.

 » L’OBJECTIF EST D’OFFRIR PLUS DE QUALITÉ, DE FLUIDITÉ ET UNE TOTALE TRANSPARENCE À L’USAGER  » Claude Steinmetz

Observant l’ouverture à la concurrence des TER en France, Didier Cazelles voit émerger des modèles différents : « Une région a choisi un modèle d’exploitation en infra, une autre attribue le matériel et confie l’exploitation, la régénération des voies et des gares et une troisième a préféré retenir une logique mixte. »

Pour dégager de la valeur, il préconise de faire émerger un modèle industriel standard. Acheter un matériel en plus grande quantité permettrait aux Régions, comme aux opérateurs, de gagner sur les prix d’achat. Une préconisation qui semble être entendue dans les appels d’offres routiers, où les exigences de standard de service se renforcent. « Le métier se transforme. On passe de l’artisanat à des process. Ce qui ne nous empêche pas de jouer un rôle de conseil, ni de partager des innovations », rapporte le directeur de Keolis.

Pour Jean-Aimé Mougenot la standardisation est aussi amorcée dans le ferroviaire avec le marché Régiolis, une rame automotrice construite par Alstom déclinable en plusieurs versions que les autorités organisatrices peuvent personnaliser. « C’est un marché de trois milliards qui va concerner des centaines de matériel encore en cours de livraison », détaille-t-il, avant d’ajouter que l’on peut aussi espérer faire des économies en travaillant sur des innovations plus frugales, avec du matériel ferroviaire hyper léger et moins cher, pour raccorder le fer aux transports en commun sur des lignes à faible densité.

Harmoniser en prenant en compte les spécificités de chaque région

Michel Neugnot, le vice-président chargé des mobilités en Bourgogne-Franche-Comté, estime en revanche que vouloir avoir un système unique dans le cadre de l’ouverture à la concurrence serait une erreur, car chaque Région a sa spécificité, son histoire, son réseau. A ceux qui s’inquiètent de l’arrivée de nouveaux opérateurs, il rappelle qu’il y a déjà une multiplicité de trains : TER, TGV, TET et du service librement organisé. Le tout étant organisé par SNCF Réseau, sans que cela ne pose de problème. C’est SNCF Réseau qui autorise la circulation sur les sillons, intervient en cas de problème et gère la reprise du trafic selon les spécificités liées au monde ferroviaire.

L’harmonisation des correspondances ne lui semble pas non plus problématique. Selon l’élu, le système fonctionne déjà entre différentes catégories de trains et avec les cars routiers. En revanche, Michel Neugnot estime qu’il faudra un jour changer les distributeurs de billets régionaux permettant l’achat de titres de transport sans réservation, qui datent de 1994 et qui n’ont pas été conçus pour prendre en compte une tarification complexe. Dans sa région, l’élu compte y pallier notamment grâce à l’achat des billets via des téléphones ou des tablettes.

 » LE MÉTIER SE TRANSFORME. ON PASSE DE L’ARTISANAT À DES PROCESS. CE QUI NE NOUS EMPÊCHE PAS DE JOUER UN RÔLE DE CONSEIL, NI DE PARTAGER DES INNOVATIONS «  Didier Cazelles

La Bourgogne-Franche-Comté a prévu d’ouvrir la totalité de son réseau à la concurrence à partir de janvier 2026. « La loi de décentralisation de 2002, qui a transféré la responsabilité des TER aux Régions, a permis de réaliser des avancées dans la gestion des trains par rapport à la situation antérieure. Cette nouvelle étape doit permettre d’améliorer encore les transports publics, en ayant cette fois une démarche qui soit multimodale. » La LOM a donné aux Régions les compétences pour l’ensemble des mobilités et la Région va se saisir de cette possibilité pour travailler en coordination avec les AO urbaines afin d’augmenter la part des transports publics et donc lutter contre le réchauffement climatique.

Pour identifier ce que chaque entreprise, y compris la SNCF, peut lui apporter, afin de proposer de nouvelles offres dès le 1er trimestre 2023, la région Bourgogne-Franche-Comté recourt au sourcing. Elle travaille aussi à l’élaboration d’un MaaS intégrant l’ensemble des acteurs. « Nous voulons proposer une offre de transport multimodale, prenant en compte le dernier km, avec un système de billettique indépendant, qui mélangera toutes les solutions, y compris le car, le covoiturage et l’autopartage et permettra de délivrer un seul et même ticket regroupant le paquet de titres de transport nécessaires au voyage de son utilisateur. Un billet payable en une seule fois, pour que les choses soient simples », détaille Michel Neugnot qui prévoit également de mettre en place des kiosques dans les gares, où seront proposé des services de type de conciergerie, blanchisserie, ventes en circuit court, livraisons de courses…

Vers une multiplication des systèmes de billettique

La région Bourgogne-Franche-Comté veut prendre en charge la billettique. « On y travaille depuis trois ans. Ce n’est pas un long fleuve tranquille, mais on va arriver à quelque chose de correct avant 1er janvier 2026 », assure Michel Neugnot qui annonce que dans sa région, on pourra prendre son billet sur Mobigo, ou via un numéro Allo billet pour les personnes n’ayant pas accès à la plateforme. Il justifie : « Il faut que chaque Région avance sur ce sujet, car si on attend le grand outil que la Fnaut réclame, il faudra patienter jusqu’à la fin du siècle. »

De son côté, Claude Steinmetz prévient : « La pire des choses serait que chaque opérateur gère sa billettique. Ce serait une régression inutile. Ce n’est pas la démarche des nouveaux entrants. On a besoin d’une SNCF forte sur ce thème et de concertation, y compris entre régions, pour parvenir à faire en sorte que l’ouverture à la concurrence soit quelque chose de simple, de positif, qui fonctionne bien, à l’instar de ce qui se fait en Suisse ou en Allemagne. »

Michel Neugnot souhaite plus d’interconnexions entre le système billettique de sa région et l’agence de voyages de la SNCF, SNCF Connect, afin que les voyageurs qui souhaitent franchir les frontières régionales, puissent le faire de façon simple, tant pour l’information que pour la réservation. Jean-Aimé Mougenot explique : « Nous travaillons déjà comme une agence de voyages. Sur le site SNCF Connect on pourra trouver un billet combinant trains, cars et TAD. Avec la profusion de possibilités de voyages, quelqu’un qui prendra un billet à un guichet en gare trouvera la continuité de son parcours au-delà du train », assure-t-il avant d’ajouter : « La somme des possibilités de voyages doit permettre de les faciliter. Et pour cela, il faut que les différents sites soient interconnectés et puissent progressivement proposer l’ensemble des prestations de chaque Région. Notre travail est de servir à tout le monde un système d’information et d’achat simplifiant les choses. Ce qui va nous demander de passer d’un système monolithe à un système modulaire. »

 » GARES & CONNEXIONS TRAVAILLE À LA MISE EN PLACE DE STANDARDS DE SIGNALÉTIQUE, D’ANNONCES, DE RITUELS D’AFFICHAGES DES TRAINS 20 MINUTES À L’AVANCE, AFIN D’APPORTER UN MÊME NIVEAU DE SERVICE À TOUTES LES GARES EN FONCTION DE LEUR TYPOLOGIE «  Eliane Barbosa

Pour le directeur TER délégué, il n’y aura pas de compétition entre SNCF Connect et les sites de MaaS que les Régions mettent en place, car l’enjeu n’est pas de se faire concurrence. Le but est de parvenir à réussir l’objectif du patron de la SNCF en doublant la part du ferroviaire en 2030. Pour faciliter les échanges d’information et l’interconnexion des sites, SNCF Voyageurs est en train d’élaborer une prise TER. « Une passerelle, une boîte logicielle sur laquelle les AO pourront se brancher sur le système d’information centrale SNCF Connect, afin de faciliter les échanges d’informations », résume Jean-Aimé Mougenot qui relativise la difficulté : « On retrouve la même problématique entre les transports régionaux et le national qu’entre les AO urbaines et le transport régional. » Il prévoit qu’à l’avenir ceux qui se déplaceront dans leur région auront le réflexe d’utiliser le MaaS local, tandis que les voyageurs venant de l’extérieur se tourneront vers SNCF Connect.

Dans la Région Sud, Transdev et la SNCF avancent sur la billettique. « SNCF assurera la distribution, mais on n’a pas encore parlé de la gestion des situations perturbées, de la modification des billets, de l’annulation, de l’ajout d’options », précise Claude Steinmetz qui prévoit de traiter tous ces thèmes avant l’ouverture à la concurrence. « On a jusqu’à juin 2025 pour trouver des solutions, ce qui compte tenu de la complexité du dossier nous laisse juste le temps, mais nous sommes sereins », affirme-t-il.

Des gares en voie de standardisation

Gares & Connexions n’est pas concernée par l’ouverture à la concurrence des TER, mais sa directrice des Opérations et des territoires, Eliane Barbosa, compte profiter de cette étape pour redynamiser les 3 000 gares qui ont été confiées à la filiale de SNCF Réseau. Il s’agit d’en faire des hubs d’échanges multimodaux et de proposer de nouveaux services aux voyageurs, de manière à les inciter à prendre davantage le train. C’est tout l’objet du programme Place de la gare.

Gares & Connexions, qui est depuis 2018 le gestionnaire unique des gares, doit en effet garantir à tous les nouveaux opérateurs le même niveau de qualité de service, de confort, d’accessibilité, de propreté, d’information voyageurs, de sécurité, mais aussi de réassurance dans les parcours de transport ferroviaire ou multitransporteurs. Les équipes d’Eliane Barbosa travaillent à la mise en place de standards de signalétique, d’annonces, des rituels d’affichages des trains 20 minutes à l’avance, afin d’apporter un même niveau de service à toutes les gares, en fonction de leur typologie, quelle que soit la région où elles se trouvent.

 » IL FAUT QUE CHAQUE RÉGION AVANCE SUR LE SUJET DE LA BILLETTIQUE, CAR SI ON ATTEND LE GRAND OUTIL QUE LA FNAUT RÉCLAME, IL FAUDRA PATIENTER JUSQU’À LA FIN DU SIÈCLE «  Michel Neugnot

La loi d’orientation des mobilités donne la possibilité aux Régions qui le souhaitent, de prendre la main sur les petites gares. Si cela arrivait, « Gares & Connexions disparaîtrait et la garantie d’homogénéité aussi », prévient la responsable de Gares et Connexions. Pour les gares régionales, le décret mono-transporteur prévoit que des gares TER puissent voir leur gestion confiée au nouvel opérateur si la région le décidait.

Mais à ce stade, aucune Région n’a choisi de le faire. « En tant que spécialiste des gares, nous souhaitons continuer à exercer notre mission pour toutes les gares, pour tous les Français, mais nous avons aussi un devoir de pédagogie et souhaitons aider les Régions à regarder là où cela pourrait être pertinent pour elles de reprendre la main, et là où nous avons tout notre rôle à jouer pour leur apporter de nouveaux services attendus par nos clients. Les contrats de performances que nous voulons signer avec les Régions doivent aussi servir à cela », précise Eliane Barbosa.

Valérie Chrzavzez-Flunkert


Les Régions légitimes pour prendre la main sur la tarification

Michel Neugnot est favorable à la liberté tarifaire dans chaque Région et ne voit pas en quoi cela peut poser problème. « Sur les TGV, il n’y a pas de prix normés », rappelle t-il tandis que Jean Pierre Serrus abonde : « Ce n’est pas un privilège pour la région qui finance le TER d’avoir la main sur les tarifs ».

Le TER est le premier budget de la Région, rappelle Jean-Luc Gibelin, le vice-président chargé des transports en Occitanie, région qui n’ouvrira pas ses lignes à la concurrence. « Dans notre région, une offre de qualité combinée à une gamme tarifaire attractive, a permis au trafic des TER de retrouver, et même dépasser, son niveau d’avant Covid », annonce l’élu. Selon lui, la mise en oeuvre d’une politique tarifaire régionale efficace permet de développer le trafic du TER. Si Claude Steinmetz juge naturel que les Régions aient la main sur l’animation tarifaire, il les encourage tout de même à réaliser un effort d’harmonisation pour simplifier la vie des usagers. «Elles pourraient, par exemple, se mettre d’accord sur les âges à partir desquels les voyageurs ont le droit à des réductions. »


Accès aux dépôts et aux matériels, deux points clé dans l’ouverture à la concurrence

La position de Transdev est connue : il faut un atelier dédié en propre pour pouvoir faire les sauts de performance attendus par la région. En Sud Paca,, Transdev travaillera avec Alstom. « Nous serons responsable de la maintenance, mais nous travaillerons avec le constructeur pour profiter de son savoir faire», précise Claude Steinmetz.

Le directeur ferroviaire de Transdev rappelle que son entreprises bénéficiera de rames neuves dans la région. Ailleurs, si elle est amenée à récupérer du matériel auprès de la SNCF, « cela supposera qu’un état des lieux et que des informations précises soient donnés pour le transfert. La transparence doit être la règle. Je suis persuadé que ce sera le cas », conclut Claude Steinmetz.


Un système billettique universel proposé aux collectivités

Née en 2012, Ubitransport est une start-up mâconnaise qui accompagne les collectivités et les opérateurs privés dans l’optimisation de leurs réseaux de transports collectifs via des solutions de paiement en ligne, de gestion dématérialisée des titres de transport et de numérisation des informations pour les voyageurs. Sébastien Hurtaux son directeur général se félicite d’avoir déjà équipé 200 réseaux de transports répartis dans 10 régions de France : «Ubitransport gère les titres de transport et favorise le partage d’informations, en temps réel, entre conducteurs, opérateurs, collectivités et usagers », précise-t-il. La solution proposée concerne les transports scolaires, interurbains, urbains et à la demande. L’entreprise qui a obtenu une levée de fonds de 45 millions en 2019, exporte désormais son savoir-faire au-delà de nos frontières.