Les fêtes de fin d’année, autour desquelles la demande en voyages pour motifs personnels est particulièrement élevée, sont-elles une période maudite pour Eurostar ? Après les rames transmanche terrassées par de la neige poudreuse en décembre 2009 et l’incendie du tunnel de janvier 2015, les deniers jours de 2023 n’ont pas été de tout repos pour les candidats au voyage par le rail entre Londres et le continent européen. Après la grève surprise le 21 décembre à Eurotunnel, c’est un incident technique survenu dans un autre tunnel qui, le 30 décembre, a non seulement bloqué quelque 30 000 voyageurs transmanche qui auraient dû prendre les 41 trains Eurostar annulés, mais a aussi entraîné un arrêt momentané des trains régionaux à grande vitesse Javelin entre la gare londonienne de Saint-Pancras et le Kent. Alors que les avions étaient complets, les voyageurs les plus pressés ont essayé de se rabattre en train ou en car vers les traversées en ferry, les autres passant la nuit à l’hôtel en attendant le redémarrage des dessertes, à moins d’annuler purement et simplement leur voyage.
Une voie ferrée noyée
Inédit, l’incident du 30 décembre est survenu sur la ligne à grande vitesse HS1 entre la gare de Saint-Pancras et la Manche, plus exactement dans le tunnel sous la Tamise, dont un des deux tubes parallèles a été envahi par plusieurs décimètres d’eau, noyant la voie ferrée. Vérification faite, plus de peur que de mal : la provenance de l’eau n’avait rien à voir avec la structure du tunnel, mais était due à la rupture d’une conduite posée sur les parois de cet ouvrage permettant à la HS1 de passer de la rive nord à la rive sud de la Tamise à l’est de Londres. Rapidement désignée responsable de cette conduite, la compagnie des eaux Thames Water a répondu qu’il s’agissait plutôt d’un tuyau alimentant le dispositif de lutte anti-incendie du tunnel…
Toujours est-il qu’un trafic Eurostar complet (mais sans trains supplémentaires) a pu reprendre le 31 décembre, l’opérateur ayant indiqué qu’« au moins un tunnel » pouvait être parcouru, avec toutefois « des restrictions de vitesse dans la matinée, ce qui pourrait entraîner des retards ». Une interruption somme toute assez limitée dans le temps… mais qu’en aurait-il été si elle avait été plus longue ? Et si les voyageurs ont droit à des indemnités de logement à l’hôtel ou de voyage de la part d’Eurostar, on pourrait se demander dans quelle mesure il ne serait pas possible d’organiser des dessertes de substitution, surtout lorsque des incidents surviennent en périodes de grands départs… Par exemple, dans le cas du 30 décembre, entre Londres et les gares internationales au sud de la Tamise (Ebbsfleet, Ashford), où les rames transmanche auraient pris le relais. Nous avons posé la question à Eurostar, qui nous a répondu que « d’un point de vue logistique, il n’est pas possible d’organiser ce genre de dispositif, les voyageurs devant être contrôlés par la douane, la PAF [Police aux frontières] et UKBF [UK Border Force] ».
P. L.