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Ewa

Les défis de SNCF Réseau selon Matthieu Chabanel

Le Club VRT s’est tenu le 29 janvier dans nos locaux de la rue de Milan, à Paris.

Nommé PDG de SNCF réseau en octobre 2022, après le départ de Luc Lallemand, Matthieu Chabanel a profité de son passage au Club VRT pour dresser un bilan positif de l’année écoulée – sur fond d’engouement pour le ferroviaire-, et évoquer ses priorités.

club chabanel janvier 2024 31 copie
Matthieu Chabanel

L’action de SNCF Réseau s’inscrit dans un contexte porteur pour le ferroviaire, a rappelé Matthieu Chabanel, qui intervenait le 29 janvier lors d’un Club VRT. « Il y a eu l’an dernier un engouement autour du train, une hausse du nombre de voyageurs, un fort taux de remplissage et SNCF Réseau est fier d’avoir contribué à cette dynamique », s’est réjoui le PDG du gestionnaire d’infrastructure. La nouvelle donne ferroviaire est aussi portée par un accroissement des moyens financiers en faveur du réseau. Le budget régénération et modernisation augmente cette année de 300 millions d’euros. Ce qui porte le total pouvant être investi à 3,2 milliards d’euros en 2024. Cette somme doit progressivement passer à 4,4 milliards par an d’ici 2027. Pour l’heure, c’est le groupe SNCF qui apporte les fonds supplémentaires à un fonds de concours.

Visibilité

Cette trajectoire donne plus de visibilité à la filière industrielle qui va pouvoir recruter et former pour être au rendez-vous, souligne Matthieu Chabanel « Comme la filière se trouve à 97 % en France, les investissements dans le système ferroviaire contribuent au dynamisme économique dans les territoires. Et le réseau dans lequel la SNCF investit est circulé par tous types de trains, dont les TER», ajoute-t-il. Le tout dans un contexte financier assaini puisque SNCF Réseau tiendra son objectif : renouer avec un cash-flow positif cette année. « Nous avons prévu un cash-flow de 2 millions d’euros pour 7 milliards de chiffre d’affaires. C’est aussi un enjeu de crédibilité : démontrer que nous tenons les objectifs financiers fixés par les pouvoirs publics et la loi», commente le dirigeant.

Fin du vieillissement

Les investissements donnent enfin des résultats visibles : SNCF Réseau a stoppé le vieillissement de la voie. Cela vaudra pour tous les composants du réseau à l’horizon 2030. « L’année dernière, nous avons pu livrer plus de 95 % des projets dans les délais », précise Matthieu Chabanel. Côté modernisation, le gestionnaire d’infrastructure prévoit, sur la ligne grande vitesse reliant Paris à Lyon, de basculer 58 postes d’aiguillages vers l’ERTMS. « Ce sera la première fois au monde qu’on le fera sur une ligne en service », souligne le PDG. Ce projet permettra d’augmenter la capacité de ligne, afin de passer de 13 trains par heure et par sens en heure de pointe aujourd’hui à 16 trains en 2030, en assurant une meilleure régularité dès 2025.

Contrat de performance : bientôt un avenant

Passer progressivement de 3,2 milliards d’euros de budget de régénération cette année à 4,4 milliards d’euros en 2027 nécessite de revoir le contrat de performance. Le précédent ministre des Transports, Clément Beaune souhaitait voir établi un nouveau projet de contrat avant la fin février. La vacance du ministère pendant quelques semaines n’a pas remis en cause le calendrier, affirme Matthieu Chabanel. SNCF Réseau travaille avec les services de l’État à la rédaction de cet avenant au contrat, qui fera ensuite l’objet d’une consultation des parties prenantes, pour une adoption espérée à l’automne 2024. Et de préciser : « On ne va pas reprendre l’intégralité du contrat de performance qui date du printemps 2022, mais rédiger un avenant prenant en compte les investissements supplémentaires de régénération, définir le rythme de la montée en charge et la manière d’investir cet argent, avec la volonté d’avoir des programmes d’investissements publiés à échéance de trois ans ».

Moins de tensions sur les recrutements

Les difficultés de recrutement en sortie de crise sanitaire ont causé des tensions dans les postes d’aiguillage. « Faute d’avoir pu recruter, nous avons sur-sollicité des agents qui l’ont vécu comme une dégradation de leur qualité de vie au travail. Cela a entrainé des mouvements sociaux. » Le problème est désormais résolu, affirme le patron de SNCF Réseau. « En 2023, nous avons pu recruter 900 aiguilleurs, qui ont été en formés, puis affectés à des postes, permettant de soulager leurs collègues et d’améliorer les conditions de travail. » Au total, SNCF Réseau a recruté l’année dernière 2700 personnes dans les métiers d’aiguilleurs, d’agents de maintenance et de travaux de la voie, de la signalisation ferroviaire ou encore les métiers de l’ingénierie. « Le marché a été moins tendu en 2023 que l’année précédente. Nous avons regagné en attractivité. » Pour l’entreprise, le mot d’ordre, c’est recruter, former, fidéliser.  Un domaine reste particulièrement compliqué : trouver des candidats pour des postes liés à l’électricité car la concurrence avec d’autres secteurs d’activités est forte. Et parce que ces postes demandent des prérequis, ce qui n’est pas le cas pour les travaux sur voie par exemple.

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SNCF Réseau va accompagner les collectivités qui souhaitent un RER métropolitain. Ici la gare Saint-Jean (agrandie par Arep), au cœur du projet de Serm de Bordeaux.

Eole a rendez-vous avec les JO

Pour les professionnels du transport, les Jeux olympiques et paralympiques représentent un rendez-vous essentiel qu’il ne faudra pas rater. L’enjeu, pour SNCF Réseau, passe notamment par la première phase de mise en service du prolongement d’Eole jusqu’à Nanterre, prévue pour le printemps. Soit huit kilomètres de tunnels et trois nouvelles gares (Porte-Maillot, La Défense et Nanterre-la-Folie). Le prolongement de la ligne jusqu’à Mantes-La-Jolie (Yvelines) se fera plus tard, en 2026.

RER métropolitains, mode d’emploi

Promulguée fin 2023, la loi SERM a posé le cadre du développement, d’ici dix ans, d’un réseau de RER métropolitains dans dix grandes agglomérations (voire plus). Elle a suscité une énorme attente chez les élus. « Il y avait déjà des expériences de RER métropolitains, comme le Léman Express, qui relie la Haute-Savoie au canton de Genève, mais la loi a généré une nouvelle dynamique. De nombreuses collectivités se montrent intéressées et montent des projets. Nous les accompagnons avec Gares & Connexions », souligne Matthieu Chabanel. Reste maintenant à labelliser les projets et à définir les financements. SNCF Réseau veillera à la compatibilité, sur le réseau, de l’ensemble des trafics. Le gestionnaire historique devra composer avec la Société des Grands Projets (jusqu’alors appelée Société du Grand Paris) en fonction de la teneur des projets. Pour résumer, la loi précise que la SGP sera maître d’œuvre pour les constructions de nouvelles voies ferrées. Et ne pourra donc pas intervenir sur le réseau existant et circulé, territoire exclusif de SNCF Réseau. « Tout le monde a bien compris que les travaux sur les infrastructures existantes doivent être réalisés par SNCF Réseau pour des raisons de sécurité », explique Matthieu Chabanel, qui se réjouit du rôle dévolu à la SGP. « Il aurait été dommage de se priver des capacités d’une société qui a fait ses preuves et dispose de beaucoup d’ingénieurs. Nous sommes animés par la même volonté de faire des SERM un succès. J’ai une grande confiance sur notre capacité collective de mener à bien ces projets. »

Nouveaux clients

Pour développer son activité, SNCF Réseau a intérêt à accueillir de nouveaux opérateurs. Le groupe a ainsi accordé des sillons à la compagnie italienne Trenitalia en 2021, puis à l’espagnole Renfe en 2023. Demain, il pourrait voir arriver d’autres entreprises, comme Kevin Speed (qui veut lancer un train à grande vitesse omnibus) ou Le Train (qui voudrait notamment se lancer sur Bordeaux-Nantes).  L’ouverture à la concurrence dans les TER va aussi instaurer de nouvelles relations avec le transporteur SNCF qui sera obligé à chaque fois qu’il remportera des appels d’offres de créer une filiale dédiée pour exploiter les TER qu’il gagnera. Cela implique une transformation culturelle. « Nous devons instaurer des modes de relations différents avec les opérateurs, transformer nos manières de faire, mettre en place des relations renouvelées », résume le dirigeant.

Hausse des péages : le rattrapage

La forte augmentation des péages ferroviaires prévue en 2024 et les années suivantes fait l’objet de critiques et de contestations de la part d’élus et d’opérateurs. Plaidant pour un débat dépassionné, Matthieu Chabanel rappelle qu’entre 2021 et 2023, les péages n’ont augmenté que de 5 % , alors que l’inflation était de 14 % . La hausse prévue pour 2024-2026, est donc un rattrapage. « Pour investir, nos deux seules sources de revenus sont les péages et les subventions. Nous faisons aussi évoluer les péages pour les rendre plus incitatifs », souligne-t-il. C’est ainsi que, pour encourager le maillage du territoire, le péage pour un TGV Paris-Arras, est moins cher que celui d’un Paris-Lille, alors que ces trains utilisent la même ligne. Ou que, pour le TER, SNCF Réseau a mis en place un forfait, puis un péage au train, de manière à inciter au développement du trafic. Des modulations des péages sont aussi instaurées avec des tarifs moins chers aux heures creuses ou sur les lignes de desserte fine du territoire. En France, les péages prélevés vont à l’entretien et la rénovation du réseau structurant, c’est un choix politique, le montant de ceux-ci est un arbitrage entre ce que doit supporter l’usager et ce qui revient au contribuable, rappelle encore le dirigeant. Le péage représente ainsi 40 % du prix du billet d’un TGV et 20 % de celui d’un TER

Optimisme pour le fret

Côté fret, après deux belles années post covid, 2023 a été plus difficile, marqué notamment par les grèves contre les retraites, les hausses d’électricité et l’éboulement en Maurienne qui a coupé la principale liaison ferrée transalpine. Mais le secteur du fret se montre encore dynamique, estime Matthieu Chabanel. « En 2023, nous avons accueilli un nouveau client chaque mois », indique-t-il. D’ici la fin 2024, Fret SNCF va disparaître pour renaître en 2025 sous une autre forme et avec une activité amoindrie. Ce qui augure encore d’une année compliquée. Sur le long terme, Matthieu Chabanel fait preuve d’optimisme, convaincu que dans le contexte actuel, « le fret ferroviaire a un réel avenir en Europe. »  Les investissements dans le fret ferroviaire ont été multipliés par quatre par rapport à l’avant Covid, notamment dans le cadre des contrats de plan État-Région qui intègrent des volets fret. Le tout soutenu par la filière réunie dans l’Alliance 4F, qui parle d’une même voix pour définir les projets prioritaires. Et vise le doublement de la part de marché du fret d’ici 2030.

Quelques améliorations sont déjà perceptibles : en septembre 88,8 % des sillons de fret ont obtenu une réponse positive, soit 15 points de plus qu’il y a 10 ans. L’entreprise progresse chaque année, assure le PDG, visant les 90 % atteints dans le transport de voyageurs. Autre bonne nouvelle : pour la première fois l’an dernier, SNCF Réseau a moins fait bouger ses sillons que les entreprises ferroviaires. Reste toutefois toujours un point de vigilance : l’augmentation des travaux doit conduire SNCF Réseau à trouver un équilibre entre trains de jour, trains de nuit et travaux. Les arbitrages se font parfois (même si c’est rare) au bénéfice du fret, avec des travaux de jour, comme cela a été le cas sur la ligne Paris-Dijon, afin d’éviter une bascule massive des marchandises sur la route.

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Renouvellement d’appareils de voies à Reims le 12 septembre 2020.

La résilience face au dérèglement climatique

En plus des éboulements de terrain, les inondations en Hauts-de-France et des canicules précoces ou tardives ont aussi marqué 2023. « Le rythme des conséquences du changement climatique s’accélère et pose la question de la résilience du réseau », rappelle Matthieu Chabanel. Développer le transport ferroviaire est positif pour la planète, mais n’exonère pas de réduire l’impact environnemental de l’entreprise, poursuit-il. Parmi les actions mises en place, le recyclage permet de revaloriser 100 % du ballast, dont 45 % est réutilisé directement sur les voies ferrées. Une filière de rails verts, qui permet de les refondre, réduit de 70 % l’impact carbone sur les achats. Matthieu Chabanel veut étendre cette politique à l’ensemble des composants ferroviaires. Pour mieux se préparer aux aléas climatiques, l’entreprise a réalisé une cartographie des risques et vulnérabilités du réseau. La forte chaleur sur les rails ne devrait pas être un problème compliqué à gérer, estime le patron de SNCF Réseau, en citant la Mauritanie, soumise à des températures élevées, et qui utilise des rails comparables aux nôtres. En revanche, les composants électroniques n’ont pas été conçus pour subir de fortes chaleurs. Le renouvellement du réseau est l’occasion de l’équiper avec des composants plus modernes et robustes, permettant de gagner en résilience. Des actions peuvent aussi être entreprises sans attendre. Ainsi, pour protéger ses installations contre les canicules, SNCF Réseau a repeint en blanc des guérites en Nouvelle-Aquitaine, ce qui lui a permis de gagner jusqu’à six degrés.
Les investissements ne sont donc pas forcément lourds à réaliser.

L’entreprise doit aussi se préparer au dérèglement des systèmes hydrauliques, à l’origine d’évènements extrêmes plus fréquents, et aux conséquences des retraits-gonflements d’argile, car l’intégralité du réseau se situe dans des sols argileux. « Renouveler le réseau est une première étape pour être plus résilient, car tous les investissements de modernisation réalisés sont utiles en matière de résilience », indique Matthieu Chabanel. « Quand on change de composants, quand on renouvelle les caténaires, c’est déjà une façon de s’adapter aux changements climatiques. Plus un réseau est récent, plus il est résilient. » Le PDG de SNCF Réseau estime que le secteur devra réfléchir à ce que seront les déplacements dans un monde à plus 4 degrés. Et il conclut : « Notre but c’est d’assurer le service le plus élevé possible en tout temps, en tous lieux, tout en veillant prioritairement à la sécurité des voyageurs. Mais je n’ai pas d’état d’âme à imaginer une restriction de circulation en cas d’alerte rouge, comme c’est le cas aujourd’hui sur les routes. Mieux vaut ne pas laisser partir un train que de laisser des voyageurs bloqués sur des voies pendant des heures… »

Valérie Chrzavzez