Je me connecte

E-mail*
Mot de passe*

> Mot de passe oublié?

Je m'inscris

*Champs obligatoires

Conformément à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée en 2004, vous bénéficiez d’un droit d’accès et de rectification aux informations qui vous concernent.
1. Mon Compte
2. Mes activités
3. Mes Newsletters

Vous devez lire et accepter nos conditions générales de vente et d’utilisation *

* Mentions obligatoires

Je souhaite recevoir la newsletter :

Je m'enregistre

Mot de passe oublié ?

Ewa

Laurent Probst : « Avec l’ouverture à la concurrence des bus Optile, Ile-de-France Mobilités a mis de l’ordre dans les marges des opérateurs »

probst

Alors qu’une nouvelle réunion était prévue le 23 janvier avec la médiatrice pour tenter de trouver une issue au long conflit des chauffeurs de bus de l’agglomération de Cergy, Laurent Probst revient sur les objectifs de la mise en compétition des bus Optile. Le directeur général d’Ile-de-France Mobilités estime que l’ouverture à la concurrence a permis de faire passer à 99 % le niveau d’offre des bus en grande et moyenne couronne francilienne (par rapport à la demande d’IDFM). 

 

Ville, Rail & Transports. Malgré la décision d’IDFM de rehausser le critère social dans ses appels d’offres, le conflit des conducteurs de Cergy, lancé en décembre, montre la poursuite de tensions lors de changements d’opérateurs. Avez-vous été assez loin dans la protection des acquis sociaux ?

Laurent Probst. Ce n’est pas le rôle de l’autorité organisatrice de s’occuper du dialogue social dans l’entreprise. Le cadre social est défini par des accords de branches entre l’UTPF et les organisations syndicales. Nous n’avons pas à y interférer.

Lorsqu’il y a eu des conflits sociaux suite aux premières attributions de contrats en 2021, nous avons toutefois constaté que les options sociales décidées par Transdev étaient sans doute un peu trop fortes. A sa décharge, l’entreprise avait obtenu un accord social avec des syndicats. Mais cela n’a pas suffi pour avoir celui des conducteurs.

Nous avons alors confié une mission à Jean-Paul Bailly (ancien patron de la RATP, ndlr), et Jean Grosset (ancien questeur du CESE, ndlr). Et mis en place, sur leurs conseils, un cahier des exigences sociales. Depuis 2021, tous les cahiers des charges s’appuient sur ces exigences. Depuis, nous n’avions pas eu de conflit dans le cadre des délégations de service public.

Les candidats en lice pour exploiter le réseau de l’agglomération de Cergy préservaient tous les conditions de travail des salariés en place et leurs salaires. Le contrat a finalement été gagné par le groupe Lacroix & Savac via sa filiale Francilité Seine et Oise. Il n’était pas le moins-disant.

De plus Lacroix & Savac était déjà présent dans un des deux dépôts du réseau : à Saint-Ouen-L’Aumône, qui était jusqu’alors géré par sa filiale la Stivo. Tandis que le dépôt de Conflans était alors géré par Transdev.

Enfin, c’est le septième réseau gagné par ce groupe qui n’a pas rencontré de difficultés sociales sur les autres contrats.

Les critères sociaux fonctionnent et permettent de garantir les conditions de travail et de rémunérations. Mais si un syndicat demande plus, c’est son droit.

VRT. Les premiers contrats attribués dans le cadre de la mise en concurrence des bus Optile arrivent à échéance. Quel bilan tirez-vous ?

L.P. Le bilan est globalement satisfaisant même si les contrats ont été « pollués » par une pénurie de conducteurs de 2021 à 2023, période post-covid.

Nous avons profité de la mise en concurrence pour améliorer les dessertes en les regroupant, en passant de 130 réseaux à 36. Nous avons fait le point sur les axes peu empruntés et augmenté l’offre de 10 à 20 % sur les lignes très fréquentées. Ce qui a parfois permis d’accroître considérablement la fréquentation.

Il y avait de nombreux réseaux qui ne fonctionnaient pas bien et nous avons pu les remettre à niveau. Ainsi, en 2024, l’offre produite atteint 99 %. Ce qui représente un vrai progrès. Le taux de régularité s’élève à 90 % en grande couronne, alors qu’il tournait autour de 86 ou 87 % auparavant. Nous constatons donc une amélioration globale de la situation avec 36 réseaux de bonne taille au standard francilien.

VRT. Ouvrir à la concurrence prend du temps et a un coût. Avez-vous cherché à le comptabiliser ?

L. P. Il n’y a pas de surcoût lié à la concurrence. Par exemple, quand nous négocions des contrats de gré à gré, nous recourons à des consultants externes. Il en est de même dans le cadre de la concurrence.

Jusqu’à présent les opérateurs de bus étaient propriétaires de leurs matériels roulants et des dépôts. IDFM payait un loyer pour les deux et ne maîtrisait pas l’outil de production. Nous sommes en train de devenir propriétaires en rachetant les matériels et les dépôts. Être locataire sur le long terme coûte plus cher qu’être propriétaire.

Désormais, nous n’allons plus payer de loyers et donc arrêter de payer les commissions prises par les opérateurs dans le cadre de ces loyers.

Enfin, regrouper les réseaux a permis une rationalisation, une suppression des doublons et donc une baisse des coûts de fonctionnement.

Par ailleurs, les économies ne se font pas sur les salaires des agents puisque nous préservons leurs conditions de travail et leurs rémunérations. Mais elles se font sur les marges des opérateurs : il y avait des contrats avec des marges importantes, d’autres qui l’étaient moins. Nous y avons mis de l’ordre. Aujourd’hui les taux de marges fluctuent en moyenne entre 2 et 4 % en fonction des réseaux.

Ces économies permettent d’investir et de mettre le paquet sur la flotte et sur l’augmentation de l’offre de transport. Le nombre de kilomètres commerciaux a ainsi sensiblement progressé.

VRT. Malgré les avenants prévus dans les contrats pour prendre en compte la hausse des coûts plus importante que prévu (inflation, énergie…), des opérateurs affirment que leurs contrats restent déficitaires. Que leur répondez-vous? 

L.P. Les candidats ont remis des offres pour gagner des lots. Indéniablement, ils ont rencontré une situation imprévue avec la guerre en Ukraine, les coûts de l’énergie, les hausses de salaires consenties aux conducteurs suite à l’inflation…

Il nous a semblé juridiquement possible de revoir l’indexation des salaires sur l’inflation et sur la hausse des prix de l’énergie. Et de l’indemniser.

Le reste n’est pas dû à une situation imprévisible. Si certains opérateurs ont présenté des offres trop agressives, il est trop facile, après, de réclamer de l’argent. L’indemniser serait illégal. Ce n’est pas à l’autorité organisatrice de sauver l’opérateur. Elle ne peut compenser que ce qui était imprévisible.

IDFM a donc été au rendez-vous. Et malgré les difficultés financières du pays, IDFM sera là pour développer l’offre en Île-de-France. On peut le constater en regardant le budget 2025 en hausse par rapport à 2024 : le budget des coûts de fonctionnement des DSP bus (hors contrats SNCF et RATP) va atteindre 1,265 milliard cette année contre 1,159 milliard l’année dernière.

Propos recueillis par Marie-Hélène Poingt

Ewa

Les nouveaux enjeux pour IDFM selon Laurent Probst

Laurent Probst, directeur général d'Ile-de-France Mobilités

Disposer du réseau de transport public le plus développé et le plus performant du monde à l’horizon 2030-2033. C’est l’objectif affiché par Laurent Probst, le directeur général d’Ile-de-France Mobilités, qui était l’invité du Club VRT le 16 mai. D’ici là, le Grand Paris Express devrait permettre ajouter 200 km de métro automatique pour desservir la région capitale.

Avec les extensions des liaisons RER et les 13 lignes de tramway attendues, l’Ile-de-France pourra y parvenir, assure le dirigeant, pour qui « il ne faut pas hésiter sur les investissements » à consentir, afin de répondre aux enjeux du changement climatique mais aussi de l’économie. 

« Le système de transport peut être considéré comme le système sanguin de l’économie de la région parisienne. Nous sommes dans la région la plus dynamique d’Europe et ce dynamisme doit absolument s’accompagner d’une augmentation de l’offre de transport », souligne-t-il. En effet, le nombre de voyageurs en transport en commun sera dans quelques années équivalent à celui des automobilistes. « La région compte 9 millions de voyageurs sur le réseau de transport en commun par jour et 14 millions sur la route. Les courbes vont se rapprocher », indique-t-il. 

Le télétravail a certes légèrement amoindri la croissance du trafic, tout comme la « télé-consommation » de loisirs de type Netflix ou la livraison de courses par Amazon. « Entre 5 à 6 % de la baisse vient du télétravail, et 4 % d’emplois en moins», ajoute le dirigeant. Le réchauffement climatique va accentuer la pression sur les transports en commun. 

Nouveaux financements

Reste à trouver les financements. Le début de l’exploitation du métro automatique du Grand Paris Express va coûter dès la première année 800 millions d’euros supplémentaires. Pour le financer, Valérie Pécresse attend des réponses de l’Etat. « Notre budget augmente de 5 à 10 % par an environ », rappelle le directeur général d’IDFM.

Parmi les solutions envisagées, la hausse des tarifs. C’est ce qui a été fait en ce début d’année (+ 11,8 % pour le prix du pass Navigo mensuel). « Mais il y a des limites car nous ne souhaitons pas instaurer des tarifs aussi élevés que Londres. D’autant que ce n’est pas bon pour le développement économique », affirme le dirigeant.

Les Assises du transport public, qui se sont tenues en début d’année 2023, ont permis de poser les enjeux. Valérie Pécresse a réitéré sa demande à l’État d’obtenir la liberté d’augmenter le versement mobilité. Sans succès pour le moment. La présidente de l’Ile-de-France souhaiterait aussi que les touristes contribuent davantage aux recettes des transports publics alors qu’ils ne supportent actuellement qu’un tiers du coût, le reste étant pris en charge par le versement mobilité (à hauteur de 50 %) et les contributions des collectivités (15 %). Elle souhaiterait pouvoir accroître la taxe de séjour, qui est de quelque 5 euros par nuit actuellement, alors qu’elle tourne autour de 20 euros dans d’autres capitales européennes.

 « Nous voudrions cibler les acteurs qui bénéficient le plus de l’amélioration des transports, pas uniquement les entreprises situées à proximité des gares. Mais aussi par exemple les sociétés de transport et logistique qui vont bénéficier de plus de place sur la route. Ou les propriétaires qui voient le prix de leurs biens immobiliers grimper grâce à la prochaine arrivée des lignes du Grand Paris Express », indique Laurent Probst. Et de citer le cas du réseau de Tokyo, où les entreprises de transport sont propriétaires de l’infrastructure autour des gares. « Là-bas, la rente immobilière permet le financement des constructions et de l’exploitation des lignes».

En attendant, les perspectives ne sont pas réjouissantes. « On estime qu’il manquera 2,5 milliards d’euros d’ici 2031 », calcule Laurent Probst. La loi de 2010 relatif au développement du Grand Paris Express n’a pas prévu le financement de l’exploitation. Par la suite, un courrier en février 2020 d’Édouard Philippe, alors Premier ministre, a reconnu la nécessité de recettes nouvelles. Il y a désormais urgence car le projet de loi de finances est attendu à l’automne…

infrastructures vieillissantes

Laurent Probst tire aussi la sonnette d’alarme sur la situation de SNCF Réseau, qui peine à assurer la maintenance et le renouvellement des infrastructures. « Aujourd’hui le contrat de performance du réseau est très mauvais. Dans l’une des plus riches régions du monde, il n’est pas normal que plus de la moitié des aiguillages s’opèrent encore à la main et ne soient pas numérisés, sans oublier que des caténaires ont plus de 100 ans », s’exclame-t-il. « Nous sommes en train de nous rendre compte que les 800 millions d’euros que SNCF Réseau met chaque année pour le renouvellement doivent devenir pérennes car cette somme arrive à peine à maintenir l’âge moyen des équipements. Si on veut rajeunir le réseau, il faudrait investir davantage ».

D’où sa crainte que SNCF Réseau ne se retrouve dans la situation d’EDF impuissante à faire fonctionner toutes ses centrales nucléaires faute d’avoir investi à temps. « Si nous ne trouvons pas de solutions, nous serons contraints de supprimer des circulations de trains dans cinq ans car les rails ne tiendront plus. Il faut prendre cette décision maintenant et c’est même déjà un peu tard …», prévient-il.

IDFM est en discussion avec SNCF Réseau, qui souhaite augmenter « très fortement » les péages, bien que leur niveau soient déjà parmi les plus élevés d’Europe. « D’autres pays agissent différemment, sans tout faire peser sur les péages. Il n’y a pas de miracle, cela passe par des subventions d’État, ou des taxes affectées », souligne-t-il.

Les investissements doivent se poursuivre à tous les niveaux. Depuis 2016, l’objectif d’IDFM consiste à développer les transports en commun aux endroits qui en ont le plus besoin,
en commençant par cibler les villes au-delà du périphérique : « Paris bénéficie déjà de transports performants avec des stations de métro tous les 500 mètres », rappelle le dirigeant.

« D’ici 2030, toutes les lignes franciliennes de trains et de RER auront bénéficié du renouvellement de leur matériel roulant, pour un investissement d’environ 10 milliards d’euros. Il a aussi fallu investir dans les ateliers SNCF et RATP, pour environ 1 à 2 milliards, ainsi que dans les systèmes et la signalisation, avec une prise en charge essentiellement par SNCF Réseau».

Cette politique fait déjà sentir ses effets. « De plus en plus d’habitants en zone périphérique ont accès aux transports publics avec une très bonne fréquence, comme pour la Ligne L qui dessert Paris depuis Versailles, avec une régularité de 94 %, du matériel roulant neuf, climatisé et sans bruit. Les Versaillais n’ont plus de raison de prendre leur voiture pour arriver à Paris », affirme le directeur général. Un système de rabattement est aussi mis en place « avec un réseau de bus performant, de l’information voyageur et des parkings relais et parkings vélos pour les habitants situés à 3-4 km des gares ».

En grande couronne, un effort « sans précédent » a porté sur les bus. « Nous avons clairement rattrapé le niveau du système de bus très performant de Londres, en commandant 1 000 bus supplémentaires en cinq ans, avec désormais 10 500 véhicules, soit la plus grande flotte de bus au monde après São Paulo ». Selon Laurent Probst, l’offre bus s’est accrue de 15 % en grande couronne, avec une demande de trafic supplémentaire en hausse de 20 %.

Comme un retour de balancier, l’accent est désormais placé sur le mass transit et le réseau de métro jugé « vieillissant ». Jusqu’en 2035, le matériel roulant sera renouvelé sur toutes les lignes et les systèmes automatisés gagneront du terrain.

Le défi des JO

Les Jeux olympiques et paralympiques représentent un autre défi en raison de l’engagement de transporter 100 % du public en transport en commun. « Aujourd’hui la part des visiteurs qui vont au stade de France en transport public est de 70 %, les autres spectateurs arrivent en voiture, souvent de banlieue, en se garant de manière anarchique à un ou deux kilomètres du stade. Pendant les JO, ce ne sera plus possible ».

IDFM va donc bâtir une offre de transport spécifique qui devra fonctionner dès le premier jour, avec un bon dimensionnement pour ne laisser personne sur les quais. La desserte des sites en dehors de Paris (et de Saint-Denis) se fera grâce à un service de bus à haute capacité. La tâche est ardue. « Il faut disposer de gares routières, prévoir où l’on parquera les bus et disposer des véhicules et des conducteurs nécessaires », prévient Laurent Probst.

De plus, IDFM va gérer un service de 1000 bus entièrement dédié aux transport des personnes accréditées. Un service de transport réservé aux personnes handicapées est aussi prévu. « On connaît précisément le nombre de spectateurs handicapés qui ont réservé des places habilitées. Il y a ainsi 500 places (sur 80 600 places au total, ndlr) qui leur sont réservées au Stade de France. Et seuls deux ascenseurs permettent de les y déposer », rappelle le dirigeant d’IDFM. D’où l’idée d’organiser des navettes dédiées entre les grandes gares parisiennes, et la station de métro Rosa Parks, et les sites de JO. Une flotte de taxis adaptés et en plus grand nombre doit aussi être proposée.

Restent plusieurs incertitudes, à commencer par le recrutement de personnel, devenu une problématique pour de nombreux secteurs. « Nous avons besoin de toutes les forces franciliennes et de France pour les JO. La SNCF a l’avantage de pouvoir faire venir des conducteurs en dehors du réseau francilien. Les réseaux de bus pourront faire venir des conducteurs d’autres réseaux de manière à recruter le moins possible. Pour sa part, la RATP devra surtout compter sur ses forces existantes (car le recrutement reste difficile), ce qui passera par des négociations avec les collaborateurs actuels pour qu’ils acceptent de travailler pendant cette période ».

Si la plupart des Franciliens seront en vacances pendant la période des Jeux olympiques, il n’en sera pas de même pour les Jeux paralympiques : la deuxième semaine correspond à la rentrée scolaire. « Cela va générer des problèmes importants car les Franciliens vont rentrer et il y aura encore beaucoup de spectateurs », reconnaît Laurent Probst. « Nous devrons recourir à ce qu’on appelle le TDM, le Travel Demand Management, mis en place par la ville de Londres pendant ses Jeux ». Traduction : cela consiste à dire aux Parisiens de rester chez eux ! Faute de quoi, le risque d’engorgement dans les transports publics ou les routes est majeur. D’où la nécessité d’un important travail de communication et de sensibilisation auprès des employeurs, des hôpitaux, des écoles et des commerçants situés près des sites olympiques.

Autre question : pourra-t-on compter sur l’arrivée des nouveaux trains RER NG sur la ligne Eole lors des JO ? Laurent Probst répond que les premiers essais démarreront à l’autonome 2023, avec un fonctionnement au printemps 2024 et un service probablement réduit pendant l’été 2024. « Nous sommes en discussion avec la SNCF, qui devra nous indiquer, d’ici notre prochain conseil ce qu’elle pourra proposer en termes de capacité. Cela dépendra de ses équipements, des nouveaux trains comme des tunnels ou de la fiabilité du système d’exploitation ». Parmi les hypothèses, la SNCF table sur quatre trains en heures creuses mais aucun aux heures de pointe… 

Ouverture à la concurrence

Dernière ombre au tableau, IDFM devra également composer avec la menace de grève brandie par les syndicats hostiles à l’ouverture à la concurrence des lignes de bus RATP, prévue le 1er janvier 2025. « Je ne pense pas qu’il faille repousser à tout prix l’ouverture à la concurrence par crainte des grèves, car cela consiste à reculer pour mieux sauter, affirme Laurent Probst.  Je peux comprendre qu’un collaborateur de la RATP ait peur de la mise en concurrence, mais il s’agit de le convaincre et de le rassurer. Jean-Paul Bailly, ancien PDG de la Poste et de la RATP, a été missionné pour réfléchir aux conditions sociales, comme il l’a fait pour les bus Optile en grande couronne, où la situation s’est apaisée depuis son arrivée ».

Le directeur général d’IDFM insiste : il n’y aura aucune suppression d’emplois et les conditions de travail et les salaires seront préservés. Reste une ambiguïté à clarifier, celle de l’affectation des conducteurs à leurs lignes de bus. « Le réseau RATP hérite d’un plan datant de 70 ans et certaines lignes vont devoir changer de dépôts pour être plus efficaces. Or le décret actuel stipule qu’un conducteur reste attaché à sa ligne, et que si la ligne change de dépôt, le conducteur doit changer. Il faut absolument changer cette règle pour donner la garantie que les conducteurs puissent rester dans leur dépôt de bus. Jean Castex, l’actuel PDG de la RATP, est tout à fait d’accord sur ce point », explique-t-il.

Tout en maintenant le calendrier d’ouverture à la concurrence décidé par la loi pour les bus parisiens, IDFM pourrait s’inspirer de la démarche mise en œuvre pour les bus en grande couronne qui a été très progressive : en trois ans 31 contrats ont été attribués, 21 ont été lancés au fil du temps, et il en reste encore six à attribuer. Jean-Paul Bailly est chargé de faire des propositions. « En fonction de ses conclusions, nous pourrons donner un calendrier précis sur l’arrivée de nouveaux opérateurs ».

Selon Laurent Probst, la RATP devrait rester l’opérateur majoritaire, comme Transdev l’est resté en grande couronne malgré la compétition en œuvre.

Côté fer, le nouvel opérateur de la ligne T4-T11 sera annoncé en fin d’année 2023, « conformément au calendrier ». En 2024, ce sera au tour de la ligne T12-T13, puis de la ligne L en 2025.

Interrogé sur la politique d’IDFM en matière d’innovation, Laurent Probst rappelle que l’autorité organisatrice préfère les solutions déjà éprouvées. Raison pour laquelle les véhicules autonomes n’ont jamais été intégrés au réseau. De même, IDFM se montre assez circonspect sur les bus roulant à l’hydrogène « Nous avons essayé avec sept bus à hydrogène sur le réseau de Versailles. Le problème, c’est qu’ils fonctionnent mal avec un taux de disponibilité entre 50 et 80 % ». Un taux jugé insuffisant pour l’exploitation d’un réseau, alors que les autres bus, électriques, biogaz ou diesel, affichent des taux de disponibilité tournant autour de 95 à 96 %.

Dans son plan Bus 2025 qui consiste à disposer de bus « propres », IDFM a renforcé la part des bus fonctionnant au gaz. « Lors du renouvellement de la flotte de bus, nous avions le choix entre les technologies électriques et biogaz, cette dernière présentant plus de particules à l’échappement. Si IDFM s’était tourné entièrement vers la solution électrique, nous aurions bien évidemment acheté des bus français auprès de constructeurs comme Heuliez, Boloré ou Alstom, mais une partie des achats aurait été également effectuée auprès de constructeurs européens, et sans doute chinois. Les pays nordiques n’achètent pratiquement que des bus électriques chinois. Par ailleurs, l’avenir de l’usine d’Annonay d’Iveco – qui produit des bus GNV – aurait été menacé, car IDFM lui achète la moitié de sa production ». IDFM a donc choisi d’investir « massivement » sur le biogaz, avec des bus produits en France par Iveco, ainsi que par Heuliez, Bolloré et un peu Alstom pour l’électrique. 

Un choix qui peut se justifier également d’un point vue écologique, car le bilan des bus biogaz est meilleur que celui des bus électriques lorsque l’on étudie l’ensemble du cycle de vie, en intégrant la construction, le recyclage des batteries et le recours à des matériaux rares, insiste Laurent Probst.

Attentes des usagers

Face aux critiques des associations de voyageurs, qui rappellent qu’il y a encore 150 lignes de bus « en offre de petites vacances scolaires », Laurent Probst assure mettre « en place de nouvelles lignes partout où nous observons des bus surchargés, ou si nous décelons de nouveaux besoins». Il fait toutefois une distinction entre la grande couronne d’une part et Paris et sa proche banlieue d’autre part. « En grande couronne, les réseaux continuent de se développer, les fréquentations sont assez fortes, entre 95 et 100 % selon les réseaux, et sont soutenues par les élus. L’offre s’est accrue par rapport à 2019, avec des initiatives comme le TAD et la volonté de créer des lignes express ».

La situation parisienne est différente. Le renouvellement du matériel n’a pas permis de redorer l’image du bus. De plus, la RATP a particulièrement souffert d’un manque de conducteurs – même si cela s’améliore –, pour différentes raisons. « La première tient au management. Il y a eu des problèmes lors de la présentation de l’accord social proposée par l’ancienne présidente de la RATP Catherine Guillouard. La situation s’est améliorée depuis l’arrivée de Jean Castex, qui a réussi à obtenir cet accord social. La seconde raison tient au fait qu’il y a moins de conducteurs de bus qui habitent à Paris. Leur temps de transport sont plus élevés pour rejoindre les dépôts ». Enfin, ajoute-t-il, Paris et quelques communes limitrophes ne donnent pas la priorité aux bus. « Certains élus écologistes parisiens imaginent supprimer des bus pour mettre des minibus à la place. Pourtant, de nombreux utilisateurs ne peuvent se déplacer autrement. De plus, le réseau de métro ne supporterait pas la charge si l’on supprimait les bus », explique-t-il.

Pour améliorer la circulation des bus dans Paris, il propose de recourir à un système de régulation des feux rouges intelligents, « comme toutes les grandes villes dans le monde ». Moyennant un budget d’investissement de 150 millions d’euros, la circulation des bus pourrait s’en trouver grandement améliorée, considère-t-il. Seul problème, cette solution semble avoir peu d’échos à la mairie de Paris pour le moment.

Grégoire Hamon

Ewa

IDFM se donne l’ambition d’avoir le réseau de transport le plus performant du monde dans dix ans

Laurent Probst, directeur général d'Ile-de-France Mobilités

Invité ce matin du Club VRT, Laurent Probst a indiqué qu’Ile-de-France Mobilités (IDFM) a l’ambition d’avoir « le réseau de transport public le plus développé et le plus performant du monde à l’horizon 2030-2033« . Et le directeur général d’IDFM de poursuivre :  » Nous en avons besoin pour le dynamisme de la région. Nous allons aider l’économie à se développer« .

D’ici cette échéance, le Grand Paris Express devrait permettre d’allonger de 200 km le nombre de kilomètres de métro grâce à quatre lignes nouvelles. Si on ajoute les lignes de RER, les 13 lignes de tramway (un nombre très conséquent), l’Ile-de-France pourra y parvenir, assure le dirigeant, pour qui « il ne faut pas hésiter sur les investissements » à consentir, lutte contre le changement climatique oblige.

Reste à trouver les financements. Or, les grands rendez-vous qui attendent IDFM en 2024, dont le début de l’exploitation du métro automatique du Grand Paris Express, vont déjà lui coûter 800 millions supplémentaires dès 2024. Un budget en hausse constante sur lequel Valérie Pécresse attend des réponses de l’Etat depuis 2019…

Intégralité du compte-rendu de la rencontre avec Laurent Probst à venir dans le numéro de juin de Ville, Rail & Transports

Ewa

Transport à la demande : Padam signe un gros contrat avec l’Ile-de-France

© Flexigo

Un futur concurrent d’Uber en grande couronne ? C’est ainsi que Laurent Probst, directeur général d’Ile-de-France Mobilités (IDFM), qualifie le nouveau service de transport à la demande (TAD) qui doit être progressivement déployé dans les zones peu denses ou excentrées de la grande couronne francilienne et intégré dans la carte Navigo. La solution logicielle est développée par la start-up Padam qui, associée à l’ingénieriste Setec ITS, signe ici son plus gros contrat (montant non communiqué).

La centrale de réservation, Flexigo, doit être lancée à l’été 2019 dans la région capitale avec trois offres de TAD « en cours de définition », indique Ile-de-France Mobilités dans un communiqué. Elle devrait être ensuite élargie pour rassembler dix opérateurs d’ici à fin 2019, puis « 40 environ en quatre ans ».

« Contrairement à des lignes de bus classiques, les véhicules de plus petite taille adaptent leurs itinéraires et horaires en fonction des requêtes des voyageurs, par téléphone ou depuis une appli dédiée. […] Ils ne suivent pas des lignes régulières mais adaptent les itinéraires en fonction des réservations », explique IDFM. Une solution dynamique pour que les opérateurs puissent adapter en temps réel leurs flottes de véhicules (des minibus en Ile-de-France).

« Cela va permettre de montrer les capacités de notre technologie sur un service de transport à la demande de très grande échelle », poursuit Grégoire Bonnat, PDG et cofondateur de Padam. La start-up qui a réalisé deux levées de fonds (avec Setec et Siemens Mobility), emploie aujourd’hui 25 personnes. Elle a expérimenté ses solutions à Bristol (GB) avec RATP Dev en 2016, et signé ses premiers contrats en 2018 avec les villes de Saint-Nom-la-Bretèche (Yvelines) et Orléans (Loiret). Depuis début 2019, Chelles, Meaux (Seine-et-Marne), et la métropole de Lille ont aussi signé pour des lignes de bus fixes « virtuelles » et un service de soirée à la demande (lire l’article).

Padam nourrit des objectifs très ambitieux avec plus de 20 contrats dans son viseur d’ici à fin 2019.

N.  A.

Laurent Probst, invité du prochain Club Ville, Rail & Transports, le 22 février à Paris

Le directeur général d’Ile-de-France Mobilités évoquera notamment la transformation de la billettique. En savoir +