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Ewa

Vents favorables pour Eole

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C’est parti pour le prolongement de la ligne E. La plupart des marchés de génie civil du tunnel et celui de Nexteo ont été attribués et l’appel d’offres pour les futurs trains est en cours d’examen Pour la première fois dans l’histoire de la SNCF, son plus grand projet est francilien. Pour l’occasion, ce n’est pas un, mais trois grands témoins qu’avait invités le Club Ville, Rail & Transports : Xavier Gruz, directeur d’Eole et de Nexteo, Alain Krakovitch, directeur général de SNCF Transilien et Didier Bense, directeur général SNCF Réseau Ile-de-France. Tout droit mis (aimablement) à la question par deux présidents d’association, Jean-Yves Durance, de l’Aude (Association des utilisateurs de La Défense) et Marc Pélissier (Association des usagers des transports-Ile de France). Et par une assistance quasiment passionnée par le sujet.

 

En décembre 2008, Jean-Yves Durance au nom de l’Aude, l’Association des utilisateurs de La Défense, avait écrit à Nicolas Sarkozy, alors président de la République, pour soutenir le projet de prolongement d’Eole à l’ouest. L’environnement, se souvient-il, était franchement hostile : « Christian Blanc, secrétaire d’Etat au Grand Paris, avait dit : jamais ; Sophie Mougard avait dit : pas avant 2035, 2040, on verra. »
La décision a été prise de lancer le projet. Ce fut un choix politique de Nicolas Sarkozy, car « le quartier d’affaires de la Défense était en difficultés à cause des transports ». De fait, selon le président de l’Aude, « à Londres, Canary Wharf s’est développé avec la Jubilee line. Et la Défense, en un premier temps, a commencé à se développer avec le RER A et le prolongement de la ligne 1 ». Le prolongement d’Eole à l’ouest va représenter pour le quartier d’affaires une nouvelle étape. Pour le président de la CCI des Hauts-de-Seine, l’essentiel est acquis. Ce qui n’empêche pas de se demander où en sont les financements et quels sont les délais.
La convention de financement est un feuilleton dont on peut faire grâce des épisodes. A l’heure où nous débattions, elle n’était pas signée et, à l’heure où nous paraissons, elle ne devrait pas l’être encore. Mais plus personne ne semble vraiment inquiet. D’ailleurs, sans hésiter, à la question de savoir si les financements nécessaires à la réalisation du projet sont acquis, Didier Bense, directeur général de SNCF Réseau en Ile-de-France, répond par l’affirmative. C’est tout de même une facture de 3,5 milliards d’euros qu’il faut régler, auxquels il faut ajouter le système d’exploitation Nexteo. Evoquant l’apport d’1,5 milliard du contrat de plan Etat-région, autant de la Société du Grand Paris, tandis que les collectivités apporteront 475 millions, SNCF Réseau 250 millions et le Stif 80 millions pour la partie embarquée de Nexteo. Didier Bense affirme : « Le compte y est. »
Sur les délais de mise en service, en revanche, ce qui est tout de même l’essentiel, les utilisateurs – qu’ils représentent les entreprises de la Défense ou les simples usagers – sont impatients. Les usagers, parce que le RER A a bien besoin d’être secouru. Les entreprises parce que, comme dit Jean-Yves Durance, la réalisation de ce projet est très attendue par les milieux d’affaires de la Défense. « Beaucoup d’investisseurs attendent de connaître la date d’arrivée d’Eole. La saturation actuelle des transports fait que beaucoup craignent l’arrivée de nouvelles tours, et donc de nouveaux voyageurs. Les tours à livrer sont en finalisation, il ne devrait plus y en avoir d’autres avant 2020, mais chaque année supplémentaire créera une difficulté. »
Urgence donc, mais sur la date, aucun des responsables de la SNCF ne peut s’avancer. En fait, il n’y a pas de mystère. Ce n’est un secret pour personne que la date de mise en service officielle, 2020 pour la ligne en tunnel jusqu’à la Défense et Nanterre, 2022 pour le projet complet jusqu’à Mantes-la-Jolie, ne peut pas être tenue. Mais le Premier ministre s’y est encore référé en février dernier, en inaugurant Rosa-Parks, et en annonçant 500 millions de mieux de la SGP pour mettre en route le projet… On peut penser que la « vraie date » sera fixée au moment de signature de la convention. Quelques indications ? « Le projet a bougé depuis 2014, mais pas autant qu’on le souhaitait. Par conséquent le calendrier définitif n’est pas encore affichable », dit Didier Bense, qui précise : « Nous avons beaucoup de pressions et pas intérêt à musarder. Mais il faut qu’on entre dans le dur avec les fournisseurs de génie civil pour pouvoir poser un calendrier qui sera forcément décalé par rapport à celui annoncé en 2015. » Ou comme dit Xavier Gruz, directeur d’Eole et de Nexteo, la date de 2020 pour le tunnel « était prévue selon l’hypothèse d’une convention signée en 2014. Nous sommes en 2016 et elle n’est pas encore signée ».
A chacun de conclure. Autant prendre de la hauteur. « C’est impressionnant la vitesse à laquelle nous sommes passés sur ce projet du scepticisme à l’impatience, affirme Didier Bense. Eole est une œuvre majeure. Le besoin est reconnu, pris en compte et les financements sont là. Le monde industriel s’organise pour nous aider à produire. Il faut bien mesurer ce qui s’est passé et le fait que l’on soit déjà presque passé du rêve à la réalité. »
Donc, plus personne n’en doute, on verra bien Eole aller jusqu’à Mantes-la-Jolie. Tout sera-t-il résolu pour autant ? Marc Pélissier, président de l’AUT-IDF en doute : « L’un des objectifs d’Eole est de décharger la ligne A de 12 %. Cela fera du bien, mais cela veut dire qu’on retrouvera, une fois le projet réalisé, la situation de 2010. Eole est un projet nécessaire, mais il ne faut pas que cela devienne un prétexte pour continuer à implanter des bureaux à la Défense ou à Nanterre, parce que la décharge sera relativement limitée et qu’ensuite on aura exploité toutes les possibilités de décharge du RER A. Et sur la ligne E, elle-même, n’y a-t-il pas un risque de saturation d’ici 15 à 20 ans ? », s’interroge-t-il.
« La nouvelle ligne ne sera pas saturée à son lancement », répond Alain Krakovitch, tout en ajoutant : « Tout ne va pas s’arrêter avec Eole. Nous ne devons pas cesser d’avoir des projets pour désaturer le réseau. C’est pour cela que nous commandons des rames à deux niveaux. C’est une course contre la montre, ce n’est pas facile, mais nous sommes dans une perspective d’amélioration de la capacité. »
Le directeur général Transilien ajoute qu’Eole aura un effet sur le RER A, mais aussi sur le B ou le D, pour les voyageurs venant du nord qui pourront aller en direct de Magenta-Gare-du-Nord à La Défense sans aller chercher la correspondance à Châtelet. Et sans prendre le tunnel saturé Gare-du-Nord – Châtelet.
Marc Pélissier s’inquiète encore : « Aujourd’hui la ligne E fonctionne bien. Nexteo va certes apporter une innovation, mais tous les trains seront interdépendants et il y a encore des points durs sur la ligne E à l’est comme à l’ouest. La complexité de l’exploitation restera présente, y aura-t-il un engagement sur la régularité de la future ligne E, car il serait mal vécu par les usagers de cette ligne que son prolongement soit synonyme de dégradations. »
Le directeur général de SNCF Transilien tente de le rassurer : « Nous allons mettre les relations à niveau sur la J5 [ligne Saint-Lazare – Mantes-la-Jolie qui va être reprise par Eole, NDLR]. Nous n’y subirons plus le vieillissement de l’infrastructure et nous aurons du matériel neuf, ce qui apportera de la régularité. La ligne H, par exemple, n’aurait pas significativement gagné en régularité sans l’arrivée du Francilien. De plus, le mode d’exploitation “en peigne” permettra d’éviter des erreurs faites dans le passé, puisque nous limiterons la longueur des lignes en créant deux demi-lignes. S’il n’est pas possible d’annuler toutes les difficultés, le fait d’avoir du matériel neuf, et un mode d’exploitation nouveau permettra d’améliorer le service. »
Qui plus est, Nexteo, le nouveau système d’exploitation confié à Siemens permettra l’automatisme, le contrôle et la supervision des trains sur le tronçon central de la ligne E, à l’instar de ce qui se fait pour les métros. « Nexteo garantira la fiabilité du service sur le tronçon le plus chargé et permettra de faire circuler entre Nanterre et Rosa-Parks jusqu’à 28 trains par heures », précise Didier Bense, avant qu’Alain Krakovitch ne rappelle : « lors de sa mise en service on sera à 22 trains, ce qui est le maximum de la capacité sur la ligne Est. Il faudra réaliser des travaux pour pouvoir l’augmenter » sur des parties encadrantes.
Si Nexteo est conçu pour la ligne E, le système sera disponible pour équiper d’autres lignes de Transilien. « Nous menons une réflexion sur l’équipement de toutes les lignes lors de l’arrivée de nouveaux trains », assure Xavier Gruz. Le Stif, dans son programme de renouvellement des trains, veut faire évoluer très vite le matériel du RER D. Ce RER pourrait bénéficier très vite de cet outil qui ne peut être implanté que sur de nouvelles rames. A terme Nexteo pourrait bénéficier à toutes les lignes de RER. « Eole sert de laboratoire, c’est un incubateur », commente Didier Bense qui ajoute qu’en attendant un renouvellement du matériel sur les autres lignes, « la modernisation d’Eole profitera notamment à la gare Saint-Lazare, qui avec 450 000 passagers par jour est saturée ». Grâce à Eole, Saint-Lazare pourrait voir le nombre de ses trains et de ses voyageurs baisser de 11 %. Ce qui fait dire à Alain Krakovitch : « Eole va tirer toute l’Ile-de-France, avec Nexteo et un nouveau matériel qui seront la vitrine et le moteur de toute la région. Ce projet on ne va pas le faire en séquentiel, mais en parallèle. Ce que nous apportera Eole on va l’utiliser de suite sur les autres lignes. »
Malgré toutes les promesses d’amélioration de service de la future ligne E, la secrétaire générale de l’Aude, (Stéphanie Fournier), critique : « Eole, c’est très beau, mais cela ne réglera pas tout. Il y a 160 000 salariés qui vont travailler à la Défense et qui sont confrontés chaque jour à des dysfonctionnements. Certaines lignes offrent des conditions de voyage qui ne sont pas dignes de la France. » Ce qu’Alain Krakovitch reconnaît : « Je comprends votre impatience et votre agacement. La situation actuelle du transport ferroviaire en Ile-de-France est le résultat de la politique des transports menée pendant trente ans en France. On y a privilégié le TGV par rapport aux lignes de banlieue. On réagit enfin, mais il faudra du temps pour que les choses s’améliorent pour les usagers. Nous sommes conscients des problèmes, mais la rénovation du réseau d’IDF et du matériel va prendre dix ans. On ne peut pas régler en deux ans trente ans de sous-investissements. Il faut du temps pour rattraper le retard pris. »
Valérie CHRZAVZEZ-FLUNKERT
Petit rappel pour ceux qui n’ont pas tout suivi

La ligne E a commencé à circuler en 1999. Première phase, qui aura donc attendu une bonne vingtaine d’années pour que soit réalisé le complément à l’ouest qui lui donne tout son sens. La nouvelle ligne de RER permettait alors de relier l’est de l’Ile-de-France avec le centre de Paris. Ce qui a nécessité la création de deux nouvelles gares parisiennes : Haussmann-Saint-Lazare et Magenta. Quelques années plus tard, après bien des rebondissements, son prolongement est enfin décidé.
Une troisième gare a été construite : Rosa-Parks, mise en service le 13 décembre dernier, entre les gares de Pantin et Magenta. Ce sera le terminus de la future branche ouest d’Eole qui ira donc de Mantes-la-Jolie à Rosa-Parks.
La ligne E, aujourd’hui terminus à Haussmann-Saint-Lazare, se prolongera sur 8 km de tunnel à 30 m de profondeur, pour arriver à la porte Maillot, où la quatrième gare parisienne d’Eole sera créée. Cette nouvelle gare sera connectée avec la ligne 1 du métro, le RER C, en correspondance avec le tram T3. Elle bénéficiera d’une verrière et sera éclairée par la lumière naturelle. Au-delà, la ligne progressera, toujours en tunnel, pour rejoindre la Défense où une autre gare sera implantée sous le Cnit. Cette gare cathédrale, avec de grands espaces, facilitera la correspondance avec la ligne A du RER, la ligne 1 du métro, le Transilien, le Tram T2, et plus tard la ligne 15 du Grand Paris. Le tunnel se poursuivra ensuite pour émerger à Nanterre où sera bâtie la dernière gare d’Eole, qui sera le terminus de la branche est. Elle permettra la connexion aux lignes 15 et 18 du futur Grand Paris Express. La ligne E rejoindra ensuite les lignes existantes de la ligne J, Mantes via Poissy, grâce à un ouvrage d’art traversant la Seine, et ce sont 47 km de voies qu’il est prévu de moderniser progressivement en direction de Mantes-la-Jolie. Sur le trajet les gares également seront modernisées, afin d’y créer plus de services et de les rendre accessibles aux personnes à mobilité réduite. A terme la ligne E remplacera définitivement la ligne J. Une fois finalisée, Eole sera la ligne la plus connectée d’Ile-de-France, puisqu’elle le sera avec tous les RER, presque tous les Transiliens, la majorité des lignes de métro, mais aussi les lignes 15 et 18 du Grand Paris Express. Eole contribuera donc à améliorer l’ensemble des transports d’Ile-de-France.
Lorsque l’intégralité des travaux aura été réalisée, la ligne E aura été prolongée sur 55 km vers l’ouest, 8 km d’infrastructures auront été creusées entre Haussmann-Saint-Lazare et Nanterre-La Folie, 47 km de voies auront été rénovées et réaménagées entre Nanterre et Mantes-la-Jolie, trois nouvelles gares créées et un système innovant d’exploitation aura été mis en place. Baptisé Nexteo, il permettra de faire circuler jusqu’à 28 trains par heure entre Nanterre et Rosa-Parks. En plus d’offrir une liaison de qualité, Eole permettra la désaturation des RER A, B et D et de la gare Saint-Lazare, d’assurer un meilleur maillage du réseau francilien et de réduire les temps de parcours des 620 000 voyageurs jours qui l’utiliseront lors de sa mise en service. On peut donc parler d’un chantier pharaonique. Ce qui explique qu’il ait fallu du temps pour convaincre les décideurs et les investisseurs de donner leur feu vert. Mais cette fois, c’est fait. Même si la convention de financement tant attendue n’est toujours pas signée. Fin 2015 les premiers travaux d’Eole ont débuté.    

V. Ch.

 

Questions pour un futur champion
Parce que c’est un projet hors normes, Eole a suscité de nombreuses questions lors de cette rencontre du Club VR&T :

L’exploitation en recouvrement qui sera mise en place sur la ligne E pourrait-elle être généralisée ?
« C’est la bonne solution d’exploiter par demi-ligne, j’en suis convaincu… mais cela demande d’être prévu au début du projet », dit Alain Krakovitch. Pour réaliser une telle exploitation sur la ligne D, par exemple, il faudrait que l’on puisse prévoir des retournements à Saint-Denis et Maisons-Alfort, à l’instar de ce qui se fera sur la ligne E à Rosa-Parks et Nanterre… ce qui n’est pas possible. Il faudrait en outre une capacité dans le tunnel qui soit deux fois celle qu’on y a aujourd’hui, puisque, par définition, l’exploitation en peigne est deux fois plus consommatrice de sillons sur le tronçon central qu’aux extrémités. D’où sa conclusion : « On doit réfléchir à des évolutions des lignes pour les simplifier. Les lignes de RER actuelles sont trop complexes, à la fois par leur longueur et le nombre de bifurcations. »

A ceux qui s’inquiètent d’une possible saturation de la gare d’Haussmann-Saint-Lazare dans le futur, gare déjà bien chargée, Xavier Gruz répond : « C’est peu probable, puisqu’en prolongeant la ligne on limitera l’effet terminus. En revanche la gare de Magenta va prendre une dimension supplémentaire, à laquelle nous allons apporter des réponses, notamment en renouvelant les escaliers mécaniques pour en augmenter le débit. »

A Marc Pélissier qui demande : « Aurez-vous les rames nécessaires dans les temps pour ce projet et que deviendront les anciennes rames de l’actuelle ligne E ? » Alain Krakovitch répond : « L’appel d’offres des rames est en cours. Il devrait être notifié en novembre 2016 et concerne 71+53 rames. Il n’y a pas d’inquiétude à avoir sur les délais de livraison du matériel roulant. Les deux premières rames arriveront en 2020, elles seront suivies de 18 en 2021, de 36 autres en 2022, puis ce sera un cycle de 68 rames par an pour atteindre 124 rames. L’ensemble de la ligne sera homogène, ce qui jouera sur sa performance et permettra d’atteindre les objectifs fixés. » Quant aux actuelles rames en services sur la ligne E, des propositions devaient être faites au Stif sur leur réutilisation. Un petit casse-tête, soit dit en passant.

Quid des moyens humains de la SNCF ? Didier Bense reconnaît qu’il y a beaucoup de projets en Ile-de-France, dont Eole et CDG Express, et que la priorité de la SNCF est la régénération, mais que l’entreprise fait face : « On avance sur trois pieds : en cherchant à améliorer la productivité, en externalisant et en mettant en place des partenariats industriels, mais il faudra aussi augmenter nos ressources internes, pour la sécurité, le pilotage… Il nous manque 250 à 350 personnes pour assurer notre programme de 2017. » Pour Eole, la SNCF externalise certaines prestations, en recourant à Sferis, filiale de la SNCF.

Comme nous sommes toujours en état d’urgence, la question de la sûreté d’Eole a été posée. « La sûreté est un sujet sur lequel nous travaillons en étroite relation avec les services de l’Etat, rappelle Xavier Gruz. Pour Eole nous avons une grosse question de sûreté, parce que nous allons dans des bassins de population sensible et que dans certains quartiers cela peut poser des questions de comportement ou d’incivilité. Nous allons y travailler, d’autant que les incivilités peuvent aussi jouer sur la régularité. » Alain Krakovitch précise : « Eole profitera des tests de vidéo automatique menés dans deux gares, Saint-Denis et Bibliothèque-François-Mitterrand. Nous avons 8 000 caméras dans les gares. Il ne peut pas y avoir un agent derrière chaque caméra. Nous travaillons avec des start-up pour déterminer des alertes automatiques lorsqu’elles détectent des mouvements de foule anormaux ou des bagarres. Eole profitera de cette évolution technologique. »

Y aura-t-il des commerces dans les gares ? Lors de l’inauguration de Rosa-Parks, Valérie Pécresse a posé la question qui fâche : où sont les commerces ? De fait, il n’y en a pas. Les conceptions de Jean-Marie Duthilleul, architecte de la SNCF, en faveur des gares monuments ou des gares cathédrales ont été attaquées à l’occasion. Alain Krakovitch explique que l’affaire est un peu plus compliquée. Et le fait de façon d’autant plus détachée qu’il n’est pour rien dans la conception de la gare qui remonte d’ailleurs au temps de la séparation RFF-SNCF. « A l’époque où elle a été conçue, il était très difficile de faire venir des commerces dans les gares. Très peu de concessionnaires étaient intéressés. On faisait des coques qui restaient vides. Donc, on n’a pas fait de coque. Résultat : on n’a pas de commerce. » Pour Eole, la SNCF a tiré les leçons. Et, la future gare de Nanterre, « post-Rosa-Parks » aura des commerces. Porte-Maillot aussi, moins que la SNCF ne l’aurait voulu, la gare devant rentrer au chausse-pied dans un espace comme on dit très contraint. Mais, à La Défense, gare Duthilleul et gare cathédrale, les commerces seront là. Il faut dire que la gare sera sous le Cnit : Unibail, son propriétaire, s’y entend dans la rentabilisation des espaces.

Le métro a des portes palières, qu’en sera-t-il d’Eole ? La SNCF teste un système de portes palières qu’on peut dire légères, mais le système n’est pas envisagé pour Eole. Même si la ligne doit disposer d’un parc homogène, en un premier temps cohabiteront des rames anciennes et les futurs RER 2N NG. Ce qui ne permet pas la pose de portes palières.

Ewa

SNCF Réseau : ce qui attend le futur président

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La démission surprise de Jacques Rapoport fin février ravive les questions de la dégradation des infrastructures ferroviaires, du poids des lignes nouvelle dans l’accroissement de la dette. Et elle pointe la responsabilité de l’Etat. Rude tâche pour le nouveau président de Réseau : négocier avec l’Etat un contrat de performance qui assure au gestionnaire d’infrastructures la visibilité tant attendue. Quel avenir pour SNCF Réseau et nos infrastructures ?

Par Dominique Bussereau
Ancien ministre, député Les Républicains et président du conseil départemental de Charente-Maritime, président de l'Assemblée des départements de France, vice-président du Gart.

 

L’annonce de la démission de Jacques Rapoport de la présidence de SNCF Réseau a été si soudaine qu’elle a surpris tous les acteurs et observateurs de notre système ferroviaire.
L’occasion m’est aujourd’hui donnée de rendre hommage à l’homme de qualité, de devoir et de dialogue qu’est Jacques Rapoport. Le choix de Jean-Pierre Farandou comme successeur est excellent : c’est un vrai cheminot qui a parfaitement réussi à la tête de Keolis.
Quel est en ce début de printemps 2016 l’état des lieux ?
D’abord celui d’une carence de l’Etat que regrettaient d’ailleurs Jacques Rapoport et très récemment l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer).
Le contrat de performance, prévu par la loi de réforme ferroviaire du 4 août 2014, n’est pas connu près de trois ans après la promulgation de ce texte !
Pourtant les urgences sont là et ne sont pas récentes. Dès 1997, le président-fondateur de Réseau ferré de France, Claude Martinand, indiquait « le réseau que me lègue la SNCF n’est pas en bon état ».
Suite au rapport Rivier de 2005, le montant annuel de la rénovation de notre réseau a quadruplé : 600 millions à l’époque et aujourd’hui 2,4 milliards d’euros.
Malgré la politique constante d’augmentation des barèmes tarifaires appliqués aux sillons, RFF ne dégage pas suffisamment de ressources pour renouveler le réseau et la même Arafer a d’ailleurs rendu récemment un avis non conforme, donc juridiquement contraignant, sur les tarifs de péage en 2017.
Comment compenser cette absence de recettes ?
Les gouvernements auxquels j’ai appartenu, à la suite du Grenelle de l’environnement avaient trouvé la solution idoine : l’écotaxe payée par les poids lourds utilisant le réseau national routier (à l’exception des autoroutes déjà soumises à péage) et les routes départementales constituant des itinéraires de substitution. Hélas, la décision funeste et démagogique de Ségolène Royal d’y mettre fin a supprimé cette ressource, pénalisant ainsi notre système ferroviaire, fluvial et les réseaux de transports publics de nos agglomérations.
A contrario l’Allemagne avec la LKW-Maut (l’équivalent de la défunte écotaxe) dont le montant annuel est en constante progression vient d’augmenter ses investissements annuels de renouvellement de 3,5 milliards d’euros à 4 milliards.
Notre Agence de financement des infrastructures de transports de France (Afitf) n’est ainsi même plus capable de payer la part de l’Etat dans le financement de la LGV Tours – Bordeaux et SNCF Réseau doit emprunter pour payer la part de l’Etat !
Ainsi la dette de SNCF Réseau s’établissait à 38,9 milliards d’euros fin novembre 2015 et s’alourdit chaque année d’environ 1,5 milliard d’euros soit ce qu’une écotaxe montant chaque année en puissance pourrait aujourd’hui rapporter au système ferroviaire.
Quelles solutions proposer pour l’avenir, en particulier en cas d’alternance politique en 2017 ?
1) Il faut rebâtir, après une vaste concertation, un système d’écotaxe permettant d’assurer la modernisation du réseau existant et de participer au financement de la LGV Bordeaux – Toulouse dont la mise en chantier est aussi nécessaire qu’inéluctable.
2) Il faut réformer la réforme ferroviaire de 2014 et redonner une totale indépendance à SNCF Réseau, quel que soit son nom pour l’avenir.
3) Il faut que l’Etat et les collectivités locales (à condition bien sûr d’arrêter de leur ôter des moyens et de faire prendre en charge par elles des dépenses de l’Etat ou décidées sans concertation par lui) financent en effet seuls les lignes nouvelles (LGV ou non) décidées par la puissance publique. Ce qu’a justement reconnu dans une déclaration récente le secrétaire d’Etat chargé des Transports, Alain Vidalies. Ce sont des décisions difficiles, souvent peu populaires, mais elles apporteront une vraie réponse à ce que je crois représente la démission de Jacques Rapoport : un signal d’alarme pour une fois tiré par un cheminot et non par un voyageur mal intentionné.

 

 

Le système ferroviaire face au mur de la vérité

Par Gilles Savary
Député PS de la Gironde et ancien vice-président de la commission Transport du Parlement européen.

A quelques jours d'intervalle, deux responsables de premier plan de nos grandes entreprises publiques, Thomas Piquemal d’EDF, et Jacques Rapoport, président de SNCF Réseau, ont démissionné de leur poste.
Si le premier a été plus disert que le second sur ses raisons, il n'est pas interdit de penser que ces deux démissions volontaires ne sont pas sans rapport avec les contradictions accumulées depuis des décennies par une gouvernance publique française encore imprégnée de l'insouciance financière des Trente Glorieuses.
D'un côté, c'est le prodigue mensonge financier du nucléaire français qui se dénoue inéluctablement. De l'autre, c'est celui du « tout-TGV » qui touche à ses évidences.
Dans les deux cas, les gouvernements successifs ont recyclé des projets et des promesses d'investissements démesurés, tout en garantissant aux usagers une frugalité tarifaire qui ajoute à l'effet de ciseau financier qui se referme sur ces deux entreprises.
Dans les deux cas, c'est la culture d'ingénieur et sa propension française à la performance de prestige à tout prix, mais aussi une certaine routine industrielle colbertiste héritée des années fastes, qui trouvent leurs limites dans le tarissement de nos capacités d'investissement public, et qui placent de grands commis de l'Etat face à de redoutables injonctions contradictoires.
En matière ferroviaire, l'objectif assigné par la loi de réforme ferroviaire du 4 août 2014, de combler l'impasse annuelle de 1,5 milliard d'euros, n'est pas conciliable avec la simultanéité de quatre chantiers de LGV et le fiasco des plans de financement et des prévisions de trafic des LGV Perpignan – Figueras et Tours – Bordeaux.
Ces seuls programmes portent la dérive financière annuelle de SNCF Réseau à trois milliards d’euros, mais il manque par ailleurs 1 à 1,5 milliard d'euros annuel de subventions d'Etat pour prétendre simplement stopper le vieillissement de notre réseau historique d'ici 2025 !
Dans un tel contexte de confusion de l'Etat Stratège, prisonnier de la pression d'élus locaux influents et de promesses historiques qui s'accumulent, on comprend que de hauts responsables ne veuillent pas assumer indéfiniment la responsabilité d'ambiguïtés politiques qui s'inscrivent immuablement dans la continuité de l'Etat, et les exposent à des conséquences judiciaires, dont les accidents de Brétigny et de Denguin donnent une idée saisissante.
En matière d'investissements ferroviaires, la prévisibilité, la constance et la fiabilité financière sont absolument nécessaires à la fixation d'objectifs partagés et surtout à leur réalisation. La plupart des pays européens l'ont compris en se dotant d'objectifs clairs, sélectifs et hiérarchisés, et de programmations transparentes, stables et sincères pour les atteindre.
Du coup, on attend avec impatience et curiosité les contrats d'objectifs que la loi de réforme ferroviaire prescrit entre l'Etat d'une part et les trois entités de la SNCF d’autre part.
S'agissant de SNCF Réseau, ce contrat, couplé à la règle d'or qui prévoit de contenir l'autofinancement du système ferroviaire dans la mesure stricte d'un endettement soutenable et non Maastrichtien, devrait constituer un rendez-vous de vérité sur nos investissements ferroviaires à dix ans. C'est peut-être la raison pour laquelle il se fait attendre.
Mais la dépréciation de 12 milliards d'euros de l'actif du groupe SNCF, dont 9,6 milliards au seul titre de SNCF Réseau, qui tend à renvoyer à l'Etat la dette ferroviaire insolvable générée par ses décisions politiques, devrait l'inviter à mettre un terme à cette fuite en avant politico-financière, qui menace de devenir explosive au moindre regain des taux d'intérêt.
C'est la crise de cette gouvernance publique pharaonique et clientéliste que signalent ces deux démissions.
Pour sa part, Alain Vidalies, en sa qualité de ministre des Transports, a pris la mesure de cette situation largement héritée du passé, en déclarant courageusement dans Le Monde du 15 mars que SNCF Réseau ne financerait plus de nouveaux projets ferroviaires, et qu'il convenait de trouver de nouvelles ressources stables affectées à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France.
Mais il lui reste, lui aussi, à régler son inconfortable porte-à-faux entre son ministère de tutelle et Bercy.

 

Ewa

LGV Est. Le dernier rail a été soudé

lgv est soudure31 03 2015

Le dernier rail de la LGV Est Européenne a été soudé le 31 mars dans le Bas-Rhin, marquant la fin de la seconde phase de travaux sur cette ligne… Soit quasiment un an avant la mise en service de cette section longue de 106 km entre Baudrecourt (Moselle) et Vendenheim (Bas Rhin). « Et cela, dans les temps et dans le budget », souligne Guillaume Pepy, le président de SNCF Mobilités. « Nous sommes fiers d'avoir démontré à cette occasion que le mode de réalisation classique d'un chantier tient ses promesses ». C’est en effet SNCF Réseau qui est le maître d’ouvrage pour la réalisation des travaux estimés à quelque 2 milliards d'euros. 

La première phase de travaux de la LGV Est, achevée en 2007, avait permis de réduire de 4h00 à 2h20 le temps de trajet sans arrêt entre Paris et Strasbourg. Lorsqu’elle sera ouverte aux circulations, le 3 avril 2016, la nouvelle section permettra de mettre Paris à 1h48 de Strasbourg (meilleur temps de parcours). Soit un gain de 32 minutes sur le trajet actuel. « Le nombre de relations domestiques va rester inchangé mais la capacité des rames va augmenter de 20 % avec la mise en place de rames Euro Duplex ». En revanche, les liaisons internationales sont renforcées avec deux aller-retour Strasbourg-Bruxelles, deux aller-retour Strasbourg-Luxembourg et deux aller-retour Strasbourg-Francfort.

Actuellement, 12 millions de voyageurs par an. La SNCF s’attend à une hausse de 15 % du trafic sur le nouveau tronçon. Pour déterminer les tarifs, la SNCF va retourner vers les clients et les élus cet automne. "Nous leur demanderons  quel est le niveau de tarifs qui leur semble légitime, compte tenu de la qualité du service et du temps gagné", a expliqué Guillaume Pepy.

En attendant la mise en service, SNCF Réseau doit encore réaliser les finitions et les réglages jusqu’à courant août. « Puis nous mettrons sous tensions la caténaire et nous incorporerons la deuxième phase dans le POS de Pagny sur Moselle », explique un de ses responsables. La campagne d’essais des TGV aura lieu d'octobre à la fin de l'année. Une demande d'autorisation d'exploitation sera transmise à l’EPSF pour obtenir l’autorisation d’exploitation. « Dans le même temps, nous donnerons les clés au futur exploitant et au futur mainteneur pour qu’ils se rôdent et les agents seront formés", poursuit-on côté SNCF Réseau.

Ewa

Avis défavorable pour les prolongements de la LGV de Bordeaux vers Toulouse et Dax

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La commission d’enquête publique sur les projets de lignes à grande vitesse Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax a rendu le 30 mars un avis négatif. Le rapport pointe essentiellement des "insuffisances et faiblesses" des projets,…   parmi lesquelles des "impacts insuffisamment pris en compte", qu'il s'agisse de la faune, de l'habitat ou de la viticulture. Les incertitudes sur le financement public et sa rentabilité sont également soulignées. Rappelons que ces lignes s'inscrivent dans la continuité de la ligne Tours-Bordeaux actuellement en construction. Et que leur coût  est estimé à 8,3 milliards d'euros.

Le secrétariat aux Transports a aussitôt indiqué qu'il fallait s'abstenir de "toute conclusion prématurée" pour respecter la procédure en cours. "Le maître d'ouvrage, SNCF Réseau, dispose désormais d’un délai de quatre mois pour répondre à ces conclusions. C'est à ce moment là seulement que l'Etat sera saisi de l’intégralité des conclusions et de cette réponse. Le Gouvernement sera appelé  à prendre sa décision dans un délai de dix-huit mois, après avis du Conseil d’Etat", a-t-il indiqué dans un communiqué.

Car déjà, les élus s'agitent. "L'avis ne lie pas le gouvernement", et "l'apport des voyageurs de Midi-Pyrénées a toujours été considéré comme la justification même des investissements consentis entre Tours et Bordeaux", a réagi Martin Malvy, le président socialiste de la Région Midi-Pyrénées.
"L'actuel gouvernement ayant inscrit la poursuite du projet comme unique perspective nationale à compter de 2018, nous nous refusons d’envisager que l’avis de la commission (…) signifie la remise en cause du projet", ont renchéri dans un communiqué commun le président de la Région Aquitaine Alain Rousset, le président de Bordeaux Métropole Alain Juppé et le président de Toulouse Métropole Jean-Luc Moudenc, qui demandent tous trois à être reçus par Alain Vidalies, le secrétaire d'Etat aux Transports.

En revanche, Gilles Savary, le député socialiste de Gironde se félicite  d'un "avis qui introduit enfin le bon sens et la rationalité économique".

Ewa

Brétigny. La SNCF met en doute l’expertise métallurgique

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Vrai scoop ou fuite orchestrée ? Le 23 janvier, l’AFP a diffusé le contenu d’une demande transmise à la justice par la SNCF le…  

19 janvier, au sujet du déraillement intervenu à Brétigny le 12 juillet 2013. Dans ce document « dont l’AFP a obtenu copie », la SNCF regrette que « se contentant d’expliquer que les têtes de boulons auraient rompu par fatigue, les experts n’ont fourni aucune explication à l’absence incompréhensible des écrous sur les vis. Pourtant, le dévissage accidentel d’un écrou oxydé est techniquement hautement improbable ». Et l’entreprise ferroviaire d’avancer deux hypothèses : « de mauvaises pièces placées sous scellé ou un déboulonnage volontaire ». Toutefois, l’AFP ajoute aussitôt qu’un porte-parole de la SNCF lui a indiqué que « des éléments dont nous disposons aujourd’hui, notre conviction c’est que l’acte volontaire n’est pas plausible ». Par déduction, ce ne seraient donc pas les bons boulons qui ont été mis sous scellés.

Mise en cause pour ses règles de maintenance par les experts judiciaires dans le rapport publié un an après l’accident, la SNCF « conteste fermement » l’expertise métallurgique dans sa demande d’expertise complémentaire. Commencée en mars 2014 et rendue en septembre, l’expertise métallurgique comporte des « erreurs » selon la SNCF, du fait du délai entre l’accident et le début de l’analyse, de la pollution du lieu pendant l’accident (pièces abîmées, aiguillage retiré brutalement…) La SNCF juge qu’il n’y a eu « aucune analyse scientifique » concernant les boulons et nie les conclusions de l’expertise judiciaire, assurant que « contrairement aux allégations des experts, les boulons de l’éclissage en cause, étaient présents sur l’éclisse, peu avant l’accident » et que « la rupture n’est pas intervenue à l’issue d’un long processus de fatigue, qui aurait échappé à la vigilance des agents lors des tournées d’inspection ». La SNCF souhaite donc, dans sa demande rendue publique par l’AFP, que les experts « complètent leurs travaux en leur demandant d’apporter des réponses à une série de questions qui lui apparaissent à ce jour toujours essentielles à la détermination de l’origine de l’accident ». Afin que ces réponses la mettent hors de cause ?

Ewa

Après le génie civil, Cosea redéploie les emplois

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Les 3 millions d’heures de travail d’insertion – sur un total de 19 millions d’heures de travail – font de la LGV SEA le plus grand chantier d’insertion d’Europe. La phase du génie civil et du terrassement touchant à sa fin, Cosea se fait un devoir de trouver des postes à tous ceux qui ont participé à la construction.  

« A son démarrage en 2012, le projet a connu quelques difficultés lors de l’acquisition des terrains, parfois dues à des contraintes environnementales nous interdisant de travailler. Ce qui a engendré à peu près six mois de retard, puis il y a eu une période de pluie. Mais aujourd’hui, grâce aux énormes efforts du groupement d’infrastructure, le planning avec une mise en service en juillet 2017 sera tenu », assure Gilles Godard, le directeur du groupement constructeur. Pour tenir les délais de réalisation de la plate-forme LGV, Cosea a en effet mis des moyens considérables sur les 300 km de linéaire. Au plus fort du chantier, en été 2013, près de 8 500 personnes étaient mobilisées ! Dont environ 2 300 embauches locales réparties en 1 800 emplois Cosea, les autres ayant été générés par les sous-traitants fournisseurs. En partenariat étroit avec l’Etat, les régions et Pôle emploi, la direction de projet a choisi délibérément de chercher la ressource sur le territoire au moment de la mobilisation. « C’est une manière de plus de s’intégrer dans le territoire et de faire accepter le projet. Ce défi a été réalisé », se réjouit Eric Leleu. Le directeur des Ressources humaines de Cosea évoque le nombre d’heures de formation dispensées pour apprendre les métiers de la conduite d’engins, du terrassement, du génie civil : 300 000 heures en six à huit mois, un coût estimé de 10 à 12 millions d’euros ! « C’est le plus grand chantier d’insertion d’Europe. Actuellement, sur un total de 19 millions d’heures de travail, on a dû réaliser environ 3 millions d’heures de travail d’insertion, avec pour beaucoup des hommes et des femmes qui étaient très éloignés de l’emploi. Ce sont de tels grands projets structurants qui, de par leur durée, permettent des actions de ce volume. »

Avec la fin annoncée des gros travaux de terrassement et de génie civil, et donc une diminution progressive des effectifs, Cosea parle désormais de redéploiement et se fait un devoir de trouver des postes à tous ceux qui ont participé à la construction. Sur les quelque 1 000 personnes formées au génie civil et terrassement, la moitié va ainsi appréhender désormais les métiers du ferroviaire, avec des formations qui vont cumuler les 100 000 heures. « Nous leur avons donné une première qualification et un vrai métier dans les travaux publics. Ils vont suivre la vie du projet et apprendre un deuxième, voire un troisième métier s’ils font de la pose de voie ferrée et de caténaire. » A l’issue de la phase superstructure, certains pourraient intégrer les effectifs de Mesea. Un redéploiement sera sans doute aussi poursuivi chez Vinci. Mais d’autres pourraient être intéressées par ces nouvelles compétences ferroviaires. Présents lors de certaines réunions d’information sur le terrain lors de ces propositions de reconversion, des représentants d’ETF et de TSO, les sociétés chargées de la pose des voies sur la ligne SEA, ont insisté sur le fait que, dans ce domaine, le travail lié au rajeunissement et à la modernisation du réseau classique ne manque pas…

M. B.

Ewa

Le génie civil s’achève, la superstructure démarre

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Le génie civil et les terrassements étant quasiment achevés, place à l’installation des supports caténaires cet été puis à la pose des voies à l’automne. L’ensemble des travaux de superstructures devrait s’achever au cours de l’été 2016.  

Engagée en février 2012 sur l’ensemble du tracé, la construction de la LGV Sud-Europe-Atlantique arrive aujourd’hui à une période charnière. Le génie civil et les terrassements sont achevés à 93 % avec des chiffres éloquents. En mai, près de 64 millions de m3 de déblais et décapages réalisés sur un objectif de 68 millions. Plus de 285 000 m3 de béton coulés pour les ouvrages d’art non courants et plus de 414 000 m3 pour ceux courants. Sur les 287 prévus, 133 rétablissements routiers étaient en service. Seule une dizaine de grands ouvrages significatifs comme le viaduc sur la Dordogne, le plus long de la ligne avec ses 1 377 m, seront encore en activité jusqu’en fin d’année. Les 29 bases du chantier de génie civil, réparties tout au long des 300 km, vont être peu à peu démantelées. Plus de 600 000 traverses béton sont déjà produites, 74 % des appareils de voie réceptionnés, 29 % de ballast approvisionné sur un total de 3 millions de tonnes. Place à la superstructure désormais encadrée par SGS, le sous-groupement Superstructures, l’un des cinq constitués d’entreprises sur lesquels s’appuie Cosea, qui est en charge des bases-travaux, de la pose des voies et de la caténaire. Cette phase va être entreprise depuis deux bases ferroviaires situées à Nouâtre-Maillé (Indre-et-Loire) et à Villognon-Luxé (Charente), soit à peu près au premier et au deuxième tiers du projet. Créées de toutes pièces, occupant une surface d’une trentaine d’hectares et comportant chacune une quinzaine de kilomètres de voies, ces centres névralgiques sont proches de la plate-forme LGV, bien desservies par des axes routiers structurants, et reliées au réseau ferré national pour permettre l’acheminement des matériaux et matériels (ballast, longs rails soudés, traverses, supports caténaires…). Les toutes premières interventions sur la ligne devaient débuter à partir de Villognon en mai, puis cet été depuis Nouâtre par l’installation des supports caténaires à l’aide de moyens routiers et le déroulage des câbles signalisation. La pose des voies ferrées – plus de 680 km mobilisant quelque 1 000 personnes – sera entreprise cet automne par les sociétés TSO et ETF qui iront à la rencontre l’une de l’autre. Ces grands travaux de superstructure doivent s’achever au cours de l’été 2016. Les deux bases, dont une partie des installations sera conservée, deviendront alors les centres principaux de maintenance de la LGV. M. B.

 

La SEA, vitrine pour Lisea

Vinci apprécie la concession. Le groupe s’investit dans les grands travaux, mais aussi dans ce modèle parce qu’il possède justement dans son portefeuille d’activités un solide pôle Concessions. Ce principe de concession pour les grandes infrastructures linéaires est éprouvé depuis longtemps. Quasiment toutes les autoroutes françaises ont été développées ainsi. Ce qui n’est pas le cas pour le ferroviaire – du moins dans son histoire récente – où il n’existe pour l’instant pas de retour d’expérience en France, la formule ayant toutefois été retenue pour des lignes internationales majeures : tunnel sous la Manche et la ligne Perpignan – Figueras. « Dans dix ans, nous pourrons dire si cela a vraiment été un succès. Mais nous estimons valoriser plus nos actifs en ayant la main sur le commercial qu’en étant uniquement présent sur le plan technique », explique Laurent Cavrois, président de Lisea, qui juge qu’en termes de maîtrise et d’efficacité de construction et de commercialisation, le principe est porteur « d’une certaine innovation, d’un dynamisme. Grâce à des méthodes ambitieuses, nous raccourcissons de plusieurs années les temps d’exécution du projet ».

Il est apparu évident, suite au Grenelle de l’environnement, et à la décision de lancer simultanément la construction de quatre lignes à grande vitesse (LGV Est-européenne phase 2, Bretagne – Pays de Loire, Sud-Europe-Atlantique et contournement de Nîmes-Montpellier), que l’Etat seul ne pouvait pas tout réaliser. « Il y avait besoin de mobiliser des financements, des capacités de maîtrise d’ouvrage, d’entreprises, ce qui n’aurait pas été possible en utilisant uniquement la maîtrise d’ouvrage publique. Lisea porte un risque commercial et en fait cela met sous tension l’ensemble du projet. Nous allons essayer de développer l’infrastructure, des services, de commercialiser des sillons, une manière d’approcher les clients qui va maximiser l’utilité de la ligne. » Il croit fermement en ce modèle, estime que l’industrie monte en gamme et que la ligne SEA va constituer une vitrine. « Le fait que de grands opérateurs en France puissent offrir de telles offres packagées doit représenter un atout pour de grands projets à l’étranger comme ceux au nord de Londres, en Russie, aux Etats-Unis ou encore en Amérique du sud. »

M. B.

 

Lire la fin du dossier : Après le génie civil, Cosea redéploie les emplois

Ewa

Le face-à-face Savary/Bussereau. Réussir la réforme ferroviaire

Bussereau Savary

Gilles Savary est le rapporteur à l’Assemblée de la loi sur la réforme ferroviaire. Dominique Bussereau, ancien ministre, a fait voter la loi créant l’Araf. Les deux députés sont des experts de la question ferroviaire. En désaccord sur le sujet.  

Réguler mieux pour mieux administrer !

Par Gilles Savary 

Député PS de la Gironde et ancien vice-président de la Commission Transport du Parlement européen

 

Alors que la réforme ferroviaire sera débattue à l'Assemblée nationale en juin prochain, la question de la place de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires (l’Araf) créée par la loi du 8 décembre 2009, en application de la directive européenne 2011/14/CE, apparaît comme un enjeu central du débat.

Dans le projet de loi, l’Araf consolide ses prérogatives de nomination et de révocation du président du futur gestionnaire d'infrastructure unifié, ainsi que de contrôle de l’indépendance de ses dirigeants.

Elle gagne considérablement en prérogatives de contrôle de la trajectoire financière du gestionnaire d'infrastructures, et en particulier donnera désormais systématiquement son avis sur la soutenabilité financière des nouveaux projets d'investissement sollicités de SNCF réseau. Cette disposition vise à prévenir les dérapages politiques qui ont conduit RFF à un niveau d’endettement record tout en laissant s’effondrer le réseau historique !

Enfin, l’Araf est confirmée dans sa mission essentielle de contrôle de l'impartialité des conditions d’accès au réseau, et particulier de la tarification (redevances) qui devrait retrouver un avis conforme, probablement étendu aux gares et aux prestations de sûreté, en débat parlementaire !

Il est également prévisible que le Parlement maintienne au sein du collège de l'Araf des experts extérieurs à côté des membres permanents à temps plein introduits par la réforme !

De la sorte, la France disposerait de l’un des régulateurs ferroviaires aux prérogatives, notamment économiques, les plus étendues et les plus impartiales d'Europe.

Ainsi notre pays qui, depuis 2010, met consciencieusement en place les institutions de la concurrence tout en résistant comme nul autre à son introduction, est en passe de devenir une beauté optique européenne !

En réalité, ce qui est en question dans la nouvelle gouvernance que la réforme française ambitionne, c'est de trouver la martingale du bon équilibre entre administrer (l'Etat), « lobbyer » (les compagnies ferroviaires, les constructeurs et les élus locaux) et réguler (l’Araf et les corps de contrôle et de résolution des conflits).

La régulation est évidemment une créature du libéralisme et de la concurrence, quand l'administration est celle de l’Etat. La France est marquée de longue histoire par sa tradition colbertiste centralisée, peu empathique avec un monde profondément décentralisé contrôlé par des régulateurs autonomes du politique. Entre administration centrale et régulateur, ce sont deux biotopes très différents qu'il faut concilier dans la réforme.

Mais force est de constater, quand on observe aujourd'hui l'état du réseau, l'irréalisme des investissements essaimés comme promesses au vent par l'ex-Snit, le déséquilibre financier vertigineux de RFF et la dégradation de certains services ferroviaires trop longtemps laissés pour compte, que l'Etat n'a pas été le moins défaillant dans la gestion hasardeuse d'un système ferroviaire français à bout de souffle !

L'Araf, dans la conception qu’en envisage la loi, est là, non pas pour se substituer à l'Etat stratège et souverain, mais pour l'aider à appliquer ses propres lois et orientations, notamment en le protégeant des pressions et des clientélismes de circonstances qui ont miné, ces dernières années, les équilibres financiers de notre système ferroviaire en tenant lieu de processus de décision politique.

Il ne serait d'ailleurs pas incongru que le régulateur rende formellement des comptes au Parlement au même titre que l’Etat, ses administrations et ses opérateurs.

C'est donc bien un équilibre que recherche la loi, en renforçant les prérogatives et l'impartialité du régulateur, mais aussi en réaffirmant le rôle imprescriptible d'orientation politique de « l'Etat stratège » et en le protégeant de ses vieux démons !

 

Une mauvaise réforme ferroviaire

Par Dominique Bussereau 

Député UMP de Charente-Maritime, président du conseil général de la Charente-Maritime, vice-président du Gart.

 

Au moment où j’écris ces lignes le programme de travail gouvernemental et parlementaire est encore flou d’où des incertitudes réelles sur l’avenir de cette réforme.

Faut-il une réforme ferroviaire ? L’équilibre issu de la loi de 1997 est bon car il donne à l’Etat un rôle de stratège et délimite clairement les fonctions respectives du gestionnaire d’infrastructures (RFF) et des opérateurs ferroviaires dont l’opérateur historique (SNCF).

La loi de 1997 peut être bien évidemment améliorée en donnant à RFF la gestion complète des infras (avec les personnels de SNCF Infra), des gares de fret et des gares de voyageurs : mais… le projet de réforme du gouvernement ne prévoit rien en la matière.

De même il est souhaitable de donner aux régions un rôle important dans la gestion des gares (avec les autres autorités organisatrices de transport (AOT) concernées, départements, agglomérations, etc.). Elles devraient pouvoir choisir leurs dessertes, le mode utilisé (train ou car), l’opérateur (SNCF ou autres entreprises ferroviaires) et avoir la propriété du matériel ferroviaire qu’elles financent.

Rien de tout cela ne figure actuellement dans le projet gouvernemental.

 

Les mauvais choix de la réforme

La nouvelle organisation, trois Epic (alors qu’il faudrait passer au statut de SA) :

– Un gestionnaire d’infrastructures unifié qui escompte, sans preuves de ce qu’il avance, réaliser des économies d’échelle alors que seul le regard extérieur de RFF permet aujourd’hui de diminuer le coût d’entretien des infras.

– La SNCF

– Un inutile Epic de tête, anticoncurrentiel, puisque la SNCF va y être en majesté et avoir ainsi un regard sur l’attribution des sillons, contraire aux impératifs de concurrence.

 

Le rôle de l’Araf : ses pouvoirs sont réduits car elle ne pourra émettre un avis conforme que dans le domaine de la régulation et non plus sur la tarification comme auparavant.

Cette réforme n’est donc pas compatible avec le vrai marché ferroviaire unique européen qui doit se mettre en place malgré les actions de retardement de certains lobbies français et allemands et des élus socialistes au Parlement européen.

Antieuropéenne, cette réforme est aussi anticoncurrentielle car outre l’invraisemblable retour en arrière pour l’attribution des sillons, elle vise en fait à retarder une interopérabilité totale sur un grand réseau transeuropéen, lui-même supervisé par des régulateurs indépendants aux pouvoirs accrus.

La réforme ferroviaire vise en fait à revenir à la SNCF d’antan avec un système unique et intégré : elle n’ouvre aucune perspective à la libéralisation des dessertes intrarégionales et des trains d’aménagement du territoire.

Bien évidemment le gouvernement se verra refuser sur ce projet le soutien de l’opposition.

De même, si en 2017 nos concitoyens choisissent l’alternance, comme ils viennent de le faire aux élections municipales, nous accélérerons l’ouverture à la concurrence, supprimerons l’Epic de tête et redonnerons à RFF son nom et sa totale indépendance.

Il va de soi également que nous ne pourrons accepter une éventuelle convention collective qui ferait passer toutes les entreprises ferroviaires sous les fourches Caudines d’un nouveau pseudo-statut de type SNCF, dont l’adoption mettrait fin définitivement à toute concurrence au détriment des clients et entraînerait inévitablement pour eux (fret et passagers) des hausses tarifaires.

 

Ewa

Trains plus larges : ça ne passe pas

Regiolissite

Un appel à la démission de Guillaume Pepy et Jacques Rapoport qui s’entendait entre les mots dans les propos de Jean-Christophe Cambadélis, le premier secrétaire du Parti Socialiste… Un rappel au bon sens de Ségolène Royal, la ministre de l’Ecologie, ironisant sur la nécessité  pour « les constructeurs et la SNCF de vérifier bien que les quais soient au moins au bon niveau » et demandant que « les responsables paient ». La commission d’enquête exigée par Frédéric Cuvillier, son  secrétaire d’Etat aux transports, voulant toute la lumière sur l’affaire. Le « Je suis en colère » de Jean-Jack Queyranne, le président de Rhône-Alpes, emboîtant le pas avec d’autres patrons d’exécutifs régionaux au président de l’ARF, Alain Rousset, qui n’entendait pas les voir pris « pour des pigeons », volatiles dans l’air du temps. Sans parler des organisation syndicales, CGT, SUD-Rail et UNSA qui l’avaient bien dit que ça devait arriver. Et une furieuse activité sur Twitter et les réseaux sociaux des uns ou des autres.  Même si Valérie Pécresse, chef de file de l’opposition UMP, n’a pu résister au plaisir d’une déclaration, la droite n’a quasiment rien eu à faire. C’est à gauche que le pavé sur les voies lancé par Le Canard Enchaîné dans son  édition de mercredi 21 mai à fait politiquement le plus de bruit en tombant. Une utilisation non dénuée pour certains de quelques arrière-pensées.

    A la veille de l’ouverture, le 16  juin prochain, de la discussion par les députés du projet de Réforme du système ferroviaire, nul doute en effet que l’affaire qu’il qualifie de « rocambolesque » des quais trop étroits ou des trains trop larges ne vienne à point nommé pour Frédéric Cuvillier faire la démonstration  de l’urgence de sa réforme remariant RFF et SNCF. Et contrer un certain nombre d’acteurs du secteur qui émettent des doutes sur la nécessité d’une telle réunification. Lesquels ne se privent pas en privé de commenter que le problème n’est pas là puisque, en l’état actuel des choses, c’est bien la SNCF qui, en tant que gestionnaire délégué des infrastructures appartenant à RFF, est chargée de planifier et de réaliser les travaux nécessaires sur les quais en temps et saison. Que c’est elle encore qui procède en tant que transporteur aux appels d’offre et que c’est bel et bien son ingénierie maison qui définit les cahiers des charges pour les constructeurs de matériels.

 Quant à Ségolène  Royal, qui a enfoncé le clou en dénonçant ceux qui avaient pris « des décisions aussi stupides », l’ex-présidente de la région Poitou-Charentes, on s’en souvient peut-être, fut la première, bien avant que huit régions ne s’associent pour commander ensemble directement leurs trains, à  émettre le vœu de pouvoir se passer de la SNCF pour la commande de ses TER.

Ch B

Ewa

Alstom Transport : la RATP, la SNCF et RFF penchent pour Siemens

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Ils se sont invités dans le débat. Les présidents de la RATP, de la SNCF et de RFF, qui représentent ensemble plus de 30% du CA d’Alstom Transport, ont « tenu à rencontrer », le mardi 6 mai au matin, le ministre de l’Economie, du redressement productif et du numérique. Le message qu’ont porté les trois patrons des entreprises publiques n’a pas dû déplaire à Arnaud Montebourg. Pierre Mongin, Guillaume Pepy et Jacques Rappoport ont, selon un communiqué commun, « souligné la nécessité de la taille critique » de la branche transports d’Alstom. Et, pour eux, « dans ce cadre  une approche européenne mérite toute l’attention des pouvoirs publics et du groupe Alstom ». Les termes sont choisis, mais entre l’américain GE et l’allemand Siemens, les grands donneurs d’ordre publics préfèrent manifestement le second.

Ils prennent cette position en tant qu’opérateurs souhaitant disposer d’un partenaire industriel stable. De l’autre côté du Rhin, Rüdiger Grube, le patron de la DB s’est lui, de façon plus classique, montré réticent à la perspective d’un rapprochement ferroviaire Alstom-Siemens  qui réduirait le nombre de fournisseurs. Mais les trois présidents d’entreprises publiques françaises, qui veulent  aussi agir en  fonction de l’intérêt national, entendent que leurs commandes soutiennent un champion national et européen fort à l’exportation. Ils s’intéressent donc à Alstom Transport en tant que « partenaire sur les projets d’innovation et d’exportation. » 
Mais le PDG d’Alstom, Patrick Kron, en présentant les résultats du groupe (CA stable à 20,3 milliards, et bénéfice en baisse de 28% à 556 millions)  a rappelé le 7 mai qu’il n’y a aujourd’hui qu’une seule offre, celle de GE, Siemens n’ayant pour l’instant présenté qu’une lettre d’intention. Alstom a ouvert sa « data room » à Siemens pour que l’Allemand puisse présenter une offre véritable. Selon lui, alors que la question stratégique se pose sur la branche énergie, le transport, dont le carnet de commandes est rempli pour 4 ans, est une « entreprise performante » . La question de la « taille critique » ne se pose pas face à des concurrents qui sont pour la plupart des « pure players » dans le transport dont le CA est le plus souvent inférieur à celui d’Alstom dans le transport, soit 5,5 milliards d’euros (voir aussi dans notre lettre confidentielle du 5 mai notre entretien avec Henri-Poupart Lafarge, président d’Alstom Transport).

Dans la perspective d’une cession de l’énergie à GE, Patrick Kron se dit intéressé pour consolider Alstom Transport par l’activité signalisation de GE. Ce n’est pas une surprise : depuis plus de dix ans Alstom « aimerait se développer dans les activités de signalisation ». Le PDG d’Alstom manifeste beaucoup moins d’intérêt pour les locomotives de fret, autre fleuron américain de GE, avec lequel il a du mal à distinguer « la synergie. »

S’« il y a des discussions sur la signalisation de GE », en revanche, « je  ne pense pas avoir entendu Siemens nous proposer d’acheter sa signalisation » dit Patrick Kron. Ce  qui pèserait très lourd, l’Allemand étant, depuis la reprise d’Invensys Rail, conclue en novembre 2012, devenu le leader mondial dans ce domaine prometteur et convoité.

Interrogé sur son avenir personnel si l’opération avec GE se conclut Patrick Kron a indiqué : « je ne pense pas que je serai durablement nécessaire pour l’avenir d’Alstom Transport ». On imagine que si Siemens au bout du compte l’emporte, c’est au moins un aspect de la question qui aura la même conclusion.

FD