Après plusieurs actions de chauffeurs de VTC (voiture de transport avec chauffeurs) en décembre, puis en janvier pour protester contre la hausse du taux de commission prélevé par la plateforme Uber le gouvernement a nommé un médiateur, Jacques Rapoport, pour aider à la résolution du conflit. Fabian Tosolini, le secrétaire général adjoint de la CFDT-Transport, explique à VR&T quels sont, selon lui, les enjeux pour le secteur.
Ville, Rail & Transports. Comment peut évoluer le conflit selon vous ?
Fabian Tosolini. Dans la matinée du 20 janvier, il y a eu une vraie évolution : lors d’une réunion avec Jacques Rapoport, les plateformes ont enfin reconnu que, quand un chauffeur travaille 40 heures par semaine, il ne gagne pas sa vie. A 60 heures par semaine, il gagne à peine un peu plus que le Smic. Et pour y parvenir, il ne prend pas de congés, n’a pas de protection sociale, minimise ses charges et optimise au maximum ses jours de connexion. C’est-à-dire qu’il fait de la maraude électronique, en se positionnant sur le bord d’une route, en infraction avec la loi qui l’oblige à repartir à chaque fois de son point de départ.
C’est une vraie évolution car cela va permettre de dire haut et fort à ceux qui veulent devenir chauffeur de VTC qu’il est difficile d’y gagner sa vie et qu’il y a une vraie dépendance vis-à-vis des plateformes. Pour un chiffre d’affaires de 5 200 euros bruts pour 60 heures de connexion par semaine, il faut enlever 1 300 euros de commission pris par les plateformes et de 1 800 à 2 280 euros de charges mensuelles (liées au coût de location de la voiture, assurances…).
Toutefois, nous risquons d’avoir de vraies difficultés à trouver un compromis avec les plateformes et le gouvernement n’y peut pas grand-chose. Nous pouvons essayer d’améliorer les revenus des chauffeurs de deux façons : en réduisant leurs charges et en revoyant les conditions d’utilisation des plateformes dans lesquelles se trouvent les tarifications des plateformes.
On peut aussi essayer de travailler intelligemment pour mettre au point une vraie protection sociale de ces travailleurs. Peut-être sur la base du volontariat.
VR&T. Comment voyez-vous le secteur des VTC évoluer ?
F. T. C’est une question que nous a posée Jacques Rapoport. Nous lui avons dit que c’est un secteur en train de s’organiser, où il y a encore un énorme chantier à construire. C’est aussi un secteur qui va s’autoréguler dans le temps. Aujourd’hui, beaucoup de chauffeurs sont en train de le quitter. D’autres arrivent mais toute l’effervescence que l’on connaissait jusqu’alors va se calmer. C’est un secteur d’avenir mais pas dans les conditions actuelles.
Il faut voir le côté positif des VTC : ils peuvent permettre de réduire l’utilisation de la voiture personnelle. Avec des mesures incitatives, ils pourraient utiliser des voitures vertes…
Il reste une question à poser : qui doit payer ? Est-ce le chauffeur aux conditions d’aujourd’hui ? Ou est-ce le client ? Les plateformes expliquent que si on augmente les tarifs, il y aura moins de clients. Les Parisiens sont-ils prêts à payer un peu plus cher ce service ? Il faut qu’ils sachent que quand ils s’assoient dans un VTC, ils garantissent 3,75 euros au chauffeur pour une heure. C’est un sujet sur lequel la CFDT travaille. Et sur lequel nous souhaitons interpeller les clients des VTC.
M-H. P