La ponctualité des trains va-t-elle s’améliorer dans les prochains jours dans les Hauts-de-France? Les voyageurs peuvent l’espérer, du moins ceux qui fréquentent les circulations de l’Etoile d’Amiens, qui doivent être gérées, à partir du 11 avril, par la commande centralisée du réseau (CCR). Les postes d’aiguillage répartis sur quatre sites vont en effet être regroupés dans une sorte de tour de contrôle régionale, la CCR, basée dans l’agglomération de Lille.
Stratégique et sensible
SNCF Réseau ne donne pas de précisions sur ce lieu sensible, et pas seulement parce que des câbles ont récemment été incendiés à
Vaires-sur-Marne, paralysant une grande partie des circulations de la gare de l’Est. «
Le site est stratégique. Il est autonome en électricité, en chaleur ou en froid. Deux groupes électrogènes assurent douze jours d’autonomie. Ils se mettent en route après deux minutes de coupure du réseau électrique RTE », explique le gestionnaire des infrastructures. Mais même très protégées, les commandes centralisées ne sont pas à l’abri de dégradations qui seraient perpétrées sur les câbles ou les commandes posés sur le terrain.
Le poste U de Douai, celui de Corbehem au sud, les deux d’Ostricourt au nord, et les trois de Somain à l’est sont concernés par ce regroupement. Parmi eux, le poste de Douai (le plus vieux de la région mis en service en 1957 et l’un des premiers informatisés de France, il y a plus de vingt ans) devenait trop compliqué à maintenir, notamment à cause de la difficulté à trouver des composants électroniques. Du 7 au 11 avril, ces installations devaient être connectées à la CCR.
SNCF Réseau a récupéré d’anciens locaux autrefois occupés par SNCF Voyageurs, pour y installer la CCR. A l’horizon 2024, le site couvrira l’ensemble des Hauts-de-France et sa dizaine de secteurs. A l’exception de celui de Creil passé dans le giron de la CCR de Saint-Denis (93) en novembre 2019.
Vision globale des circulations
Avec son immense Tableau de contrôle optique (TCO) qui occupe une grande partie d’un des murs, la première salle de la CCR de Lille, qui doit ouvrira à Pâques, donne une vision globale des circulations. Les informations sont disponibles sur les quatre tables des opérateurs, à travers un kaléidoscope de 8 écrans. Connectés ensemble, ils forment une seule image sur laquelle les agents circulation peuvent zoomer. Dans cette configuration, ils couvrent plus de 100 km de lignes et gèrent plus de 290 circulations par jour.
« Ce qui change tout, c’est la souris !», assure Franck Foglietta, chef de projet pour l’exploitant SNCF Réseau. « En deux clics, je peux tracer un itinéraire sur 100 km ». Une révolution pour celui qui a connu le crayon (et la gomme !) pour tracer des itinéraires sur une feuille de papier millimétré. « Avant, on traçait des itinéraires. Maintenant, on s’assure que ces itinéraires sont bien appliqués, et, surtout, on intervient en cas d’incidents imprévus, comme un dérangement de PN ou un problème sur un matériel, afin que les ordinateurs suggèrent un nouveau plan de transport », poursuit-il.
Changement de métier
Les enclenchements sont gérés par des logiciels développés par Alstom et Hitachi. Ils sont hébergés par des serveurs installés dans des salles informatiques situées en dessous de la CCR. « L’outil informatique est très puissant et sûr. Les processeurs travaillent en parallèle pour calculer chacun un itinéraire possible. Ceux-ci sont ensuite comparés pour s’assurer qu’ils ne sont pas différents. On considère alors qu’ils sont sûrs », explique Hella Bouakaz responsable du projet, qui représente la maîtrise d’ouvrage à la direction territoriale opérationnelle de SNCF Réseau.
Cette nouvelle organisation du travail, liée à un véritable changement de métier, doit aboutir à télécommander des secteurs géographiques élargies avec des technologies digitalisées pour fluidifier les circulations et les fiabiliser. En donnant en temps réel une vision plus précise du trafic, elle doit aussi conduire à une meilleure information des voyageurs. Dans les Hauts-de-France, 130 millions d’euros vont être investis dans ce projet.
Yann Goubin
19 commandes centralisées prévues à l’horizon 2040
Le réseau ferré national compte 1500 postes d’aiguillages qui gèrent 277 secteurs de circulations. Pour améliorer la régularité des trains et augmenter la capacité du réseau, ces postes sont, depuis quelques années, peu à peu regroupés dans des commandes centralisées du réseau (CCR) régionales.
Neuf d’entre elles sont déjà entrées en service : Bordeaux, Dijon, Lyon, Pagny-sur-Moselle, Rennes, Saint-Denis, Strasbourg, Toulouse, Vigneux-sur-Seine. La dixième, la CCR de Paris-Est est en cours d’installation à Pantin, à côté du Centre de commandement unique (CCU) Est-Ouest Francilien et de la centrale sous station (CSS). Suivront dans quelques jours les CCR de Lille et de Marseille en 2024. Au total, 19 commandes centralisées doivent être installées. Le processus doit s’étaler jusqu’en 2040, chaque CCR intégrant progressivement de nouveaux secteurs.