Le titre unique va faire ses premiers pas en France : selon nos informations, l’Etat a choisi le 6 décembre la société française Worldline pour déployer le sésame qui doit permettre, à terme, de se déplacer partout sur le territoire quel que soit le mode de transport. Ce titre unique avait été annoncé en février 2023 par Clément Beaune quand il était ministre des Transports, avec l’objectif de le lancer deux ans après.
Un contrat de 20 millions d’euros
Le contrat attribué pour quatre ans à Worldline représente 20 millions d’euros entièrement financés par l’Etat, nous explique-t-on côté DGTIM. Worldine, spécialiste des solutions de paiement, devra déployer une plateforme permettant de générer un titre de transport (avec une appli nationale) et un système de gestion des recettes. Le compte bancaire des voyageurs sera prélevé en fin de mois en fonction des déplacements qu’ils auront effectués. Les recettes perçues par le système seront ensuite reversées aux opérateurs de transport concernés.
Une première expérimentation doit débuter d’ici 18 mois sur l’axe ferroviaire Caen-Le Mans-Tours qui traverse trois régions (la Normandie, les Pays de la Loire, le Centre-Val de Loire). Le billet unique sera proposé pour utiliser le transport urbain, les TER et les Intercités. L’idée est de définir un modèle économique et de réfléchir à la pérennité du projet.
Au bout de quatre ans, l’Etat devrait remettre la main sur le système développé par Worldline grâce à des clauses de transférabilité inclues dans le contrat. L’objectif sera alors de mettre sur pied une structure dédiée, avec une gouvernance partagée avec les AO, Actuellement, une quinzaine de collectivités autorités organisatrices des mobilités (dont quatre régions) travaillent avec la DGITM sur le sujet. Or, on compte plus de 750 AO, indique-t-on du côté de la DGITM. Comment les convaincre de travailler toutes dans la même direction alors que la tendance actuelle des collectivités est plutôt de se démarquer des autres en imprimant leur propre marque sur les transports qu’elles financent? D’ailleurs, bien qu’il s’agisse d’un titre unique, la politique tarifaire restera entre les mains des collectivités. Le projet de billet universel a encore du chemin à parcourir avant d’arriver dans la poche des voyageurs.
« Des centaines de rames » amiantées pourraient-elles perturber l’ouverture à la concurrence des TER ? Le vice-président chargé des transports dans les Hauts-de-France, Christophe Coulon, a lancé un pavé dans la marre, s’inquiétant des effets d’une réglementation européenne de 2006 qui n’aurait pas été anticipée.
« C’est une directive européenne, Reach, qui édicte qu’on ne peut pas céder des biens contenant de l’amiante », s’est-il emporté devant des journalistes. Sont concernés des trains assez anciens dont la SNCF ne peut pas se défaire. « Or, dans le cadre de l’ouverture à la concurrence, nous devons mettre à la disposition de l’opérateur retenu les trains qu’il va devoir exploiter. »
L’Etoile d’Amiens, que les Hauts-de-France ont déjà mise en concurrence, n’est pas concernée. Mais l’Etoile de Lille l’est, avec « une quarantaine de trains » contenant de l’amiante, selon Christophe Coulon. Un lot que la région entend ouvrir à la concurrence en 2028. Les remplacer coûterait un milliard d’euros, dit-il. « Des centaines de rames sont concernées en France », met en garde l’élu LR.
Découvre-t-on soudainement le fameux règlement Reach concernant les substances chimiques, un texte de 2006 qui s’applique en France depuis 2011, alors que l’ouverture à la concurrence du ferroviaire n’était encore qu’un vague concept ? Le texte européen interdit en l’espèce à un opérateur de céder du matériel contenant de l’amiante, quand bien même il n’y a aucun danger pour le personnel et les passagers (l’amiante se trouvant dans les isolants de compartiments fermés). « Cela fait trois ans qu’on a identifié ce sujet et que rien n’avance. se plaint Christophe Coulon. Depuis 2021, nous avons demandé à l’Etat de se prononcer mais on n’a jamais eu de réponse ! »
Benoît Simian, lorsqu’il était député, avait posé la question en 2019. Il s’intéressait alors à l’amiante contenue dans les voitures Corail, mais le problème est le même que pour les TER. Et il avait reçu une réponse assez claire du gouvernement (plus d’un an plus tard) : « Seul un désamiantage total, forcément très coûteux, permettrait de les transférer ou de les louer à un autre opérateur. Comme autres solutions, les autorités organisatrices ou les opérateurs ferroviaires peuvent faire l’acquisition de matériels neufs ou d’occasion qui ne présenteraient pas ces contraintes, ou, s’ils veulent disposer de locomotives ou de voitures sans en financer l’acquisition, les louer auprès de l’un des loueurs de matériel ferroviaire qui ont émergé à la suite de l’ouverture à la concurrence de différents réseaux ferroviaires européens. »
La France n’ayant pas demandé de dérogation, le règlement Reach empêche de fait la SNCF de céder ses vieux TER aimantés —du matériel construit jusque dans les années 1990— aux régions qui les ont payés, et a fortiori à des concurrents. L’Etat fait profil bas, les régions sont peu loquaces… « C’est un sujet qui relève de l’application du droit. SNCF Voyageurs est tenue de se conformer à la réglementation européenne », indique sobrement l’opérateur historique, qui dans l’histoire est le moins gêné puisqu’il pourra toujours exploiter ses trains.
Cette situation « peut constituer un frein pour l’ouverture à la concurrence », s’inquiète de son côté l’Autorité de régulation des transports (ART). « Les appels d’offres régionaux pourraient rester inaccessibles aux nouveaux entrants ferroviaires, ces derniers ne disposant pas de matériel roulant adéquat en raison des coûts et délais de fabrication des équipements neufs et de l’absence de marché de seconde main pour des matériels exempts d’amiante », ajoute-t-elle.
L’ART dit vouloir agir avec les autorités organisatrices, l’Etat et la Commission européenne « afin d’identifier les leviers juridiques éventuellement mobilisables ainsi que la levée des éventuels risques de distorsion de concurrence qui pourraient se présenter entre l’opérateur historique et les entreprises ferroviaires alternatives ». Autrement dit demander une dérogation à Bruxelles, pour que l’ouverture des TER à la concurrence puisse se faire quel que soit le matériel utilisé.
Après plusieurs mois de discussions sur l’entrée d’un nouvel actionnaire dans le capital de Transdev, la Caisse des Dépôts a tranché : elle a annoncé le 16 décembre avoir retenu Rethmann pour engager des négociations exclusives lui permettant de prendre 32 % de parts additionnelles dans le capital de Transdev. Ce qui ferait du groupe allemand l’actionnaire majoritaire avec 66 % des parts, la Caisse des Dépôts en conservant 34 %. Et ce qui aboutira à la privatisation de l’opérateur de transport public français.
La Caisse des Dépôts explique son choix par la nécessité de soutenir le développement stratégique prévu en France et à l’international (qui représente désormais les deux tiers du chiffre d’affaires), mais aussi par la « stabilité managériale » qui en découlera, « l’équipe en charge du groupe restant aux commandes« . Le siège social sera maintenu en France.
L’opération pourrait devenir effective dans le courant de l’année 2025, une fois consultées les instances représentatives du personnel et sous réserve de l’approbation des autorités administratives et réglementaires compétentes.
La commission d’enquête publique a rendu le 9 décembre un avis défavorable au projet d’extension du tramway dans l’Eurométropole de Strasbourg. Ce chantier à 268 millions d’euros prévoyait la cinq kilomètres de voies nouvelles en direction de Schiltigheim (34.000 habitants) et Bischheim (18.000 habitants), accompagnées par les opérations massives d’urbanisme et des changements significatifs des plans de circulation automobile.
Jeanne Barseghian, maire de Strasbourg, a déploré ce « coup dur » qui empêchera probablement la municipalité écologiste de lancer les travaux du « Tramway Nord » en 2025. Pia Imbs, présidente de l’Eurométropole, a promis de « retravailler » le projet.
L’enquête publique qui s’est déroulée entre le 9 septembre et le 18 octobre a abouti à plus de 7000 contributions. Le rapport de la commission d’enquête (150 pages) a été remis à la préfecture du Bas-Rhin, mais son contenu n’a pas été révélé. La concertation autour du projet d’extension a été marquée par les oppositions virulentes et structurées des riverains et opposants, qui ont reproché à la municipalité sa volonté de « passer en force ». L’opposition s’est cristallisée autour du choix de tracé et la requalification de l’avenue des Vosges, axe structurant dans l’organisation des mobilités de l’agglomération.
L’opposition politique a fustigé l’équipe municipale en place. « L’avis défavorable de la commission d’enquête constitue une grande première dans l’histoire du projet tramway à Strasbourg. Si j’en crois les commentaires et les indiscrétions, il s’agirait davantage d’une contestation de la méthode de conduite du projet que sur le fond de celui-ci », observe Roland Ries, maire de Strasbourg jusqu’en 2020, initiateur de plusieurs phases antérieures du tramway dans l’agglomération.
« Le Tramway Nord est un élément majeur de notre politique de mobilité promise et engagée en 2020, qui comprend également 100 millions d’investissements en faveur des réseaux cyclables, l’aménagement de pôles d’échanges multimodaux, la transformation du secteur de la gare et la participation au fonctionnement du RER métropolitain », rappelle de son côté Alain Jund, vice-président de l’Eurométropole en charge des mobilités, lors du lancement du projet. Le « Tramway Nord » devait notamment soulager l’exploitation saturée sur les six lignes existantes au centre de Strasbourg. La mise en service était prévue en 2027.
C’est la première création d’une ligne de desserte du territoire de jour (TET) depuis que l’État est devenu autorité organisatrice des trains d’équilibre du territoire en 2011 : la liaison Nancy-Lyon a été relancée le 15 décembre. Le train est ainsi parti de la gare de Nancy à 7h46, pour une arrivée à Lyon-Part-Perrache à 12h16, en passant par Toul, Neufchâteau, Culmont-Chalindrey, Dijon-Ville, Chalon-sur-Saône, Mâcon, Lyon-Part-Dieu. Dans l’autre sens, le train part de Lyon-Part-Dieu à 15h52 et arrive à Nancy à 20h16.
Cette relance était réclamée par des élus depuis la suspension en 2018 de cette ligne pour travaux. 48,6 millions seront nécessaires pour la financer sur la période 2025 à 2028. Ils seront apportés par l’État (24,6 M€), la Région Grand Est (20,2 M€), le Conseil départemental de Meurthe-et-Moselle (1,8 M€), le Conseil départemental des Vosges (0,2 M€), et la Métropole du Grand Nancy (1,8 Me), qui ont coopéré pour faire revivre la ligne. Puis, à partir de 2029, le financement sera totalement assuré par l’Etat.
Dans un premier temps, entre 2025 et 2027, la région Grand Est va mettre à disposition des trains Régiolis. Ils seront remplacés à partir de 2028 par des voitures Corail. Durant toute la période, les abonnés des TER Grand Est pourront utiliser le service entre Nancy et Culmont-Chalindrey avec leur abonnement. « Pour les autres voyageurs et les autres parcours, la tarification Intercités sera appliquée, avec des prix attractifs et la possibilité de choisir sa place selon ses préférences« , indique dans un communiqué le ministère des Transports.
Désormais, le réseau national des TET comprend neuf lignes de jour et cinq lignes de nuit, précise encore le ministère.