
La chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes, saisie début 2023 par l’ex-président Laurent Wauquiez, vient de livrer son rapport d’évaluation de la politique du matériel roulant ferroviaire. Ses conclusions mettent en évidence les principales faiblesses qui aboutissent à des annulations et des retards de trains mais aussi à de l’inconfort. Une situation dénoncée par les usagers. « Notre enquête auprès des abonnés du TER fait ressortir que 53 % des usagers se disent satisfaits ou très satisfaits contre 87 % en moyenne pour les enquêtes de la SNCF », souligne Bernard Lejeune, président de la chambre régionale des comptes.
La juridiction s’est d’abord penchée sur l’adéquation entre le matériel roulant et le niveau de qualité de service arrêté par convention entre la Région et la SNCF. Force est de constater que l’offre de trains n’est pas à la hauteur. Entre 2017 et 2022, l’offre est restée constante avec 418 rames alors que la fréquentation des TER a progressé de 11 %. « Les voyageurs s’entassent dans des trains surchargés qui affichent en moyenne 104 voyageurs en 2022 contre 90 en 2017 », indique Bernard Lejeune.
30 trains de plus seraient nécessaires
Cette offre insuffisante impacte également la capacité à faire face aux aléas. « Il n’y a que 2,5 trains en réserve alors qu’il en faudrait 12 », précise le président. Pour assurer le plan de transport dans de bonnes conditions, la chambre régionale des comptes estime qu’il faudrait dès aujourd’hui 30 rames supplémentaires et 3,4 Md€ d’investissement jusqu’en 2035 pour moderniser et étendre le parc de matériel. Quelques années difficiles sont donc encore promises aux voyageurs. « Cinq à sept ans s’écoulent entre les commandes et les livraisons. De plus, les vieux Corail devront être remplacés ou subir une maintenance lourde avec 6 mois d’immobilisation », explique Bertrand Lejeune.
C’est le résultat d’un manque d’anticipation dans le remplacement des matériels et d’une mauvaise appréciation de l’augmentation de fréquentation, estime l’institution. « Il y a eu un jeu d’acteurs et un manque de confiance et de dialogue entre la Région et la SNCF. Au final, c’est l’usager qui paie les pots cassés », analyse Bernard Lejeune.
La maintenance souffre, elle aussi, de nombreuses faiblesses et nécessiterait 400 M€ d’investissement. Outre la concentration des technicentres sur le nœud ferroviaire lyonnais saturé, la polyvalence des ateliers est insuffisante alors que le parc compte une quinzaine de séries différentes. De plus, les équipements sont vieillissants et sous-dimensionnés, estime le rapport qui s’interroge sur les périodes de maintenance. « Seulement 35 % des opérations sont réalisées la nuit ou le week-end alors que c’est à ce moment-là que les TER circulent moins », s’étonne Bernard Lejeune.
La chambre régionale des comptes relève toutefois un point positif : l’efficacité industrielle de la SNCF. En effet, le taux de matériel disponible pour l’exploitation atteint 84 %, soit + 5 points en 5 ans, et dépasse de 7 points la moyenne nationale des TER.
Pour gagner en efficacité, la chambre régionale des comptes recommande à la Région de reprendre la propriété du matériel ferroviaire et des ateliers de maintenance pour avoir la maîtrise complète de sa politique d’acquisition et de maintenance lourde. Elle préconise aussi de lancer une étude sur la mise en place du cadencement qui permettrait d’optimiser l’utilisation du matériel.
Séverine Renard








