Compte tenu des lourds investissements à consacrer, les concurrents de la SNCF sont encore peu nombreux, mais ils concentrent tous leurs efforts sur une poignée de dessertes à grande vitesse : les plus rentables. Trenitalia, première challenger de l’opérateur historique en France, s’est positionnée sur le Paris-Lyon et envisage un Paris-Marseille. Sa concurrente espagnole Renfe attend le certificat de sécurité de ses trains à grande vitesse pour lancer aussi des liaisons Paris-Lyon et Paris-Marseille. Proxima, la compagnie créée par Rachel Picard (ancienne directrice de SNCF Voyages), veut relier Bordeaux, Rennes, Nantes et Angers depuis Paris.
Devant cet intérêt exclusif pour ce que l’on pourrait appeler les lignes vaches à lait, François Durovray veut lancer le chantier sur l’avenir des dessertes d’aménagement du territoire par les trains à grande vitesse. Auditionné le 22 octobre devant la Commission du développement durable de l’Assemblée nationale, le ministre des Transports a dit vouloir faire évoluer la loi : « Dans un cadre de marché ouvert, les règles du jeu peuvent également évoluer. Je souhaite que les nouveaux entrants participent à ces enjeux d’aménagement du territoire. Je ne vois pas au nom de quoi ils récupèreraient uniquement les dessertes les plus rentables et ne concourraient pas aux logiques d’aménagement du territoire que nous avons tous en partage« .
Invité le 15 octobre du Club Ville, Rail & Transports, le président de l’Autorité de régulation des Transports Thierry Guimbaud, tenait le même discours : « Si l’ouverture à la concurrence se concentre uniquement sur les lignes ferroviaires rentables, nous ne remplissons pas notre rôle », avait estimé le gendarme du rail.
Le directeur de SNCF Voyageurs, s’est félicité sur X (anciennement Twitter) de l’annonce du ministre : « Merci au Ministre @Durovray d’avoir ouvert le chantier des dessertes d’aménagement du territoire en grande vitesse. Avec l’ouverture du marché à la concurrence, cet équilibre entre dessertes rentables et déficitaires est mis à mal », écrit Christophe Fanichet. « C’est un enjeu majeur pour notre pérennité dans la concurrence », poursuit-on chez SNCF Voyageurs. L’opérateur historique qui subit la hausse du tarif des péages ferroviaires (+8% en 2024), participe aussi financièrement à la régénération du réseau ferré via une ponction de son bénéfice reversé dans un fonds de concours.
Assez logiquement, les nouveaux entrants qui bénéficient d’une réduction sur le tarif des péages lorsqu’ils arrivent sur le marché ferroviaire (lire : ici), se positionnent sur les dessertes les plus rentables. Ce qui peut déséquilibrer le modèle économique de la SNCF qui utilisait jusqu’à présent les lignes rentables pour financer celles d’aménagement du territoire, déficitaires. Selon le principe de la péréquation.
Que propose François Durovray pour inciter les concurrents de la SNCF à s’intéresser à d’autres dessertes ? Devant les parlementaires, il a promis une première série de propositions d’ici à l’été 2025.
N.A