TER : le rapport Grignon prépare la fin du monopole de la SNCF
Enfin ! C’était l’un des textes les plus attendus par le secteur ferroviaire : le rapport du sénateur (UMP) du Bas-Rhin, Francis Grignon, sur les conditions d’expérimentation de la concurrence dans les TER a été remis le 18 mai à Thierry Mariani, le secrétaire d’Etat aux Transports. Il semble avoir entendu les arguments de la SNCF, puisqu’il préconise de bien border le terrain avant de se lancer dans l’expérimentation, en particulier dans le domaine social. C’est précisément ce que réclame depuis de longs mois la SNCF, qui refuse de voir le scénario de l’ouverture à la concurrence du fret ferroviaire se répéter pour le transport ferroviaire régional (TER) : le fret a été libéralisé en 2006 et ce n’est que quelques années plus tard qu’une convention collective pour le fret ferroviaire a commencé à être mise en place. Ce texte, qui exclut la SNCF, prévoit des conditions de travail plus souples pour les cheminots du privé.
Francis Grignon estime d’abord qu’il faudra modifier la loi d’orientation sur les transports intérieurs (Loti) qui institue le monopole de la SNCF pour expérimenter la concurrence. Celle-ci devrait être testée sur un périmètre restreint, sur un groupe de lignes « territorialement cohérent et économiquement équilibré » représentant un minimum de 1,5 million de voyageurs/km. Le sénateur se prononce pour le recours à des délégations de service public, après appels d’offres.
Si un contrat est gagné par un opérateur concurrent de la SNCF, un principe est posé : les contrats de travail des cheminots concernés seront transférés au nouvel opérateur. Cette question a fait l’objet de vives discussions entre la SNCF et les opérateurs privés. La première défendait le principe d’un tel transfert, tandis que les seconds le rejetaient au motif qu’ils ne seraient pas compétitifs si des cheminots, dont ils décrient les conditions de travail, leur sont imposés. « Nous étions contre un détachement des salariés et cela n’a pas été retenu. S’il y a transfert, il doit se faire sur la base du volontariat et être bien encadré », indique un responsable de Veolia Transport qui attend de longue date l’ouverture à la concurrence.
Le sénateur a tranché en faveur du volontariat. « Nous proposons que les cheminots gardent leur statut. C’est-à-dire tout ce qui touche à leurs droits de retraite, la protection et la sécurité sociale, le plan de carrière, les billets gratuits, est maintenu », précise Francis Grignon qui ne cache pas qu’il s’agit d’inciter au volontariat. Que se passerait-il si les cheminots refusaient en masse le transfert ? Un mécanisme d’indemnisation de la SNCF avait été imaginé au départ, mais « en l’absence de base légale pouvant la fonder dans son principe », il a été écarté tant il risquait d’être contesté. De ce fait, rien n’est prévu, la SNCF devrait alors absorber le surcroît de personnel. « Dans un premier temps, l’expérimentation ne devrait concerner que quelques dizaines de personnes », nuance le sénateur.
Les cheminots pourraient toutefois être rebutés par les conditions de travail du privé. Pour mettre tout le monde sur un pied d’égalité, le rapport recommande aux partenaires sociaux de négocier une convention collective applicable à l’ensemble du secteur ferroviaire, y compris à la SNCF. Cet accord, s’il voit le jour, énoncerait des principes communs à toutes les entreprises, notamment sur la durée du travail. Conséquence, il faudrait auparavant abroger la loi du 3 octobre 1940 qui exclue le personnel sous statut, donc les cheminots, du droit commun du travail. Rappelons que cette loi donne au ministère des Transports la mission de définir les conditions de travail à la SNCF. C’est elle qui avait permis à l’ancien ministre des Transports, Jean-Claude Gayssot, d’édicter le fameux règlement RH0077 sur les conditions de travail des cheminots.
« Le RH0077 recouvre deux aspects. C’est un décret d’application des 35 heures à la SNCF. Dans ce cadre, il devrait évoluer et il faudra en négocier le contenu. Le RH0077 est aussi un accord d’entreprise. Il reviendra à la SNCF et aux organisations d’en discuter. L’idée de la direction étant de le rapprocher du décret », souligne Jean-Pierre Farandou. Pour le patron de SNCF Proximités, « il n’y a pas d’autres choix que d’aboutir à l’alignement des conditions de travail ».
De telles négociations s’annoncent plus que compliquées. Les syndicats de cheminots ont toujours montré un attachement inflexible au RH0077. S’ils acceptaient de telles négociations, ce serait plutôt dans le sens d’un alignement vers le haut des conditions de travail. En face, les entreprises privées n’auront de
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