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Sécurité. Ce qui doit changer

04 Jan 2016

Sécurité , Stratégie

Mis à jour le 23 mai 2017

Entretien avec Jacques Rapoport, PDG de SNCF Réseau.

La SNCF a été profondément meurtrie par l’accident d’Eckwersheim, dans lequel 11 personnes ont trouvé la mort le 14 novembre. Très vite, Guillaume Pepy et Jacques Rapoport, les deux patrons du directoire de SNCF, ont décidé de « remettre de la rigueur partout ». Les cadres de proximité doivent être au maximum libérés des tâches administratives pour se consacrer au terrain. Tout incident de sécurité remarquable fera l’objet d’un rapport immédiat au niveau national. Un directeur général Sécurité a été nommé, commun aux trois Epic. Jacques Rapoport, président de SNCF Réseau, revient pour Ville, Rail & Transports sur les accidents des deux dernières années et sur les mesures arrêtées.

 

Ville Rail & Transports. Peu de temps après le terrible accident d’Eckwersheim, Guillaume Pepy et vous avez annoncé des mesures d’urgence, destinées à remettre de la rigueur partout dans l’entreprise. Dans quel état d’esprit avez-vous pris ces mesures ?
Jacques Rapoport. Nous avons connu trois accidents graves ces trois dernières années, Brétigny, Denguin, Eckwersheim. Ils ont profondément bouleversé la famille cheminote.
Nous ne sommes malheureusement pas les seuls à connaître ces difficultés et nos confrères suisses, qui ont la réputation d’être les meilleurs, ont connu quatre accidents en deux ans.
SNCF a vécu pendant près de 25 ans sans accident majeur, ce dont tout le monde se satisfaisait. Au fil du temps, il a pu y avoir un moindre suivi dans l’application, pas seulement de nos référentiels de sécurité mais aussi dans ce qu’on peut appeler nos bonnes pratiques.
Le drame d’Eckwersheim a fait 11 morts, dont neuf collègues et deux accompagnantes. Dans tous les secteurs de l’entreprise, le bouleversement est considérable. Nous n’oublierons jamais nos collègues disparus dans cet accident.
Depuis nous avons réuni deux comités directeurs animés par Guillaume Pepy et moi-même. Il en ressort qu’il nous faut garantir en tout temps, en tout lieu et en toutes opérations une complète rigueur dans l’application des principes de sécurité.

VR&T. Avec sept personnes en cabine de conduite, n’avait-on pas enfreint
des règles de base ?
J. R. Cela montre qu’il peut y avoir des situations dans lesquelles on se dit : on connaît notre métier. La clef de voûte de la sécurité, c’est l’humilité. Nous pouvions penser totalement maîtriser le système, compte tenu, je l’ai dit, de l’absence d’événement grave pendant plus de 20 ans.

VR&T. Vous voulez instaurer de la rigueur partout. Comment cela se traduit-il dans le management ?
J. R. Nous avons considéré qu’il fallait une sorte d’électrochoc interne. Nous avons déjà lancé et réalisé deux grands plans d’action : Vigirail et Excellence sécurité. Mais, après Eckwersheim, il fallait montrer à toute l’entreprise que nous devons sortir des sentiers battus.
Nous avons traduit cette exigence en trois mesures qui concernent tout l’encadrement. Lequel, sans aucunement être mis en cause, doit percevoir qu’il se passe quelque chose, que demain est différent d’hier.
Cela ne veut pas dire : du caporalisme partout. Ce n’est pas parce qu’on se met au garde à vous que tout va aller pour le mieux. Ce n’est pas non plus de la centralisation partout. Mais il faut, partout, une rigueur qui se fonde sur le respect des bonnes pratiques.

VR&T. La première mesure concerne l’encadrement de proximité…
J. R. La productivité dans les structures – qui est indispensable –, la multiplication des systèmes d’information et des reportings font que les cadres de proximité sont progressivement transformés en opérateurs de tâches technico-administratives. Je ne jette la pierre à personne. J’en suis à ma troisième entreprise publique et je connais un peu les entreprises privées : c’est une tendance générale, ce n’est pas propre à la SNCF. Nous y avons mis un stop et dit : l’encadrement de proximité doit être sur le terrain. Je sais bien que cette décision, déjà prise sans succès par le passé, suscite le scepticisme. À nous d’assurer son effectivité. On y est totalement déterminé.

VR&T. Mais Gilbert Garrel, le secrétaire général de la CGT Cheminots nous dit : l’encadrement sur le terrain, cela avait déjà été annoncé après Brétigny !
J. R. En fait, cela a été annoncé il y a plus longtemps encore, il y a une quinzaine d’années. C’était dans le cadre de 20 ou 30 mesures. Les Dirigeants de proximité sur le terrain était l’une d’entre elles. Mais cette fois, nous ne prenons pas 20 ou 30 mesures, nous n’en prenons que trois. Toute l’entreprise sait qu’il faut que ça change.
Il faut une continuité entre l’entreprise qui décide et l’entreprise qui produit. S’il y a une coupure entre les deux, on peut lancer tous les plans d’actions les plus parfaits, ils n’iront pas jusqu’au bout. Nous ne prenons donc pas une mesure comme une autre. C’est un élément vital, pour que cette logique de rigueur s’impose dans toute l’entreprise. Cela implique que l’encadrement soit avec les opérateurs sur le terrain, que l’encadrement supérieur soit auprès de l’encadrement de proximité, pour l’assister, pas uniquement, ni même principalement, pour le contrôler.
Chaque niveau d’encadrement fait l’objet d’une décision qui traduit un changement effectif pour lui. Ce sont des décisions qui frappent les esprits. La plus importante et la plus difficile, c’est celle-ci, l’encadrement de proximité libéré de toute une série de tâches. Elle rencontre à la fois l’adhésion et le scepticisme des syndicats, et de l’encadrement lui-même. Les cheminots sont tout à fait d’accord… mais sceptiques. Les cheminots se demandent : que vont-ils faire là-haut, pour que ce ne soit pas que du discours ? Nous sommes conscients de ces difficultés, Guillaume Pepy et moi. Il va falloir être au front tous les jours. Nous y sommes déterminés.

VR&T. En deuxième lieu, vous demandez un rapport sur les incidents les plus sérieux. Cela ne va-t-il pas de soi ?
J. R. Cette décision vise à montrer que tout incident de sécurité est grave. Certes, on le sait déjà dans l’entreprise. On ne change donc pas de nature, mais on change d’intensité. Quand il y a un incident de sécurité important, on en rend compte le lendemain matin à un directeur général. Il faut montrer à toute l’entreprise qu’un tel incident doit être traité toutes affaires cessantes.

VR&T. Troisième mesure, cette fois pour les dirigeants…
J. R. Elle est conjoncturelle, mais très importante. Les dirigeants des branches et métiers n’auront en 2016 que des objectifs de sécurité.

VR&T. Vous avez complété vos mesures en annonçant la nomination de Frédéric Delorme au poste de directeur général Sécurité. Pourquoi créer ce poste ?
J. R. C’est la conséquence de ces mesures. Les mesures d’organisation sont subséquentes aux mesures de fond. La réforme ferroviaire est excellente, mais elle peut nécessiter des adaptations bien naturelles. Or à ce jour les responsabilités de sécurité sont encore éclatées. En fonction des règles européennes et nationales, les certificats de sécurité sont donnés pour les deux sociétés filles, Mobilités et Réseau. La société mère, elle, n’a pas de responsabilité en matière de sécurité. Elle n’a qu’une responsabilité en matière de coordination et d’animation.
Dans ce contexte, nous avons trois dirigeants de très haut niveau, Barbara Dalibard pour Mobilités, Claude Solard pour Réseau et Pierre Izard à l’Epic de tête, qui chacun sont en charge de sécurité, mais aucun à temps plein, tant ils exercent par ailleurs des responsabilités essentielles et lourdes.
Pour pallier cela, nous nommons un directeur général, à temps plein sur la sécurité, qui assure la coordination, parce qu’il est présent dans chacun des trois établissements. Nous ne changeons pas les règles juridiques. Quand nous en avons débattu entre nous, Frédéric Delorme s’est imposé, comme l’homme de la situation qui, à la fois, connaît très bien la maison, a des expériences à l’extérieur et a une réputation d’homme d’écoute et de dialogue. Il sera le délégué Sécurité du président de Mobilités, ainsi que celui du président de Réseau et le délégué Sécurité du directoire de l’Epic de tête. Il va aussi bénéficier de la grande expertise d’Yves Ramette, directeur général de SNCF Réseau Île-de-France.

VR&T. Que cela change-t-il pour les trois dirigeants que vous avez cités ?
J. R. Claude Solard – je commence par parler de Réseau que je connais le mieux – a une mission fondatrice : définir et déployer notre politique industrielle. De cela dépend l’accélération du renouvellement du réseau, l’industrialisation des travaux, les relations avec l’industrie, le déploiement des innovations, de l’Internet des objets, du numérique… J’ai besoin d’un directeur général à mes côtés totalement centré sur la politique industrielle.
Pierre Izard se centre sur l’international, sur Systra et sur la prospective technologique. Comment fonctionnera le chemin de fer en 2030, en 2040 ? Nous voyons arriver de grandes ruptures. Le développement de l’automatisation, la disparition progressive des équipements sol, etc. Tout cela fait que demain les trains dialogueront avec des centres de calcul via des liaisons radio. Barbara Dalibard, DG Voyageurs, veille à accélérer le développement des solutions de mobilité partagée pour nos clients, avec le train pour colonne vertébrale. La nomination d’un directeur général Sécurité va permettre à ces trois dirigeants de se centrer sur leur mission propre, spécifique et indispensable à la réussite de SNCF.

VR&T. Ces mesures sont d’ordre général. Sont-elles adaptées à l’accident tout à fait particulier survenu, lors des essais, à Eckwersheim ?
J. R. Deux décisions sur les conditions de réalisation des essais sur ligne à grande vitesse ont immédiatement été prises :
l première mesure : geler les marches d’essais à grande vitesse jusqu’à l’intégration des premiers enseignements des enquêtes dans les processus d’essais ;
l seconde mesure prise : un Comité d’expertise est confié à André Claude Lacoste entouré de plusieurs experts. Il est en charge d’approfondir les conditions d’organisation et les facteurs humains ayant pu concourir aux conditions de l’accident. Il s’attachera notamment à revisiter les procédures et leur application dans le cadre des essais.

VR&T. L’accident d’Eckwersheim est dû à une vitesse excessive. N’est-il pas possible, plutôt que de neutraliser les dispositifs de sécurité pendant les essais, de les paramétrer autrement, à V + 10 % par exemple ?
J. R. Il y a probablement plusieurs solutions possibles pour améliorer le niveau de sécurité des essais. Mais nous devons attendre les recommandations du comité d’experts piloté par André-Claude Lacoste. Un rapport intermédiaire nous sera rendu dans 3 mois et le rapport final est attendu dans 6 mois.

VR&T. Du fait de l’accident d’Eckwersheim, la mise en service de la LVG Est est-elle reportée, comme vous l’avez laissé entendre ?
J. R. Au lendemain de l’accident, j’ai dit qu’il était peu probable de penser qu’on tiendrait les délais. Aujourd’hui nous n’avons pas encore défini les solutions possibles. Nous y verrons clair avant la fin de l’année. Nous pourrons alors établir des scénarios, en discuter avec les financeurs et avec l’EPSF. Nous devrions prendre une décision début janvier. C’est l’objectif que nous nous fixons.
    Propos recueillis par
    François DUMONT

 

 

« Notre budget nous permet de fournir vraiment un très gros effort »

A l’occasion de l’entretien que nous a accordé Jacques Rapoport sur la sécurité après l’accident d’Eckwersheim, le PDG de SNCF Réseau nous a également donné des précisions sur le budget de l’Epic. Il reconnaît que la dette de l’infrastructure continue de croître et que le résultat financier se dégrade. Mais il souligne que les investissements de maintenance et de renouvellement du réseau augmentent nettement.

 

Ville, Rail & Transports. Dans un avis du 30 novembre portant sur le budget 2016 de SNCF Réseau, l'Arafer déclare que, faute de contrat conclu avec l’Etat, elle n'est pas en mesure de vérifier le respect de la trajectoire financière du gestionnaire d'infrastructure. Qu'en est-il ?
Jacques Rapoport. En effet, l'Arafer constate que le contrat de performance n’est pas finalisé. Le régulateur souligne aussi que la situation n'est pas totalement clarifiée sur les péages fret, et que SNCF Réseau a des créances sur l’Etat.
Je le souligne à chaque conseil d'administration de SNCF Réseau : il est difficile de gérer une entreprise d’infrastructures lourdes sans visibilité pluriannuelle. Le processus d’établissement de ce contrat de performance prévu par la loi est en cours. Je souhaite évidemment qu’il puisse aboutir au plus vite, dans l’intérêt du service public.

VR&T. L'Arafer relève aussi l'aggravation du déséquilibre financier.
J. R. Sur le fond du budget 2016, on peut voir le verre à moitié vide ou à moitié plein. L'Arafer voit le verre à moitié vide et c’est bien logique du fait de ses missions. De fait, le résultat financier se dégrade, la perte comptable augmente. La dette étant pour l’essentiel liée au financement des LGV et, comme il y a moins de LGV, on pensait qu'à partir de 2016 il y aurait moins de dette nouvelle… Mais il y en a toujours autant. Pourquoi ? Parce que les investissements ne sont pratiquement pas autofinancés, parce que les créances sur les collectivités publiques augmentent. Tout cela fabrique de la dette. C'est ce que constate l'Arafer et c’est exact.
Mais, en tant que gestionnaire d'infrastructure, je vois aussi le verre à moitié plein. La maintenance courante augmente de 3,6 %. C'est une croissance importante des budgets consacrés à l'entretien, dans le droit fil de ce que nous disons depuis des années et de ce que demande le ministre. Un budget de dépenses courantes qui augmente de près de 4 %, je ne sais pas où cela peut aujourd'hui se trouver dans le secteur public, et ce serait plus difficile encore à trouver dans le privé.
D'autre part, les investissements de renouvellement, avec 2,6 milliards, augmentent en réalité de près de 100 millions d'euros. C'est dû, d’une part, au fait que le programme GSMR touche à sa fin, ce qui nous permet de redéployer près de 120 millions d'euros.
De plus, la réforme ferroviaire, avec la création du gestionnaire d'infrastructure unifié, nous permet d’engager sans délai une performance achat bien meilleure. Nous faisons une économie de près de 150 millions par rapport à nos estimations résultant de la situation antérieure de séparation. Et, comme les budgets ne baissent pas, toute la productivité ainsi mobilisée est réinjectée en production de renouvellement, laquelle est orientée vers la partie la plus circulée du réseau.
Ainsi, avec 3,6 % de croissance de la maintenance courante, et 5 % de croissance de la maintenance patrimoniale (régénération du réseau), nous disposons d'un budget qui nous permet vraiment de fournir un très gros effort pour maintenir et renouveler le réseau existant. C’est évidemment considérable quoiqu’encore insuffisant puisque l’âge moyen du réseau va encore croître, à un rythme certes ralenti, mais croître tout de même. Rappelons qu’en Grande-Bretagne 3,5 millions d’euros annuels sont consacrés au renouvellement et 4 milliards d’euros en Allemagne.
La conséquence de cette indispensable croissance de l’activité, c'est que la situation financière se dégrade. Car nos recettes, elles, sont stables à près de 6,46 milliards d’euros. Les recettes péages n'augmentent quasiment plus. Comment pourraient-elles augmenter ? La situation du fret est difficile, et la marge du TGV baisse. Quant aux recettes des péages TER, eux aussi précédemment en hausse continue, c’est à présent terminé puisque les régions ne peuvent plus augmenter leurs financements. Il en résulte un léger tassement du trafic ferroviaire, qui, combiné avec une très légère hausse des péages, se traduit par une stabilité des recettes. Mais, comme les charges augmentent de plus de 4 % du fait de l’accélération de la maintenance et du renouvellement, il y a mécaniquement une dégradation du résultat.

VR&T. L'Arafer rappelle la promesse de 500 millions de productivité en cinq ans et semble ne pas les voir venir…
J. R. La création du GIU permet effectivement de mobiliser 500 millions de productivité en cinq ans. Nous l'avons dit et je le confirme pleinement. Et cette productivité est engagée sans délai. Dans un premier temps c'est la productivité sur les achats qui est mobilisée, grâce à l'unification des pratiques d'achat et l’allongement de la durée des marchés, comme par exemple l’accord-cadre d’un milliard d’euros pour la fourniture de 750 000 tonnes de rail signé en octobre dernier pour cinq ans assortis de quatre années optionnelles. Les gains sur les dépenses de fonctionnement sont engagés mais sont constatés plus progressivement. Ce qui importe dès aujourd'hui c'est que la productivité réalisée, avec les achats pour commencer, est conservée par l’entreprise pour accélérer maintenance et renouvellement plutôt que de le restituer aux financeurs. C’est là un effort de l’Etat à souligner.
    Propos recueillis par F. D.
 

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