La gare centrale d’Athènes sonne étrangement creux, ce dimanche 12 mars. D’ordinaire bondé, débordé de voyageurs pressés, le bâtiment ne fourmille pas comme à son habitude. Les rideaux sont tirés, les panneaux d’affichages sont vierges. Aucun train n’est à quai. Devant l’entrée, déposés au fil des jours par les passants, on distingue des bouquets de fleurs, des bougies, le portrait d’une jeune mère et de son bébé. L’une des 57 victimes de la catastrophe ferroviaire de Tempé.
Cela fait désormais plus de douze jours que plus aucun train ne circule, dans la gare centrale d’Athènes comme dans tout le reste de la Grèce. Depuis le 28 février et la mort de 57 personnes dans la collision « nez à nez » de deux trains dans le centre du pays – la pire catastrophe ferroviaire de leur histoire -, les Grecs découvrent avec horreur l’état de délabrement de leur réseau. Quelque 2 300 kilomètres de voies ferrées truffés d’équipements défaillants, exploités par des opérateurs en sous-effectifs chroniques et dépourvus, sur de larges tronçons, de tout système de sécurité automatique… S’il faudra des mois, voire des années, pour établir définitivement les responsabilités, la même question hante aujourd’hui l’ensemble du pays : comment en est-on arrivé là ?
« Pas un accident, un meurtre »
« Ce n’est pas un accident, c’est une négligence délibérée. Quand le profit est la première des priorités de tous les gouvernements depuis quinze ans et que la sécurité devient une simple variable d’ajustement, on se retrouve avec un réseau ferroviaire digne du Bangladesh. » Débitée suffisamment fort pour couvrir le vacarme dans les rues d’Athènes noires de monde, l’opinion de Petros résume bien l’état d’esprit général, ce 8 mars. Le jeune homme, qui refuse de donner son nom et fait partie du Front des étudiants en lutte, est l’un des 65 000 manifestants qui défilent ce mercredi dans toute la Grèce, pour l’une des plus importantes journées de mobilisation depuis la fin de la dictature des colonels, en 1974.
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Publié le 10/12/2024 - Marie-hélène Poingt