Le premier tronçon de 40 km du tram-train doit ouvrir d?ici à quatre ans. Sans le recours à un partenariat public-privé, la ligne n?aurait jamais vu le jour Décembre 2013, c’est désormais la date annoncée pour la mise en service d’un premier tronçon du tram-train de la Réunion. « C’est le top chrono. Mais il peut y avoir des aménagements du calendrier en fonction des contraintes des 12,5 km de tunnel à creuser, et cela nécessite un échelonnement, explique Pierre Vergès, vice-président de la région Réunion et délégué au projet de tram-train. Sur la partie Sainte-Marie – début de La Montagne (Bellepierre), nous sommes aussi contraints par l’agrandissement de l’aéroport. Il devra accueillir deux A380 commandés par la compagnie Air Austral, qui compte faire le premier low-cost d’A380. Lorsque 852 passagers débarqueront, il faudra pouvoir les accueillir autrement qu’en créant des parkings… » Le grandiose projet ferroviaire réunionnais, cher à Paul Vergès, le président du conseil régional, indispensable pour contrer le phénomène galopant de la voiture avec ses sempiternels et interminables bouchons aux entrées des communes – quelque 30 000 véhicules individuels sont comptabilisés en plus chaque année sur cette île dont le réseau routier n’est pas extensible à l’infini – est donc cette fois bien sur les rails. Lors de la troisième édition des Rencontres internationales des partenariats public-privé (PPP) qui s’est tenue au palais des Congrès de Paris, les 21 et 22 octobre, ce projet s’est même vu décerner le prix du « Défi relevé ». Une distinction destinée à valoriser la mise en œuvre des contrats de partenariat attribuée par le Club des PPP et la MaPPP, mission d’appui à la réalisation des contrats de partenariats. Noël de Saint-Pulgent, président de cette mission, tenait à saluer à cette occasion « le professionnalisme de la région Réunion dans la façon de mener ce projet, le respect des délais, de l’enveloppe budgétaire prévue par la région, avec deux offres finales et financièrement acceptables. C’est elle qui, pour la garantie de l’Etat, a “essuyé les plâtres”. Cela a été fait remarquablement, à tel point que l’enveloppe maximale pour la garantie que nous avions indiquée ne sera pas atteinte ». Partenariat public-privé. C’est l’évidence. Sans un tel montage, ce projet pharaonique, estimé aujourd’hui à environ 1,5 milliard d’euros pour les seuls 40 km de la première phase, serait sans doute resté dans les cartons. « L’enseignement à tirer pour cette procédure de PPP sur le tram-train, c’est d’abord commencer par un étroit partenariat public-public, poursuit Pierre Vergès. Compte tenu qu’il s’agit d’un projet hors norme pour une collectivité régionale, l’appui de l’Etat a été nécessaire et l’est toujours sachant que nous avons à répondre à des exigences posées par les conseillers régionaux, mais aussi par l’ensemble des autorités organisatrices des transports (AOT) de l’île. » Pour lui, la ligne ferroviaire ne doit donc pas s’arrêter à cette première phase, mais tenir compte d’un engagement conclu en 2005 en assemblée plénière d’un projet envisagé depuis l’est, à Saint-Benoît, jusqu’au sud, à Saint-Joseph, soit un linéaire de 130 km. Dans le cadre du protocole de Matignon, la première phase prévoit en valeur 2007 la part de l’Etat à 435 millions d’euros. Suite au Grenelle de l’environnement qui préconise de faire de la Réunion un territoire exemplaire au niveau du développement durable et conformément aux orientations stratégiques communautaires, le programme opérationnel européen (POE) 2007-2013 prévoit quant à lui 100 millions d’euros. Mais les promoteurs du projet comptent bien plaider auprès de l’Europe un effort plus important. Au-delà de ces 535 millions d’euros et des prêts à taux privilégiés à hauteur de 350 millions, le reste fait actuellement l’objet d’une négociation pour un effort plus important de l’Etat, de façon à atténuer la charge sur le groupement, laquelle charge d’environ 700 millions pèsera à partir de 2014 sur la région au titre de la redevance d’exploitation. L’engagement du protocole de Matignon concerne non seulement le tram-train, mais aussi une nouvelle route du littoral sécurisée à créer, qui s’annonce déjà très chère et très complexe à réaliser. « Il ne faudrait pas que nous soyons lestés financièrement dans le cas de la première phase du tram-train pour ne pas respecter ensuite nos engagements sur les extensions réclamées par l’ensemble de l’opinion et des acteurs institutionnels, hormis quelques-uns, et en même temps répondre à notre engagement d’accompagner l’Etat dans le cadre de la réalisation de cette nouvelle route. » Pour rattraper certains retards en matière d’équipement de son territoire qui comptera 1 million d’habitants dans les années 2020, la région investit beaucoup : 62 % de son budget récemment, soit environ 500 millions d’euros ! Mais ce gros effort n’est pas renouvelable à l’infini. D’autant qu’elle doit maintenant rembourser une dette liée à la prise en charge à 85 % de la route des Tamarins, ouverte en juin. Cette route estimée à l’origine à 850 millions d’euros aura coûté au final 1,146 milliard ! L’une des raisons ? Le choix de l’allotissement, qui s’est traduit par une très forte activité locale, mais qui a conduit à un surcoût, puisqu’il peut y avoir renchérissement des marchés successifs compte tenu de la concurrence moindre sur un petit territoire insulaire. « C’est aussi l’une des raisons qui nous a poussés à aller vers le PPP pour le tram-train de façon à ce que, dès l’origine, nous puissions apprécier le coût global du projet à l’arrivée », conclut Pierre Vergès.
Michel BARBERON