« J’ai toujours été opposé à cette discontinuité« , a affirmé Jean-Baptiste Djebbari , le 14 septembre lors de son audition devant la commission d’enquête parlementaire sur la libéralisation du fret ferroviaire. L’ancien ministre délégué aux Transports juge qu’en formant une plainte pour aides publiques illégales devant la Commission européenne, les entreprises plaignantes (ECR, filiale de la Deutsche Bahn, notamment, elle-même sous le coup d’une enquête) ont agi par « opportunisme » afin de « mettre sous pression le groupe SNCF, et Fret SNCF en particulier ».
Pour rappel, entre 2007 et 2019, Fret SNCF a reçu des aides d’Etat d’un montant total de 5,3 milliards d’euros. Et pour éviter le remboursement qui pourrait être demandé par Bruxelles à l’entreprise (et qui aboutirait à sa dissolution), le gouvernement a préféré l’option du « plan de discontinuité » économique prévue par les règles européennes visant à faire disparaître Fret SNCF (et sa dette) avant de relancer deux nouvelles entités à l’activité réduite, l’une dédiée à l’exploitation, l’autre chargée de la maintenance.
Deuxième pique du prédécesseur de Clément Beaune, à l’encontre cette fois de Margrethe Vestager, la commissaire européenne à la concurrence : « L’interprétation économique est erronée : le marché du fret ferroviaire dysfonctionne (…) et appliquer les règles de discontinuité sur un marché qui n’a pas digéré la concurrence contribue à affaiblir les entreprises, et le marché lui-même (…) Vouloir adopter des remèdes contre un opérateur ne va pas améliorer le fonctionnement du marché européen. Le risque, c’est d’affaiblir Fret SNCF sans pour autant améliorer ce fonctionnement« , a taclé J.B Djebbari.
Les règles du plan de discontinuité proposé par Bruxelles et accepté par la France prévoit de supprimer 10% des 5 000 emplois cheminots et d’abandonner 20 % des 730 millions de chiffre d’affaires de Fret SNCF. Concrètement, 23 lignes de transport ferroviaire de marchandises devront être cédées à la concurrence au 1er janvier 2024. Ainsi que 62 locomotives (sur un parc de 730 machines) et par l’abandon des trains entiers réguliers (à 95 % du transport combiné). Soit 23 flux à céder progressivement à d’autres opérateurs d’ici à la fin de l’année. Ces trafics ferroviaires resteront-ils sur les rails ou basculeront-ils sur la route, faute de repreneurs ?
N.A