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Ewa

Alerte à Bâle III !

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Les nouvelles normes bancaires internationales Bâle III risquent de se traduire par un assèchement du crédit. C’est la crainte de Jean-Pierre Audoux, délégué général de la Fédération des industries ferroviaires. Très mauvaise nouvelle pour les projets ferroviaires du Snit, et pour une industrie dont les perspectives sont redevenues sombres. L’horizon de l’industrie ferroviaire s’assombrit. En tout cas sur le marché français. Selon Jean-Pierre Audoux, délégué général de la Fédération des industries ferroviaires (FIF), dès 2012, les signaux négatifs s’accumulent et, en 2016, c’est quasiment le vide des commandes. Déjà, un événement majeur pourrait changer la donne des financements. La réforme du secteur bancaire Bâle III, dans laquelle le secrétaire général de la FIF voit un « véritable tsunami ». Principe de Bâle III : renforcer le niveau et la qualité des fonds propres des banques. Effet redouté : « les grandes banques françaises vont devoir multiplier par trois leurs fonds propres d’ici à 2016, la structure de leurs prêts va s’orienter essentiellement sur le très court terme et le crédit va très vite s’assécher », s’alarme Jean-Pierre Audoux. Or, « la composante ferroviaire du Snit (100 milliards d’euros d’investissements hors Grand Paris) est censée être financée à 80 % par des contributeurs autres que l’Etat ou des collectivités locales ». C’est-à-dire par des PPP, dans lesquels les banques occidentales vont de moins en moins se risquer. Si les grands projets sont plombés, le plomb est plus noir encore pour les commandes de matériel roulant. Passage en revue, secteur par secteur.
• Tramway. Sans faire exception, le matériel urbain ne sera, lui, pas le plus mal loti. C’est du moins, selon le délégué général, « la moins menacée de toutes les activités… qui sont toutes menacées ».
• Fret. Là, c’est clair, « il n’y a plus rien », et cela va vite se concrétiser. 2011 verra la fin de livraison des locomotives diesel Alstom-Siemens. Après, c’est le désert.
• Trains d’équilibre du territoire (TET). L’Etat s’est engagé à verser 300 millions d’euros pour la rénovation des trains Téoz, Lunéa, ou Corail. Mais la somme ira à la SNCF et donc d’abord à ses ateliers… « Les retombées pour les entreprises industrielles du secteur privé seront de ce fait mineures », regrette Jean-Pierre Audoux. Et, pour la suite, « l’Etat a annoncé un effort considérable de renouvellement du parc à partir de 2014-2015, représentant au minimum un milliard d’euros. Mais on peut s’interroger, compte tenu de la crise, sur ce qu’il va en advenir ».
• TER. Les deux matériels commandés, le Régiolis à Alstom, le deux-niveaux à Bombardier, pouvaient atteindre, compte tenu des options, 1 860 unités. Certes, ce nombre semblait déjà bien optimiste à la signature des marchés. Reste qu’on en est très loin, puisque les commandes passées atteignent 260 unités. Or, selon Jean-Pierre Audoux, les constructeurs « se sont calibrés pour des commandes plus importantes, et le point mort doit s’établir entre 400 et 500 unités pour chaque matériel ». On ne voit pas trop comment les régions, maintenant que l’Etat, en supprimant la taxe professionnelle, a amputé leurs recettes, pourraient aller nettement au-delà de ce qu’elles ont commandé.
• TGV. L’Etat a tranché plutôt en faveur de RFF, en décidant une hausse substantielle des péages dans les années à venir. La SNCF dit qu’elle doit complètement revoir le modèle économique. Sa menace : une limitation des dessertes TGV aux LGV. Dans une telle logique, on n’a plus besoin que de 300 rames. La SNCF ira-t-elle au bout de cette logique ? Cela ressemble plutôt à un argument massue dans une discussion serrée avec l’Etat. Toujours est-il qu’après la dernière rame TGV de la série livrée pour le Rhin-Rhône, plus rien n’est attendu.
Résultat des courses : en 2016, les industriels du ferroviaires redoutent, selon leur délégué général, de « ne réaliser plus qu’un quart ou un tiers du chiffre d’affaires actuel sur le marché français ; soit 500 à 700 millions pour deux milliards aujourd’hui ». Cette perspective, se désole Jean-Pierre Audoux, « contraste fortement avec notre volonté collective de faire de la filière ferroviaire industrielle française une filière des plus performantes au niveau mondial ».    

F. D.
 

Ewa

Le débat sur le ferroviaire : l’heure des choix

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Le 15 décembre va se tenir la dernière séance plénière des Assises du ferroviaire.? Les quatre commissions (concurrence et Europe, gouvernance, finance, industrie) vont remettre leurs recommandations au gouvernement. Dernières pièces versées au dossier dans nos colonnes : Pierre Cardo, président de l’Araf, se prononce en faveur d’un RFF chargé du pilotage, de la coordination et de la planification. Alain Quinet, DGD de RFF, explore, en pragmatique, quelques pistes permettant de résorber en dix ans le trou annuel du système ferroviaire. Louis Nègre, président de la Fédération des industries ferroviaires montre comment la filière veut s’organiser, de façon indépendante de la SNCF Entretien avec Pierre Cardo, président de l’Araf
« J’ai envie d’une SNCF qui gagne, mais est-il normal qu’on multiplie ses fonctions ? »

Pierre Cardo plaide en faveur d’une réorganisation de RFF et d’une SNCF qui puisse se concentrer sur son cœur de métier. Et refuse une holding à l’allemande qui n’est pas conforme au droit européen et comporte des risques de discrimination.

Ville, Rail & Transports. Vous avez été auditionné, dans le cadre des Assises du ferroviaire, par la commission de la gouvernance et par la commission chargée de l’Europe et de la concurrence. Quel message est le vôtre ?
Pierre Cardo. Il n’y a pas de système parfait. Le système issu de la réforme de 1997 est au milieu du gué et on ne peut pas en rester là. Il faut progresser par étapes. Une première étape pourrait être de regrouper les fonctions de planification, de pilotage et de coordination. Et cela ne peut être que le fruit d’une réorganisation profonde du rôle du gestionnaire d’infrastructure. Le système de la holding à l’allemande tel que certains le préconisent n’est pas satisfaisant. Il n’est pas conforme au droit européen, et il comporte des risques de discrimination, quand bien même il disposerait d’un régulateur puissant. D’ailleurs, la DB a été récemment condamnée pour discrimination par des tribunaux allemands. N’oublions pas non plus que ce n’est pas le système de holding qui a fait le succès en Allemagne, c’est tout un ensemble, qui passe entre autres par la refonte du volet social et le règlement de la dette.
Au-delà de la gouvernance, il faut définir les périmètres. Est-il normal qu’il y ait des infrastructures ou des prestations de services, dues à tout le monde, qui soient attribuées ou rendues par un opérateur qui peut être tenté de se favoriser ? En Allemagne, pour ne pas dépendre de la DB, certains nouveaux entrants ont dû investir dans des ateliers, compte tenu des difficultés rencontrées pour accéder ou bénéficier d’une qualité de service satisfaisante pour la maintenance de leur matériel. Mais tous ont-ils les moyens nécessaires pour de tels investissements ?

VR&T. Vos réflexions vont à l’encontre de ce que souhaite la SNCF, qui compte sur une position d’opérateur pivot pour conforter sa position de champion national.
P. C. Moi aussi j’ai envie d’une SNCF qui gagne ! Mais si on veut que l’opérateur historique, non seulement ne subisse pas la concurrence mais en bénéficie, est-il normal qu’on multiplie les fonctions qu’il doit assurer ? Aujourd’hui, on lui demande de faire de la gestion déléguée d’infrastructure et d’accomplir des missions pour les autres. Ne vaut-il pas mieux lui donner les moyens de se concentrer sur son cœur de métier, avec les plus grandes chances de réussite en France comme à l’étranger ?

VR&T. L’Araf a un an d’existence depuis le 1er décembre. Où en est la montée en puissance de l’Autorité ?
P. C. Les contentieux commencent à s’accumuler. Nous avons réglé deux différends, un troisième est en cours d’instruction, deux autres devraient nous arriver dans peu de temps. Nous avons aussi en cours trois procédures de sanction. Ce sont des procédures moins codifiées que les règlements de différends, plus souples, laissant davantage de temps à l’investigation, portant sur des manquements plus globaux que les différends et qui, comme leur nom l’indique, peuvent donner lieu à des sanctions. Les thèmes évoqués portent principalement sur le rôle de l’opérateur historique comme gestionnaire des infrastructures de services de fret et sur la qualité des sillons alloués. Tout cela montre que nous sommes utiles. Nous avons envie de jouer notre rôle, de clarifier les règles qui s’imposent aux acteurs, par exemple en rendant le document de référence du réseau plus lisible. Dans le cadre des Assises, on nous suggère de faire, à l’image des Britanniques, un « code du réseau » fixant les relations contractuelles entre acteurs. Cela permettrait d’être en amont des problèmes. Pourquoi pas, mais encore faut-il avoir les moyens de le faire. Or l’Etat, par la loi de finances, a plafonné nos ressources. Elles ne dépendent pourtant pas du budget de l’Etat. Nous disposons de 3,7 ‰ des péages versés à RFF pour fonctionner, part que nous avons fixée en bas de la fourchette qu’on nous proposait. Cela nous assure aujourd’hui 11 millions d’euros, et voici que, sans concertation, on nous plafonne à cette somme. Nous sommes, de plus, sous la menace d’un plafonnement d’emplois, alors que nous sommes en période de montée en charge, pour un effectif prévu de 60 personnes. Veut-on avoir un régulateur qui favorise les usagers, protège les acteurs, optimise l’utilisation du mode ferroviaire ? L’autonomie, cela passe aussi par les moyens financiers. Je ne suis satisfait ni dans le fond ni dans la forme. J’ai toujours été extrêmement rigoureux dans ma façon d’utiliser les fonds publics.
  

Propos recueillis par F.?D.

 

Entretien avec Alain Quinet, directeur général délégué de RFF
« On peut réduire l’impasse financière du système en dix ans »

Quelle trajectoire prendre pour trouver un équilibre économique ? Alain Quinet propose une réforme des modes d’organisation permettant d’améliorer la productivité du système comme la disponibilité commerciale du réseau.

Ville, Rail & Transports. On évalue l'impasse du système ferroviaire à environ 1,5 milliard d’euros par an. Tout le monde est d’accord : à ce rythme, on va dans le mur. Mais comment résorber l’impasse ?
Alain Quinet. La situation financière du réseau ferré est en effet préoccupante. Il faut dans un même temps se garder de postures radicales et parfois caricaturales. On peut toujours demander que l’Etat reprenne les problèmes à sa charge en augmentant les concours publics ou à l’inverse souhaiter une purge des coûts et un gel des projets. Si l’on s’en tient à ces postures de principe, il est difficile d’avancer, parce qu’aucune de ces solutions radicales n’est viable, et on reste au bout du compte avec son milliard et demi d’impasse sur les bras.
Ce qui me semble utile, c'est de voir de quelle façon on peut réduire dans la durée une impasse qui spontanément ne va pas se réduire. La première question, c’est celle de l’horizon et de la trajectoire qu’on se donne pour trouver un équilibre économique. Un des atouts du secteur ferroviaire, c'est qu'il peut s'inscrire dans un temps relativement long. C’est un atout, car il faut du temps pour réformer les modes d’organisation. Si on commence maintenant en se donnant un horizon de dix ans, cela veut dire, chaque année, franchir une marche de 150 millions d’euros. C’est à la portée du système, car les leviers de performance sont d'autant plus nombreux que l’horizon s’allonge. Si on raisonne sur un horizon trop court, on reste essentiellement dans une logique de transferts financiers entre l’Etat, RFF et SNCF, avec à chaque fois un gagnant et un perdant potentiel. On ne sort pas du débat sur le niveau des péages ou des concours publics. Si on raisonne sur un temps plus long, on peut mobiliser d’autres leviers de performance, qui améliorent le bien commun.

VR&T. A quoi pensez-vous ?
A. Q. De manière pragmatique on peut actionner trois leviers : celui de la productivité de l'ensemble du système, celui de l'augmentation de la disponibilité commerciale du réseau pour faciliter l’augmentation des trafics et celui des financements multimodaux.

VR&T. Mais ne sont-ils pas déjà actionnés ? On a l’impression d’entendre un air connu…
A. Q. Ont-ils tous été explicités ? Je n'en suis pas certain, et c’est un des intérêts des Assises du Ferroviaire que de les mettre en évidence. Quand on parle de productivité, on pense généralement aux effectifs. Mais le champ de la productivité, est beaucoup plus large. La productivité du capital, par exemple, est un enjeu très important : on peut davantage mécaniser l'entretien, souvent effectué avec un matériel vieillissant ; on peut davantage massifier les travaux de rénovation. Il y a aussi la productivité des trains, leur taille et leur taux de remplissage. Pour le fret par exemple, la longueur moyenne des trains est de 550 mètres et le réseau est historiquement conçu pour supporter des trains allant jusqu’à 750 mètres. A la demande de la ministre Nathalie Kosciusko-Morizet, nous nous sommes engagés à adapter l’infrastructure de certains axes pour permettre la circulation dès 2012 de trains de 850 mètres et, à terme, de 1 50 mètres.
Autre dimension de la productivité, celle du réseau. Notre réseau reste globalement sous-utilisé, même si les trafics sont denses dans certaines zones. Or, chaque pour-cent de trafic en plus, est une opportunité de péages supplémentaires et d’étalement des coûts fixes. C’est la responsabilité de RFF de mieux organiser la répartition des capacités entre circulations et maintenance ; ranger les travaux dans des fenêtres prédéterminées, mettre ces fenêtres la nuit lorsque les trafics de jour sont denses, ce qui permet de sécuriser et d'affermir les sillons. Le cadencement des horaires permet de mieux organiser les correspondances, de développer une logique de hub, et d’augmenter les capacités de trafic sur le réseau. Nous pouvons aussi avoir recours à « la domestication des trains », ce qui permet d'augmenter les trafics et la productivité du réseau, quitte à ne pas faire rouler chaque train à sa vitesse maximale. Regardez l'évolution des trafics entre Paris et Versailles. En 1922, quelques trains bolides ne mettaient que 23 minutes, sans arrêts. Aujourd'hui, les trains mettent en moyenne 31 minutes. Mais nous avons un trafic quatre fois plus dense et des arrêts intermédiaires en gare plus nombreux. Comme le trafic est plus dense les coûts de l’infrastructure sont répartis entre plus de trains, et donc le coût par train plus faible.
Vous le voyez, quand on allonge l'horizon, on dispose d’un « bouquet » de solutions plus large ; on ouvre des perspectives nouvelles. Pour mettre en œuvre ce bouquet, naturellement il faut une bonne gouvernance, que chacun soit responsabilisé sur ses choix et dispose d’un bon éclairage économique.

VR&T. Tout ceci vaut pour le réseau existant, mais comment faire pour assurer aussi la réalisation des meilleurs projets ?
A. Q. Il y a des possibilités, dans les années qui viennent, de redéploiement des concours publics en faveur de la modernisation du réseau existant, priorité affirmée par le nouveau projet de Snit. Après la mise en service à l’horizon 2017 des quatre lignes nouvelles déjà programmées, il y a une opportunité pour le faire. Selon nos calculs, la rentabilité financière d’une rénovation supplémentaire bien faite est en moyenne de 6 %, et sa rentabilité socio-économique d'environ 9 %. Le bilan carbone est également positif. C’est à comparer à chaque fois avec la pertinence d’un projet de ligne nouvelle. Là aussi, il faut se méfier des solutions trop radicales. Il est normal et sain d'avoir des projets. Je serais inquiet de voir une société simplement tournée vers l’apurement de sa dette.
Mais il y a deux aspects à considérer : pourquoi y a-t-il une pression pour la réalisation de nouveaux projets ? Et comment gère-t-on leur abondance ? La pression peut venir de bonnes raisons : parce qu'il y a une inégalité territoriale par rapport à la grande vitesse ou parce qu'il y a des zones saturées, comme l'Ile-de-France.
Mais il y a aussi de moins bonnes raisons. Par exemple lorsque la pollution n’est pas correctement tarifée. La mise en service de l’écotaxe poids lourd me semble de ce point de vue intéressante, de même qu’une extension de la fiscalité carbone. Dans les zones saturées, il faut aussi, comme nous le dit l’Araf, avoir une bonne tarification de congestion avant de penser à de nouveaux projets. Si on ne tarife pas bien la congestion ou la pollution, on aura beau construire en permanence des capacités supplémentaires, on va alimenter le problème autant qu’on va le résoudre.
Une fois qu’on a fait émerger les bons projets, on a deux modes de gestion de la rareté des fonds publics. L’un se fait par file d’attente. On attend en quelque sorte que les bons projets trouvent leur tour de table et qu’ils se mettent ainsi en bon ordre dans la file d’attente. Ce n’est pas totalement irrationnel, mais ce n’est pas totalement satisfaisant. Tout le monde tourne depuis longtemps autour d’une idée assez simple : il faut améliorer la gouvernance des projets sans dessaisir le politique, en donnant plus de poids dans la décision aux évaluations de la rentabilité collective de chaque projet.
De ce point de vue, le modèle du nouveau Commissariat général à l’investissement mis en place pour gérer le fonds du Grand emprunt pour les investissements d’avenir me parait un exemple intéressant. On a une vraie gouvernance, un mandat pour hiérarchiser les projets sur la base d’une enveloppe qui est prédéfinie et sécurisée. On pourrait s’inspirer de ce modèle dans le domaine des infrastructures en s’appuyant sur deux principes : une visibilité financière pluriannuelle à 5 ou 10 ans, un mandat donné à une institution, qui pourrait être par exemple l’Afitf, de hiérarchiser les projets sur la base d’une évaluation, débattue de manière ouverte, de la rentabilité socio-économique et financière des projets.

VR&T Vous parlez d’une vraie rentabilité socio-économique. Vous la jugez aujourd’hui mal évaluée ?
A. Q. Il faut faire évoluer les méthodes d’évaluation. Jusqu’à présent, ce qui fait la rentabilité socio-économique d’un projet c’est essentiellement le gain de temps. On regarde la minute gagnée entre le point A et le point B. Cela permet d’évaluer assez bien les gains de trafic et les parts de marché que le fer peut gagner sur l’aérien ou sur la route. Mais ce n’est qu’une partie de l’impact d’un projet sur la vie du réseau et le bien-être des usagers. Il faut tirer d’emblée les premières leçons de la mise en service de la LGV Rhin-Rhône pour le service annuel 2012. Elle n’offre pas simplement un gain de temps sur le tronçon concerné, mais de proche en proche elle a un effet significatif sur le graphique de circulation. Il faut donc avoir une approche globale et se demander quel effet peut avoir un nouveau projet sur l’ensemble du graphique de circulations, sur la robustesse des horaires, les correspondances, l’occupation des gares, etc. C’est ce qu’on fait pour les nouveaux projets comme Tours – Bordeaux ou Bretagne – Pays de la Loire. C’est d’autant plus important que beaucoup des nouveaux trains circulant sur ces futures lignes arriveront en zones très denses.
En résumé il faut davantage penser global, penser « réseau » que de manière isolée projet par projet, car la grande force du fer par rapport à l’avion notamment, c’est l’effet réseau entre les trains, entre les TGV, les TET, les TER. Penser réseau c’est se donner les moyens d’améliorer la qualité de service et l’équilibre économique du système.

VR&T. La SNCF est, on le sait, très hostile à une « dé-intégration » du système ferroviaire, au nom notamment de coûts importants engendrés. Qu’en pensez-vous ?
A. Q. Il y a certes un coût lié à la dispersion de la gestion d’infrastructure entre plusieurs acteurs, mais je pense qu’il est difficile d’en faire un chiffrage convaincant. Ce que je crois de manière plus fondamentale, c’est que dans un système où la gestion d’infrastructure est dispersée entre plusieurs institutions, on ne peut pas mettre en place les bonnes incitations. Dans un réseau « normal », le régulateur fixe des objectifs de performance au gestionnaire de réseau : performance financière, avec par exemple une cible de productivité, et performance en termes de qualité de service et de régularité (ce qu’on appelle en anglais le performance regime). C’est ce que l’on voit dans l’électricité ou les télécoms. Mais le système ferroviaire français ne fonctionne pas de cette manière. L’Araf pousse à une meilleure performance du système, mais le système n’est pas organisé aujourd’hui pour que l’Autorité puisse lui fixer des objectifs de performance.
Même si l’on unifie le gestionnaire de réseau, il faudra de toute façon faire vivre le système ferroviaire avec plusieurs acteurs : les AOT, la SNCF, les autres entreprises ferroviaires, le gestionnaire de réseau mais aussi les ports, les OFP… Le système doit être organisé pour vivre avec un nombre important d’acteurs et de parties prenantes. Il faut organiser ces relations sur la base d’une logique de droits et de responsabilités, en misant sur la transparence et la clarté des responsabilités de chacun.     
    

Propos recueillis par F. D.

 

Entretien avec Louis Nègre, vice-président du comité stratégique de la filière ferroviaire et président de la FIF
« Le pilotage effectif de la filière est d’abord l’affaire des industriels »

Louis Nègre se dit confiant quant aux travaux en cours au sein du comité stratégique de la filière. Ils devraient déboucher sur la constitution d’une filière industrielle ferroviaire organisée. A l’image de celles dont disposent l’Allemagne, la Chine ou le Japon.

VR&T. Les états généraux de l’industrie avaient clairement fait apparaître dans le secteur ferroviaire, comme dans la plupart des autres secteurs industriels, l’absence d’une véritable filière organisée et solidaire. Quel bilan tirez-vous des travaux et actions mis en œuvre depuis l’été 2010 ?
Louis Nègre. Vous avez raison d’évoquer le rôle salutaire, voire même « salvateur » des états généraux de l’industrie (EGI). Cette initiative majeure, lancée sur proposition du président de la République, a permis de prendre conscience que notre pays, contrairement à des pays aussi différents que l’Allemagne, la Chine, le Japon ou encore la Corée, manquait cruellement de véritables filières industrielles, et qu’en l’absence d’un travail collectif en profondeur, nos industries allaient continuer à perdre à la fois des marchés et des emplois. Cela a conduit les partenaires du secteur ferroviaire – j’y inclus les syndicats de salariés, particulièrement constructifs dans les groupes de travail –  à s’organiser, autour de la FIF, dans le cadre du comité stratégique de la filière industrielle ferroviaire, afin d’œuvrer à la mise en place d’une véritable filière dans notre pays.
Un premier rapport d’étape vient d’être remis par le comité de pilotage de la filière industrielle ferroviaire, que je préside, à l’ensemble des membres du comité stratégique, le 9 novembre dernier, avec en perspective, je l’espère, une validation par l’ensemble des partenaires à la fois de l’analyse de la situation actuelle et des pistes d’action proposées. Ceci débouchera sur l’élaboration du rapport définitif prévu pour mars 2012.

VR&T. Quelles sont les premières pistes évoquées dans ce rapport d’étape ?
Louis Nègre. Vous comprendrez bien qu’il m’est difficile d’être explicite aussi longtemps que ce rapport d’étape n’aura pas été validé dans le cadre d’une réunion officielle du comité stratégique de la filière industrielle ferroviaire.
Je puis néanmoins d’ores et déjà vous préciser que ce premier rapport vise à analyser les prérequis pour la constitution d’une filière industrielle ferroviaire organisée et pérenne et, également, à effectuer un certain nombre de préconisations à la fois vers les pouvoirs publics et vers les partenaires du dossier, afin de créer véritablement cette filière en la rendant solidaire et efficace.
Ces préconisations concernent cinq domaines prioritaires : la stratégie globale de la filière, le renforcement de la cohésion et de la solidarité au sein de la filière, la mobilisation des supports de la filière à l’international, le renforcement de l’efficacité économique des processus d’innovation et, enfin, la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences au sein de la filière, son image, son attractivité pour les jeunes diplômés aussi bien que pour les cadres expérimentés.
Des pistes prometteuses se dégagent déjà au sein des groupes de travail, avec pour objectif de renforcer les moyens d’action de la filière et surtout de les rationaliser. J’y associe bien sûr les procédures publiques d’aide à l’innovation « stratégique » ou encore à l’international. Une autre préoccupation majeure qui apparaît à travers certaines préconisations est d’assurer des relations contractuelles plus harmonieuses et plus équilibrées au sein de l’ensemble de la filière, ainsi qu’un autre mode de coopération entre les acteurs.
J’espère, quoi qu’il en soit, avoir prochainement l’occasion de détailler ces pistes et ces préconisations à l’issue de la prochaine réunion du comité stratégique de filière qui devra se prononcer sur ce rapport d’étape.

VR&T. Quelle est votre réaction à la suite des déclarations de Guillaume Pepy se proposant d’être le pilote de la filière industrielle ferroviaire ?
Louis Nègre. Je crois que la SNCF, grand client de la filière industrielle ferroviaire, est un partenaire indispensable et majeur. Son rôle de grand client peut s’exercer de façon déterminante à travers des décisions d’investissements qui restent à prendre sur la grande vitesse, et également en matière de prescription des matériels destinés aux régions. Quant au fret, il n’est pas interdit d’espérer… Pour ce qui concerne le pilotage effectif de la filière industrielle ferroviaire, ceci est d’abord l’affaire des industriels eux-mêmes, qui sont directement confrontés à la concurrence mondiale sur des marchés de plus en plus concurrentiels.
Je suis pleinement confiant quant aux perspectives offertes par les travaux en cours au sein du comité stratégique de la filière ferroviaire auxquels est associée la SNCF. Le gouvernement, par l’intermédiaire du ministre de l’Industrie, m’a confié en août 2010 cette mission, que j’entends remplir jusqu’au bout.
Je m’emploierai pleinement pour que ces travaux, en liaison étroite avec ceux menés dans le cadre des assises du ferroviaire et en concertation permanente avec l’ensemble des partenaires du secteur, en particulier les grands décideurs, débouchent sur la constitution d’une véritable filière industrielle ferroviaire, organisée et pérenne.

VR&T. Parallèlement à la mise en place du comité stratégique de filière, nous avons vu se succéder un certain nombre de démarches publiques autour de l’avenir de la filière. Après la commission d’enquête parlementaire « Bocquet-Paternotte » sur l’avenir de la filière industrielle lancée en janvier dernier, il y a eu le rapport du Boston Consulting Group commandé conjointement par Bercy et par le MEEDDM, puis, depuis septembre dernier, la mise en place d’un groupe « filière » dans le cadre des Assises nationales sur le ferroviaire. Tout cela n’est-il pas redondant ?
Louis Nègre. S’il est vrai que cette accumulation de « travaux publics » autour d’un même sujet qui est celui de la compétitivité et de l’avenir de la filière industrielle ferroviaire peut donner un certain sentiment de redondance, il n’en reste pas moins tout aussi vrai que cela montre bien que les pouvoirs publics ont pris conscience, depuis la mise en œuvre des états généraux de l’industrie, de l’importance stratégique de cette filière.
Je ne puis donc que m’en réjouir, a fortiori dans un contexte économique et financier planétaire aussi drastique, pour ne pas dire dramatique, qui pourrait, selon certains, remettre en cause les objectifs du Grenelle de l’environnement.
De mon point de vue, non seulement le mode ferroviaire à un grand avenir devant lui, mais encore la filière industrielle française dispose d’un potentiel, et bientôt, je l’espère, disposera d’une organisation qui lui permettra d’être au rendez-vous de l’avenir.    

 

Ewa

Industrie ferroviaire : Alain Bocquet et Yanick Paternotte réclament un Airbus du rail

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L’un est député communiste, l’autre, UMP. Tous deux ont présenté d’une même voix un rapport sur l’industrie ferroviaire qui met le doigt sur le défaut criant d’une Europe du rail. Et ils émettent sans attendre vingt-cinq propositions concrètes pour donner de la visibilité à une filière industrielle française dont les sous-traitants sont durement éprouvés par la mondialisation. «Tout le monde savait que c’était impossible à faire. Puis un jour quelqu’un est arrivé qui ne le savait pas, et il l’a fait. » C’est en se référant à Churchill qu’Alain Bocquet (PCF), président de la commission d’enquête parlementaire sur la filière ferroviaire française, et Yanick Paternotte (UMP), rapporteur, ont appelé, en présentant leur rapport, le 15 juin, à la création d’un consortium ferroviaire européen. Impossible ? Les industriels l’ont dit aux députés. Nécessaire pourtant, répondent ceux-ci. Ils voient les pays émergents se doter d’industries ferroviaires exportatrices : aujourd’hui, la Chine, devenue, soulignent-ils, le leader mondial de la construction ferroviaire, et demain, pourquoi pas, l’Inde ou le Brésil ? L’Europe, cependant, reste techniquement et politiquement morcelée. La commission d’enquête s’est rendue à Bruxelles, où on l’a reçue « poliment ». Mais, déplore Yanick Paternotte, « il n’y a pas d’envie » de la part d’une Commission européenne qui a pensé à ouvrir ses marchés sans consolider son industrie. L’unification réglementaire et la standardisation de la sécurité ne progressent pas. Or, sans elles, il ne peut y avoir de massification de la production. De plus, alors que pour l’ensemble des marchés publics (tous secteurs confondus) l’Europe ouvre la porte à un chiffre d’affaires de 312 milliards d’euros, les Etats-Unis l’entrebâillent avec 34 milliards, et le Japon la laisse quasiment close avec 22 milliards. Une situation particulièrement grave dans le ferroviaire. « Nos entreprises, relèvent les députés en tête de leur rapport, risquent de devenir d’autant plus vulnérables que l’Union européenne a trop largement ouvert ses marchés, sans exigence de réciprocité réelle vis-à-vis de certains pays tiers, qui, eux, conservent une priorité quasi absolue sur chacun de leur marché domestique. » L’argument de la réciprocité était jusqu’à présent tabou dans le langage communautaire. Sur ce point, on sent enfin, relève Alain Bocquet, un frémissement tout récent.
Les députés ne s’en tiennent pas à cet appel à l’Union européenne. Leur rapport avance vingt-cinq propositions à court ou à moyen terme (entre six et dix-huit mois), avec un maître mot : visibilité. Sans visibilité, les constructeurs souffrent et les sous-traitants meurent. Aussi demandent-ils à la SNCF, « mère poule ayant abandonné ses petits poussins », d’être à la hauteur du pilotage de fait qu’elle exerce encore sur la filière ferroviaire, en donnant d’ici six mois des perspectives sur ses prochaines commandes au cours des cinq prochaines années. Une SNCF qui de son côté se plaint régulièrement de manquer de visibilité sur des éléments constitutifs de ses activités, comme l’évolution des péages…
La Fédération des industries ferroviaires se dit très satisfaite des conclusions de la commission d’enquête. Son communiqué du 17 juin appuie notamment la demande « d’une perspective claire des investissements à moyen terme des grands donneurs d’ordres, au premier rang desquels la SNCF (proposition 1) », et approuve l’organisation d’un « forum annuel sur les perspectives des marchés ferroviaires (proposition 17) ». Elle soutient la création d’un fonds de modernisation des équipementiers ferroviaires (proposition 12) et la mise en place de clusters (proposition 10). Enfin, la FIF approuve l’exigence d’un cadre réglementaire favorisant, d’une part, la construction d’une Europe ferroviaire harmonisée, d’autre part, la mise en œuvre de modes de financement au service de l’innovation. Mais cette harmonisation et cette innovation peuvent-elles aller jusqu’à la création de « l’Airbus du rail » que souhaite la commission d’enquête ?     

 

F.D.

Ewa

Salon Sifer : « Amis équipementiers, délocalisez en Chine ! »

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« Les collaborations envisageables. » Naïvement, on imaginait, en lisant l’énoncé de la présentation des chinois de CRC et de la ville de Changchun dans le programme du salon Sifer (Lille), qu’il puisse y avoir un échange entre Orient et Occident. Une invitation à travailler main dans la main en utilisant le savoir-faire de chacun, le regard sereinement tourné vers le développement de trains meilleurs. « Les collaborations envisageables. » Naïvement, on imaginait, en lisant l’énoncé de la présentation des chinois de CRC et de la ville de Changchun dans le programme du salon Sifer (Lille), qu’il puisse y avoir un échange entre Orient et Occident. Une invitation à travailler main dans la main en utilisant le savoir-faire de chacun, le regard sereinement tourné vers le développement de trains meilleurs. En fait de collaboration, la délégation chinoise était venue à Lille mardi 5 avril pour vanter aux équipementiers et industriels occidentaux tous les bienfaits de la délocalisation de leur activité en Chine. Si l’on en croit la présentation enthousiaste de Yang Junliang, secrétaire général de la municipalité de la province de Changchun, les industriels trouveront à Changchun, capitale de la région du Jilin, une ville de 7 millions d’habitants dynamique, accueillante et entièrement tournée vers l’industrie. Changchun, où seraient aujourd’hui construits 50 % des trains chinois et 70 % des tramways et métros, « est la base de la construction ferroviaire en Chine », a avancé Yang Junliang. En plus de CNR, de CRC et de leurs coentreprises avec les constructeurs occidentaux, 130 équipementiers seraient aujourd’hui implantés à Changchun. Le secteur offrirait par ailleurs 13 laboratoires de recherche, et formerait 110 000 techniciens chaque année. Quant aux conditions d’implantation, elles seraient incomparables : une zone d’activité de 51 km2 située au sud-ouest de la ville, à 10 minutes de la gare et à 30 minutes de l’aéroport. Confort et services assurés, et vue imprenable sur les usines du géant de la construction, CRC, qui s’y est implanté en 2008. « Les partenaires occidentaux qui le visitent sont toujours surpris par notre nouveau site, c’est la base de production la plus étendue au monde », a soutenu sans complexe le vice-président de CRC, Ding Riguo. Quant à la zone d’activité elle « est l’une des priorités du 12e plan quinquennal », a tenu à préciser Yang Junliang. Pour preuve, les équipementiers qui souhaiteraient s’y installer bénéficieraient d’un fort soutien de la municipalité qui a « mis en place des mesures de réduction des frais d’implantation, un système d’impôts sur les bénéfices très avantageux et des avantages fiscaux pour les cadres dirigeants des entreprises ». C’est le secrétaire général de la municipalité de la province de Changchun qui vous le dit : « Nous fournissons un service du type “ aide-soignante ” pour les entreprises qui souhaitent s’implanter sur la zone ». Commentaire d’un industriel français rencontré sur le salon : « Délocaliser, pourquoi pas, mais l’important est de garder la maîtrise de nos produits et surtout de nos technologies. Et en Chine, on sait que c’est compliqué. »

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Homologation des trains en Allemagne : l’industrie ferroviaire dénonce le manque de transparence

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Le torchon brûle entre les constructeurs et l’EBA, l’agence qui délivre l’agrément de circulation en Allemagne. Les procédures sont jugées trop longues et aléatoires. Il y a six mois, Bombardier pensait sûrement avoir fait le plus dur en produisant dans les délais impartis 60 automotrices commandées par la Bahn. C’était oublier l’EBA, l’agence chargée d’homologuer les matériels avant leur mise en service. Car les fonctionnaires estiment que le cahier des charges n’est pas rempli : les automotrices ne répondraient pas aux normes en vigueur, ce que conteste le constructeur. Et pendant que chacun se renvoie la balle, les matériels sont immobilisés, au grand dam de la DB, qui perd patience. « Nous et nos usagers sommes les victimes de ce différend », déplore Rüdiger Grube.

Loin d’être un cas isolé, ce différend illustre les tensions croissantes entre l’industrie ferroviaire et l’Eisenbahn-Bundesamt autour de la question des normes de sécurité. Les procédures de l’EBA sont jugées trop longues et, surtout, aléatoires.

Selon les constructeurs, l’office ferait preuve d’une précaution exagérée, multipliant les contrôles et les exigences dont l’utilité ne serait pas toujours prouvée. Parfois, l’EBA changerait même brutalement ses prescriptions au beau milieu du processus d’homologation. Conséquence : des délais de livraison « retardés de plusieurs mois », dénonce la VDB, la fédération des industries ferroviaires. « Cela ternit notre image de marque et implique des coûts supplémentaires qui se chiffrent en dizaine de millions d’euros. » Sans compter les conséquences en cascade pour les opérateurs. Keolis en sait quelque chose : fin 2009, la reprise d’une franchise dans la Ruhr avait tourné au cauchemar, faute de trains ayant reçu l’agrément de circulation.

De fait, certains reprochent aux fonctionnaires de chercher avant tout « à se couvrir » : l’EBA vivrait dans la crainte des poursuites judiciaires qui pourraient être engagées à son encontre si elle autorisait la mise en circulation de trains à la sécurité défaillante.
 
Alors que le torchon brûle, le ministère des Transports a mis sur pied un groupe de travail. Objectif : publier une liste détaillée et exhaustive des normes exigées. Une façon de couper court aux contestations et d’accélérer ainsi la mise en service des matériels. Une décision saluée par la Bahn : 163 automotrices, dont celles produites par Bombardier, devraient recevoir le précieux sésame avant la fin de l’année, après de long mois d’attente.

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2010 : la croissance du ferroviaire profite à Bombardier

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Excellente année 2010 pour Bombardier et des commandes sur toute la planète. Le constructeur surfe sur le retour en force du mode ferroviaire. Reste à gagner la bataille des coûts. Pour Bombardier, 2010, dont les comptes seront clos à la fin de ce premier trimestre, s’annonce une année record. Les commandes de l’année devraient atteindre 10 milliards d’euros. Le carnet s’élève à 32 milliards de dollars (environ 25 milliards d’euros). Et, précisait le 10 janvier André Navarri, président de Bombardier Transport, devant l’Association des journalistes ferroviaires, ces commandes concernent des matériels aussi divers que les Twindexx en Suisse, les Zefiro pour Trenitalia, les Regio 2N en France, ou le monorail de São Paulo : « Tous les matériels, toutes les géographies : c’est une caractéristique de Bombardier. »

Après avoir atteint 10 milliards de dollars (7 milliards d’euros) en 2009, le CA sera en léger retrait, repli dû à la fin de contrats à cycle court. Le constructeur retient plutôt sa croissance organique de 11 % par an pendant les 4 années précédentes pour 6 % de croissance du marché. S’agissant des résultats, « on s’était fixé 6 % d’Ebit (résultat opérationnel) en 2009, on les tient, on fera 6,3 % en 2010 et l’objectif est de 8 % dans deux-trois ans. » La croissance du secteur ferroviaire vient de facteurs connus : urbanisation croissante, retour à la hausse du prix du pétrole, redémarrage de politiques « vertes », vieillissement de la population. André Navarri y ajoute un facteur imprévu : « l’effet boule-de-neige, lié à l’attractivité des matériels neufs. »

Problème : « Il y a une demande, il y a une offre, il faut trouver l’argent au milieu ». Problème crucial en Espagne ou à New York. André Navarri compte sur le développement des PPP et l’arrivée d’acteurs financiers qui cherchent à sécuriser leurs investissements.

Sur les grands marchés mondiaux, c’est d’abord la Chine qui vient à l’esprit. En Chine, rappelle André Navarri, « on a une situation différente de tous les autres constructeurs. On a deux joint-ventures 50/50, dans lesquelles nous avons le management. » Et de préciser, pour le produit phare qu’est le train à très grande vitesse : « le Zefiro 380 est fait dans une usine Bombardier. Sur 1 million d’heures d’ingénierie, on compte 500 000 heures en Europe, 500 000 en Chine. On se transfère la technologie à nous-mêmes. Nous sommes un constructeur chinois comme les autres. C’est un modèle qui fonctionne extrêmement bien. »

André Navarri ne craint pas d’affirmer, à propos du Zefiro chinois : « dans la grande vitesse, nous sommes en tête au niveau technologique. En vitesse commerciale, en aérodynamique, en consommation d’énergie, en capacité ». Certes, le Zefiro n’est pas encore sorti d’usine, mais cela ne saurait tarder : « J’ai vu les premières voitures dans notre site chinois de Qingdao. » Un site dont la capacité de production est de 90 voitures/mois en grande vitesse et très grande vitesse.

Quant à Changchun, site de construction de métros, il a permis à Bombardier de gagner un contrat à Singapour. Et surtout d’être au cœur d’un pays qui représente 40 % du marché mondial des métros. Stratégie comparable en Inde, où « on est les seuls pour l’instant à avoir trois unités de fabrication dans le pays ». Avec une commande de 420 voitures pour le métro de Delhi que Bombardier est en train de livrer. Autre réalisation notable, le Gautrain, en Afrique du sud. Un succès, avec 400 000 passagers/jour, alors que seul un tronçon est ouvert. La branche pour Pretoria doit ouvrir en ce début d’année. En Russie, Bombardier est distancé par Siemens ou Alstom. Cependant, le groupe a signé un accord sur la signalisation avec RZD. De quoi se renforcer dans un secteur où Bombardier reconnaît son retard. Alstom et Siemens « y font un CA d’1 milliard d’euros chacun, nous de 600 millions. » Mais André Navarri relève sa forte présence dans les secteurs les plus modernes et les plus profitables de la signalisation (ERTMS, CBTC). Pour poursuivre sur sa lancée, le ferroviaire doit remporter la bataille des coûts. De gros efforts sont en cours sur la réduction des coûts de maintenance, la disponibilité des matériels et la consommation d’énergie. Des facteurs décisifs pour  une industrie dont l’objectif est de « mettre des gens de la route vers le train ».

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En 2015, le premier TGV africain au Maroc

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Le projet TGV marocain a pris une dimension plus concrète depuis que le groupe industriel français Alstom a reçu une commande portant sur 14 rames de TGV Duplex. Un contrat de 400 millions d’euros a été signé avec le roi Mohammed VI. Et ce n’est qu’un début. Après près de trois ans de négociations, d’ajustement du projet et de son tour de table, le projet de ligne de TGV marocain, reliant à la fin de 2015 Tanger à Kénitra (200 km), a été officiellement lancé. Le 10 décembre 2010, le roi du Maroc Mohammed VI a signé à Tanger un contrat de près de 400 millions d’euros pour la fourniture de 14 rames de TGV Duplex par Alstom Transport. Ce train à grande vitesse sera un trait d’union entre les plus grandes villes du royaume. A l’horizon 2015, Tanger (700 000 habitants), son port de commerce et son nouveau pôle économique de Tanger-Tétouan, ne sera plus qu’à 1 heure 20 de la capitale politique Rabat (1,6 million d’habitants) et à 2 heures 10 de sa capitale économique, Casablanca (3,2 millions d’habitants), contre respectivement 3 heures 45 et 4 heures 45 aujourd’hui. A terme, l’objectif est de transporter 10 millions de voyageurs chaque année sur cet axe, et 6 millions dès la première année, avec un cadencement à l’heure pour débuter.

Si tout se passe comme prévu, fin 2015, les trains seront exploités à 320 km/h sur la première section de 200 km de la ligne à grande vitesse entre Tanger et Kénitra, puis ils rejoindront Casablanca en empruntant le réseau classique, où ils circuleront à 160 km/h ou à 220 km/h, « selon la vitesse d’exploitation prévue par le client marocain en 2015 », précise Alstom. Equivalente à la LGV Paris – Lille, la construction de la nouvelle infrastructure implique 1 200 ha de territoire à préempter avant le début des travaux de génie civil, programmés en juin 2011. Le tracé comptera 200 grands ouvrages et 7 viaducs dont un de 1,7 km. Equipée en ERTMS et GSMR, la nouvelle infrastructure, qui doit être livrée fin 2014, sera apte au 350 km/h. Elle sera dotée d’un poste de commande à distance et d’un central sous-station à Rabat.

Coté matériel roulant, les motrices et rames seront conçues et fabriquées principalement en France, et livrées à partir de juillet 2014. Elles seront assemblées en trains dans un atelier de l’ONCF à Mghogha, près de Tanger. « Le TGV que nous livrerons est dérivé de la série en cours de livraison à la SNCF », explique Gian Luca Erbacci, directeur général de la région Europe du Sud d’Alstom Transport. « Nous apportons quelques modifications, compte tenu des conditions climatiques du Maroc ; il sera adapté pour affronter le sable et les hautes températures, et son système d’information-voyageurs sera bilingue arabe-français. » Quelques fournisseurs marocains déjà référencés par Alstom seront associés à la sous-traitance. Avec Systra, Egis Rail, RFF, la SNCF et Alstom à pied d’œuvre dans ce projet, les industriels français sont toutefois les fournisseurs presque exclusifs d’un système TGV clés en main « made in France » de dernière génération. Il faut préciser que le plan de financement repose lui aussi très largement sur la France. Sur 1,8 milliard, le Maroc contribue à hauteur 500 millions d’euros. La France apporte 920 millions d’euros dont 75 millions donnés par l’État français et 845 millions d’euros de prêts attribués à taux plancher. La contrepartie à ce financement coule de source : l’attribution de gré à gré des marchés aux industries de la maison France. En dépit de cette coopération financière hexagonale, le Maroc aura mis quelques mois à boucler son tour de table, que les alliés arabes saoudiens, koweïtiens et d’Abou Dhabi sont venus compléter avec une participation à hauteur de 380 millions. Depuis la signature d’un protocole d’accord avec la France en octobre 2007, le projet est passé de 2,2 milliards à 1,8 milliard et le nombre de trains à fournir de 18 à 14. Mais, comme le notait le PDG d’Alstom Transport, Philippe Mellier, cité par l’AFP : « C’est un très beau contrat pour un début. »

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Métro de Rennes : les dessous d’un choix industriel

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Lors de son conseil communautaire du 18 novembre, Rennes Métropole a attribué le marché relatif au système de transport (rames, voies, guidage, courants forts, etc.) de la ligne B du métro. C’est l’offre de Siemens SAS qui a été retenue au terme de deux ans de négociations. Rennes sera le premier réseau de transport à être équipé du Cityval, véhicule automatique à pneus sur voie béton, qui s’inspire du fonctionnement des tramways. « L’offre de Bombardier-ETF était également excellente, mais nous avons préféré Cityval pour son évolutivité d’une part et son coût attractif d’autre part », précise Guy Jouhier, vice-président délégué aux transports. En effet, le cahier de charges porte sur 110 000 voyageurs par jour avec 4 000 personnes par heure et par direction (pphd), lors de la mise en service en 2018, avec une fréquence de 3 mn. A moyen terme, le système devrait pouvoir accepter 9 000 pphd sans modification du génie civil, puis à terme 15 000 pphd. Le Val 208 de Siemens, en service actuellement sur la ligne A, ne permet pas d’augmenter la capacité au-delà de 7 700 pphd sans impacts réels sur les stations. Au contraire, au-delà de 9 000 pphd, le Cityval permet l’adjonction d’une troisième voiture qui peut s’intégrer dans les stations actuelles de 35 m. « Le système LIM de Bombardier présentait également une évolutivité intéressante, mais était surdimensionné aux heures creuses », commente Guy Jouhier. C’est donc le même fournisseur que pour la ligne A qui a été retenu, mais « ce point n’a pas influencé notre décision, souligne Guy Jouhier, car avec vingt ans de différence les deux systèmes présentent des technologies très éloignées ». Peut-être cependant que quelques économies d’échelle pourront être réalisées, car le poste central sera identique aux deux lignes. Mais l’offre de Bombardier était semblable sur ce point. La commande ferme porte sur dix-sept rames doubles, pour un montant de près de 213 millions d’euros. « La différence de coût avec Bombardier était significative, environ 50 millions d’euros, et n’était pas compensée par les frais de fonctionnement », déclare Guy Jouhier. Les coûts de maintenance et d’exploitation du Cityval seront en effet moins élevés que sur la ligne A (16 millions d’euros par an, personnels compris). Par ailleurs, le projet de Bombardier était plus consommateur d’énergie, même en comptant le chauffage des voies aériennes l’hiver pour le Cityval.

« Nous attendons une subvention de 105 millions d’euros de la part de l’Etat sur ce marché. En outre, le Val fait partie du contrat de projet Etat-région ; la région, le département et le Feder seront donc également sollicités », conclut Daniel Delaveau, président de Rennes Métropole. Au total, l’ensemble de la ligne B est toujours évalué à environ un milliard d’euros.

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La bataille Eurostar se poursuit en justice

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Alstom UK versus Eurostar PLC. Les filiales anglaises des deux groupes s’affrontent en justice, suite à l’attribution à Siemens du contrat de « TGV » de l’opérateur transmanche. Après le grand déballage public, « l’affaire Eurostar » se joue maintenant dans les prétoires.

Ulcéré par le résultat de l’appel d’offres Eurostar, mais aussi par la manière dont a été conduit le premier appel d’offres de TGV passé de manière autonome par l’exploitant ferroviaire Transmanche, Alstom poursuit ses actions en justice sur deux fronts. Devant la Haute cour de Londres, le jugement en référé a, certes, établit qu’Alstom n’a pas pris l’appel d’offres Eurostar suffisamment au sérieux, en se référant notamment à un audit interne d’Alstom. Mais le groupe français à bien montré à travers son recours que certaines irrégularités avaient émaillées la procédure d’appel d’offres. « Contrairement à ce qui a pu être écrit, notre action devant la Haute cour de justice de Londres se poursuit. Le juge a souligné que les offres ont dû se faire sur une cible mouvante et que les véritables critères d’évaluation n’ont pas été communiqués. Nous avons d’excellentes raisons de poursuivre notre action sur le fond » explique le directeur général d’Alstom Transport France Jérôme Wallut. Autre point soulevé durant l’audience, le fait que Siemens a eu pour consultant « Interfleet », celui-là même qui a préparé l’appel d’offres pour le compte d’Eurostar. La défense devra apporter la preuve qu’Interfleet a bien érigé des « Chinese wall » entre ses deux clients, faute de quoi, il y aura clairement un problème de conflit d’intérêt. La mention vantant la mission d’Interfleet auprès d’Eurostar a d’ailleurs bizarrement disparu du site internet du consultant britannique, et à l’heure ou nous écrivions ces lignes Interfleet n’avait pas apporté la preuve que des consultants différents aient travaillé pour Eurostar et Siemens. Sur le front bruxellois, la plainte d’Alstom devant la DG market a entraîné l’ouverture d’une enquête par la Commission européenne. Les autorités britanniques doivent répondre aux questions posées par la Commission sur le respect des procédures sous 4 semaines, soit avant le 23 novembre. La Commission pourra se satisfaire de ces réponses ou poursuivre ses investigations, ce qui peut prendre des mois, voire des années. Mais les poursuites d’Alstom seront-elles maintenues jusqu’à ce terme ?

Plusieurs sources estiment qu’à ce stade, l’industriel français peut tirer un trait sur cette commande, mais que son action vise à obtenir des compensations financières à la hauteur du préjudice subi, sur la base des irrégularités qu’il a pointé. Dans cette histoire, Alstom s’est senti floué, utilisé comme un lièvre par un donneur d’ordre qui avait, selon lui, fait son choix dès le départ : « Ce qui a été mal vécu chez nous est que depuis le 14 septembre 2009, Eurostar nous a toujours dit qu’il n’achèterait pas tant que les règles de la CIG ne seraient pas modifiées. Qu’Eurostar ait eu depuis le début une préférence pour Siemens, pourquoi pas, mais il ne peut pas l’avantager en tordant les aiguilles. On veut bien jouer et l’on accepte de perdre, mais il faut que les procédures soient claires. Au bout du compte, notre constat amer est qu’Eurostar a tout fait pour que l’on reste dans la course, sans être en mesure de gagner. Acheter des trains est un réel métier. Ce n’est pas de l’arrogance, que de dire cela. C’est du business, on ne peut pas laisser passer cela » explique Jérôme Wallut. Si l’on se réfère à ses auditions lors de l’examen du référé par la Haute cour de Londres, Eurostar – qui ne souhaite plus s’exprimer publiquement sur cette affaire –, estime pour son compte qu’il a convenablement et équitablement informé Alstom sur ses intentions et la procédure et que le problème vient surtout de l’insuffisante implication de l’industriel français dans cet appel d’offres auquel il a répondu au départ « a minima ». En juin 2009 faute de visibilité sur le référentiel technique, Alstom a, en effet, arrêté de travailler sur l’offre et n’a repris qu’en septembre à la demande d’Eurostar. La justice tranchera sur les questions formelles, mais sur le fond de cette affaire, deux questions risquent de rester ouvertes. La première pour Eurostar : comment un opérateur aussi averti a-t-il pu mener sa consultation en laissant planer à ce point le doute sur ses intentions réelles de passer à l’acte d’achat, avec toutes les conséquences que cela peut avoir pour ses fournisseurs ? La deuxième pour Alstom : comment un industriel ayant une telle expérience des appels d’offres a-t-il pu à un tel point se méprendre sur les réelles intentions d’un client qu’il est censé connaître si bien ?

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Les nouveautés des équipementiers au salon Innotrans

Au salon Innotrans, véritable « mondial du ferroviaire » qui se tient tous les deux ans à Berlin, les visiteurs ne viennent pas uniquement pour le matériel roulant ! Les nouveautés sont aussi aux stands des équipementiers CROUZET : Nouveaux interrupteurs PBX Secure

Dans les transports ferroviaires, de nombreuses applications embarquées (verrouillage des portes, essuie-glace, manipulateurs de traction et freinage, disjoncteurs, arrêt d’urgence…) ou fixes intègrent des interrupteurs comme composants critiques de sécurité. Pour répondre aux exigences très élevées de ce marché, tant question fiabilité que concernant l’environnement difficile dans lequel ces interrupteurs sont appelés à fonctionner, Crouzet a développé sa nouvelle gamme PBX Secure. Qualifiés par la SNCF pour une utilisation ferroviaire, ces interrupteurs à manœuvre positive d’ouverture brevetés, éprouvés (EP 11227362) et conformes à la norme CEI 60947-5-1 pour les contraintes d’isolation sont classifiés feu-fumée (NFF 16 101/102), étanches (selon versions) et utilisables entre -50°C et +85°C. Ces interrupteurs avec une grande surcourse après atteinte de la position d’ouverture positive, se présentent sous plusieurs conditionnements : cosses à vis, capot de protection, cosses pliées, cosses droites, levier à galet, montage en batterie…

Présent depuis plus de 50 ans dans le secteur ferroviaire européen, Crouzet propose tout une gamme d’interrupteurs, de minirupteurs et de détecteurs de position pour les applications de détection ou de commutation dans tous les types de matériels roulants (grande vitesse, trains régionaux, tramways…) ainsi que dans certaines installations fixes (postes d’aiguillage, appareils de voie, barrières de passages à niveau, disjoncteurs et sectionneurs moyenne tension). Toujours pour des applications ferroviaires embarquées, Crouzet propose une gamme de moteurs et réducteurs pour actionneurs électriques (pantographes, essuie-glaces, portes et accès, vitres, alimentation et protection électrique…)
 

 

 

 

KOCKUMS INDUSTRIER : le Megaswing, un wagon intermodal « passe-partout »

Venu de Suède, le wagon porte-camions Megaswing de Kockums Industrier était présenté à Innotrans comme « votre propre terminal intermodal ». De fait, à la différence de la plupart des autres wagons intermodaux sur le marché, le Megaswing n’a besoin d’aucune installation de type grue ou quai pour charger (en 5 minutes) ou décharger (en 3 minutes) « tous les types de remorques ou semi-remorques » européens – mais pas leur camion tracteur. Chaque wagon est chargé individuellement à partir d’une surface plane au bord de la voie, même sous caténaire, et « une demi-heure » suffit pour remplir « tout un train ». Le Megaswing se présente comme un wagon-poche dont la poche, par le jeu d’actionneurs hydrauliques, pivote sur un des deux bogies – ou des trois bogies en version articulée. L’astuce est que la poche, une fois désaxée par rapport à la voie, s’abaisse et se relève grâce à des vérins qui la transforment en rampe d’accès sur laquelle la semi-remorque peut être poussée ou tirée par le camion tracteur. Non seulement ce wagon peut être chargé ou déchargé partout où un plan se présente le long de la voie à moins de 150 mm plus bas que la surface de roulement du rail, mais il devrait également passer sur la plupart des voies ferrées du continent européen, ainsi que sur les ferries ferroviaires. Ce wagon est en effet léger (la tare de la version sur deux bogies ne dépasse pas 24 t) et s’inscrit dans le gabarit G1 (le plancher de la poche n’est qu’à 270 mm du rail), ainsi que dans des courbes de rayon supérieur à 75 m. Seul inconvénient avoué par son constructeur : le prix est « quelque peu » plus élevé que chez la concurrence.
 

 

 

 

SEKISUI : innovations pour la voie

Le groupe japonais Sekisui Chemical présentait sur son stand trois réalisations concernant la voie ferrée : éclisses en plastique renforcé par fibres (FRP), dispositif d’insonorisation Calmmoon Rail et traverse synthétique en mousse d’uréthane renforcée par fibres (FFU). Zoom sur ces deux dernières innovations, qui ont particulièrement attiré la curiosité des visiteurs.

 

Calmmoon Rail : la sourdine du rail

Frappez un coupon de rail : à moins d’être fissuré, il émet un son aussi harmonieux que celui d’une cloche. Un doux son que n’apprécient pas forcément les riverains des voies ferrées. Pour réduire les bruits de roulement au niveau du rail, Sekisui a développé dès 2002 le profilé autocollant Calmmoon, à appliquer sur la semelle et l’âme du rail à traiter. À partir de ce produit dont les applications sont multiples (ponts, navires…), Sekisui a réalisé un dispositif enrobant l’ensemble du rail en dessous du champignon : Calmmoon Rail. À l’intérieur d’une tôle fine structurant ce dispositif dont la masse atteint 4 kg/m (à comparer aux 60 kg/m des rails aujourd’hui les plus utilisés en Europe), une couche de Calmmoon est appliquée, ainsi qu’une couche de polyéthylène. Si cette dernière absorbe le son en provenance de l’âme et de la semelle du rail (par le dessous), le Calmmoon transforme en chaleur le reliquat d’énergie oscillatoire. Lors de tests effectués à Wagram (Autriche), ce dispositif de section à peu près triangulaire, boulonné au rail par une sorte d’étrier, a permis d’abaisser de 2 à 11 dB le bruit d’un train de fret, selon les plages de fréquence. De quoi convaincre l’EBA (Bureau fédéral des chemins de fer allemands) à approuver, en avril 2010, l’utilisation du dispositif sur le réseau ferré allemand. Et à Innotrans, les visiteurs invités à frapper un rail équipé Calmmoon Rail ont pu constater par eux-mêmes la « mise en sourdine » du rail dans les fréquences auxquelles les oreilles sont les plus sensibles !

Traverse synthétique en FFU : retrouver les propriétés du bois

Matière plastique d’une même densité que le bois et aussi facile à travailler que ce dernier, la mousse d’uréthane renforcée par fibres (FFU) présente de nombreux avantages qui en font un candidat idéal pour la production de traverses. Des traverses offrant une « très faible » conductivité électrique et une résistance chimique « très élevée ». Sur une durée de vie prévisible de 50 ans, leur coût de maintenance devrait être « minimal ». Et en plus elles sont réutilisables grâce à l’emploi de résines synthétiques permettant de combler d’anciens trous de perçage, tout en étant recyclables en fin de vie ! L’usage de telles traverses a été approuvé en Allemagne en mars 2009 par l’EBA.