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Ewa

Des pistes pour les petites lignes

Gap-briancon

Quel avenir pour les petites lignes ? C’est le titre d’un rapport opportunément publié par le Cerema au cours de l’été (lire le rapport ici). Pour son auteur, Bruno Meignien, ces lignes de desserte fine (comme on les appelle aujourd’hui), dont bon nombre sont aujourd’hui menacées de fermeture faute d’investissement suffisant dans le passé, souffrent plus souvent « d’un déficit d’offre que de demande ».

Dans cette étude d’une quarantaine de pages, Bruno Meignien propose une méthode pour évaluer le potentiel de ces lignes, en étudiant de façon précise le territoire qu’elles desservent (emplois salariés, tissu industriel, établissements scolaires, accès aux équipements, hôtels…) et en comparant les temps de parcours selon les modes (trains, cars, voitures, vélos…). Cette méthode doit permettre de prendre des décisions fortes, estime cet expert du ferroviaire : fermer une ligne ou l’exploiter au maximum de ses capacités « avec un système optimisé et en bon état ». Et d’insister : « Les solutions intermédiaires souvent observées, si elles ont le mérite de sauvegarder un patrimoine, conduisent à transporter peu de voyageurs pour un coût élevé, voire très élevé. Il faut donc évaluer le coût d’investissement et d’exploitation pour aboutir à la fréquence/cadence voulue – deux heures, une heure, une demi-heure, un quart d’heure – en fonction du nombre de voyageurs attendus ».

La fréquence doit être régulière tout au long de la journée. Supprimer des trains en heures creuses ne permet qu’une économie toute relative, souligne le rapport. Et rend le transport ferroviaire moins attractif. « Contrairement aux idées reçues, un système optimisé requiert des trains en heure creuse, et des autocars en heure de pointe ! », souligne Bruno Meignien. Un exemple : « quelques autocars circulent en heure de pointe sur la ligne du Blanc-Argent pour améliorer la desserte de certains établissements scolaires, le système de signalisation très simple (et très peu coûteux) ne permettant pas d’augmenter la fréquence des trains en heure de pointe ».

Quant à la vitesse des trains, elle ne doit pas être maximale mais calculée dans la recherche du meilleur compromis entre temps de parcours, optimisation de la desserte et rotation des trains, poursuit ce spécialiste du ferroviaire.

Pour réduire les coûts d’entretien d’une ligne, il faut d’abord disposer d’une ligne rénovée. Faute de quoi, « le coût d’entretien courant augmente graduellement tandis que les vitesses nominales et les capacités déclinent, dans une logique économique très éloignée de l’optimum », souligne encore le rapport. Le coût de rénovation complet des petites lignes est considérable sur les prochaines années, mais au fil du temps, la modernisation du réseau permettra de revenir à des niveaux de dépenses beaucoup plus faibles et de réaliser des économies sur l’entretien courant et l’exploitation de l’infrastructure.

Le Cerema propose aussi de recourir à des matériels légers ou lents pour réduire les coûts d’entretien puisque c’est le tonnage qui définit en large partie les modalités d’entretien des infrastructures ferrées. Une voie en bon état et frugale peut être entretenue à un coût proche de 10 000 euros par km et par an, affirme le rapport.

Quant à la tarification actuelle des péages d’utilisation des voies, elle est inadaptée car elle ne donne aucune visibilité aux régions sur les coûts fixes. « D’une part la redevance d’accès, qui en couvre une bonne partie, est payée par l’État. D’autre part, les péages payés au train.km par les Régions, donc comme des coûts variables, recouvrent en réalité pour l’essentiel le restant des coûts fixes. En d’autres termes, moins il y a de trains, moins il y a de péages perçus et moins le coût fixe est couvert. Or sur de nombreuses lignes TER et notamment les plus petites, très peu de trains circulent en heure creuse… En partie parce que la tarification n’y incite pas ! », est-il expliqué.

D’où la proposition du Cerema de forfaitiser la redevance de 2 à 3,40 euros/train.km selon les régions. « Ce qui donnerait une meilleure vision sur les coûts d’infrastructures et inciterait à concevoir l’offre, non pas comme une juxtaposition d’horaires indépendants, mais comme un ensemble cohérent et cadencé, quitte à absorber la pointe par des trains en unité multiple, voire des autocars complémentaires ».

Parmi les autres recommandations, le rapport plaide pour une gouvernance plus locale et le recours à la polyvalence dans les missions des cheminots apportant plus de souplesse aux services. Les petites lignes pourraient ainsi devenir les nouveaux « laboratoires » du ferroviaire.

M.-H. P.


La relance d’un ensemble disparate

7,8 milliards d’euros d’ici à 2028. C’est le montant nécessaire au sauvetage des petites lignes selon le rapport Philizot, du nom du préfet qui a planché sur le sujet.

L’état de ces quelque 9 000 km de ces lignes (rebaptisées depuis quelque temps dessertes fines du territoire) est à 60 % dans un état jugé « très dégradé » du fait d’un sous-investissement chronique. Plus des trois quarts des voies faisaient, en 2017, l’objet d’un risque de limitation de vitesse, voire de suspension de la circulation. « Ce phénomène, sauf investissements massifs, est appelé à s’accentuer dans les 10 ans qui viennent : à terme, près de 6 500 km sont susceptibles d’être concernés par de telles mesures, représentant les trois-quarts des lignes, un risque de fermeture pesant sur plus de 4 000 km, soit plus de 40 % du réseau », reconnaissait en début d’année le ministère des Transports, en rappelant que ces lignes sont inégalement réparties sur le territoire.

Pressé par les élus territoriaux, attachés à la vitalité de ce réseau, le gouvernement a esquissé en février dernier un projet, basé sur des plans d’actions territoriaux avec des engagements différenciés au cas par cas. Avec en toile de fond un principe : les lignes « les plus utilisées » pourraient être reprises par SNCF Réseau, les autres devraient être financées par les régions.

Par ailleurs, le ministre délégué aux Transports plaide pour l’expérimentation de « trains légers » (autorails ou trams-trains électriques, voire aussi autonomes), moins lourds donc moins coûteux en infrastructures, mais aussi à l’achat et en exploitation. Pour Jean-Baptiste Djebbari, il s’agit de « favoriser l’émergence de filières industrielles comme celles du train léger » pour « sortir des standards de régénération du réseau et d’exploitation de la SNCF ».


Près d’un milliard d’euros annuels de dépenses

Les petites lignes représentent 9 137 km sur un total de 28 364 km.

Elles accueillent chaque année 17 % du trafic des TER.

L’État et SNCF Réseau financent actuellement la majeure part des dépenses en faveur des petites lignes, en couvrant plus de 85 % des charges d’entretien de ces lignes et un tiers des coûts de renouvellement. Cela représente 710 M€ par an.

Les Régions financent 15 % des charges d’entretien via les péages et deux tiers des coûts de renouvellement. Ce qui équivaut à environ 280 M€ par an.

Ewa

Pourquoi le train léger n’est pas la solution miracle pour les petites lignes

Gap-briancon

Construire des trains légers pour redynamiser les petites lignes comme le propose Jean-Baptiste Djebbari, est-ce une bonne idée ? Dans le cadre de son plan de sauvetage pour les « dessertes fines du territoire », le secrétaire d’État aux Transports souhaite en effet le développement en France d’une filière autour du train léger.

SNCF Réseau, qui travaille sur le sujet à la demande du gouvernement devait lui remettre vers la fin février un rapport sur la question. Il en ressort qu’il ne faut pas croire que le train léger permettra de remédier seul au casse-tête des petites lignes.

 

Passage en revue des obstacles sur la voie…

Avant même de pouvoir lancer des trains légers sur une ligne, il faut de toute façon remettre les voies en bon état, ce qui ne permet donc pas de s’exonérer de travaux de régénération.

Actuellement, aucun train « léger » ne circule sur le réseau français même s’il y a en eu dans un passé pas si lointain avec les A2E (même si avec leurs 25 tonnes pour 50 places, ils ne sont pas si légers), ou encore les X2000 corses (18 tonnes, jusqu’en 2012, mais ce sont des autorails à voie métrique).

En utilisant des trains moins lourds que ceux qui circulent aujourd’hui, on pourrait réduire la masse du train au voyageur transporté et donc limiter l’usure des rails et permettre des normes d’entretien des voies moins contraignantes. Circulant à une vitesse réduite et pouvant freiner rapidement, donc dotée d’une meilleure « sécurité active », les trains légers permettent aussi le maintien de certains passages à niveau ou de traversées piétonnes en gare, évitant de coûteux investissements.

On en attend aussi des coûts moins élevés tant en entretien qu’à l’achat. Toutefois, pour bénéficier d’économies d’échelle, il faut un minimum de commandes.

Aujourd’hui, les constructeurs essaient déjà de concevoir les matériels les plus légers possible pour limiter notamment les coûts en énergie. Mais avec des limites pour ne pas remettre en cause la robustesse du matériel et le confort des passagers (notamment au niveau des vibrations que n’apprécient ni les voyageurs, ni les équipements électroniques). Sans oublier qu’un matériel très léger aura une longévité plus limitée et sera donc difficile à amortir.

Recourir à des trains légers (dont la vitesse de circulation ne peut excéder 100 km/h) n’est envisageable que si les voies sont isolables du reste du réseau ferré (en raison des normes plus souples mises en œuvre sur ces voies) et que si elles sont essentiellement empruntées par des TER.

Malgré ces contraintes, le Cerema (Centre d’études et d’expertises sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement) a calculé que plus de 2 500 kilomètres pourraient accueillir les trains légers. « Pour affiner l’évaluation, et si on enlève les liaisons trop isolées qui n’atteindraient pas un seuil intéressant de nombre de rames et donc d’économies d’échelle, on a un potentiel d’une centaine de rames qui pourraient circuler notamment autour de l’étoile de Brive et Limoges, l’étoile de Tours, l’étoile de Saint-Pol, les lignes Besançon-Le Locle, Nice-Tende, Grenoble-Gap et Nancy-Vittel », précise Bruno Meignien du Cerema.

De son côté, un représentant d’un constructeur souligne « qu’il ne faut pas rester sur les mêmes paradigmes. Il faut commencer à comprendre qu’on ne peut pas exploiter toutes les lignes de la même manière. Un train peut ne pas être apte à circuler sur l’ensemble du réseau. Et il ne sera pas forcément cher à produire si on s’appuie sur des plateformes déjà existantes ».

Se pose toutefois la question de l’entretien de ces trains qui devraient être habilités par l’EPSF (l’établissement public de sécurité ferroviaire) pour circuler sur des grandes lignes sur quelques kilomètres pour aller rejoindre des ateliers de maintenance existants. Si ce n’est pas possible, il faudrait alors un atelier de maintenance dédié. Ce qui impose suffisamment de rames à entretenir, faute de quoi le coût de fonctionnement serait lourd, allant à rebours de l’objectif poursuivi : baisser les coûts du système.

Selon d’autres experts dubitatifs sur l’intérêt des trains légers, dédier des matériels sur certaines lignes casse la cohérence du réseau ferroviaire, en ne permettant plus aux trains de rouler partout.

Enfin, autre élément à prendre en compte : les régions ne sont pas dans une logique de renouvellement de leurs parcs qui sont plutôt récents. Leurs matériels les plus anciens arrivent à leur période de mi-vie et les régions devraient plutôt profiter de cette échéance pour faire évoluer leur matériel en le verdissant plutôt qu’en le changeant, estiment plusieurs experts ferroviaires.

 

…et des pistes à explorer

Plusieurs initiatives ou projets actuellement à l’étude pour réduire les coûts du système ferroviaire paraissent à cet égard prometteurs.

La liaison Bordeaux et Le Verdon par exemple, déjà électrifiée mais ancienne, doit faire l’objet d’une modernisation dans le cadre du contrat de plan Etat-Région (CPER). L’idée consiste à ne régénérer qu’une partie de la caténaire dans la banlieue bordelaise et d’exploiter la ligne avec du matériel bimode caténaire-batteries : une partie de la ligne grâce à la caténaire, l’autre grâce aux batteries dont on aura équipé le matériel roulant en remplacement du moteur diesel.

De même, à Marseille-Aix, une étude a été lancée pour voir si l’on peut électrifier uniquement la ligne sur les zones les plus faciles autour de Marseille. Le reste du parcours pourrait se faire grâce à des batteries équipant les trains, et en profitant du profil valloné de la ligne, qui permet de récupérer de l’énergie lors des descentes.

Reste un consensus : avant de se lancer dans de nouveaux projets, il convient de regarder ce qu’on peut faire en utilisant mieux l’existant. Le plus important, souligne-t-on côté du Cerema, « c’est de réfléchir d’abord à la desserte que l’on veut mettre en place pour répondre aux besoins de déplacements. Les solutions à mettre en place en dépendent. Et le train léger peut éventuellement en faire partie ».

Selon l’établissement public, pour diminuer le coût unitaire des trains tout en augmentant le trafic, il faut raisonner en termes de fréquences, ce qui implique de la régularité. En un mot, il faut cadencer. Et après seulement voir quel programme de travaux lancer.

Finalement, il serait sans doute plus judicieux de s’intéresser à la mise au point d’un système ferroviaire « frugal » selon le mot désormais utilisé côté Cerema et SNCF Réseau, afin d’abaisser les coûts.

Marie-Hélène Poingt

Ewa

Le plan (inachevé) de sauvetage pour les petites lignes

les petites lignes menacees par un autorail deficient e1570804298348

Repoussé de mois en mois, le gouvernement a finalement lancé le 20 février son programme de sauvetage des petites lignes ferroviaires, qui s’étendent sur 9 137 kilomètres, soit le tiers du réseau mais n’accueillent que 17 % du trafic. L’objectif est d’examiner au cas par cas ces lignes, qui forment un ensemble hétérogène irrigant tous types de territoires et sont le plus souvent à voie unique (pour 78 % d’entre elles), non électrifiées (dans 85 % des cas) et surtout en très mauvais état après des décennies de sous-investissements. Il s’agit de voir s’il faut les rénover, comment et surtout avec quels financements.

Les pouvoirs publics se sont basés sur le rapport du préfet François Philizot, qui avait été chargé, il y a deux ans, de réfléchir au sort des « lignes de desserte fine du territoire » – nom officiel des petites lignes –, lui demandant un diagnostic et des solutions. Pour remettre en état ces lignes, le préfet estime qu’il faudrait investir près de 7 milliards d’euros sur une dizaine d’années « aux conditions techniques et financières actuelles ». Actuellement, l’effort financier annuel s’élève à près d’un milliard d’euros, couvrant avant tout les frais d’entretien. 710 millions sont apportés par l’Etat et SNCF Réseau (85 % vont à l’entretien, le reste au renouvellement des voies), et 280 millions par les régions (15 % vont à l’entretien, le reste à la régénération). Mais cet effort est insuffisant et 60 % des lignes sont menacées de fermeture au grand dam des régions qui s’inquiètent pour la desserte de leurs territoires.

Une quinzaine de lignes vont intégrer le réseau « structurant »

Selon Jean-Baptiste Djebbari, le secrétaire d’Etat aux Transports auditionné ce matin par la Commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat, trois cas de figure sont envisagés pour prendre en compte l’hétérogénéité de ces lignes : les lignes les plus circulées rejoindront le réseau structurant financé à 100 % par SNCF Réseau, alors qu’elles étaient jusqu’à présent essentiellement financées par l’Etat et les régions. Le surcoût sera pris en compte dans le « contrat de performance » en cours de négociation avec le groupe public, avait déjà précisé Jean-Baptiste Djebbari lors d’un déplacement à Orléans le 20 février dernier. Ces lignes sont au nombre d’une quinzaine, estime-t-il.

D’autres lignes relèveront du cofinancement classique via les contrats de plan État-région (CPER), dont le volet transport est prolongé jusqu’en 2022, date à laquelle doit commencer une nouvelle cuvée. La troisième catégorie de lignes, enfin, sera transférée aux régions, ce qui leur permettra « soit de déléguer leur gestion pour trouver de nouvelles voies d’économies, soit de lancer des expérimentations autour de trains légers, de trains à hydrogène ou d’autres solutions permettant d’ajuster l’offre aux attentes des usagers », a expliqué aux Sénateurs le secrétaire d’Etat, en évoquant aussi la possibilité de recourir à de nouvelles normes d’exploitation plus souples ou à d’autres modes de transport.

Une filière sur le train léger sera lancée

« Nous lancerons très prochainement au ministère des Transports une filière industrielle du train léger permettant d’offrir de nouvelles solutions ferroviaires », a également indiqué Jean-Baptiste Djebbari, souhaitant que l’on « explore toutes les possibilités sans tabou ». En attendant, le gouvernement a déjà signé le 20 février deux premiers protocoles d’accord avec les régions Grand Est et Centre-Val de Loire. Mais -et c’est toujours là que le bât blesse- les modalités précises de financement restent à définir, avec la publication des futurs textes d’application de l’article de la Loi d’orientation des mobilités (LOM) permettant aux régions de prendre directement en charge la gestion de certaines lignes.

M.-H. P.

Ewa

Belfort – Delle : comment rattraper un loupé ?

Correspondance à Meroux entre une rame RE des CFF, au départ pour Delle et Bienne (Suisse), et une ZGC du TER Bourgogne Franche-Comté, qui attendra 59 minutes avant de repartir pour Belfort…
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Sur le papier, la ligne rouverte entre Belfort et Delle, à deux pas de la frontière, aurait tout pour plaire : rétablir un lien ferroviaire entre Belfort, le sud du Territoire et la Suisse, tout en reliant la gare de Belfort-Montbéliard TGV à ses environs.

 

Un an après, le constat est sans appel : la réouverture de la ligne entre Belfort et Delle, à la frontière suisse, est considérée comme un « bide » par les usagers. Afin d’étudier un remède à cette situation, les acteurs français et suisses cherchent des solutions.

Sur le réseau ferré national, les fermetures de « petites » lignes se poursuivent, la dernière en date ayant touché la voie ferrée entre Lille et Commines, à la frontière belge. Mais d’autres lignes bénéficient d’une réouverture, fondant de grands espoirs sur leur fréquentation future. C’était le cas, il y a un an, de la ligne de 22 km entre Belfort et Delle, à la frontière suisse. Et sur le papier, cette ligne semblait avoir tout pour être un succès : le long d’un itinéraire routier, déjà très fréquenté (qui a récemment bénéficié de grands travaux), les usagers du rail se voyaient proposer un raccourci considérable entre Belfort et la Suisse toute proche, donnant aux milliers de travailleurs frontaliers français un accès en principe direct au canton du Jura et à tout le réseau suisse. Enfin (et surtout, pour la clientèle venue du reste de la France) cette ligne rouverte marque un arrêt à Meroux, en correspondance directe avec la gare de Belfort-Montbéliard TGV et ses relations vers Besançon TGV, Dijon, Paris, Lyon, Marseille, Montpellier, Mulhouse, Bâle, Zurich, Strasbourg, Luxembourg ou Francfort…

Avec un tel potentiel, une fréquentation quotidienne de l’ordre de 1 500 à 3 500 voyageurs ne semblait pas hors d’atteinte lors de la réouverture de la ligne, le 9 décembre 2018, après 26 ans de fermeture de bout en bout. Mais un an plus tard, le « bide » constaté au cours des premières journées de service a été confirmé : quelque 200 voyageurs seulement empruntent chaque jour la ligne rouverte.

Sans donner dans les discours simplistes, il n’est pas très difficile de comprendre la désaffection du public, rien qu’en essayant de lire l’horaire du service annuel 2019. Qu’y constate-t-on ?

Déjà, cet horaire est quasiment illisible, car truffé de cas particuliers (circulations assurées hors ou pendant les périodes de vacances scolaires, par exemple). Non seulement, ce tableau donne les circulations entre Belfort, Delle et Bienne (Suisse), mais il est considérablement alourdi par les colonnes consacrées aux relations TGV vers tous les coins de France (mais aussi vers l’Allemagne ou le Luxembourg) !

Et une fois que l’on commence à se retrouver parmi tous les trains affichés, on constate qu’il n’est tout simplement pas possible de relier sans changement Belfort à la Suisse…

En effet, une correspondance s’avère obligatoire à Meroux (arrêt de la gare TGV) ou à Delle pour qui voudrait relier en train la ville du Lion au Jura suisse. Car si c’est bien une ligne que l’on a rouverte entre Belfort, Delle et la Suisse, ce sont deux dessertes qui y sont proposées : d’une part, des TER Bourgogne-Franche-Comté font la navette entre Belfort et Meroux (gare TGV) ou Delle, sans jamais quitter le territoire français ; d’autre part, des relations RE assurées par les CFF entre Bienne et Meroux via Delle, sans jamais pousser jusqu’à Belfort (alors que ce serait techniquement possible).

Reconnaissons que les correspondances sont généralement bien étudiées (une poignée de minutes à Meroux, voire une bonne vingtaine de minutes à Delle). Mais des « ratés » existent (52 minutes d’attente à Meroux en milieu de matinée en période scolaire). Ceci s’explique par le fait que si un semblant de cadencement existe (en particulier du côté CFF et dans une moindre mesure pour les TER), la desserte entre Belfort et Meroux présente parfois des « trous » aux heures creuses… On est loin des « 16 allers et retours par jour en 27 minutes » en TER promis entre Belfort et Delle pendant les travaux de reconstruction de la ligne…

 

Dite « Flirt France », cette rame suisse RABe 522 repart vers Bienne sur la ligne rouverte fin 2018 entre Belfort et Delle. Autorisée en France, elle ne dépasse pourtant pas la halte de Meroux sur la ligne vers Belfort…

 

Et qu’en est-il des correspondances à Meroux entre trains régionaux et TGV ? Même celles-ci ne sont pas vraiment privilégiées : la robustesse des horaires est faible en cas de retards et, même quand tous les trains sont à l’heure, des « loupés » existent à la gare TGV (tel ce TER qui part pour Belfort une minute avant l’arrivée du TGV en provenance de Marseille !) Et pour l’élargissement vers le nord de la zone de chalandise de la gare TGV, le rendez-vous est manqué une fois de plus, comme l’a signalé dès décembre 2018 l’AUT-FNAUT Lorraine : les correspondances entre les TER Épinal – Belfort et Belfort – Meroux ne permettent pas aux Lorrains du sud de prendre le TGV…

Comment en est-on arrivé là ? Plutôt que de chercher à voir dans cette situation le résultat d’un sabotage calculé, la vérité est plutôt à trouver dans les intérêts contradictoires des acteurs concernés.

La ligne proprement dite est globalement réussie, même si sa réouverture a pris bien plus de temps que prévu : la première étape vers sa remise en service remonte quand même à décembre 2006, avec le retour des trains à Delle, après 11 ans de fermeture. Pendant les 12 années suivantes, en attendant la réouverture de la ligne vers Belfort, Delle était la seule gare française uniquement accessible par la Suisse !

Finalement, les travaux de reconstruction de la ligne ont été lancés en 2015. Non seulement la voie unique a été reposée, mais son tracé a été dévié au niveau du franchissement de la LGV Rhin-Rhône, dont la construction avait littéralement coupé en deux l’ancienne ligne (où une desserte fret s’était jusque-là maintenue). Sur la ligne reconstruite, un point d’arrêt TER facilitant la correspondance avec la gare TGV (ouverte en 2011) a donc été établi. Au total, cinq arrêts ont été créés ou recréés sur le tracé rouvert, sans compter Belfort et Delle. Cette dernière gare est toutefois passée à trois voies, les systèmes d’électrification n’étant pas les mêmes de part et d’autre de la frontière. En effet, c’est sous caténaire 25 kV 50 Hz française que la ligne a été rouverte en 2018 (au-delà, du côté suisse, la caténaire 15 kV 16,7 Hz est arrivée dès 1933).

Restait à voir comment la ligne reconstruite serait desservie. L’affaire semblait entendue : les TER de Bourgogne-Franche-Comté relieraient Belfort à sa gare TGV et à Delle, alors que les RE Bienne – Delémont – Delle des CFF seraient prolongés vers la gare TGV et Belfort-Ville. Cette solution offrant des relations intéressantes et un service globalement fréquent était techniquement possible question capacité (la voie unique permet des croisements à Meroux et Grandvillars, outre Belfort et Delle). Et même si les ZGC françaises ne peuvent pas aller plus loin que Delle, la sous-série de rames Flirt suisses en service sur la ligne a été spécialement étudiée pour pouvoir fonctionner sur les lignes françaises électrifiées sous 25 kV 50 Hz (cette série RABe 522, dite « Flirt France », est également en service sur le Léman Express).

Mais dans les faits, en l’absence d’une subvention pour compenser le déficit d’exploitation entre Belfort-Ville et la gare TGV, la desserte assurée par les rames CFF ne pénètre pas plus loin en France que la gare de Meroux. D’où la situation en vigueur depuis décembre 2018…

Et cette situation n’a pas de quoi satisfaire grand monde. Même si le besoin existe pour les « frontaliers » français de gagner tous les jours la Suisse voisine, la route permet d’aller globalement plus vite que le train, faute de fréquence suffisante de ce dernier et de desserte de bout en bout. Même constat pour la clientèle – captive s’il en est – des scolaires, pour qui la desserte par car est bien mieux adaptée. Enfin, il ne semble pas que les Jurassiens suisses soient intéressés outre mesure par la possibilité de prendre le TGV vers le vaste monde. « Par jour, on doit avoir quatre ou cinq Suisses qui se rendent à la gare TGV », estime Bernard Tournier, membre du conseil FNAUT BFC.

Un dernier rendez-vous manqué est celui du fret. Alors que la ligne peut techniquement accueillir des trains lourds tractés par des locomotives, en commençant par les trains de travaux qui l’ont fait renaître, elle a été homologuée pour les trains de voyageurs uniquement. Dommage pour la livraison en Suisse des locomotives H4 par l’usine belfortaine d’Alstom, effectuée par un grand détour via Mulhouse et Bâle, sur une artère qui n’a pas vraiment besoin de circulations supplémentaires. Dommage également pour le transport des ordures ménagères de Belfort à la localité voisine de Bourogne (sur route depuis 2007). Dommage enfin pour les entreprises présentes le long de la voie, à laquelle se connectaient au moins cinq embranchements avant la coupure de la voie pour la réalisation de la LGV Rhin-Rhône.

C’est dans ce contexte, au bout d’un an de remise en service, que les autorités françaises et suisses se sont réunies le 17 décembre dernier à Delle. Coprésidée par David Asseo, représentant du ministre de l’Environnement du canton suisse du Jura, et Michel Neugnot premier vice-président de la région Bourgogne Franche-Comté, cette réunion avait pour but le lancement de la gouvernance de la ligne transfrontalière Belfort – Delle – Bienne. Cinq groupes de travail ont été mis sur pied à l’occasion : planification et exploitation ; tarification et distribution ; promotion et communication ; collège des associations représentant les parties prenantes ; et enfin un comité de coordination, présidé par la région Bourgogne Franche-Comté, qui devra assurer la coordination des travaux et le suivi du développement de la ligne. Les trois premiers groupes devront se réunir aussi souvent que nécessaire, en tout cas au moins trois fois par an, contre une fois par an au moins pour le groupe collège des associations et deux fois par an pour le comité de coordination, qui sera doté d’un secrétariat permanent.

Pour un bon fonctionnement de ces groupes dont les travaux devraient débuter « sans tarder », selon les deux coprésidents de la réunion de décembre, il serait souhaitable qu’y participent les différentes entités administratives des deux côtés de la frontière (République et canton du Jura, Office fédéral des Transports, conseil départemental du Territoire de Belfort, Grand Belfort, communauté de communes du Sud Territoire et communes françaises disposant d’une gare), les exploitants ferroviaires (CFF, SNCF Mobilités et Réseau), ainsi que les transports publics (communauté tarifaire Vagabond, côté suisse, et Syndicat mixte des transports du Territoire de Belfort).

On le voit, le nombre d’acteurs à coordonner est considérable pour une ligne de 22 km, constat que dresse également la FNAUT Bourgogne Franche-Comté. Cette dernière est également « dubitative », compte tenu de « la volonté des représentants suisses de maintenir en l’état actuel la desserte en y apportant toutefois les aménagements qui pourraient être jugés nécessaires à la suite des débats ». Or, pour les représentants des usagers, « il faut agir rapidement, revoir les correspondances à Belfort-Montbéliard TGV vers la Suisse, mais aussi vers Belfort-Ville, faire cesser les ruptures de trajet entre Delle et Belfort à la gare TGV, et étudier la possibilité de trajets directs et d’ouvrir des correspondances de et vers Epinal, comme le demandent les élus vosgiens ». Quand on sait que beaucoup de « ratés » actuels concernent des correspondances manquées à quelques minutes près, voici une liste d’améliorations qui ne coûteraient pas très cher…

Patrick Laval

Retrouvez l’intégralité du dossier dans notre numéro du mois de février

Ewa

Des plans d’actions régionaux pour les petites lignes

Circulation d'un TER près de la ville de Monistrol-d'Allier.

Le secrétaire d’Etat aux Transports Jean-Baptiste Djebbari a indiqué le 7 janvier qu’un « plan d’action concerté » devrait être signé d’ici à la mi-février avec les régions et SNCF Réseau pour décider de l’avenir des petites lignes de trains. Il concernera les régions pour lesquelles « les travaux sont suffisamment matures et qui sont volontaires », a détaillé Jean-Baptiste Djebbari lors d’un débat sur les trains régionaux au Sénat, évoquant « plusieurs milliards d’euros ». Il s’agit, selon lui, de « préserver le maximum de nos petites lignes de dessertes fines du territoire ».

Ces petites lignes qui représentent un peu plus de 9 000 km ouverts aux voyageurs – soit 32 % du réseau national – seront concrètement classées en trois catégories. Le secrétaire d’Etat chargé des Transports a différencié celles qui « présentent un caractère structurant pour le territoire », celles dont la rénovation est prévue dans les contrats actuels de plan Etat-régions et les autres, dont les régions devront décider du sort et sur lesquelles elles pourront mener des « expérimentations, avec des solutions innovantes et adaptées à chaque ligne en termes techniques et de gouvernance ». La nouvelle Loi d’orientation des mobilités (LOM) permet notamment aux régions de récupérer la gestion de certaines voies ferrées, a-t-il rappelé.

Ces orientations proviennent-elles du rapport sur l’avenir des petites lignes commandé en janvier 2009 au préfet François Philizot par Elisabeth Borne quand elle était ministre des Transports (aujourd’hui ministre de la Transition écologique) ? Ses conclusions devaient à l’origine être remises au Parlement avant la fin juin 2019, conformément à la loi de réforme ferroviaire adoptée un an plus tôt. Mais ses conclusions n’ont pas été dévoilées. « Le temps n’est plus aux rapports, le temps est à l’action ! », a lancé Jean-Baptiste Djebbari aux Sénateurs, en évoquant aussi le souhait que « l’Etat impulse la création d’une véritable filière des trains légers pour redonner aux TER la place qu’ils méritent, y compris sur les dessertes fines du territoire ».

Ewa

L’Allemagne va étudier la réouverture de lignes ferroviaires abandonnées

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La rentabilité n’est plus le principal objectif de la Deutsche Bahn. L’actionnaire principal, l’Etat, a décrété que l’objectif principal de la compagnie ferroviaire allemande n’était plus « la maximisation du profit mais la maximisation du transport ferroviaire ».

La décision d’un moratoire sur la fermeture de lignes déficitaires s’inscrit dans ce nouveau plan stratégique « Pour un rail fort » (Starke Schiene). Une « Task Force » a été créée pour étudier quelles lignes abandonnées étaient susceptibles d’être réactivées. Le plan « détaillé » sera présenté au cours de l’année 2020.

« Nous avons besoin en Allemagne de chaque kilomètre de ligne pour répondre à l’augmentation de la circulation de voyageurs mais aussi de marchandises et pour renforcer le réseau ferroviaire », a confirmé Ronald Pofalla, directeur des infrastructures à la DB.

Le groupe de travail se basera sur la liste de 3 000 kilomètres de lignes susceptibles d’être réactivées, établie par l’organisation « Allianz pro Schiene » qui regroupe ONG environnementales, associations de consommateurs, syndicats et entreprises régionales du rail.

Cette décision confirme la volonté du gouvernement de faire du rail l’un des fers de lance de la lutte contre le réchauffement climatique. La compagnie allemande a l’intention de doubler le nombre de passagers d’ici 2030, à 260 millions par an, et augmenter ses capacités de 30 %. L’objectif de faire rouler tous ses trains avec de l’énergie renouvelable a été avancé à 2038 contre 2050 auparavant.

Depuis la réforme de 1994, la DB a supprimé 5 400 kilomètres de lignes ferroviaires, ce qui représente 16 % de l’ensemble de son réseau de 33 000 km.

Christophe Bourdoiseau, à Berlin