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Ewa

Grand Paris Express: Un nouveau dispositif pour renforcer la sécurité sur les chantiers

Grand Paris Express
Après cinq décès survenus entre 2020 et 2023 sur les chantiers du Grand Paris Express, la SGP cherche à renforcer les mesures de sécurité. Elle a signé le 28 avril un accord avec la Fédération régionale des travaux publics Île-de-France, le Syndicat parisien des travaux publics (SPTP), l’Union des métiers de la terre et de la mer (UMTM), le Syndicat des entrepreneurs des travaux de voies ferrées de France (SETVF), le Syndicat des entreprises de la transition énergétique et numérique (SERCE), la Fédération française du bâtiment (FFB) Grand Paris Île-de-France et Syntec-Ingénierie.

L’objectif est de sensibiliser 8 000 personnes par an, en priorité les nouveaux arrivants, grâce à des modules spécifiques pour les compagnons (une demi-journée), les encadrants (une journée) et les équipes de direction (une demi-journée). La SGP financera le dispositif, les fédérations professionnelles et les syndicats du BTP l’animera.
Un comité de pilotage réunissant les signataires sera organisé durant le mois de mai pour construire le programme et lancer les premiers modules dès janvier 2026.

Ewa

Les retards s’accroissent pour les lignes 15, 16 et 17 du Grand Paris Express

Grand Paris Express

Le calendrier des mises en service des nouvelles lignes du Grand Paris Express ne cesse de s’étirer. A l’automne dernier,  le conseil de surveillance de la Société des grands projets (SGP) annonçait une livraison de la nouvelle ligne 15 Sud à l’été 2026 au lieu de la fin 2025. Aujourd’hui, la SGP a indiqué qu’il ne fallait pas l’attendre avant le quatrième trimestre 2026. Un retard de plus pour cette infrastructure qui doit relier sur 33 km Noisy-Champs à Pont-de-Sèvres et était initialement programmée pour 2022.

En cause, les premiers essais automatiques lancés l’an dernier qui ont mis en évidence de nouvelles difficultés, en particulier dans le domaine de la signalisation. Jean-François Monteils, le président du directoire de la SGP, s’en est expliqué. A la fin de l’année dernière, a-t-il rappelé, la décision a été prise de revoir tout le planning et de le faire expertiser par Yves Ramette, ex-DGA du groupe RATP et ex-DG de SNCF Réseau Ile-de-France, et par Didier Bense, qui a passé une grande partie de sa carrière à la RATP et a ensuite remplacé Yves Ramette à SNCF Réseau.

Le nouveau calendrier, validé par les deux experts, prévoit également l’achèvement du premier tronçon de la ligne 16 (Saint-Denis Pleyel- Clichy-Montfermeil) au deuxième trimestre 2027, de même que celui de la 17 (Saint-Denis Pleyel-Le Bourget Aéroport). « Le travail ne peut pas être fait simultanément sur la ligne 15 Sud et sur les lignes 16 et 17« , indique Bernard Cathelain, membre du directoire de la SGP. En revanche, il ne devrait pas y avoir de décalage de calendrier pour les tronçons suivants de la ligne 15, ni pour ceux des lignes 16 et 17.

Complexité inédite

« Ces annonces sont difficiles. Mais elles ne sont pas anormales« , s’est justifié Jean-François Monteils. « Le projet est d’une ampleur et d’une complexité inédites« , a-t-il ajouté. Parmi les difficultés à gérer, le nombre et surtout la diversité des entreprises à pied d’oeuvre pour réaliser les 200 km de lignes prévues autour de Paris et les 68 gares qui vont les desservir. Plus de 830 entreprises travaillent par exemple sur la 15 Sud.

Un plan d’action est mis en oeuvre pour consolider la réalisation du super-métro parisien. Les essais vont être menés dans les conditions les plus proches de la configuration définitive et la supervision du système de transport va être plus intégrée, grâce notamment au renforcement du rôle de Systra. Il y aura aussi un suivi au plus haut niveau avec la réunion mensuelle d’un comité stratégique. Les retours d’expérience sur la ligne 15 vont bénéficier aux autres chantiers, affirme encore Jean-François Monteils.

L’ancien président de la Chambre régionale des comptes de la Nouvelle-Aquitaine promet un planning désormais « robuste« . Il a été partagé avec Ile-de-France Mobilités, dans la « transparence« , souligne-t-il.

Colère de Valérie Pécresse

Mais cette « transparence » arrive tard. Et les annonces de la SGP n’ont pas manqué de provoquer la colère de Valérie Pécresse. La présidente d’Ile-de-France Mobilités s’est dite « choquée » par l’ampleur des nouveaux retards annoncés. « C’est une très mauvaise nouvelle pour les centaines de milliers d’habitants et travailleurs de la petite couronne qui l’attendent depuis plus de quinze ans », commente-t-elle dans un communiqué.

Pour l’élue, également présidente de la région, l’expertise réalisée par Yves Ramette et Didier Bense « contredit toutes les informations données jusqu’ici aux membres du Conseil de surveillance de la Société des grands projets« . D’où sa demande de créer « une mission de contrôle et de coordination technique État-Île-de-France Mobilités- Société des grands projets, pour réduire ces nouveaux retards au maximum ».

De son côté, IDFM a déjà désigné les futurs exploitants des lignes 15 Sud, 16 et 17 et le matériel roulant « est en cours de livraison« . Mais la SGP ne sera pas tenue de verser des pénalités pour ces retards. « Nous restons propriétaires de l’infrastructure que nous remettrons à IDFM. IDFM nous versera alors à ce moment-là une redevance. Notre obligation est simplement de prévenir IDFM un an avant la mise en service prévue car c’est à ce moment-là que l’opérateur retenu doit se mobiliser« , explique Jean-François Monteils.

La ligne 18, la plus petite liaison prévue dans le projet de boucle de la capitale (mais aussi la plus contestée en raison de sa faible utilité), n’est pas concernée par les annonces. « Elle sera réalisée mais postérieurement, nous serons en ligne pour la première section et donc pour les suivantes« , commente Jean-François Monteils. Mais Valérie Pécresse souhaite aussi que la mission menée par les deux anciens dirigeants experts soit étendue à la situation de cette ligne « pour laquelle aucune revue de projet n’a été effectuée et qui ne relève pas des mêmes technologies ni fournisseurs« .

Le nouveau calendrier du Grand Paris Express

Calendrier GPE

Ligne 15

Noisy-Champs > Ponts de Sèvres : quatrième trimestre 2026 Pont de Sèvres > Saint Denis – Pleyel : 2031
Saint-Denis – Pleyel > Champigny Centre : 2031

Ligne 16

Saint-Denis – Pleyel > Clichy-Montfermeil : deuxième trimestre 2027; Clichy-Montfermeil > Noisy – Champs : fin 2028

Ligne 17

Saint-Denis – Pleyel > Le Bourget Aéroport : deuxième trimestre 2027;  Le Bourget Aéroport > Parc des Expositions : fin 2028;
Parc des Expositions > Le Mesnil Amelot : fin 2030

Ligne 18

Massy Palaiseau > Christ de Saclay : quatrième trimestre 2026;  Massy Palaiseau > Aéroport d’Orly : quatrième trimestre 2027;  Christ de Saclay > Versailles Chantiers : fin 2030

 

Ewa

Premier marché de conception-réalisation sur le tronçon Ouest de la ligne 15 du Grand Paris

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Le 13 juillet, la Société du Grand Paris (SGP) a notifié son premier marché de conception-réalisation, qui porte sur le futur tronçon Ouest de la ligne 15 du Grand Paris Express, entre la gare de Pont de Sèvres et La Défense. Attribué au groupement d’entreprises Intencités15, avec pour mandataire Vinci Construction Grands Projets, ce marché est, pour la SGP, le premier à avoir été notifié sous ce mode contractuel, qui permet de confier simultanément la conception (études) et la réalisation (exécution des travaux) d’un ouvrage à un groupement unique d’opérateurs.

Comprenant 14 membres, le groupement Intencités15 emploiera plus de 2 000 personnes en période de pic d’activité, selon la SGP et Vinci, et « permettra la création de 460 emplois en insertion tout au long de la période de travaux », soit 10 % des heures travaillées. Les membres du groupement sont Vinci Construction Grands Projets (mandataire), Chantiers Modernes Construction, Razel-Bec, Dodin Campenon Bernard, SDEL Infi, Fayat Energie Services, ETF, Ingérop, Artelia, JFS Architectes, Grimshaw, AREP Architectes, Archi 5 Prod et Philippe Gazeau Architecte. L’ingénierie de projet a été confiée à un sous-groupement de maîtrise d’œuvre intégrée composé d’Ingérop, d’Artelia et des cinq cabinets d’architecture en fin de la liste.

Prolongement vers le nord le tronçon Sud de la ligne 15, cette première partie du tronçon Ouest de la ligne 15 sera en correspondance avec les lignes Transilien L et U à Saint-Cloud, avec le RER E à Nanterre La Folie, ainsi qu’avec les lignes A et E du RER, la ligne 1 du métro, le T2 du tramway et les lignes Transilien L et U à La Défense. La mise en service de ce premier tronçon est prévue pour fin 2031 et le montant global du marché s’élève à 2,71 milliards d’euros, « dont 20 % seront confiés à des PME locales », selon la SGP et Vinci. Ce contrat porte sur la construction tous corps d’état de 14 km de tunnels, de cinq gares (Saint-Cloud, Rueil – Suresnes – Mont-Valérien, Nanterre La Boule, Nanterre La Folie et La Défense), d’une arrière-gare à Nanterre La Folie et de 16 ouvrages de service.

Ingérop précise que le périmètre technique du marché comprend les travaux préparatoires, de génie civil, d’aménagement tous corps d’état des gares et ouvrages de service ainsi que les systèmes, équipements ferroviaires, équipements des gares, ouvrages de service et tunnels : voie ferrée, courants forts (haute tension, basse tension, traction, caténaire), courants faibles, équipements électromécaniques des gares (ventilation/désenfumage/climatisation, ascenseurs et escaliers mécaniques…), du tunnel et des ouvrages de services (ventilation/désenfumage/décompression). Et Vinci, qui « mobilisera son fonds de dotation Chantiers et Territoires Solidaires, [soutenant] des projets associatifs d’intérêt général pour promouvoir l’accès à l’emploi et à la création de lien social sur les communes traversées », précise que le groupement utilisera majoritairement des bétons bas carbone et très bas carbone.

Ce premier marché du tronçon Ouest n’est qu’une étape vers le bouclage de la future ligne 15 autour de Paris : la SGP ajoute que les procédures de consultation se poursuivent sur les trois marchés restants des tronçons 15 Est (marchés 1 et 2), entre Saint-Denis Pleyel et Champigny, et 15 Ouest (marché 2), entre La Défense et Saint-Denis Pleyel.

P. L.

Ewa

« Ne pas se servir de la Société du Grand Paris comme d’un cheval de Troie »

Gilles Savary

Fin connaisseur du transport ferroviaire, Gilles Savary, ancien député socialiste de Gironde, salue le modèle de la Société du Grand Paris pour externaliser la maîtrise d’ouvrage de grandes infrastructures, et les financer. Mais il met en garde contre la pression fiscale, « fabrique à gilets jaunes », comme s’intitule son essai paru en début d’année (1).

Ville, Rail & Transports : Le gouvernement veut placer la Société du Grand Paris en orbite pour la réalisation des RER métropolitains et de leurs gares. Qu’en pensez-vous ?
Gilles Savary : C’est plutôt une bonne idée. Avec le Grand Paris Express, le plus grand chantier d’infrastructure européen, la SGP a fait ses preuves dans deux registres : un financement innovant et une maîtrise d’ouvrage complexe. Dotée d’une fiscalité propre (notamment la taxe sur les bureaux, ndlr), elle peut se refinancer sur les marchés financiers au rythme de la construction des projets. En France, l’offre ferroviaire est insuffisante par rapport à la demande, il y a des goulets d’étranglement sur le réseau, et c’est d’ailleurs pour les désengorger que l’on fait des RER métropolitains. Le chantier est énorme, les recettes de péage et les subventions sont à peine suffisantes pour maintenir le réseau ferré en état. La SGP peut amener des fonds plus rapidement mobilisables que des financements budgétaires.

Ce ne serait pas dévoyer le modèle SGP ?
G. S : Je connais les réticences extrêmes de SNCF Réseau et de Gares & Connexions devant la possible arrivée d’un nouvel acteur, immédiatement compétent. D’autant que SNCF Réseau sait qu’il n’a pas les capacités de production industrielle pour accomplir les RER métropolitains. Nous allons affronter une crise d’insuffisance de l’offre ferroviaire : la SGP, qui s’appellera autrement, est donc la bienvenue pour atteindre nos objectifs environnementaux et de report modal. Toutefois, la loi lui interdit d’intervenir là où le réseau ferré existant est exploité : ce qui l’exclut de la plupart des projets de RER métropolitains. Elle pourrait intervenir sur les lignes du Grand Est que la région veut remettre en exploitation. Ailleurs, elle aura des queues de cerises. Sauf à ce que SNCF Réseau en fasse un maître d’ouvrage délégué, ou un maître d’œuvre.
Mais la grande difficulté pour la SGP sera de mobiliser des ressources propres en levant de nouvelles taxes, car dans de nombreuses régions, c’est déjà fait pour les nouvelles lignes à grande vitesse ! Sud, Occitanie et Nouvelle-Aquitaine se sont fait piéger dans des sociétés de projets qui lèvent des impôts locaux, des taxes spéciales d’équipements et des taxes additionnelles aux taxes de séjour pour financer les LGV Bordeaux-Dax-Toulouse, Montpellier-Perpignan, Provence Côte d’Azur.
Dans les Hauts-de-France, Xavier Bertrand est très intéressé pour un RER métropolitain entre Lille et Hénin Beaumont. La SGP est partante, SNCF Réseau n’y voit pas d’inconvénient puisque ce sont des ouvrages ferroviaires nouveaux, mais pas question de créer de nouvelles taxes locales, avertit le patron de la région qui lève déjà des impôts pour la Société de projet du canal Seine-Escaut. Après ce siphonnage fiscal des territoires pour financer des infrastructures ferroviaires nationales, il n’y a plus d’argent !
On ferait mieux d’avoir des recettes fiscales claires et précises et de ne pas se servir de la SGP comme d’un cheval de Troie. Financer des LGV, dont la plupart des gens n’ont pas besoin dans des territoires qui sont en déficit de transports collectifs, par de la fiscalité locale impalpable mais qui a vocation a augmenter, c’est une bombe à retardement. Une fabrique de gilets jaunes ou de bonnets rouges, au choix… Exactement comme pour l’écotaxe ou la taxe carbone. Il aurait donc été bien plus judicieux de garder ces ressources pour les RER métropolitains.

Dans ces conditions, la SGP ne pourrait mettre qu’un pied dans la porte…
G. S : Elle construira peut-être des RER métropolitains si les élus mettent carte sur table et instaurent une taxe juste, pas en catimini, pour combler le déficit de transports collectifs. La SGP construira aussi peut-être des pôles d’échanges multimodaux, des gares. Mais par corporatisme, Gares & Connexions n’a pas très envie de voir débouler un nouveau maître d’ouvrage sur ce marché.

Propos recueillis par Nathalie Arensonas

La Ville inaccessible. Essai sur une fabrique des gilets jaunes. Ed. le Bord de l’eau, 290 p., 18 euros.

Ewa

La Société du Grand Paris veut imposer de nouvelles mesures de sécurité à ses sous-traitants

Chantier du Grand Paris Express
Après cinq décès mortels sur les chantiers de construction du métro automatique autour de Paris, dont deux en mars et avril derniers, la Société du Grand Paris réagit pour éviter de nouveaux drames. Le 10 mai, la SGP a fait stopper les 140 chantiers pour organiser des ateliers de sensibilisation sur la sécurité, menés en partie par des salariés de l’entreprise. S’il est encore trop tôt pour faire un bilan, Jean-François Monteils, le président du directoire de la SGP, se dit persuadé de leur intérêt.
La sécurité fait partie des priorités, assure-t-il.
« Nous avons un document, la charte et référentiels sécurité des chantiers, qui s’impose systématiquement dans tous les contrats que nous passons avec les entreprises de travaux et de prestations intellectuelles », explique de son côté Bernard Cathelain, membre du directoire de la SGP. Ce document rappelle le cadre législatif (code du travail, code de l’environnement), et les recommandations sectorielles (Caisse national d’assurance maladie des travailleurs salariés, Caisse régionale d’assurance maladie d’Île-de-France, Institut national de recherche et de sécurité, OPPBTP1, Association française des tunnels et de l’espace souterrain, etc.). Mais surtout, poursuit-il, « il permet de garantir une homogénéité et une unicité des règles quelles que soient les entreprises ».
Dès le début du projet, la SGP a mis en place une procédure d’alerte afin d’être prévenue en cas d’accident. En fonction des enseignements tirés, elle peut éventuellement prendre des mesures sur d’autres chantiers. Enfin, le maître d’ouvrage mène chaque année plusieurs dizaines d’audits afin que chaque chantier soit visité au mois une fois par an. « Il nous est arrivé de demander à une entreprise un changement de chef de chantier qui ne faisait pas appliquer les règles de sécurité », raconte Bernard Cathelain.
« Dans la construction, il est difficile de mettre en place des processus de sécurité comme il en existe dans l’industrie où les tâches sont plus répétitives. Dans le bâtiment, les tâches peuvent être différentes d’une journée à l’autre, d’une heure à l’autre», souligne Jean-François Monteils. De plus, plusieurs entreprises peuvent intervenir en même temps et la manipulation de lourdes charges est fréquente, ce qui multiplie les risques.
Selon les statistiques recueillis par la SGP, il y aurait un lien entre intérim et accidentologie. « Les intérimaires représentent à peu près un quart des 6000 compagnons présents sur les chantiers », précise Bernard Cathelain. « Juridiquement, il est compliqué d’imposer une limitation de la sous-traitance », estime Bernard Cathelain, tandis que Jean-François Monteils rappelle avoir « une clause de recours aux PME pour 20 % des travaux ». Un niveau essentiel, selon lui, pour le tissu industriel local.
Afin de renforcer les mesures déjà existantes, la SGP a créé, en janvier dernier, un groupe de travail chargé de réfléchir à de nouvelles mesures. Le plan de renforcement de la sécurité exige désormais que l’ensemble des intérimaires intervenant sur les chantiers soient titulaires d’un Passeport sécurité Intérim (PASI) BTP. Ce document, qui n’était pas obligatoire jusqu’à présent, mais fortement recommandé, est une attestation valable dix ans, délivrée aux intérimaires qui ont suivi deux jours de formation à la sécurité.
Le plan prévoit également l’instauration d’une journée ou demi-journée annuelle systématique de sensibilisation, comme celle du 10 mai dernier, et la création d’un conseil de la sécurité des chantiers pour mieux identifier les accidents. « Composé de spécialistes et d’indépendants reconnus dans ce domaine, il aurait pour mission d’assurer le plus haut niveau de connaissances en la matière, d’analyser l’accidentologie, d’examiner les mesures envisagées et de faire des propositions en lien avec les risques en présence », indique encore le dirigeant.
La SGP souhaite auditer les Plans particuliers de sécurité et de protection de la santé (PPSPS) de chaque entreprise afin de s’assurer de leur qualité. Elle imposera désormais d’avoir des coordonnateurs de sécurité et de protection de la santé (CSPS) exclusivement dédiés au Grand Paris Express, alors que leur temps pouvait jusque-là être partagé avec d’autres projets de leur entreprise.
Le CSPS devra désormais formuler un avis qui l’engagera. Il participera à la mise en place de mesures d’organisation des CISSCT, adaptées aux conditions de déroulement des travaux. Enfin, il contribuera à l’harmonisation des dispositions, au travers d’un plan général de coordination corédigé par l’ensemble des CSPS titulaires.
La SGP imagine aussi un système d’incitation aux bonnes pratiques, assorti, pour les entreprises, d’un bonus financier. Elle affirme qu’elle sera vigilante face au risque potentiel qui consisterait à sous-déclarer des incidents pour obtenir de meilleurs résultats.
L’incitation à signaler les mauvaises pratiques sera enfin encouragé, notamment de la part de toute personne intervenant sur un chantier, mais aussi des syndicats. La SGP souhaite qu’ils puissent accéder aux chantiers pour donner de la visibilité aux mesures de sécurité mises en place. En espérant renforcer ainsi la culture de sécurité.
Yann Goubin

Ewa

Elisabeth Borne promet 100 milliards pour le ferroviaire et met la Société du Grand Paris sur orbite

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S’appuyant sur les conclusions du rapport du Conseil d’orientation des infrastructures qui lui a été remis le 24 février, la Première ministre a présenté un plan de 100 milliards d’euros pour les transports. Avec une priorité absolue au réseau ferroviaire et aux trains du quotidien. Les RER métropolitains y ont une place de choix et la Société du Grand Paris est chargée de les mettre sur les rails, en binôme avec SNCF Réseau.

Jean-Pierre Farandou a fini par être entendu par Matignon. Le pdg de la SNCF demandait depuis des mois 100 milliards d’euros sur 15 ans pour remettre le réseau ferré d’équerre, le moderniser, redresser le niveau de service des trains du quotidien et permettre ainsi de doubler la part du transport ferroviaire, écologiquement plus vertueux, dans la mobilité urbaine.

Elisabeth Borne l’a annoncé le 24 février à l’hôtel Matignon lors de la remise du rapport du Conseil d’orientation des infrastructures (COI) dont le contenu n’était plus un mystère (lire) : ce sont bien 100 milliards d’euros supplémentaires d’ici à 2040 qui pourraient être mobilisés pour le ferroviaire. A raison de 500 millions par an sur le quinquennat en cours pour le moderniser, et un milliard supplémentaire par an pour régénérer le réseau ferré qui, en l’état, est incapable de supporter une augmentation du trafic. En moyenne, les voies ont 30 ans d’âge, deux fois plus qu’en Allemagne par exemple.

Le plan massif envisagé pour le rail par le gouvernement s’appuie sur l’un des trois scénarios proposés par les experts du COI : celui dit de « planification écologique », à 84,3 milliards d’euros sur la seule période 2023-2027 (lire).

La SGP a « le vertige »

Outre les demandes appuyées de Jean-Pierre Farandou et de l’ensemble de la communauté ferroviaire sur les investissements à consentir pour stopper le vieillissement du réseau ferré et même le rajeunir, Elisabeth Borne a aussi reçu cinq sur cinq la proposition d’Emmanuel Macron, fin novembre 2022 sur YouTube, en faveur des RER métropolitains. Ces trains du quotidien, à horaires cadencées et à large amplitude horaire, pour relier les métropoles régionales, les métropoles à leurs banlieues excentrées, ou aux villes moyennes du même bassin d’emploi.

Et la Première ministre propulse un nouvel acteur sur la scène, la Société du Grand Paris (SGP), l’établissement public qui construit le métro automatique Grand Paris Express et porte les moyens extra-budgétaires pour le financer. « Il faudra une disposition législative pour modifier la structure de la SGP », indique Elisabeth Borne.

Jean-François Monteils, le patron de cette société de projet et de financements, accueille l’annonce « avec un peu de vertige », même s’il s’y était bien préparé. Il a récemment créé une filiale, SGP Dev, dont la raison de vivre est justement de conduire des études en vue de réaliser d’autres infrastructures que celle du Grand Paris Express. Autrement dit, faire des RER en régions et en assurer la maitrise d’ouvrage. En binôme avec SNCF Réseau qui a le monopole de la gestion du réseau ferré national. Des discussions sont déjà bien avancées avec la région Hauts-de-France et la communauté urbaine de Lille pour un RER métropolitain.

« C’est une ambition historique, commente Jean-François Monteils. Nous allons faire fructifier l’expérience que l’on a accumulé avec le métro du Grand Paris ». Qu’il reste à finir…

Quels financements ?

Ces 100 milliards d’euros, l’Etat ne les déboursera pas tout seul. Les investissements seront partagés avec les collectivités locales dans le cadre du volet mobilité des futurs contrats de plan Etat-Région (CPER) que les élus régionaux attendent depuis un an. Selon la clé de répartition habituelle : 60% collectivités locales, 40% Etat, précise Clément Beaune, le ministre des Transports. « Les mandats de négociation des préfets avec les collectivités seront envoyés en mars et les CPER devraient aboutir d’ici à l’été 2023 », indique la Première ministre. Le round de négociations va donc s’ouvrir au printemps « pour trouver les clés de financement et les calendriers de chaque projet ».

Réaction de deux sénateurs de la commission des Finances du Sénat, Hervé Maurey (centriste) et Stéphane Sautarel (LR) qui mènent une  mission de contrôle sur le financement de la mobilité : « Aucune trajectoire, aucun calendrier, aucune précision sur les sources de financement, les zones d’ombre de ces annonces sont multiples. Espérons que d’ici à la préparation du projet de loi de Finances 2024, on aura des précisions« , ont-ils commenté le 1er mars devant la presse. Pour Philippe Tabarot, sénateur LR et membre du comité d’experts du COI, « Au regard du reste à charge à financer très important qui repose sur les collectivités locales, j’appelle à la vigilance sur la poursuite de ce plan et sur le mode de financement ».

En Ile-de-France, « Les collectivités locales sont prêtes et pleinement mobilisées », ont fait savoir les intéressées dans un communiqué. La région s’engage à mettre quatre milliards d’euros sur la table, la Ville de Paris et les sept départements franciliens deux milliards : soit 60% des 10 milliards pour le volet transport du plan État-région attendus par ces collectivités locales.

A la recherche de nouveaux financements, le gouvernement va se tourner vers l’Europe mais aussi des « gros contributeurs aux émissions de CO2  que sont le secteur aérien et les sociétés d’autoroute qui dégagent des profits importants », souligne Matignon. Sur la perspective d’une loi de programmation préconisée par le Conseil d’orientation des infrastructures, « ce sera également décidé d’ici à l’été« , répond un conseiller. « Ce n’est pas sérieux d’annoncer ça ! , réagit le sénateur centriste Hervé Maurey, membre de la commission des Finances. On sait que les contrats de concessions des sociétés d’autoroute sont tellement bien faits que si on les taxe, les concessionnaires répercuteront sur les péages !« . Il faudra attendre la fin des concessions, au-delà de 2030, pour rédiger des contrats permettant de financer le rail par l’autoroute…

Routes, LGV, voie d’eau 

Outre le « boost ferroviaire », le gouvernement flèche aussi une partie de l’effort budgétaire vers l’entretien des routes (et non pas la construction de nouveaux projets routiers ou autoroutiers), et des voies d’eau pour le transport fluvial de marchandises. « Plus de rail ne signifie pas forcément moins de route, mais on réinterrogera certains projets, il y aura des choix à faire si on veut réduire la voilure du routier au profit du ferroviaire », explique Matignon. Tout en voulant rassurer : « Si l’enveloppe financière de l’Etat [pour ces projets] sera un peu réduite, nous en discuterons avec les collectivités».

Comme pour le ferroviaire, l’idée est de privilégier l’entretien, voire la réhabilitation du réseau routier existant, sa modernisation, plutôt que d’investir dans de nouveaux chantiers. Un choix salué par Réseau Action Climat, qui fédère des associations environnementales et réclame « l’arrêt des investissements dans l’ensemble des nouveaux projets routiers ».

Quant aux trois projets de ligne à grande vitesse (LGV) Marseille-Nice, Montpellier-Perpignan ou Bordeaux-Toulouse (Grand projet du Sud-Ouest, GPSO) remis sur le métier en 2021 par Jean Castex, alors Premier ministre, puis par Emmanuel Macron, ils ne sont pas prioritaires dans le scénario du COI que le gouvernement a choisi. « Mais le point d’atterrissage pourrait être différent en fonction des négociations avec les collectivités locales », précise Matignon. En Occitanie et en Nouvelle-Aquitaine, les négociations pour certaines options du GPSO risquent d’être serrées.

« Si la volonté d’accélérer sur les mobilités du quotidien est primordiale, je rappellerai à la Première ministre que le développement des RER métropolitains en Occitanie passe impérativement par la création des lignes nouvelles entre Toulouse et Bordeaux et entre Montpellier et Perpignan. Elles seules permettront d’augmenter les trains du quotidien sur les lignes actuelles saturées et ainsi de diminuer le nombre de voitures et de camions en circulation sur nos routes. J’ai obtenu des garanties quant à leur réalisation dans les délais annoncés », a immédiatement réagi Carole Delga, présidente de l’Occitanie.

Nathalie Arensonas

Ewa

La feuille de route de Jean-François Monteils pour la Société du Grand Paris

Le Club VRT avec Jean-François Monteils s’est tenu le 1er décembre dans nos salons, 
rue de Clichy, dans 
le 9e arrondissement 
de Paris.

Devant le Club VRT du 1er décembre, Jean-François Monteils, le président du directoire de la Société du Grand Paris depuis mars 2021, a tracé la feuille de route pour l’établissement public chargé du plus grand chantier de France. Soit 68 gares desservies par 200 km de ligne de métro automatique autour de Paris. Saluant le travail réalisé par son prédécesseur, Thierry Dallard, il confirme que les chantiers seront menés dans leur intégralité. Et ambitionne d’ouvrir un nouveau chapitre, en élargissant le champ d’intervention de la SGP, lorsque celle-ci aura achevé sa mission après 2030.

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Jean-François Monteils

Construire 200 km de lignes de métro automatique et 68 gares en investissant plus de 36 milliards d’euros, c’est la mission confiée à la Société du Grand Paris. « Elle sera menée à son terme », affirme Jean-François Monteils qui a succédé à Thierry Dallard à la présidence de la SGP. Il balaie d’un revers de main les critiques qui se font encore entendre, comme celles de Jacqueline Lorthiois, Jean-Pierre Orfeuil, Harm Smit ou Jean Vivier qui, dans une tribune publiée cet automne par l’Obs, expliquaient que les calculs réalisés par la SGP pour justifier la construction des lignes 17 Nord et 18 étaient sujets à caution. « Il est traditionnel et sain d’avoir des visions opposées », justifie-t-il. Selon lui, le raisonnement de ces opposants repose sur le fait que ces travaux aboutiraient à une urbanisation massive qui ne serait pas souhaitée. « C’est peut-être le cas pour ceux qui veulent préserver leur pavillon, mais des milliers de Franciliens à la recherche d’un logement en Ile-de-France attendent la réalisation du Grand Paris », assure le dirigeant.
Et Jean-François Monteils de poursuivre : « Il n’y a pas de projet qui puisse avancer sans utilité publique, sans analyse des flux, sans mesure de valeur socio-économique, vérifiées par des autorités expertes. C’est très encadré méthodologiquement » , assure-t-il. Le président de la SGP ne s’inquiète pas non plus des changements d’habitudes et de déplacements des Franciliens, causés notamment par le télétravail, qui pourraient remettre en cause l’intérêt de certaines lignes du Grand Paris. « C’est habituel de se poser la question lorsque les évaluations sont lancées très en amont. Mais je suis confiant, car nous n’anticipons pas moins de transport, mais un meilleur transport. Le métro automatique du Grand Paris ne sera pas un métro comme les autres. Il pourra s’ajuster aux flux, ce qui est intéressant pour les coûts d’exploitation », commente-t-il. Et il ajoute : « On ne peut pas dire qu’il y ait un surcroit d’offres de transport public en Ile-de-France, qu’il n’y ait pas un besoin massif de report modal, de liaisons nouvelles, d’interconnexions, ou de développer le transport du quotidien ».

Un peu plus de la moitié des lignes déjà creusée

Pour l’heure, un peu plus de la moitié des travaux sur les lignes a été creusée. « Le creusement de la ligne 15 est achevé et la voie posée sur sa moitié. Les deux tiers de la ligne 16 sont accomplis et plus de 110 marchés sont en cours d’exécution. Sur certains tronçons on entrevoit déjà la ligne d’arrivée. Nous avons actuellement à la fois de très gros chantiers de génie civile et une multitude de chantiers d’aménagement », précise le patron de la SGP.
Les rames ont déjà été commandées et achetées et des essais en usine ont démarré. Il faudra patienter jusqu’à fin 2023 pour que commencent les premiers essais en ligne. « Une nouvelle phase critique débutera alors, car il y aura des des interfaces avec d’autres lignes déjà en exploitation et avec Ile-de-France Mobilités. Ce qui annonce de nouvelles difficultés, les seules que nous n’ayons pas encore expérimentées », indique Jean-François Monteils. Pour se préparer à cette phase d’intégration qui nécessitera des échanges constants entre la SGP, IDFM et l’opérateur du système, un appel d’offres a été lancé pour contractualiser avec un « shadow » opérateur, qui servira de « sparring partner » pour anticiper l’exploitation. C’est Transdev Group et Strides International Business qui ont été choisis, il y a un peu plus d’un an par la SGP et IDFM, pour jouer le rôle d’opérateur virtuel pour les quatre nouvelles lignes de métro sans conducteur du Grand Paris. Cette démarche vise à préfigurer l’exploitation et la maintenance pour qu’elles fonctionnent par la suite dans de bonnes conditions, Transdev devant jouer le rôle du futur exploitant et Strides International Business devant apporter son regard d’exploitant de métro automatique avec une expérience internationale.

Aménagement de gares

En plus des nombreux chantiers sur les lignes (creusement de tunnels, constructions des piliers, pose de voies), des travaux d’aménagement de gares ont également démarré. Plus de 12 millions de m2 destinés à créer des bureaux, logements et équipements sont en cours de réalisation sur les 32 millions attendus. La SGP, qui possède un million de m² de surfaces de plancher dans les quartiers des nouvelles gares, a prévu de réaliser 8000 logements d’ici 2030.
La stratégie urbaine définie par la SGP prévoit que ces projets se feront en co-promotion. Une filiale immobilière a été créée pour permettre à la SGP de garder la main sur les 353 projets d’aménagement accompagnant le Grand Paris Express. « Les opérations urbaines seront réalisées en partenariat avec les grands acteurs publics, des promoteurs, des aménageurs », énumère le président de la SGP. « Nous avons signé des conventions. Nous ne faisons pas ce que d’autres font mieux que nous », explique-t-il.

Le bouclage du Grand Paris ne sera pas achevé en 2030

Une vingtaine de jours après cette rencontre, Jean-François Monteils a finalement reconnu que le métro du Grand Paris ne sera finalement pas achevé comme prévu en 2030 mais « probablement » avec « un décalage de quelques mois ».
« On va casser le cap de 2030, on va recaler l’échéance de mise en service des deux derniers tronçons » de la ligne 15, de Pont de Sèvres à Saint-Denis Pleyel puis à Champigny, a-t-il expliqué à l’AFP, en refusant de s’engager sur une date, tant que le groupement chargé de sa construction ne serait pas choisi. « On n’est pas à deux ans », a-t-il ajouté, laissant entendre un objectif d’ouverture en 2031. « On décale de quelques mois, on se sent beaucoup plus robuste sur le planning global ».

Chantiers duplicables

« La SGP est un projet à visée environnementale », assure Jean-François Monteils. Les nouvelles lignes de métro du GPE devraient permettre d’économiser 14 millions de tonnes d’émissions de gaz à effet de serre en contribuant au report modal et grâce au plan d’urbanisme. Mais leur construction pourrait générer 4,4 millions de tonnes équivalent CO2. Jean-François Monteils assure que d’ici 2050, les émissions de la phase chantier auront été compensées, mais pour aller plus vite, il s’est fixé comme objectif de réduire de 25% les émissions liées aux travaux, en utilisant tous les leviers possibles.
« Nous faisons un gros travail d’innovation environnementale qui pourra être reproduit et s’étendre dans des projets menés de par le monde », affirme-t-il, promettant de jouer la carte de la transparence sur ce sujet. « Nous publierons des données vérifiables sur notre performance environnementale, de manière à ce que d’autres projets puissent s’en inspirer ».
Après plusieurs accidents mortels et graves, qui ont jeté une ombre sur les chantiers du Grand Paris, l’établissement public s’est engagé à renforcer la sécurité et la prévention des risques d’accident sur les 170 chantiers en cours, sur lesquels travaillent actuellement plus de 6000 personnes. « Leur sécurisation est une priorité absolue pour 2023. Nous sommes dans un secteur d’activité où la sécurité est importante, mais pas toujours la mieux traitée. D’autres pays, ou d’autres secteurs, font probablement mieux. Nous devons nous en inspirer pour nous améliorer », déclare Jean-François Monteils.

Expertises

Depuis sa création en 2010, la Société du Grand Paris a traversé plusieurs phases. « Dans les premières années, peu de gens pensaient qu’on arriverait au bout d’un projet de cette ampleur. Il semblait impossible de réaliser ces travaux dans les délais », se remémore Jean-François Monteils. Le démarrage des travaux a fait entrer l’entreprise dans une deuxième phase, celle de l’apprentissage. « Ce qui nous a permis d’acquérir de l’expérience. Désormais, nous amorçons une troisième phase, celle des acquis de l’expérience. Nous pouvons utiliser ce que nous avons appris pour faire mieux et améliorer la poursuite du chantier », poursuit-il.
Le réseau a été divisé en 6 tronçons : les trois sections de la ligne 15 et les lignes 16, 17, 18 et comme chacune est dans un état d’avancement différent, il est possible de tirer les leçons de ce qui a été réalisé ici et là pour poursuivre les travaux plus efficacement sur d’autres chantiers. « Nous avons accumulé une énorme somme d’expérience qu’il est important d’utiliser pour la suite du projet et même au-delà », souligne le président de la SGP. C’est dans ce but, qu’avec l’accord du conseil de surveillance, la SGP a créé la filiale SGP Dev. Il s’agit d’utiliser la concentration de compétences « d’une qualité exceptionnelle » rassemblées par la SGP, que ce soit dans le domaine technique, juridique ou administratif, précise t-il (lire aussi l’encadré en page 53).

Equilibre financier

Le financement de la réalisation du Grand Paris Express a été possible grâce à un emprunt massif réalisé avec des taux d’intérêt bas et fixes. « La stratégie de financement a été faite de manière intelligente par mes prédécesseurs », rend hommage Jean-François Monteils qui se trouve confronté à la remontée des taux d’intérêt pour réaliser de nouveaux emprunts destinés à financer la suite des travaux. « Pour financer le projet au-delà de 2027, nous allons continuer notre stratégie de financement par appel au marché avec des taux qui seront plus élevés mais avec des recettes qui le seront
également. Car l’inflation a deux effets : un sur les coûts, l’autre sur les recettes ». Restera à trouver un équilibre financier. « Il faudra voir si la hausse des recettes, indexées sur la hausse des prix, suffira à financer celle des coûts. Mais à ce stade, nous n’avons pas identifié de raison de considérer que l’inflation remet en cause l’équilibre financier du projet », affirme Jean-François Monteils.
Selon lui, il n’y a pas lieu de revoir l’estimation des coûts sur l’ensemble du projet, évalué à ce jour par la SGP à 36,1 milliards d’euros. « Certains pensent que c’est une fatalité qu’il y ait une dérive financière pour ce type de projet. A ce jour, ce n’est pas le cas », insiste-t-il.
Le président de la SGP reconnaît toutefois que l’entreprise ne sera pas épargnée par le phénomène de hausses de prix et les problèmes d’approvisionnement. « L’inflation aura des effets sur la conduite du projet. Il faut voir, contrat par contrat, s’il y a des clauses prévues, des dispositifs d’indexation pour répercuter les hausses, pour savoir comment les hausses subies nous seront répercutées », liste le président de la SGP, qui mène ce travail avec les sociétés intervenant sur ses chantiers.
Un travail mené en conformité avec les préconisations de la circulaire sur l’exécution des contrats de la commande, qui invite les services de l’Etat à passer des marchés à prix révisables, lorsque ceux-ci portent sur des prestations exposées à des aléas économiques majeurs. « Nous devons avoir une approche plus souple et faire évoluer les contrats en cours d’exécution. Nous allons intégrer ce nouveau contexte pour travailler avec les entreprises », indique Jean-François Monteils.

Deux filiales dont il faudra assurer la pérennité

La Société du Grand Paris a pour mission de concevoir et réaliser les travaux du Grand Paris Express. Une fois sa mission achevée, à l’horizon 2030, elle aura vocation à disparaître, même si une structure pourrait rester en place pour gérer la dette. Pour donner de nouvelles perspectives et éviter de perdre l’expérience et l’expertise accumulée avec les chantiers du Grand Paris, la SGP vient de créer deux filiales, SGP Immobilier et SGP Dev, qui devraient subir le même sort que leur société-mère… sauf changement législatif.
La filiale SGP immobilier a été lancée pour gérer le patrimoine foncier du Grand Paris Express en lien avec la puissance publique. « Nous travaillons avec le Préfet de région et le commissaire du gouvernement qui font des préconisations sur l’urbanisme », explique Jean-François Monteils. Les bénéfices réalisés par cette filiale, de l’ordre de quelques centaines de millions d’euros, doivent contribuer à rembourser la dette. « Les contribuables ont acheté des terrains qu’on valorise. On les vend et les recettes serviront à minorer le montant de la dette », résume le dirigeant. Une fois, les aménagements réalisés, cette filiale n’aura plus de raison d’être. En revanche, la filiale SGP Dev, pour l’heure « une structure exploratoire », pourrait être appelée à un bel avenir s’il lui est possible, plus tard, de conduire des études en vue de réaliser d’autres infrastructures que celle du Grand Paris Express. Eventuellement en intervenant sur le réseau ferroviaire national, actuellement chasse gardée de SNCF Réseau. Mais auparavant, il faudra faire évoluer la loi.
« Il ne serait en effet pas concevable, que nous travaillions sur d’autres projets avec de l’argent destiné au Grand Paris Express », a expliqué Jean-François Monteils en justifiant le lancement de ces filiales : « La SGP a développé un savoir-faire dans la maîtrise d’ouvrage, qu’il serait dommage de voir se perdre avec la fin du projet du Grand Paris ». Réponse d’ici à l’été prochain, espère le président, pour savoir si la SGP a convaincu les pouvoirs publics du potentiel de SGP Dev. Et pour pouvoir commencer à lever les obstacles juridiques et techniques qui se dressent encore sur son chemin.

Management collégial

Interrogé sur sa méthode, la président met en avant la concertation. Il rappelle que la SGP a une direction collégiale et se réjouit d’avoir été intégré « dans un directoire d’une qualité exceptionnelle, avec des complémentarités qui permettent la réflexion et de faire émerger des solutions sur des sujets difficiles, en échangeant. Ce qu’on aura fait de bien, on l’aura fait à trois, avec Bernard Cathelain et Frédéric Brédillot », souligne le président du directoire.
Celui-ci se félicite également de l’élection à l’unanimité, en novembre, de Karim Bouamrane, maire de Saint-Ouen-sur-Seine, à la présidence du conseil de surveillance. « Cela n’avait pas été le cas de ses prédécesseurs. Cela démontre que nous sommes entrés dans une période de sérénité qui contraste avec les phases précédentes. Avoir un conseil de surveillance qui fait son travail, surveille, se prononce sur notre stratégie et valide nos options de manière sereine, c’est important, et c’est un signe de progrès », conclut Jean-François Monteils. Deux filiales dont il faudra assurer la pérennité
La Société du Grand Paris a pour mission de concevoir et réaliser les travaux du Grand Paris Express. Une fois sa mission achevée, à l’horizon 2030, elle aura vocation à disparaître, même si une structure pourrait rester en place pour gérer la dette. Pour donner de nouvelles perspectives et éviter de perdre l’expérience et l’expertise accumulée avec les chantiers du Grand Paris, la SGP vient de créer deux filiales, SGP Immobilier et SGP Dev, qui devraient subir le même sort que leur société-mère… sauf changement législatif.
La filiale SGP immobilier a été lancée pour gérer le patrimoine foncier du Grand Paris Express en lien avec la puissance publique. « Nous travaillons avec le Préfet de région et le commissaire du gouvernement qui font des préconisations sur l’urbanisme », explique Jean-François Monteils. Les bénéfices réalisés par cette filiale, de l’ordre de quelques centaines de millions d’euros, doivent contribuer à rembourser la dette. « Les contribuables ont acheté des terrains qu’on valorise. On les vend et les recettes serviront à minorer le montant de la dette », résume le dirigeant. Une fois, les aménagements réalisés, cette filiale n’aura plus de raison d’être. En revanche, la filiale SGP Dev, pour l’heure « une structure exploratoire », pourrait être appelée à un bel avenir s’il lui est possible, plus tard, de conduire des études en vue de réaliser d’autres infrastructures que celle du Grand Paris Express. Eventuellement en intervenant sur le réseau ferroviaire national, actuellement chasse gardée de SNCF Réseau. Mais auparavant, il faudra faire évoluer la loi.
« Il ne serait en effet pas concevable, que nous travaillions sur d’autres projets avec de l’argent destiné au Grand Paris Express », a expliqué Jean-François Monteils en justifiant le lancement de ces filiales : « La SGP a développé un savoir-faire dans la maîtrise d’ouvrage, qu’il serait dommage de voir se perdre avec la fin du projet du Grand Paris ». Réponse d’ici à l’été prochain, espère le président, pour savoir si la SGP a convaincu les pouvoirs publics du potentiel de SGP Dev. Et pour pouvoir commencer à lever les obstacles juridiques et techniques qui se dressent encore sur son chemin.

Valérie Chrzavzez

Ewa

Les incertitudes de SNCF Réseau

Travaux été RER E
Haussmann Saint Lazare
SNCF Réseau

Contrat de performance qui se fait attendre, départ de deux hauts dirigeants, velléités de la SGP d’intervenir sur le réseau ferré… Le gestionnaire des infrastructures ferroviaires est bousculé. Les engagements de l’Etat seront regardés de près. Le salon européen de la mobilité (EuroMoExpo) qui se tiendra du 7 au 9 juin Porte de Versailles à Paris, sera-t-il l’occasion d’annonces en faveur du transport public?

Coup sur coup, deux nouvelles ont surpris au sein de SNCF Réseau. C’est d’abord l’annonce inattendue du départ, dès le 1er juillet, de deux de ses dirigeants, dont celui de Matthieu Chabanel, le numéro deux du gestionnaire des infrastructures dont les compétences et le sens relationnel étaient unanimement appréciés. C’est, quelques jours plus tard, le 12 mai, la décision de la Société du Grand Paris de créer une filiale « pour conduire des études en vue de la réalisation d’autres projets d’infrastructures, soit d’extensions potentielles du Grand Paris Express, soit sur des projets se situant au-delà de la maîtrise d’ouvrage du GPE ».

Autrement dit, l’établissement public créé par une loi en 2010 pour réaliser le Grand Paris Express envisage de se voir confier la maîtrise d’ouvrage travaux des projets dont elle aurait conduit les études préalables, notamment sur le réseau ferré national. Cela permettrait de lui donner de nouvelles perspectives, justifiées par la SGP par « la concentration de compétences dont elle s’est dotée dans tous les domaines touchant à la construction d’une ligne nouvelle de métro ». Dans un communiqué, la SGP explique que « l’ensemble de ces compétences a donc désormais vocation à servir l’intérêt général au-delà du Grand Paris Express« .

Pour le moment, il s’agit simplement d’autoriser la création d’une filiale pour réaliser des études et des travaux, modère un porte-parole. Selon lui, la loi de 2010 sur le Grand Paris prévoit ce cas de figure en indiquant que « la SGP puisse se mobiliser pour réaliser des études sur d’autres projets mais en tant que maître d’ouvrage« . Le conseil de surveillance a donc mis en place un groupe de travail sur les modalités « d’extension des compétences, sur les obstacles à lever et les enjeux ». C’est aussi une façon de se préparer à l’avenir en se donnant une nouvelle raison d’être : dans 8 ans, la mission de la Société du Grand Paris (SGP) devrait être remplie avec la construction de 200 kilomètres de ligne de métro automatique (et 68 gares)  autour de Paris.

Interrogée sur ces velléités de développement, Valérie Pécresse se dit favorable à l’extension des champs de compétence de la SGP et à sa sortie des frontières. Mais sous condition :  qu’elle ne le fasse pas avec les recettes versées par les contribuables franciliens. Or, actuellement, la SGP tire une grande partie de ses recettes de taxes sur les bureaux, sur les locaux commerciaux et de stockage ainsi que sur des surfaces de stationnement en ile-de-France. La présidente de la région Ile-de-France, qui cite « la demande des Hauts-de-France à la  SGP de réaliser des études sur Lille-Hénin-Beaumont », estime que cela « ne peut pas se faire avec des ressources franciliennes ». L’élue, qui s’exprimait en marge d’une conférence de presse sur l’ouverture à la concurrence des bus en grande et moyenne couronne, a également fait part de ses souhaits : elle demande que « la SGP finance des études d’extensions de lignes comme Versailles-Nanterre ou Orly-Montegereau ou la T8 à l’Est , ou encore l’interconnexion de la ligne H à Pleyel« .

Mais ces perspectives suscitent des inquiétudes en interne, sur une possible fin du monopole de SNCF Réseau sur les infrastructures ferroviaires. Fanny Arav, administratrice Unsa de SNCF Réseau, s’interroge : « Est-ce l’ère de la découpe? Cette création suscite beaucoup de questions« . Selon elle, « Il y a quelques années, on a réuni RFF et l’Infra après s’être rendu compte que séparer la maîtrise d’ouvrage et la maîtrise d’ouvrage délégué était dangereux car cela ne responsabilise pas le concepteur« . Or, rappelle-t-elle,  » SNCF Réseau a beaucoup de difficultés à trouver des financements alors que le monopole du réseau est sa raison d’être ». Selon elle, l’Etat ne se donne pas les moyens d’une politique affirmée en faveur du ferroviaire avec des moyens financiers à la hauteur. « On le voit avec le contrat de performance qui est un contrat d’attrition », dit-elle. Conséquence, poursuit-elle, « l’Etat veut faire monter en puissance un autre organisme, la SGP, qui est une société de financement qui fonctionne avec un système de financement bien fichu. On a l’impression qu’une bascule peut se produire. » Et de s’interroger : »n’est-ce pas un moyen de tuer dans le temps SNCF Réseau?« 

De son côté, SNCF Réseau se contente de rappeler que ses équipes travaillent déjà sur le réseau ferroviaire avec d’autres entreprises ou dans le cadre de PPP (partenariat public-privé). Il faudra aussi attendre les prochaines annonces pour comprendre le positionnement des pouvoirs publics vis-à-vis du gestionnaire du réseau.

Marie-Hélène Poingt

Ewa

« Je crois profondément au modèle économique, juridique et d’aménagement de ce projet »

Club VRT Thierry Dallard
Thierry Dallard
Thierry Dallard, président du directoire de la Société du Grand Paris.

Depuis 2020, la réalisation du Grand Paris Express connaît une phase d’accélération : actuellement, une vingtaine de tunneliers sont entrés en action pour creuser le métro de 200 km qui doit encercler la capitale en desservant 68 gares. Thierry Dallard, le président du directoire de la Société du Grand Paris (SGP) était l’invité du Club VRT le 28 janvier à Paris. Face à un public nombreux, il a fait le point sur l’avancée du projet du siècle et les perspectives.

Ingénieur des ponts et chaussée et ancien élève de l’Ecole normale supérieure, Thierry Dallard a pris en mai 2018 la présidence du directoire de la Société du Grand Paris, succédant à Philippe Yvin. Chargé de piloter ce projet souvent qualifié de pharaonique, il nuance cet adjectif : si certains critiquent son coût et son intérêt, d’autres mettent en avant le challenge technique et les défis à relever.

« Lorsque j’ai pris mon poste, il y avait encore des Parlementaires qui s’interrogeaient sur la nécessité de mener ce projet », raconte Thierry Dallard, en rappelant que Paris ne se place qu’au 19e rang sur 20, au classement des métropoles, établi en fonction de la taille de leur métro. « Si le Grand Paris Express (GPE) était livré aujourd’hui, nous nous placerions à la cinquième place. Mais lors de sa livraison, en 2030, notre capitale ne sera que neuvième dans ce classement. » Dans une logique de compétition internationale, ce projet lui paraît donc « urgent et nécessaire ». Pour en relativiser le gigantisme, il précise : « sur le marché mondial de la création de lignes de métros automatiques, le GPE ne représente que 7 % de ce qui se fera dans les 10 ans ».

Selon lui, l’importance du projet de transport masque sa dimension urbaine, qui va être réalisée via l’aménagement des quartiers de gares. « En compilant ces aménagements, on arrive à 1,5 fois la superficie de Paris. Réaliser l’aménagement d’une telle superficie, c’est bien plus compliqué que ce qu’à fait Haussmann au XIXe siècle. »

Le dirigeant se réjouit des réalisations en cours, rendant irréversible ce projet, qui se fera en moins de 15 ans, avec des leaders français et européens, comme Thalès, Alstom-Bombardier et Siemens.

Peu impacté par la crise jusqu’à présent

Prévu pour être achevé en 2030, le chantier du Grand Paris Express avance. L’année 2020 a été très dense, malgré la crise sanitaire. C’est la période où il y a eu le plus grand nombre de tunneliers en action sur les chantiers. Vingt tunneliers en même temps en 2020, cela correspond au pic du nombre de tunneliers à l’échelle du projet. A partir de maintenant, un certain nombre d’entre eux vont s’arrêter, notamment sur le tronçon de la ligne 15 où la fin du creusement est prévue fin 2021.

Malgré la crise sanitaire, une enquête publique a été engagée, permettant d’effacer les derniers obstacles administratifs pour réaliser le premier tronçon de la ligne 18. « Nous avons signé pour la création des deux premiers lots de génie civil, pour la section Orly Massy-Palaiseau et la section aérienne de Palaiseau jusqu’à l’arrière gare du CEA Saint-Aubin. Et le troisième lot de génie civil sous terrain est lancé pour Saint-Quentin – Versailles », détaille Thierry Dallard. Les travaux ferroviaires ont également démarré. Les premiers rails ont commencé à être posés sur plusieurs kilomètres en octobre dernier, sur la ligne 15, à partir de la gare de Noisy-Champs en Seine-et-Marne. L’impact de la crise sanitaire sur les lignes qui n’étaient pas encore en travaux sera limité, de l’ordre de quelques mois.

Les lignes déjà en travaux vont, en revanche, subir un retard de six à huit mois, en raison de l’arrêt total des chantiers lors du premier confinement, puis de la désorganisation complète de la chaîne logistique. « Nous avons connu une baisse de productivité lors du redémarrage en avril, du fait de la fermeture des écoles, des hôtels… et de la difficulté de maintenir des chantiers 24 heures sur 24, quand les gens étaient confinés chez eux. »

Le reconfinement de novembre n’a heureusement pas eu de conséquences analogues car les entreprises avaient mis en place un protocole sécurité très rigoureux sur leurs chantiers.

La Société du Grand Paris recherche, avec ses maîtres d’oeuvre et les entreprises de travaux, les moyens de résorber le retard et surtout de ne pas l’accroître. Cela dépendra de la façon dont la crise sanitaire évoluera. « Pour le moment, à l’échelle de l’enjeu du projet, l’impact est  cependant modeste, en comparaison à certains secteurs de l’économie, fortement sinistrés. », assure Thierry Dallard.

La crise n’a pas, non plus, arrêté les appels d’offres. « Ils ont été signés aux dates prévues et les lancements de procédure n’ont pas été impactés. » Les appels d’offres les plus importants seront lancés cette année et au plus tard au premier trimestre 2022.

L’aubaine des taux très bas

La crise qui a fait baisser les taux d’intérêt, a permis à la SGP de bénéficier de conditions financières excellentes. « On a fait une émission obligataire en plein confinement, avec des modalités favorables », rappelle Thierry Dallard.

De plus, tout récemment, le conseil de surveillance a autorisé un volume d’emprunt maximum de 10 milliards d’émissions vertes si les conditions de marché le permettent. Ce qui permet ainsi de poursuivre la sécurisation du financement du projet.

Rappelons qu’en 2017, un rapport de la Cour des comptes avait mis en cause l’équation financière de la SGP et s’inquiétait « d’une trajectoire financière non maîtrisée » qui pourrait « faire entrer la SGP dans un système de dette perpétuelle ».

Pour renforcer les moyens de la SGP et lui permettre de mener à bon port le chantier dont le coût prévisionnel avait alors été réévalué à 35 milliards d’euros en 2017 (alors qu’il était censé coûter 25 milliards en 2013), le député LR Gilles Carrez, chargé de trouver une solution, avait en effet proposé d’accroître les recettes fiscales de la Société du Grand Paris, en les faisant passer de 200 à 250 millions, dès 2018. « Avant la Covid-19, nous n’avions que 50 % de ce montant. Les taux très bas que nous avons obtenus, nous ont permis de présenter au Parlement fin 2020, une trajectoire recalée, permettant de rembourser notre dette, sans avoir à remonter la fiscalité », se félicite Thierry Dallard.

Dans un but de consolidation, la SGP prévoit d’emprunter, en 2021, à une hauteur supérieure à ses besoins, comme elle l’a déjà fait en 2020. De manière à avoir deux années de réserve et de disposer fin 2021, d’un encours de dette de 80 % de ses besoins, afin d’être capable de financer le projet jusqu’à la fin du prochain quinquennat. Ce qui donne de la visibilité aux entreprises : la robustesse du projet est démontrée via sa capacité d’affronter l’avenir de manière sereine avec l’assurance de disposer de fonds.

Pas d’inquiétudes non plus liées aux incertitudes actuelles sur l’immobilier des bureaux et sur la façon dont le marché va évoluer. L’essentiel des recettes est calé sur le stock de bureaux existant, et non pas sur les ressources locatives.

« Aujourd’hui nous avons une trajectoire de remboursement amortissable en 2070. Si demain les recettes étaient moindres, nous n’aurions pas les problèmes majeurs que la Cour des comptes avait relevés. »

La méthode Dallard

Interrogé sur sa méthode, Thierry Dallard répond : « c’est un cocktail de mes expériences, dans le public et le privé ». Au cours des 15 années passées dans le secteur public, notamment au ministère de l’Equipement, il a « acquis la conviction que pour faire des projets complexes, la concertation doit être un acte de foi. Qu’il faut expliquer, écouter, convaincre et se remettre en cause ».

Et durant les 12 ans passés dans le privé, explique-t-il, il a utilisé « des outils qui n’existent pas dans la sphère publique et a acquis la culture de la gestion des risques ». Il a aussi été confronté à l’expérience des marchés financiers et des lancements d’émissions obligataires. « S’il y a une méthode Dallard, c’est celle de la biodiversité, y compris dans les organisations humaines ! », lance-t-il.

D’où cette conviction : pour mener à bien un projet aussi ambitieux que le Grand Paris Express, il faut réunir des talents dans tous les domaines. « Parce qu’un système monoculture ou monoformation ne marcherait pas. » Selon lui, c’est en mélangeant les expertises que l’on pourra faire aboutir le projet.

La SGP prévoit d’ailleurs de poursuivre ses recrutements pour passer de 200 salariés en 2018 à 1 000 fin 2021. L’entreprise n’a pas cessé les embauches durant le confinement. « On devait embaucher 300 personnes en 2020, nous y sommes parvenus. » Même si l’intégration, en pleine période de confinement, n’a pas toujours été aisée.

Dialogue et concertation

Comment se passent les relations, qui n’ont pas toujours été faciles, avec les élus ? « C’est grâce aux maires que le projet a vu le jour et que cela va aussi vite », estime le président du directoire. « Il n’y a pas beaucoup de grands projets publics d’infrastructure qui soient passés aussi vite du stade de concept politique, au premier coup de pioche. Cela n’aurait pas été possible sans l’adhésion des élus. »

Ce dialogue constant avec les élus se double de discussions sur le terrain avec les riverains. Une vingtaine de tunneliers qui creusent et 300 chantiers à mener rapidement pour tenir les délais, c’est en effet autant de nuisances pour le voisinage. « Quand on doit faire tourner des chantiers 24/24, il faut parfois convaincre, expliquer, accompagner, réduire les nuisances pour organiser le chantier. C’est le travail du maître d’ouvrage. Et c’est là que la SGP a mis tout son poids dès l’origine, parce que nous avions conscience que cela allait être essentiel. »

Si Thierry Dallard reconnaît qu’il peut y avoir des tensions avec les élus, il assure qu’il n’y a pas d’exemples où on n’a pas trouvé de solutions.

Et demain ?

Pour lancer les appels d’offres, qui permettront de choisir les futurs exploitants des lignes de métro, une plateforme a été mise en place, réunissant la SGP, la RATP, qui sera le gestionnaire d’infrastructure et Ile-de-France Mobilités, l’autorité organisatrice. « Ce sera plus complexe que les mises en services auxquelles on a été habitué jusqu’à présent. C’est pourquoi nous avons mis en place un plateau commun. » L’exploitant des lignes 16 et 17 devrait être choisi mi-2022.

Autre question sensible : comment financer le coût de fonctionnement du métro du Grand Paris, estimé à un milliard d’euros annuels ? « Le financement, n’est pas de notre ressort. Nous n’avons pas pour charge de définir la politique fiscale ou tarifaire. Mais c’est une question qui est devant nous », reconnaît Thierry Dallard.

Quant à l’avenir de la SGP elle-même, une fois que sa mission sera achevée, Thierry Dallard estime qu’il est trop tôt pour l’évoquer. « Nous sommes encore en phase de montée en puissance. Quand on aura franchi le cap des recrutements, puis celui de la première mise en service opérationnelle, on pourra se poser la question. » Il constate que ce n’est pas un sujet de préoccupation pour ses collaborateurs. « Sans doute parce que peu d’entre eux ont une visibilité à 10 ans. Et parce que les talents qui auront travaillé sur ce projet et auront enrichi leur expérience, pourront la valoriser. Soit de manière individuelle, en travaillant pour des sociétés ailleurs dans le monde, ou avec un spin-off du Grand Paris pour d’autres projets. »

Et de conclure :  « Ce dont je suis sûr, c’est qu’ils auront accumulé un savoir qui aura vocation à être utilisé. Je crois profondément au modèle économique et juridique de ce projet, mais aussi à son modèle d’aménagement, consistant, non pas à faire de grandes radiales sur des terres agricoles ou des forêts comme le RER, mais consistant à développer une vision structurée autour du mass transit, dans une logique de reconstruction de la ville sur la ville. Les équipes qui seront capables de gérer les relations avec les marchés financiers, de savoir gérer la gouvernance locale et la complexité contractuelle et technique des outils à mettre en place pour ce genre de projet, auront des choses à faire devant elles. Pour l’heure, ajoute leur patron, la priorité est de faire face aux challenges qui se présentent et de se mobiliser à 200 %. Quand on les aura franchis, on pourra se projeter, mais on n’en est pas là. »

Valérie Chrzavez


Un modèle transposable

Le modèle du GPE est-il transposable ? « Oui », répond Thierry Dallard, qui est allé présenter le projet à Bruxelles, où on a plutôt tendance à soutenir les projets de liaisons interurbaines. « Les nœuds urbains n’étaient pas, jusqu’à présent, dans son cœur de priorité. C’est pourtant là qu’on coche toutes les cases du développement durable. » Agir sur les nœuds urbains permet de réduire l’usage de la voiture et donc les émissions de gaz à effet de serre, de désenclaver des territoires et de limiter l’étalement urbain, en permettant à des territoires de se redévelopper, sans avoir à créer de villes nouvelles. « En termes de politique de transport, le GPE devrait être une inspiration pour l’Europe. Pas seulement en termes de trafic, mais sur l’effet structurel que cela peut avoir en termes d’urbanisme », estime-t-il.


Pas vocation à devenir aménageur

« Si on regarde le PIB, les économistes évaluent entre 10 à 20 milliards le PIB supplémentaire induit par la création du GPE, soit quatre à huit milliards de recettes fiscales induites au niveau national. La création de valeur réelle permettra donc de rembourser le métro.» Mais pour Thierry Dallard, la vraie création de valeur, c’est le développement immobilier. Une valeur qui ne sera pas captée par la société du GPE qui n’a pas vocation à devenir aménageur. « On a assez à faire comme maître d’ouvrage du GPE et on ne veut pas troubler les messages en sortant de notre rôle », justifie Thierry Dallard. La société aura tout de même un rôle dans le développement immobilier, qui se limitera, en tant que propriétaire foncier, à valoriser les parcelles non utilisées pour ne pas laisser de dents creuses. « On a évalué à un million de mètres carrés ce que l’on pourrait faire sur un potentiel de 30 à 40 à l’échelle des quartiers de gare. C’est modeste, mais c’est quand même trois à quatre fois le village olympique.»


Trois enquêtes d’utilité publique prévues en 2021

Les lignes du Grand Paris Express seront progressivement mises en service entre 2024 et 2030. Actuellement plus de 40 km sur les 200 km prévus ont déjà été creusés. Et plus de 20 milliards d’euros engagés.« Nous avons encore trois enquêtes publiques en 2021, pour décision en 2022, avant les présidentielles, pour le tronçon est de la ligne 15. Celle du tronçon ouest qui entérinera le déplacement de la gare de la Défense et celle d’utilité publique modificative du tronçon ouest de la ligne 18, intégrant le repositionnement de la gare de Saint-Quentin et la mise au sol du viaduc entre le CEA et le golf, afin de réduire l’impact sur le paysage et de réduire l’emprise foncière. Pour la ligne 18, le GPE a réduit de 20 % l’emprise sur les terres agricoles », souligne Thierry Dallard. L’abandon d’Europacity ne remet pas en cause la ligne 17, mais va demander de redimensionner la gare du triangle de Gonesse. En attendant de savoir ce que l’Etat en fera, la Société du Grand Paris a choisi d’accélérer la mise en œuvre de la gare de Villepinte, initialement prévue pour 2030, qui pourrait être mise en service au parc des expositions, en 2028.

Ewa

Olivier Klein prend la présidence du conseil de surveillance de la SGP

Olivier Klein

Après des semaines de tensions et de tractations, François Durovray, le président LR du conseil général de l’Essonne, a jeté l’éponge, laissant la voie ouverte à Olivier Klein qui a été élu le 3 novembre président du conseil de surveillance de la Société du Grand Paris. Le maire socialiste de Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), qui était soutenu, semble-t-il, par l’Elysée, succède à Patrick Braouzec, ancien député et maire communiste de Saint-Denis. Marc Papinutti, le directeur général des infrastructures de transports et de la mer au ministère de la Transition écologique devient vice-président de la SGP. Le nouveau président a dit aborder son mandat « dans un esprit de dialogue et de travail avec toutes les collectivités locales, notamment les départements ».

De son côté, Thierry Dallard, dont le mandat est arrivé à échéance fin septembre (il est arrivé en 2018 et a terminé le mandat de cinq ans commencé par Philippe Yvin en 2015), doit être auditionné par le Parlement. « Ces auditions, préalables au décret de reconduction, n’ont pas pu se tenir, pour le moment, en raison de la crise sanitaire qui bouleverse le calendrier parlementaire », explique la SGP. En attendant, il a été nommé par président du directoire par intérim (ainsi que les deux autres membres du directoire) afin que les activités de la Société du Grand Paris puissent se poursuivre, à savoir réaliser 200 km de métro automatique autour de Paris pour desservir 68 nouvelles gares.