Le projet « Villeneuve Demain » est entré dans une nouvelle phase avec la pose, le 18 juin, de la première pierre du nouveau technicentre de Villeneuve-Saint-Georges (dans le Val-de-Marne), en présence notamment de Valérie Pécresse, présidente d’Ile-de-France Mobilités et de la région, Jean-Pierre Farandou, PDG du groupe SNCF, Matthieu Chabanel, PDG de SNCF Réseau ou Christophe Fanichet, PDG de SNCF Voyageurs.
C’est, indique la SNCF, le plus gros chantier mené en Île-de-France par SNCF Voyageurs pour le compte d’Île-de-France Mobilités pour un investissement de 685 millions d’euros (dont 590 millions d’euros financés par Île-de-France Mobilités et 95 millions d’euros par la Région Île-de-France et l’Etat).
Le projet, explique le groupe, « doit faciliter l’entretien et la maintenance des trains Régio 2N déjà en circulation sur la ligne R et le RER D, tout en permettant l’accueil des nouveaux RER NG de la ligne RER D, permettant ainsi d’optimiser leur fiabilité et leur régularité au bénéfice des 700 000 voyageurs quotidien de ces deux lignes« .
Ces trains à deux niveaux nécessitent des infrastructures de maintenance redimensionnées pour améliorer les accès aux différentes pièces et faciliter leur maintenance, précise encore l’entreprise. D’où la création de ce nouveau complexe industriel dédié à la maintenance et au garage des matériels roulants de la ligne R et du RER D.
Les bâtiments situés sur le site de Villeneuve Prairie sont actuellement dédiés à la maintenance des trains Intercités et TER – dont l’entretien est relocalisé-, ainsi qu’à celle des trains Régio 2N de la ligne R qui vont demeurer sur ce site. Les nouveaux équipements du technicentre de Villeneuve Prairie seront construits en remplacement des équipements existants.
Eiffage, qui a remporté l’appel d’offres, a commencé les travaux avec notamment la démolition des anciens bâtiments et la préparation des chantiers (mise en place d’un convoyeur pour les évacuations de déblais et des gravas). A la place sont notamment prévus deux bâtiments pour la maintenance légère, un atelier pour la maintenance lourde, une tour et un vérin en fosse pour entretenir les roues des trains, diverses voies de remisage et de préparation des rames ou encore la refonte totale des voies d’entrée du site.
La livraison du site est prévue d’ici à la fin de l’année 2027.
Le Technicentre de Villeneuve en chiffres
79 Régio 2N pour les lignes D et R / 81 RER NG
31 hectares de superficie totale du site Villeneuve Prairie
100 % des trains de la ligne R et 50% des trains de la ligne RER D y seront maintenus
Plus de 150 rames en capacité de stationnement et 22 rames en maintenance simultanées
4 accès modernisés pour une plus grande fluidité d’exploitation de la ligne R et du RER D
Cinq ans après le lancement du programme Opter, le bilan est satisfaisant : 12 régions ont confié à SNCF Voyageurs la rénovation à mi-vie de leurs TER. Auxquelles se sont ajoutés les chemins de fer luxembourgeois (CFL). Les premières rames rénovées sortent désormais des ateliers : le 24 février, un TER 2N NG des CFL a quitté le technicentre de Saint-Pierre-des-Corps. Le 26 mai, c’était au tour de la première rame AGC de Grand Est d’être présentée au technicentre de Bischheim à côté de Strasbourg.
Rappelons qu’avec ce programme, la direction du Matériel ciblait 931 TER achetés entre 2004 et 2011 et arrivés à mi-vie (dont 699 AGC et 232 TER 2N NG). Soit 40 % du parc de matériel employés pour le transport express régional qui sera rénové en 2031.
Elle a dû aller voir les régions, une par une, pour les convaincre de recourir à ses services, au lieu de passer par d’autres prestataires (potentiellement Alstom ou Caf). Elle leur a proposé de profiter de cette opération pour revoir l’aménagement intérieur des trains et pour installer de nouveaux services.
Mise à nu
Après une vingtaine d’années de circulation, ces matériels ont en effet besoin d’être entièrement révisés et dotés d’équipements plus modernes. Cette maintenance de niveau 4 et 5, de grande ampleur, ne peut pas être effectuée dans les ateliers TER régionaux qui réalisent la maintenance courante, de niveau 1 à 3. Les opérations dites de mi-vie consistent à désaccoupler les éléments de la rame. Chacun d’eux est dégarni : tous les équipements intérieurs sont retirés, des sièges aux fenêtres et des sols à la moquette qui couvre le plafond. Cette mise à nu permet d’accéder au “chaudron“, à la fois structure et carrosserie de l’élément, afin de vérifier que d’éventuelles infiltrations d’eau n’ont pas entraîné de corrosion. L’élément est dépelliculé, traité contre la corrosion, et repeint. La chaîne de traction est aussi démontée et vérifiée. Il faut rééquiper l’intérieur en câbles de toutes sortes pour la vidéo surveillance, le wi-fi, les prises de courant ou l’éclairage qui passe au led. On compte ainsi plus de 200 km de câbles dans chaque rame.
Viennent ensuite les équipements, la pose de nouveaux revêtements sur les parois et le sol. Et de nouveaux sièges sont installés. Même le conducteur devrait prochainement être assis sur un nouveau siège à support pneumatique.
Nouvelles fonctionnalités
Ces travaux donnent l’occasion d’offrir plus de places aux personnes à mobilité réduite avec l’optimisation de la rampe d’accès et l’ajout d’un bouton SOS. Et d’agencer des espaces vélo avec six crochets.
Pour baisser l’empreinte carbone, plusieurs dispositifs sont prévus, du pelliculage athermique au mode éco clim en passant par des filtres à particules sur les moteurs diesels des rames qui en sont équipées.
La rénovation permet aussi d’intégrer des fonctionnalités de « train connecté » avec un système d’information voyageurs en temps réel, du wi-fi, de la vidéoprotection avec transmission en temps réel, ou encore avec un système de comptage automatiques des voyageurs.
Grâce à cette remise à neuf, la durée de vie de ces rames va pouvoir s’allonger de 15 à 20 ans. Pour les régions, ce rajeunissement représente le tiers du prix d’un matériel neuf. Et pour la SNCF, ces opérations représentent un chiffre d’affaires déjà contractualisé de 2,1 milliards d’euros sur les dix ans à venir. Potentiellement, le montant pourrait atteindre trois milliards d’euros si toutes les régions confient à la SNCF le soin de relifter l’ensemble de leurs TER vieillissants.
Yann Goubin
Des technicentres 4.0
Les dix technicentres industriels de la SNCF (Bischheim, Charentes-Périgord, Hellemmes, Nevers-Languedoc, Picardie, Rennes, Romilly, Rouen Quatre-Mares, Saint-Pierre-des-Corps et Vénissieux), vont participer au programme Opter, même si chacun d’eux a développé sa propre spécialité, comme la révision des moteurs pour Vénissieux, des Corails pour Charentes-Périgord, des blocs freins pour Rennes, des batteries pour Romilly, ou des wagons pour la Picardie.
Dans ce but, les technicentres ont dû s’adapter pour accroître leurs performances industrielles en termes de qualité, délais et coûts, et gagner en efficacité et en compétitivité. Les bâtiments ont été transformés et les méthodes de travail revues.
À Bischheim, par exemple, l’agencement du technicentre a été remodelé pour faire de la place à un nouvel atelier industriel de 10 000 m2 recouvert d’un badage gris anthracite qui voisine avec le grès rose des Vosges dont sont faits les anciens bâtiments du technicentre. La partie neuve, ajoutée à deux halles historiques pour former le nouvel atelier, ne dispose pas de voies ferrées. Elle est organisée selon différents postes (cabine de peinture, passerelles, etc.) vers lesquels sont amenés les éléments en rénovation Ceux-ci sont déplacés à l’aide chariot plats motorisés donnant à cet atelier des allures d’usine du futur. C’est en effet l’objectif de la direction du Matériel qui a engagé en 2015 un programme dénommé Usine 4.0 Elle y consacre 500 millions d’euros, avec l’objectif de propulser les dix technicentres industriels au plus haut niveau des standards de l’industrie 4.0, d’ici 2025.
Visible très concrètement à travers les bâtiments, la mutation se traduit aussi dans le management et l’organisation du travail. Si les métiers des agents ne changent pas de nature, les outils digitaux – les nouveaux ateliers sont connectés en 5G – permettent de l’exercer différemment en privilégiant la collaboration, l’autonomie et la réactivité.
Progressivement, on voit apparaître dans ces ateliers, des nouvelles technologies comme des exosquelettes pour soulager les agents qui doivent manipuler des pièces, ou multiplier les changements de positions (accroupis, debout), les robots collaboratifs guidés par les agents, ou encore les robots autonomes. On peut aussi citer les tablettes numériques qui fournissent des plans, et des procédures de montages ou démontages, in situ.
L’objectif de toutes ces améliorations permet aussi d’absorber une charge de maintenance qui ne cesse de croître : elle a notamment augmenté de + 50 % en 2023, par rapport à 2022.
A Bischheim, le site, qui emploie 769 agents et 63 alternants, s’est notamment fixé comme objectifs une baisse de 20 % de ses coûts de production en cinq ans, une augmentation de 20 % de la satisfaction des agents et de 30 % de celle des clients.
Dans le monde ferroviaire, avoir 20 ans, c’est déjà avoir beaucoup vécu et les rames TGV doivent se refaire une nouvelle jeunesse ! Elles sont alors envoyées aux ateliers de la SNCF pour subir une rénovation mi-vie qui leur permet de repartir pour vingt ans de service.
C’est le cas depuis quelques années pour les TGV Duplex avec une particularité depuis septembre dernier : une rame (la rame 262) est en train d’être réaménagée sur le modèle du TGV Océane qui circule sur l’axe Atlantique. Une rénovation en profondeur, différant de celle subie jusqu’alors par les Duplex qui étaient rénovés sur la base de la génération précédente des TGV mais avec le Wi-Fi en plus.
C’est le technicentre de Bischheim, situé au nord de Strasbourg dans le Bas-Rhin, qui travaille sur cette rame 262 devenue un prototype. L’opération, qui consiste carrément à désosser la rame (avec démontage des sièges, revêtements, câblage, moquette, éclairage…), devrait s’achever en juin après l’obtention d’une homologation.
A partir de ce moment-là, le technicentre qui se présente comme « la clinique du TGV », pourra passer à la phase industrielle en série en « opérant » dix rames par an. Il est prévu que 26 rames subissent cette opération, dont 16 à Bischheim et 10 à Hellemmes à Lille, l’autre atelier spécialisé dans la rénovation des TGV.
Usines du futur
Les technicentres doivent tous devenir des « usines du futur », selon le programme fixé par la SNCF, et qui passe par le recours accru au digital et à la robotisation. Avec, à la clé, des objectifs de productivité. A Bischheim, les équipes, qui disent apprendre beaucoup en désossant la rame 262, espèrent réduire notablement le temps passé aux rénovations mi-vie. Aujourd’hui, la durée d’immobilisation d’une rame atteint 150 jours pour réaliser l’opération. Le but est de passer sous les 100 jours. L’enjeu est important : chaque jour d’immobilisation d’une rame coûte 15 000 euros.
Pour la SNCF, c’est aussi une façon de prendre une longueur d’avance lorsque le marché de la grande vitesse s’ouvrira à la concurrence à partir de la fin 2020. La SNCF vendra-t-elle cette prestation à ses concurrents potentiels ? Rien n’est moins sûr, à en croire Guillaume Pepy. « Nous discutons actuellement avec l’Arafer pour déterminer ce que nous serons obligés de faire pour nos concurrents. L’accès à nos stations-service sera obligatoire. On sera aussi probablement obligé d’accueillir dans nos ateliers de maintenance le train d’un concurrent s’il casse. Mais on peut imaginer que les opérations mi-vie ne feront pas partie des obligations. Chacun aura le droit de le faire où il veut », estime le PDG de SNCF Mobilités, en assurant que les constructeurs ferroviaires ne sont pas capables d’assurer une prestation comparable à celle réalisée par la SNCF.
Une affirmation sans doute un peu rapide puisque les constructeurs et certains autres acteurs du ferroviaire maîtrisent également les opérations mi-vie, y compris avec modernisation (ACC à Clermont-Ferrand, Alstom à Reichshoffen, Bombardier à Crespin et bientôt à Coquelles, CAF à Bagnères, Eurotunnel à Coquelles…. ). Et eux aussi en font un axe majeur de développement pour les prochaines années. Y compris pour la grande vitesse et à l’international. Citons à cet égard Stadler qui rénove actuellement les X2000 en Suède avec remotorisation des motrices, une opération sûrement plus lourde qu’un réaménagement, même façon Océane !
Marie-Hélène Poingt
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