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Ewa

Vélib, le service que le monde nous envie, selon Stéphane Volant

Le Club VRT s’est tenu le 21 mars dans nos locaux au 29 rue de Clichy dans le 9e arrondissement de Paris.

club vrt mars 2023 volant 20 copieC’est à Bertrand Delanoë et à l’opérateur JCDecaux qu’on doit l’offre de location de vélos en libre service à Paris. « Vélib’ 1, c’est une formidable intuition qui s’est avérée gagnante », raconte Stéphane Volant. Lorsque la concession a été remise en concurrence en 2017, il a été décidé d’étendre le service, qui se limitait alors à Paris intra-muros, à l’ensemble des 60 villes de la métropole, soit sur 450 km2, et d’y ajouter une offre de vélos à assistance électrique. Smovengo remporte le marché, coiffant sur le poteau JCDecaux. Les pistes cyclables se développent de plus en plus vite, surtout lorsqu’en 2019, le gouvernement lance son grand plan vélo prévoyant de faire passer de 3 % à 9 % la part modale des bicyclettes. Dans l’euphorie, Smovengo ou les pouvoirs publics ont-ils vu trop grand ? Stéphane Volant est appelé à la tête de Smovengo en juillet 2022. Avec la mission de resserrer les liens avec les élus et de venir à la rescousse d’un service victime de son succès. Selon le dirigeant, le contrat a été « mal fagoté ». Et il explique : « A mon arrivée, Smovengo était dans une situation où, plus il y avait de vélos en circulation, plus nous perdions d’argent. » L’aventure aurait pu mal se terminer si les Parisiens n’avaient pas été aussi attachés à ce qu’il décrit comme «  le plus beau système au monde de vélos partagés en station ». Pour remonter la pente, Stéphane Volant a renégocié le contrat et cherché à rééquilibrer le modèle économique afin de sauver le service.

D’importantes pénalités

En raison de ses débuts compliqués, Vélib’ a dû verser des dizaines de millions d’euros de pénalités. Une sanction financière justifiée, selon Stéphane Volant, puisque le service n’était pas au rendez-vous. Mais qui empêchera les actionnaires de Smovengo de rentrer dans leurs frais à la fin du contrat. Aujourd’hui, l’entreprise équilibre ses comptes et continue à payer des pénalités, mais les montants sont moins importants car le service s’améliore et les modalités de calculs sont jugées plus justes. La société Smovengo a désormais dix ans devant elle (date d’échéance du contrat) pour démontrer que son modèle économique lui permet de dégager de la valeur, d’investir dans la qualité de service, de partager les bénéfices avec ses salariés et de faire remonter des dividendes aux actionnaires. Avec, si possible, « un partage du succès à hauteur d’un tiers chacun », espère le président.

Un audit commandé par le SAVM, et attendu dans les prochaines semaines, devrait tracer de nouvelles perspectives pour Smovengo. Mais avant même de connaître ses conclusions, Stéphane Volant estime que le succès est au rendez-vous. Et le démontre par les chiffres. 45 millions de courses ont été enregistrées en 2022, soit 12 % de plus que l’année précédente. Les vélos partagés ont permis de parcourir 140 millions de km, en hausse de 20%, dont 62% réalisés en vélo électrique. Chaque jour, 62 000 utilisateurs enfourchent un Vélib’, soit 24 % de plus qu’en 2021. L’an passé Smovengo a comptabilisé 765 000 utilisateurs, dont 380 000 abonnés. « Il n’y a pas de système aussi performant que le nôtre en France ou dans le monde. Nous sommes au rendez-vous des attentes des Parisiens, puisque le nombre d’abonnements augmente et que nous avons de plus en plus de clients et d’usages », en déduit Stéphane Volant.

A titre de comparaison, le patron de Vélib’ évoque le système de vélos partagés de New York, Citi Bike, qui, « avec autant de vélos fait deux fois moins de courses. Ce qui ne les empêche pas de s’apprêter à doubler leur flotte pour répondre à la demande exponentielle », précise-t-il. Smovengo prévoit également d’augmenter son parc de vélos, en consacrant 20 millions d’euros pour se doter de 10 000 cycles supplémentaires. Un investissement qui se fera en tandem avec Paris Métropole, qui prévoit de financer de nouvelles stations et des bornettes, indissociables pour monter en puissance.

A mon arrivée, Smovengo était dans une situation où, plus il y avait de vélos en circulation, plus nous perdions d’argent Stéphane Volant

De nombreuses pannes

« En acquérant ces vélos, nous serons à même de proposer véritablement, 3000 bicyclettes de plus en circulation, lors des JO de 2024 et faire ainsi le plein du système Vélib’ prévu à son contrat », explique Stéphane Volant. Car les Vélib’ sont souvent immobilisés pour réparation. Vendus pour être utilisés 6 à 7 fois par jour, ils le sont 3 à 4 fois plus. Cet usage intensif explique une usure accélérée des pneus et des freins, qui nuit à la qualité de service. Les équipes de Smovengo s’efforcent de les réparer sur place et ne les envoient en atelier que lorsque que c’est indispensable. Pour limiter leur immobilisation, les rotations pour grosses réparations en atelier sont passées de 24 à 48 heures, contre 72, il y a encore quelques mois. Stéphane Volant regrette qu’il n’existe pas de filière française (sauf pour des niches haut de gamme). Les constructeurs se trouvent en Asie. Ce qui pose le problème d’approvisionnement des pièces détachées, qui mettent 15 à 18 mois pour parvenir jusqu’ici. Pour tenter de limiter sa dépendance à l’Asie, Smovengo joue la carte de l’économie circulaire en réutilisant des pièces récupérées sur des vélos hors service pour construire de nouvelles bicyclettes. « Sur les 10 000 vélos supplémentaires prévus, 1000 seront fabriqués à partir d’engins hors service», indique le président de Smovengo.

Une clientèle hétérogène

« Nos clients représentent toute la palette de la population parisienne et métropolitaine. L’utilisateur moyen ressemble aux habitants de la métropole. Nous avons de plus en plus de femmes qui circulent, majoritairement sur des vélos mécaniques et ne renoncent pas à pédaler les jours d’intempéries. Et si les déplacements de Vélib’ 1 se faisaient entre arrondissements et en vélo mécanique uniquement, désormais nos clients traversent le périphérique et prennent goût au vélo électrique. Les distances parcourues s’allongent en mécanique, comme en électrique », rapporte-t-il, fier du succès populaire du vélo partagé.

« Vélib’ n’est pas un service élitiste, puisque notre abonnement le plus bas est à 1,55 euros par mois, tandis que la formule la plus onéreuse, Vmax, ne revient qu’à 8,30 euros mensuel ». Et comme ces abonnés utilisent de plus en plus leur abonnement, le dirigeant se dit favorable à un tarif Vmax Plus, qui prendrait davantage en compte l’utilisation réelle, de manière à être plus juste et à faire payer en fonction du nombre de courses réalisées. Stéphane Volant insiste aussi sur la nécessité de conserver une offre accessible aux plus modestes, afin de leur offrir une solution pour se déplacer à très bas prix. La politique tarifaire de Vélib’ ne dépend de pas de Smovengo. Les prix sont décidés par le SAVM et subventionnés à hauteur de 60 % par la métropole. Les utilisateurs ne payent que 40 % du coût du service.

Un succès qui frise souvent la surchauffe

Si le taux de satisfaction du Vélib’ progresse de 0,5 point par an et atteint désormais 50 %, il reste autant d’insatisfaits. « Il reste une marche à monter pour améliorer la qualité de service et satisfaire ses clients », reconnaît Stéphane Volant. « J’aimerais qu’on puisse bâtir son agenda avec Vélib’ comme on peut le faire avec la RATP : c’est-à-dire en ayant la certitude en temps réel de trouver un vélo en état de marche dans la station Vélib’ la plus proche. Nous n’y sommes  pas encore, notamment aux heures de pointe. Mais nous y allons», assure-t-il.

Reste toutefois un autre défi à relever : la majorité des besoins se concentre sur quelques heures. En effet, Vélib’ compte 380 000 abonnés pour une flotte de 20 000 vélos. 10 % des besoins des utilisations ont lieu aux heures de pointes. « Nous gérons de la frustration », reconnaît Stéphane Volant qui ne peut que constater qu’à certaines heures, le système est en surchauffe, même si Smovengo s’efforce de réguler le trafic, en procédant à des ajustements. « Nous savons de mieux en mieux quels sont les besoins de nos clients, d’où ils partent, où ils vont, à quelle heure et là où il y a des déficits de bornettes, de stations et de vélos. Nous déclenchons donc les interventions de nos équipes pour corriger ce flux naturel et assurer une meilleure répartition. » Le système a des limites car des tests menés entre les 11e et 8e arrondissements ont mis en évidence qu’entre 8h et 10h en semaine, 700 vélos sortent de l’arrondissement de l’est parisien et autant entrent dans celui situé à l’ouest. « Pour réguler les déplacements sur ce créneau horaire, il faudrait 53 camions, à raison de 13 cycles par véhicule. A Paris, le déséquilibre est de l’ordre de 2000 à 3000 vélos et ce sont 230 camions qu’il faudrait pour déplacer les vélos afin de régulariser la situation. Cela n’a pas de sens », indique le dirigeant qui plaide pour davantage d’achats de vélos et d’installations de bornettes dans les stations. Les  60 communes de la métropole se sont engagées à ajouter 1700 bornettes, le président de Smovengo rêve d’un système avec 40 000 vélos.

Se préparer pour les JO

Lorsque Paris accueillera les JO en 2024, il devra se contenter de 20 000 Vélib’. Toutefois des stations éphémères humanisées pourraient être mises en place à proximité des lieux où se tiendront les compétitions olympiques, comme cela se fait déjà lors d’évènements exceptionnels, par exemple au moment du tournoi de Roland Garros ou lors du festival Solidays. « Un test sera fait lors de la Coupe du monde de rugby, afin d’estimer les besoins et les coûts», précise Stéphane Volant.

Le patron de Smovengo réfléchit à la mise en place de hubs de transport bas carbone en villes. Autrement dit, « des stations électrifiées où il serait possible de recharger sa trottinette, sa batterie de vélo propriétaire, avec un standard pour pouvoir accéder aux prises des bus et où on pourrait accueillir des voitures électriques. Sur ces hubs, Vélib’ pourrait mettre à profit les compétences de ses 500 salariés pour proposer des micros ateliers où l’on pourrait regonfler des pneus, changer des freins ou faire du gardiennage de vélos propriétaires et de véhicules électriques », détaille-t-il.

L’importance du lobbying

Stéphane Volant évoque l’urgence à développer le vélo partagé, mode de transport « écologique, démocratique et économique » et encourage à monter au créneau pour le défendre. «Il faut qu’une filière vélo continue à se développer. Un lobbying en faveur du vélo doit émerger dans ce pays. L’automobile et l’avion savent donner de la voix. Il faut mettre plus d’énergie dans une activité militante, de manière à pousser cette mobilité douce et partagée, comme nous le faisons chez Smovengo.» La tâche est n’est pas simple, alors que les secteurs de l’aérien et de l’industrie automobile bénéficient de milliards pour se réinventer, la filière vélo doit se contenter de millions, bien qu’il existe des besoins colossaux d’aménagement. « Nous avons besoin d’une grande politique d’infrastructures et de disposer de véritables pistes cyclables. Ce qui nécessite des investissements lourds pour donner au vélo la place qu’il mérite en France », souligne Stéphane Volant. Selon lui, « pouvoir utiliser un vélo partagé électrique sur tout le territoire, pour moins de 10 euros par mois peut être un moyen de permettre aux personnes éloignées de s’arrimer à bas coûts aux services essentiels des villes ».

La Métropole de Marseille a lancé un nouveau service de vélos électriques en libre-service et sera regardé de près par les grosses métropoles alentours, estime-t-il. « Elle pourrait, par capillarité, irriguer la région plus vite et mieux que d’autres ». En revanche, poursuit-il, une ville comme Lyon propose une offre très en deçà des besoins, avec seulement quelques centaines de vélos en libre accès et un service expérimental d’une vingtaine de vélos cargo à assistance électrique en libre-service.

Jouer la carte de l’intermodalité

La nécessité d’arrimer les vélos partagés aux différents modes de transport est un autre impératif. « Je regrette que certains opérateurs de transport se vivent encore en concurrence avec les autres modes ». Lorsqu’il était à la SNCF, il se souvient du peu de considération affiché pour les vélos. « Lorsque les TER ont été conçus, les deux roues étaient considérés comme un embarras. On n’en voulait ni dans les trains, ni dans les gares. Et comme les élus ne réclamaient pas de vélos, la direction n’était pas encouragée à modifier sa stratégie. Les temps ont changé, mais on ne va pas encore assez loin pour faciliter l’intermodalité ». Pour appuyer sur l’accélérateur, il faudrait bénéficier d’une cartographie de toutes les infrastructures et modes de transport existants et se voir proposer un service de MaaS (mobility as a service) intégrant tous les moyens de déplacements, marche, vélo, RER, avion…, les connecter et permettre de voyager avec un seul billet, tout en reversant son dû à chaque opérateur. « On en est encore loin, car on ne connecte pas encore tous les modes de transport et on se jalouse…  », déplore Stéphane Volant, qui assure ne pas se sentir en compétition avec le service Véligo de location de longue durée de cycles, mis en place par Île-de-France Mobilités. « Beaucoup de mes abonnés en sont également clients, ou utilisent des services de trottinette ou une voiture ».

Pour un meilleur usage des mobilités douces dans la capitale et faire baisser le nombre d’accidents de la route, dont les piétons, cyclistes et utilisateurs de trottinettes sont les premières victimes, Stéphane Volant plaide pour plus de pédagogie et se dit favorable à l’enseignement du code de la rue dans les écoles. Mais il rappelle aussi que beaucoup d’accidents sont liés à des voieries défaillantes.

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Les vélos électriques (à droite) connaissent de plus en plus de succès.

 

Des hausses de tarifs mi-mai

L’abonnement V-Max de Vélib’ passera de 8,30 à 9,30 euros mensuel en mai, soit une hausse de 12 % pour ce forfait qui inclut deux trajets par jour. Comme les courses à vélo électrique hors forfait augmenteront de un euro, les abonnés V-Max les paieront deux euros, au lieu d’un aujourd’hui pour tout trajet supplémentaire. La demi-heure supplémentaire de VAE, au-delà des 45 minutes incluses, passera elle aussi à deux euros. Le pass 24 heures et le pass trois jours électrique n’incluront plus que cinq trajets, au lieu de six, par tranche de 24h. Les autres formules restent inchangées. Des hausses justifiées par le Syndicat Autolib’ Vélib’ Métropole par le contexte inflationniste et par la volonté d’assurer un meilleur partage des Vélib’ à assistance électrique, dont l’utilisation intensive reste concentrée sur un faible nombre d’abonnés.
En 2021, Vélib’ avait déjà avait mis fin aux courses illimitées à vélo électrique, pour freiner leur sur utilisation par des livreurs, coûteuse en termes de maintenance.

 

Valérie Chrzavzez

Ewa

Après le vélo, les villes s’emparent du sujet de la marche

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Avec une augmentation de 34% des déplacements à vélo, en moyenne en 2022, dont 38 % en milieu urbain, 15 % en milieu périurbain et 16 % en milieu rural selon l’association Vélos & Territoires, la petite reine prend de plus en plus de place dans la ville, les trottinettes aussi quand elles existent. Et la cohabitation avec les piétons devient parfois difficile.

Ajoutons à cela les terrasses qui depuis l’après-Covid, prennent leurs aises, cela donne des trottoirs très encombrés. Avec le conflit autour de la réforme des retraites, les tonnes d’ordures ménagères qui jonchent les trottoirs de Paris ont fini par exacerber la guerre du bitume.

Mais ce n’est pas la grève des éboueurs qui ont poussé les collectivités locales à travailler sur leur stratégie marche. Les « plans marche » sont une grande première dans beaucoup de villes. C’est ce que révèlent les résultats d’une enquête nationale sur les politiques modes actifs menée par le Club des villes cyclables et marchables avec Vélos & territoires. Et présentés le 22 mars 2023.

Mille deux cents collectivités locales, communes, communautés de communes, départements, régions ont répondu au questionnaire fourni (170 questions !)  sur leurs politiques cyclables, marchables, les moyens humains et financiers déployés, les dispositifs etc.

L’enquête montre que ces démarches sont en plein boom. Quatre collectivités sur cinq bénéficient d’un « portage politique » sur la marche. « Ces stratégies s’inscrivent dans un renversement des hiérarchies. D’abord la marche, ensuite le vélo, puis le transport en commun et les voitures », constate Françoise Rossignol, présidente du club des villes et territoires cyclables.

Le vélo tient le haut du pavé et est plébiscité tant dans les communes, que les départements et les régions. Les sommes en jeu montent en flèche. Les dépenses cumulées des collectivités pour les politiques cyclables s’élèvent désormais à 15 euros par an et par habitant (aides de l’Etat et de l’Union européenne comprises). Objectifs des associations de promotion du vélo au quotidien : 30 euros par habitant et par an pour améliorer les  conditions de déplacement en vélo, et les sécuriser.

Depuis 2019, les ressources humaines dédiées au sujet dans les collectivités a doublé par selon l’étude du Club des villes et territoires cyclables et marchables et de Vélo & territoires.

Selon les 1 200 collectivités qui ont répondu au questionnaire, il s’agit de réaliser 28 000 kilomètres supplémentaires d’aménagement cyclable d’ici la fin du mandat. Et 480 000 nouvelles places de stationnement vélo, avant d’atteindre, à terme, le million de places.

Avec quels moyens financiers ? « Il nous faudrait une aide de 500 millions. L’Etat nous en promet 250, mais, pour l’heure, on n’en a vu que 100 millions », indique Françoise Rossignol.

N.A

Les résultats de l’enquête (synthèse et complets) : ici

Ewa

La France en queue de peloton pour les investissements vélo

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Si depuis 2019, l’année pré-Covid, la pratique du vélo a progressé de plus de 30 %, et de 8% depuis 2021, la France n’arrive qu’en 21e position des 27 pays membres de l’Union européenne en termes de dépenses de l’État par habitant pour favoriser la pratique du vélo. Pour remonter le peloton, « Il faut des financements clairs et qui s’adressent à tous les territoires. Nous sommes donc vigilants sur la consommation effective de l’enveloppe du plan vélo [250M€ par an annoncés par le gouvernement en septembre 2022, ndlr]», indiquait le 18 janvier devant des journalistes Jacques Fernique, sénateur et coprésident du Club des élus nationaux pour le vélo.

L’élu EELV du Bas-Rhin accueillait au palais du Luxembourg le Club des villes et territoires cyclables et marchables (nouvel adjectif de l’association qui réunit plus de 230 collectivités locales) pour sa conférence de presse de rentrée.

Après l’espoir, l’impatience

 « 2022 était une année pleine d’espoirs avec la création d’une Alliance pour le vélo [elle réunit les acteurs industriels et institutionnels de la filière]  et la mise en place du nouveau plan vélo du gouvernement. 2023, elle, sera une année pleine d’impatiences car les premiers projets d’incitation au vélo dans les villes sont prêts, mais les investissements ne viennent pas », constate de son côté Françoise Rossignol, présidente du Club et élue locale dans le Pas-de-Calais. Avec la flambée du prix de l’énergie après une première partie de mandat municipal difficile en raison du Covid, les contraintes financières sont telles que beaucoup d’élus revoient leur plan d’investissement « , constate-t-elle.

Et à la lecture du rapport du Conseil d’orientation des infrastructures (COI) qui a fuité mi-janvier dans la presse, la représentante de l’association de défense des mobilités actives se dit « inquiète« . L’Etat doit-il confirmer un accompagnement financier fort pour la pratique du vélo dans les déplacements quotidien ? « Le rapport ne le dit pas« , déplore le sénateur écologiste Jacques Fernique.

Pour atteindre l’objectif d’une part modale de la bicyclette à 9% en 2024 , 12% en 2030 (fin 2022, la France n’en était qu’à 4%), Guillaume Gouffier-Valente, deputé du Val-de-Marne et également coprésident du Club des élus nationaux pour le vélo, propose quant à lui d’étendre le public éligible au bonus à l’achat d’un vélo et à la prime à la conversion.

A un an et demi des JO 2024, il s’inquiète du retard pris sur les infrastructure vélo : selon l’élu, une cinquantaine de kilomètres de pistes cyclables ne seraient toujours pas financés, en Seine-Saint-Denis et dans les Yvelines notamment. Enfin, l’ambition du zéro artificialisation nette (ZAN), qui demandent aux collectivités locales de réduire leur consommation des espaces naturels, risque aussi d’impacter négativement la construction de pistes cyclables… même poreuses.

N.A

Ewa

Malgré sa percée en ville, le vélo peine à atteindre ses objectifs

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L’association Vélo & Territoires vient de publier les chiffres des déplacements en vélo 2022, en France. Ils progressent de 31% par rapport à 2019, année pré-Covid, et de 8% par rapport à 2021. A raison de +10 % en semaine et de +2 % le week-end.

« Mais ce rythme risque de ne pas suffire pour atteindre l’objectif de 12 % de part modale à horizon 2030 », précise l’association qui rassemble près de 180 collectivités locales adhérentes et publie ces bulletins de fréquentation à partir d’un échantillon national de 297 compteurs représentatifs de l’ensemble des compteurs de la Plateforme nationale des fréquentations.

L’usage du vélo poursuit son essor en 2022 et « ce bilan est à attribuer avant tout à la fréquentation en milieu urbain qui poursuit une progression à deux chiffres (+10 % par rapport à 2021) », indique l’association. En milieu périurbain et rural, les déplacements à bicyclette s’essoufflent un peu (respectivement +0 % et -1 %) avec des périodes de recul en hiver, aux mois août, septembre et décembre. Et au final, une fréquentation comparable à celle de 2021. A la campagne et dans le périurbain, le vélo reste donc lié à une pratique de loisirs marquée par les congés et la météo.

Censée s’arrêter en décembre 2022, l’aide à l’achat pour un vélo neuf est finalement prolongée en 2023. Conditionnée au revenu fiscal, elle peut représenter jusqu’à 40 % du prix d’achat, pour les vélos dits musculaires (c’est-à-dire classiques), avec un plafond à 150 €, ceux à assistance électrique (plafond de 300 €) et les vélos cargo (jusqu’à 2 000€). Avec un montant plus important pour les personnes en situation de handicap.

Lancé en 2018, le Plan vélo a été renfloué et 250 millions d’euros ont été débloqués pour 2023. Si les promesses sont tenues par le gouvernement, ils devraient concerner les infrastructure, stationnement vélos et pistes cyclables, sur l’ensemble du territoire.

N.A

Ewa

A Séville, le vélo connait des hauts et des bas

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En cinq ans seulement, de 2006 à 2010, la part du vélo dans les déplacements à Séville est passée de presque rien à 6%. La décision politique de créer l’ensemble du réseau cyclable a immédiatement rendu toute la ville accessible à ces déplacements. En 2010, 120 km de pistes cyclables couvraient toutes les zones habitées de la ville, formant un réseau bidirectionnel, continu, homogène et confortable. De plus, dès 2007, un système de vélo-partage couvrant l’intégralité de la ville, avec 2 500 vélos et 250 stations, était mis en place. 
Or, s’étonne Ricardo Marqués, auteur d’un article publié par le Forum Vies Mobiles, cette forte croissance a été suivie par une période de stagnation, et même de déclin. En 2011, on atteignait 72 000 déplacements quotidiens,  mais on a connu une réduction d’environ 10 000 trajets entre 2011 et 2015. Les trajets ont augmenté au cours des quatre années suivantes pour retrouver des niveaux similaires à ceux de 2011, mais ils sont retombés à 55 000 trajets en 2021.
Ces reflux, souligne Ricardo Marqués, bon connaisseur puisqu’il a été membre du conseil d’administration de ConBici, la principale association espagnole de cyclistes urbains, et qu’il a participé à l’élaboration de la politique cycliste de Séville et de son université, sont corrélés à la présence d’un maire issu du principal parti conservateur d’Espagne – le Parti populaire (PP) – qui a mis fin aux politiques favorables au vélo instaurées par son prédécesseur, à la tête d’une coalition de gauche.
La structure de l’agglomération permet aussi de comprendre en partie les raisons de la stagnation. Car la quatrième ville d’Espagne est constituée d’un centre dense (la ville de Séville en elle-même), entouré d’une vaste couronne métropolitaine formée d’une multitude de petites et moyennes villes. La population de la ville est restée quasiment constante de 1990 à nos jours, autour de 700 000 habitants. L’ensemble de l’agglomération atteint 1,5 million d’habitants, la population périurbaine étant en constante augmentation sur la période, mais avec une  densité dix fois plus faible que celle de la ville centre, ce qui ne facilite pas la création d’un réseau de transports publics efficace et intégré. Et les villes périphériques sont seulement pourvues de quelques pistes cyclables, qui ne sont pas reliées entre elles.
De plus, pour Marqués, à la différence de nombre de villes européennes, l’absence de politique de promotion du vélo pendant et après la pandémie de Covid est une des explications de la récente diminution du trafic urbain cyclable. 
Surtout, des politiques de restriction de la circulation automobile et de re-localisation des activités sont essentielles pour promouvoir efficacement la marche et le vélo. Or la municipalité y a renoncé. Aucune politique de parkings à vélos sécurisés n’a été élaborée. L’intégration du vélo dans le système global de mobilité urbaine est également un point crucial. Enfin, on a observé récemment une tendance croissante et significative à favoriser les trottinettes électriques au détriment du vélo.
Conclusion : le cas de Séville confirme que, « si la mise en place d’un réseau cyclable confortable et sécurisé est un élément essentiel à la réussite d’une politique de promotion du cyclisme urbain, des stratégies complémentaires sont nécessaires pour intégrer pleinement ce dernier dans le plan de transport de la ville. »
F. D

Ewa

Recalé en Ile-de-France, l’Espagnol Moventia ne désarme pas

Josep Maria Marti , pdg du groupe de transport espagnol Moventia, dont la filiale française Moventis est dirigée par un ancien de Transdev et ex-directeur général de Smovengo.

Candidat malheureux aux appels d’offres d’Ile-de-France Mobilités pour les lignes de bus de la grande couronne, Moventia vient de remporter coup sur coup les contrats de bus de la communauté d’agglomération de Grasse et des vélos en libre-service de la métropole de Rouen.

Ne dites pas à Josep Maria Marti qu’en cinq ans, Moventia, le groupe de transport qu’il dirige en famille, n’a fait que deux prises sur l’Hexagone : Montbéliard et tout récemment Grasse. Et réussi à percer dans deux autres villes françaises, Clermont-Ferrand et Marseille, pour prendre le guidon des vélos partagés, avec sa filiale Inurba. Bientôt trois avec Rouen où, selon nos informations, l’Espagnol a remporté le marché.

Il a en revanche échoué en Ile-de-France, sur les appels d’offres des lignes de bus Optile, en grande couronne. « En France, les appels d’offres sont extrêmement fermés », commente le pdg de Moventia.

« Transdev et Keolis nous savonnent la planche »

« En 2017, Montbéliard était un ballon d’essai et surtout, le moyen de montrer comment on travaille, c’est un cycle de développement long, il faut démontrer aux élus nos capacités industrielles, les rassurer sur nos différences. Faire la chispa, comme on dit en espagnol », poursuit Josep Maria Marti. La chispa ? L’étincelle.  A Montbéliard, on a même réussi à gagner de l’argent », se défend l’opérateur de transport catalan.

Faire des étincelles sur le marché français n’est visiblement pas chose facile, « Les deux majors du secteur, Transdev et Keolis, défendent leur forteresse, font un lobbying intense auprès des élus, nous savonnent la planche », reprenait Jorge Azevedo, directeur du développement France de Moventia, le 22 novembre lors d’un point presse. Avant de filer au salon des Maires qui se tenait à deux pas, porte de Versailles… Cet ancien de Transdev a aussi dirigé Smovengo, l’opérateur de Vélib’ Métropole, le service de vélos en libre-service de la Ville de Paris et des 60 communes de la métropole.

Deuxième concessionnaire Renault en Espagne

Originaire de Sabadel, dans la région de Barcelone, le groupe familial bientôt centenaire, créé par le grand père des actuels dirigeants (trois frères et sœurs) avait donc remporté en 2017 son premier contrat hexagonal en 2017 à Montbéliard (142 000 hab.) pour exploiter pendant six ans et demi le réseau de bus urbains, jusqu’alors aux mains de Keolis. Un contrat de 112 millions d’euros, remporté selon Jorge Azevedo en gagnant la confiance des syndicats. La même année, l’Espagnol gagnait un contrat de bus urbains à La Mecque.

Cinq ans après, en novembre 2022, le Catalan qui a également une grosse activité de concessionnaire automobile multi-marques (c’est le deuxième concessionnaire Renault en Espagne) vient de déloger Transdev de Grasse dans les Alpes-Maritimes. La communauté d’agglomération (100 000 hab.) lui a confié les clés du réseau de 70 bus, dont 9 électriques, et la construction d’un nouveau dépôt. Un contrat de dix ans qui démarre le 1er janvier 2023 pour un montant de 100 millions d’euros. Moventia dit étudier trois nouveaux appels d’offres sur l’Hexagone, principalement dans des villes moyennes.

Nathalie Arensonas

Moventia en chiffres

Implantations : Espagne (bus, tramways, vélos), France (bus, vélos), Finlande (bus, vélos), La Mecque (bus)
1 850 bus
45 000 vélos (dont 30 000 en France), 4 500 stations
41 tramways (à Barcelone)
150 millions de passagers/an

Ewa

Le forfait mobilités durables pas assez utilisé par les grandes entreprises selon une enquête de Matthieu Orphelin

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Déception pour le député écologiste Matthieu Orphelin qui s’était battu pour la mise en place du forfait mobilités durables prévu par la LOM. Un peu plus de deux ans après la promulgation de cette loi, « force est de constater que son déploiement reste insuffisant malgré ses nombreux bénéfices pour les entreprises et leurs collaborateurs », juge l’élu du Maine-et-Loire qui a mené une enquête (tous les résultats : https://cac40avelo.fr) puisque le gouvernement n’a pas « publié le bilan du forfait mobilités durables pourtant prévu dans un délai de 18 mois » par la LOM (article 83).

Les résultats de son enquête montrent que sur l’ensemble des grands groupes français du CAC 40, seules 39 % des entreprises ont mis en place le forfait mobilités durables. « C’est clairement très insuffisant », juge Matthieu Orphelin. « 19 % réfléchissent actuellement à sa mise en place et ce ne sont pas moins de 42 % des entreprises interrogées qui n’ont rien fait et n’ont pas déployé le dispositif », ajoute-t-il.

En haut du podium, on trouve toutefois Accor avec un forfait unique de 451 € (si trajets vélo, covoiturage, trottinette ou service de mobilités partagées) et un vélo de fonction proposé à tous les salariés en CDI. Vient ensuite Orange (jusqu’à 400 € si trajets vélo, covoiturage ou trottinette) avec une aide à l’acquisition d’un deux-roues et accès à une consigne sécurisée. En troisième position, on trouve, ex aequo, Axa France (400 € si trajets vélo, en covoiturage ou en trottinette) avec prise en charge des titres de transport à l’unité, location et libre-service. Et L’Oréal (jusqu’à 500 € pour les salariés venant à vélo uniquement, et 50 € de pack sécurité : casque, brassard, dossard clignotant, gants de sécurité, support de smartphone).

Parmi les mauvais élèves, on trouve Veolia, Thales, Michelin et Danone.

Le député va désormais élargir son enquête aux entreprises du SBF 80, celles cotées en Bourse qui suivent les 40 premières, « afin d’avoir une vision sur tous les grands groupes français ». Et il continue à demander la généralisation du forfait mobilités durables à toutes les entreprises de plus de 11 salariés.

Y. G.

Ewa

Plus de 100 000 emplois pourraient être créés dans la filière vélo selon le député Gouffier-Cha

Guillaume Gouffier-Cha, député LREM du Val-de-Marne
« Nous devons regarder avec intérêt les perspectives économiques que le développement de la pratique du vélo pour les trajets du quotidien offrent à nos acteurs industriels et économiques », écrit Guillaume Gouffier-Cha, député du Val-de-Marne, dans le rapport qu’il a remis le 8 février à Jean-Baptiste Djebbari et à Agnès Pannier-Runacher, respectivement ministre des Transports et ministre de l’Industrie. C’est l’aboutissement de la mission sur la structuration de la filière économique du vélo que lui avait confiée en octobre 2021, le Premier ministre, Jean Castex.
Au cours de ses trois mois de mission, Guillaume Gouffier-Cha a auditionné 130 personnes dans tout l’écosystème vélo et effectué 24 visites sur le terrain, en France et au Portugal. A l’issue de ses consultations, le député LREM estime qu’il faut « reconstruire les fondements d’une industrie du vélo » en France, alors qu’elle est aujourd’hui très dépendante des importations.
« Aujourd’hui, sur les 2,685 millions de vélos vendus en France, seuls 690000 y sont assemblés », précise l’élu qui veut « créer un label France vélo qui intègre des critères sociaux, environnementaux et économiques » et « moderniser activement les outils industriels ».
Dans cette perspective, il encourage la création d’un « comité de filière vélo avec les acteurs industriels et économiques du vélo » et propose de « lancer des états généraux des acteurs économiques du vélo dans les prochains mois ».
En matière de compétences professionnelles, l’auteur du rapport veut « créer de nouvelles formations diplômantes pour tous les métiers du cycle » . Il n’existe pour l’instant qu’un CAP très généraliste alors que les nouveaux vélos à assistance demandent des connaissances électriques.
Sur le plan économique, Guillaume Gouffier-Cha suggère de « rendre la TVA déductible pour l’achat de vélos pour les professionnels ».Enfin, il préconise d’« actualiser le Plan vélo, dès 2022 et de proposer un fonds de mobilité active de 400 millions d’euros par an ». Il s’agit, explique-t-il, « d’accélérer réellement le développement des infrastructures cyclables dans tous nos territoires ». Cela doit permettre de « poursuivre la reconnaissance du vélo comme mode de transport ».
A terme, la filière vélo au sens large, de la maintenance au vélo tourisme en passant par la cyclologistique, pourrait créer, selon certaines estimations « plus de 100 000 emplois d’ici 2050 ».
Yann Goubin

Ewa

Mobilité verte. Pékin mise sur le MaaS et les crédits carbone

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La plateforme #MaaS de Pékin devient un relais actif pour encourager le changement de comportements des usagers vers une mobilité durable, à travers l’intégration d’incentives basés sur un dispositif de crédits carbone. Un système d’incitations à la mobilité durable que ne pratique pas l’Europe.

Par Jingoo Choi et Josefina Gimenez

Réduire les émissions carbone du transport est un objectif partagé par la communauté internationale. Si des innovations technologiques permettent de proposer des alternatives viables à la voiture, le passage à l’acte de l’usager demeure le facteur décisif. Ainsi, la contrainte (les embouteillages), le calcul financier (le prix du carburant versus le transport collectif) ou l’accessibilité (trouver le bon vélo au bon moment) restent les éléments en considération à l’heure de choisir le bon mode, quand le choix est possible.

Sur la base des objectifs de réduction d’émissions carbone en 2030 et de neutralité carbone en 2060, le gouvernement chinois encourage la mise en place des plateformes MaaS dans le territoire. Elles sont le levier pour accélérer l’adoption des modes doux et des nouveaux services de mobilité (free-floating, modes partagés et ride-hailing) en interaction avec les modes collectifs. C’est dans ce contexte que la commission de transport de la municipalité de Beijing et le bureau d’Ecologie et Environnement introduisent le premier système d’incitations à la mobilité durable à travers le dispositif de crédits carbone, « MaaS Mobility for Green City ». Il s’agit d’un dispositif de récompense afin d’encourager les usagers à s’engager dans une mobilité verte.

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Estimation basée sur le simulateur des émissions des trajets de l’Ademe.

Des incentives integrées à la plateforme MaaS de Beijing

La plateforme MaaS de Beijing a été lancée fin 2019, intégrant des services classiques du MaaS tel que le calcul d’itinéraire, les informations du transport public en temps réel ainsi que des données sur les modes doux (comme la marche ou le vélo). D’autres informations comme le taux de remplissage des transports, ou des rappels pour effectuer les changements sont aussi disponibles.

Le système de récompenses vient compléter le dispositif comme levier pour favoriser le choix des modes plus économes en énergie.

Afin de bénéficier du dispositif, les usagers doivent avoir un compte carbone personnel, possible via les systèmes de Amap ou Baidu Maps. Ainsi, lorsque l’utilisateur préfère un mode à faibles émissions pour son trajet (comme la marche, le vélo ou les transports en commun) via le système de navigation Amap ou Baidu, son compte est ‘crédité’ des crédits carbone en fonction de la distance parcourue. Ces crédits correspondent aux émissions carbone évitées pour avoir préféré un mode de transport doux plutôt que les déplacements individuels motorisés, comme la conduite d’une voiture ou le VTC.

Amap et Baidu Maps collectent ces crédits et les échangent sur le marché du carbone de Pékin. Quant à l’usager, les incentives prennent la forme de dons solidaires ou de soutien à des associations (comme le don pour la plantation d’arbres), ou encore des bons d’achat ou le rechargement de cartes de transport.

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Comparaison de la part modale entre Paris et Pékin.

Le transfert modal et les émissions du transport

Combinée à ces crédits carbones, la plateforme MaaS va de pair avec la stratégie de décarbonation de la Chine. Le 16 juillet, la Chine a en effet lancé son « marché du carbone » qui permet non seulement aux autorités provinciales de fixer des quotas pour les centrales thermiques mais aussi aux entreprises d’acheter des « droits de polluer » à d’autres organisations ayant une empreinte carbone plus faible1. La première transaction fixait à 6,80 dollars la tonne de carbone, et l’application initiale de ces systèmes s’adresse aux entreprises du secteur de la production d’électricité (2 162 producteurs) qui contribuent aux émissions de CO2 les plus élevées de Chine (51% du total, IEA). Ainsi, les crédits collectés par Amap et Baidu Maps seront échangés auprès des producteurs d’électricité via le marché du carbone de Pékin.

Ce mécanisme d’incitations et d’échanges de crédits carbone pour encourager le « green travel » est une nouvelle extension des plateformes MaaS. Une manière supplémentaire de promouvoir la mobilité verte, et faciliter un changement substantiel dans les comportements de déplacements.

Selon les statistiques de 2018, le secteur de transport représente environ 10 % des émissions totales de CO2 de la Chine. C’est le troisième secteur le plus important, l’électricité et l’industrie contribuant à 80% aux émissions. Quant à la France, le secteur du transport représente 41%, mais le montant d’émissions est encore nettement plus élevé en Chine qu’en France (917 Mton versus 215 Mton, IEA).

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Calcul et comparaison des émissions de carbone – Bonjour RATP d’Ile-de-France.

Dans le cas de Pékin, le recours aux différents modes de transport est globalement équitablement réparti en termes de partage modal. La part des émissions des véhicules particuliers est naturellement plus élevée due à une majeure émission de carbone par unité de distance, comparativement aux autres modes de transport (collectifs ou partagés). Par ailleurs, aussi bien à Paris qu’à Pékin, environ 20% des déplacements sont effectués en véhicule particulier. Cependant, la différence dans le volume des voitures entre les deux villes fait que les émissions de carbone des véhicules particuliers à Pékin (15 millions de tonnes), avait un poids d’environ 75% sur le total des émissions de carbone du secteur du transport en 2012.

Et ce malgré la forte proportion du recours à de modes actifs tels que la marche à pied et le vélo (53%) à Pékin comparativement à Paris. Le report modal de Pékin peut sembler positif, mais compte tenu de son empreinte carbone élevée, une réduction supplémentaire des émissions locales à travers la réduction du recours à la voiture peut être attendue grâce au transfert vers des modes à faibles émissions.

Ainsi, dès lors qu’on prend en compte le potentiel des modes doux dans la réduction des émissions liées au transport et à la voiture en particulier, la possibilité d’intégrer des systèmes incitatifs dans les plateformes MaaS peut être envisagée comme un nouveau levier pour accompagner le changement de comportement des usagers.

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Calcul et comparaison des émissions de carbone – OURA d’Auvergne-Rhône-Alpes

Quelle place pour les incentives dans les plateformes MaaS en France ?

Si la mise en place des marchés carbone en Europe permet de mesurer et contrôler les émissions des industries, la création de systèmes de crédits personnels ne semble pas à l’heure du jour. Cependant, diverses plateformes de MaaS françaises, comme « Bonjour RATP » d’Ile-de-France, « OùRA » d’Auvergne-Rhône-Alpes ou « Fluo » de Grand-Est indiquent les émissions de carbone sur les itinéraires sélectionnés.

La question demeure de savoir si l’information suffit à l’usager pour prendre la décision dans le sens de la réduction d’émissions. Dans quelle mesure ce niveau d’information est un premier pas vers la création d’un système d’incentives ?

Même si leur poids est inférieur par rapport à Pékin, en France les émissions des véhicules particuliers représentent 51 % du secteur de transport, soit 16 % des émissions totales de gaz à effet de serre du pays en 2019 (SDES 2021). Associés à des mesures d’offre de mobilité verte comme les pistes cyclables et les aménagements piétons ou le projet du Grand Paris Express, les dispositifs incitatifs peuvent créer des synergies tout en stimulant la demande des utilisateurs.

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Calcul et comparaison des émissions de carbone – FLUO de Grand Est.

Cependant, le marché des crédits carbone tel que celui de Pékin et l’application des incitations restent à étudier parmi les parties prenantes. Le marché français du carbone est conforme aux normes de l’Union européenne2 (UE) depuis 2005 et les secteurs concernés sont l’industrie (chaleur, raffineries, acier, fer, ciment et chaux, verre, céramique, pâte à papier, etc.) et la production d’électricité, qui représentent 41 % des émissions totales de carbone de l’UE. Compte tenu du niveau d’émissions du secteur du transport, une réflexion sur l’adoption du marché du carbone par les acteurs du transport pourrait être envisagée.

Actuellement, des tentatives basées sur des systèmes incitatifs voient le jour en France, comme le « Compte CO23» et la plateforme « Rob4». Ces dispositifs sont également basés sur des application smartphone et offrent des récompenses pour l’utilisation de modes de transport respectueux de l’environnement, comme des points ou de l’argent virtuel permettant des réductions d’achats ou des cadeaux éthiques.

Cependant, ces applications d’incitations sont indépendantes des plateformes MaaS existantes, ce qui peut rendre difficile l’accès aux utilisateurs, et freiner leurs utilisations. Ceci remet les acteurs du MaaS français au centre, et les interpelle sur leur capacité à mettre en place des dispositifs internes afin d’encourager et récompenser l’attitude des usagers.

1 La Chine lance officiellement son marché du carbone, 16 juillet 2021, Le Monde.
2 Marchés du carbone | Ministère de la Transition écologique (ecologie.gouv.fr).
3 Compte CO2, le service de paiement pour le climat
4 Rob | L’app qui récompense tous tes trajets responsables (rob-app.fr)

Ewa

Un nouveau plan vélo pour Paris

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Plan vélo acte II à Paris. Après avoir lancé un premier plan vélo entre 2015 et 2020, la Ville a dévoilé ce matin son nouveau projet 2021-2026 pour un « Paris 100 % cyclable ». L’idée est d’inciter toujours plus à la pratique du vélo qui atteint aujourd’hui 5,6 % de part modale (9 % pour la voiture, 50 % pour la marche). « Nous souhaitons que la part modale du vélo soit supérieure à celle de la voiture », souligne David Belliard, l’adjoint à la maire chargé des transports, estimant que le premier plan a été un succès même s’il n’a pas atteint l’objectif fixé : une part modale de la Petite Reine de 15 %.

Le nouveau plan est doté de plus de 250 millions d’euros pour créer 130 kilomètres de pistes cyclables sécurisées et pérenniser 52 km de « coronapistes ». Il s’intégrera au réseau métropolitain et au réseau régional, précise David Belliard. Une attention particulière sera portée à la sécurisation des carrefours et des portes de la capitale. Et les voies à double sens doivent être généralisées sur 450 km d’ici à la fin du mandat.

100 000 places de stationnement sécurisées sont aussi prévues, dont 40 000 aux abords des gares (50 000 dans des espaces privés et 10 000 dans des parkings ou la voie publique), ainsi que 30 000 arceaux. Des places dédiées aux vélos cargos seront également aménagées.

Différentes initiatives seront prises, comme un travail sur le code de la rue, des actions pédagogiques à destination des enfants, la priorité accordée aux pistes cyclables lors d’opération de nettoyage et de déneigement, ou encore la création de places temporaires lors de grands événements comme les JO de 2024 par exemple. Les agents de la Ville seront aussi incités à pédaler pour hisser à 20 % le niveau des déplacements professionnels à bicyclette. Enfin, David Belliard annonce un renforcement du contrôle à venir, qui sera assuré par la police municipale.