Il va partir sur une note victorieuse. Deux jours avant l’annonce de l’Elysée qui souhaite voir Jean Castex prendre les commandes de la SNCF, l’actuel patron de la RATP était sur le point de réaliser une grande première : remporter un contrat ferroviaire, au nez et à la barbe de la SNCF… Sa filiale RATP Dev est pressentie pour exploiter les TER de l’Etoile ferroviaire de Caen. L’opérateur va faire son entrée sur le réseau des trains régionaux.
Ce sera peut-être le dernier fait d’armes de Jean Castex à la tête de la RATP, dont le bilan après trois ans de mandat est honorable. Il était arrivé à un moment très compliqué de l’entreprise. Désormais sur le départ, il laisse l’opérateur public en meilleur état qu’il l’avait trouvé en novembre 2022. A l’époque, la Régie était en crise avec un quart des bus et 10% des métros dans l’incapacité de rouler en raison d’un manque de conducteurs, des grèves liées à l’ouverture à la concurrence, et un taux absentéisme élevé. Surtout, les comptes étaient dans le rouge avec 26 millions d’euros de pertes pour 2022.
Carnet de chèques
Il s’était immédiatement attelé à renouer le dialogue avec les syndicats, avait surtout consenti une hausse des salaires de 5,7%, et convaincu les élus d’Ile-de-France Mobilités (IDFM) de voter fin 2023 un avenant au contrat qui lie l’autorité organisatrice des transports de la région à la RATP. Un chèque de 285 millions d’euros sur deux ans pour absorber une partie de la hausse de salaires, ce qui permit à l’époque de sauver non seulement les comptes de la RATP qui menaçaient d’être à nouveau dans le rouge, mais aussi l’intéressement des agents et la prime JO des 19 000 salariés mobilisés pendant l’événement.
Il a dans le même temps lancé des campagnes massives de recrutements pour rétablir la qualité de service, revenue à un niveau satisfaisant juste avant les JO. La RATP a ensuite relevé sans encombre le défi du transport des spectateurs lors de cet évènement sportif mondial, pour lequel elle était particulièrement attendue. Le groupe a même renoué avec les bénéfices en 2024 avec des comptes semestriels bénéficiaires de 153 millions d’euros contre 54 millions d’euros de pertes un an avant. Il a ensuite enregistré une belle croissance au premier semestre 2025.
Ouverture à la concurrence
L’ouverture à la concurrence du réseau de bus de la RATP promettait d’être un sujet explosif en interne. Le dirigeant est parvenu à éteindre le feu avec des primes généreuses. C’est dire s’il va laisser un bon souvenir en interne, lui le haut fonctionnaire bonhomme, au contact humain facile, à la façon d’un Jacques Chirac, qui pour apaiser le climat social, n’a pas hésité à pratiquer la politique du carnet de chèques.
La barre est haute pour celui ou celle qui devra lui succéder. Deux noms circulaient avant l’été, celui de Catherine MacGregor, la patronne d’Engie, et de Xavier Piechaczyk, président de RTE. Celui de François Durovray, président de l’Essonne et éphémère ministre des Transports du gouvernement Barnier, est aussi évoqué.
Dans le contexte d’ouverture à la concurrence, le fauteuil de pdg de la Régie ne peut pas rester vide pendant trop longtemps. Des échéances approchent, notamment la dernière vague d’attribution des marchés des bus parisiens. Jusqu’ici, la RATP a réussi à limiter la casse même si elle vu débouler ses concurrents, Keolis, Transdev et l’italien ATM qui va débarquer à Paris.