Nice a attrapé le virus des transports en commun et décroche le Pass d’or La voiture perd du terrain à Nice. Depuis un an, le mouvement enclenché au début des années 2000 s’accélère. Le développement des transports urbains était l’une des priorités de Christian Estrosi en 2008 lorsqu’il était candidat aux municipales. Le maire de Nice et président de la communauté urbaine est en train de réussir son pari. Les résultats de l’enquête sur les déplacements des ménages ne seront connus qu’en 2010, mais il y a des signes qui ne trompent pas sur le changement des mentalités. La fréquentation du parking de Nice-Etoile, par exemple, serait en baisse de 20 % alors que le chiffre d’affaires de ce centre commercial bordant l’emblématique avenue Jean-Médecin, cette artère qui débouche sur la place Masséna, serait en hausse. Le tramway, lancé en novembre 2007, a attiré 8 % d’automobilistes. Autant d’automobiles en moins en ville. Surtout, la fréquentation des transports en commun a explosé : 34,5 millions de voyages en 2005, 38 millions en 2006, 40 millions en 2007 et 54 millions en 2008, soit une progression de 35 % en un an. Et en 2009 le trafic serait en augmentation de 6 à 7 %. Cette évolution a plusieurs explications. D’abord, le constat : la circulation automobile en ville n’a cessé de croître jusqu’à ces dernières années. Un chiffre : 240 000 véhicules franchissent chaque jour le Var, la « frontière » ouest de la ville. Une ville-centre, au cœur d’une agglomération de 530 000 habitants, dont les contours ne sont pas extensibles : au sud, la mer ; au nord, les collines, l’autoroute A8, les Alpes ; à l’est, le port, la colline du Château et un fleuve côtier canalisé, le Paillon, avec une voie « pénétrante » ; à l’ouest, la plaine du Var et l’aéroport. Elle est, de plus, traversée par une voie « rapide »… qui très souvent ne l’est plus. La première réponse pour briser cet étouffement a été donnée par la municipalité de Jacques Peyrat, le prédécesseur de Christian Estrosi à la mairie, avec la ligne 1 du tramway qui décrit un V de 8,7 km. Inauguré en novembre 2007, ce tram de 560 millions d’euros et quatre ans de travaux a transformé le centre-ville, évacuant la voiture de l’avenue Jean-Médecin devenue piétonne, transformant les places Masséna et Garibaldi, irriguant des quartiers entiers. Résultat, un succès fulgurant : 20 millions de voyages en un an et des pointes à plus de 75 000 par jour. Selon une enquête réalisée en mars 2008 par ST2N (filiale de Veolia Transport) qui gère le réseau Ligne d’Azur, 24 % des voyageurs du tram étaient de nouveaux utilisateurs des transports en commun. Aujourd’hui, le tram est victime de son succès et atteint une saturation qui devrait être résolue avec l’arrivée de 8 nouvelles rames en 2010. Alain Philip, vice-président de la communauté urbaine délégué aux transports, note toutefois que « la ligne 1 du tram était une réponse un peu ponctuelle ; aujourd’hui, les transports reprennent leur place dans une stratégie globale de développement ». Le tramway n’a pas en effet été le seul facteur de l’évolution des transports à Nice. La politique tarifaire y a aussi beaucoup contribué, en particulier avec le ticket à un euro depuis février 2008, prix aligné sur celui du réseau départemental que venait d’instaurer Christian Estrosi, alors président du conseil général des Alpes-Maritimes. « On a vu tout de suite un basculement sur les transports publics », assure Alain Philip. Parallèlement, des ajustements sur le réseau ont permis de porter globalement les fréquences de 7 à 5 minutes. La communauté urbaine a par ailleurs augmenté l’offre de 17 % (plus de deux millions de kilomètres), engagé 117 chauffeurs supplémentaires et introduit de nouveaux bus pour porter l’âge moyen du parc à 6 ans et 10 mois seulement. Quatre parkings-relais ont été ouverts en 2007 et 2008 pour un total de 1 350 places avec un tarif attractif : deux euros, ticket aller-retour et parking compris. « Aujourd’hui, le parc du Rouret (le plus important avec 760 places) a un taux d’occupation de 70 % et les autres sont complets à certaines périodes. Ce n’était pas le cas il y a un an », remarque Yvette Lartigau. Directrice des transports de la communauté urbaine, elle illustre un aspect moins visible de ce succès : la mutualisation des décisions. Yvette Lartigau est en effet aussi directrice des transports du conseil général. Enfin, le système de TAD enregistre 2 000 voyages par mois. « Des chiffres très encourageants », selon la directrice des transports qui estime qu’en 2009 ce chiffre sera doublé. Christian Estrosi entend poursuivre l’effort. Le président de la communauté urbaine a présenté récemment un plan de développement des transports urbains sur dix ans dont l’objectif est de « développer de +50 % l’offre de transport sur le réseau du transport public urbain et sur le réseau ferroviaire ». Cela passe, entre autres, par la création de deux nouvelles lignes de tramway et de quatre grands pôles intermodaux. Nice va franchir un cap dans le développement technologique avec l’introduction, au printemps 2010, du paiement sans contact par téléphone portable et l’information en temps réel. En 2011, un site propre pour les bus devrait aussi voir le jour sur la Promenade des Anglais. C’est aussi le développement des Vélos bleus et des pistes cyclables qui doivent passer de 44 km à 125 km en deux ans. C’est, enfin, le développement de l’intermodalité avec le réseau TER. « Nous avons signé une convention avec RFF et la SNCF pour la réfection des trois gares de Nice, rappelle Alain Philip. L’objectif est d’assurer une intermodalité entre la gare Thiers et la ligne 1 du tram. Elles sont toutes proches mais aujourd’hui il n’y a pas de liaison physique. » Une réflexion est aussi menée pour relier la gare des Chemins de fer de Provence, la ligne Nice – Digne, au tramway. A terme, le réseau de tram sera connecté avec des lignes TER vers Breil et Monaco à l’est (la communauté urbaine devrait s’étendre jusqu’à Menton), et vers Cannes à l’ouest. Nice aura alors un réseau digne d’une ville qui aspire à devenir une grande métropole.
José SOTO
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