Ville, Rail & Transports donne la parole aux organisations syndicales de la SNCF suite à la présentation le 9 juillet, par le ministre des Transports, des conclusions de la conférence Ambition France Transports. Après Thierry Nier, Fanny Arav, secrétaire générale adjointe de l’Unsa-Ferroviaire, fait part de sa déception.
Ville, Rail & Transports. Comment réagissez-vous aux conclusions de la Conférence de financement des transports?
Fanny Arav. Le travail est à moitié fait. Il a été sérieux, il y a eu une bonne analyse, même si elle n’est pas nouvelle. Une esquisse de solutions a aussi été exposée. Le sujet est compris, la démarche intéressante. Mais le résultat est décevant.
On nous explique qu’il faut favoriser la régénération du réseau? Mais cela a déjà été dit dès 2017! Et malgré cela, on a continué à lancer des lignes à grande vitesse.
Tout est rédigé de façon alambiquée, On sent des hésitations sur qui paye quoi. Il était pourtant possible de faire des fléchages et de sortir par le haut avec une loi de programmation.
VRT. La SNCF va continuer son rôle d’aménagement du territoire avec le TGV…
F. A. On a compris que les opérateurs privés avaient hurlé… et été entendus. Mais les pouvoir publics ont une part de responsabilité dans cette affaire : la France applique de façon un peu bête les règles européennes. Il y a une certaine naïveté française, un emballement, on se dit : le marché va tout régler tout seul. Mais cela ne marche pas ainsi, on s’en rend bien compte aujourd’hui. Il aurait été tout à fait possible de faire contribuer les opérateurs privés à un fonds de péréquation. Mais en l’anticipant. C’est très difficile ensuite de vouloir changer les règles du jeu en cours de route. On aurait aussi pu envisager des DSP par lots et par services, par gares. Parmi ses propositions, l’Unsa défend l’idée de contrats de service territorial un peu sur le modèle du service universel de La Poste.
VRT. Et le privé est appelé à la rescousse….
F. A. Les PPP, appelés à la rescousse, servent à pallier l’incapacité de l’Etat à sécuriser les financements des transports publics. C’est donc passer par un artifice alors qu’à la base c’est une compétence de l’Etat. Or l’argent privé coûte cher. Il faut améliorer la maîtrise publique des PPP. On sent tout de même une certaine prudence. On comprend qu’il faut y aller au cas par cas. Les PPP pourraient être limités à l’ERTMS car il faut faire attention à ne pas trop découper le réseau ferré.
Quant aux concessions des sociétés d’autoroute, il y a encore beaucoup de flou. Il faudra voir comment l’Etat redéfinira son rôle de co-actionnaire. Mais ce qui est sûr c’est que les recettes du transport doivent aller au transport.
Enfin, l’idée d’un « Ferroscope » (un outil d’aide à la décision pour hiérarchiser les projets de régénération et de développement, ndlr) est intéressante mais elle montre aussi qu’il va falloir gérer la pénurie. Il faudra revoir les barèmes, prendre en compte la valeur temps, évaluer l’impact écologique et toutes les externalités. En résumé, disposer d’une réelle analyse socio-économique.
Cette conférence représente donc un bel objet d’analyse, mêlé d’inquiétudes pour ne pas aller trop loin… Il faut maintenant attendre. C’est très frustrant.
Sur le même sujet : interviews de Thomas Cavel, secrétaire général de la CFDT Cheminots, de Thierry Nier, secrétaire général de la CGT-Cheminots et de Julien Troccaz, secrétaire fédéral de Sud Rail,