Entre 2031 et 2036, les sept contrats historiques de concessions autoroutières (90% du réseau concédé, plus de 9 000 km) qui lient l’Etat depuis des décennies aux mastodontes Vinci, Eiffage et Abertis arrivent à échéance. Les autoroutes concédées seront alors restituées à la puissance publique, à commencer par celles du réseau Sanef dans les Hauts de France, la Normandie et le Grand Est. Dans quel état, sachant que les concessionnaires sont peu enclins à investir en fin de contrat ? Et sous quelle forme l’Etat décidera-t-il de les faire exploiter ? « 2031, c’est demain, il n’y a plus de temps à perdre pour préparer l’avenir du secteur, rebattre les cartes, poser les bases d’un nouveau modèle autoroutier », a insisté Thierry Guimbaud lors de la présentation à la presse, le 24 septembre, du nouveau plan stratégique de l’Autorité de régulation des transports (ART) qu’il préside depuis le début de l’année.
Il tirait une nouvelle fois la sonnette d’alarme déjà tirée avant son arrivée. Pour la qualifier cette fois d‘ « alerte rouge« . Une manière d’interpeller le tout nouveau gouvernement, l’exhortant à anticiper car « Prolonger les concessions serait un échec collectif, estime celui qui a dirigé les services techniques du ministère des transports, la DGITM, de 2011 à 2014. Les contrats sont déjà très longs, les conditions d’optimisation économiques ne sont plus réunies », a-t-il poursuivi.
Compétente pour réguler les concessions autoroutières, l’ART qui a élargi son champ d’intervention par « couches sédimentaires » depuis sa création en 2009 (ferroviaire, autocars longue distance, autoroutes, aéroports, transports publics urbains franciliens, services numériques et billettique), recommande de réduire la durée des futurs contrats de concession. Et « dans l’hypothèse où des contrats courts ne pourraient être envisagés, d’encadrer plus strictement leur renégociation » avec des clauses de révision tous les cinq ans pour éviter les rentes autoroutières.
Bornes de recharge électrique
L’ART contrôle aussi les contrats passés par les sociétés concessionnaires avec les exploitants d’aires de service, sous-concessionnaires. Et s’est récemment intéressée à la manière dont sont déployées les bornes de recharge électrique. « Nous avons analysé les sous-concessions et nous constatons que la redevance perçue par les autoroutes sur les infrastructures de recharge est entre 12 % et 15 % du chiffre d’affaires, contre 4 % à 5 % en moyenne pour les autres activités, dont les carburants, sur les aires de service », souligne Thierry Guimbaud. Du nouveau grain à moudre.
Enfin, insistant sur la nécessité de réduire l’empreinte environnementale des transports, responsables d’un tiers des émissions de gaz à effet de serre, l’ART recommande aussi que le coût de la pollution, les « externalités environnementales« , soit intégré dans la tarification de l’accès aux infrastructures, conformément à la directive Eurovignette. Autrement dit, moduler le tarif des péages d’autoroutes (lesquels rapportent 10Mds€ par an aux sociétés concessionnaires) en fonction des émissions des véhicules.
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Les concessions d’autoroutes en chiffres
Plus de 90% des autoroutes sont gérées par 19 sociétés concessionnaires (SCA), dont :
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7 SCA historiques détenues par les groupes Vinci, Eiffage et Abertis, qui représentent 91,5% du chiffre d’affaires global
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10 SCA récentes (2001-2019)
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2 sociétés d’économie mixte (SEMCA) exploitant des tunnels alpins internationaux
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Chiffre d’affaires annuel des autoroutes concédées: 10 milliards d’euros (recettes des péages).