Contrairement aux pronostics pessimistes de certains industriels qui annonçaient un salon en perte de vitesse, il y avait foule aux 27es Rencontres nationales du transport public (RNTP) qui se déroulaient à Nantes du 1er au 3 octobre. Selon Anne Gérard, la présidente du GIE Objectif Transport Public, l’un des organisateurs de l’événement, 6 000 visiteurs ont arpenté les allées et découvert 222 exposants, un chiffre en hausse de 11 % par rapport à l’édition 2017.
Comme un regain d’intérêt pour un secteur qui attend sa loi (la LOM, objet de la table ronde plénière d’ouverture) et qui est à la veille de bouleversements majeurs avec l’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire (décembre 2019 pour les TER et Intercités, un an plus tard pour les lignes commerciales dont les LGV) et sans doute plus encore avec la compétition qui s’annonce en Ile-de-France (objet de la table ronde de clôture).
Transition énergétique et boom de fréquentation
Avec en toile de fond, un thème incontournable sur les stands : la transition énergétique. Bus roulant au gaz, à l’électricité, à l’hydrogène, et même un trolleybus – ce qui ne s’était pas vu en France depuis longtemps – tenaient la vedette sur l’espace dédié aux constructeurs de bus. Les constructeurs ferroviaires qui avancent sur le train à batterie côté Bombardier, sur l’hydrogène côté Alstom, n’étaient pas en reste. Enfin, l’espace dédié aux start-up et celui consacré aux mobilités dites « actives » gagnaient en visibilité avec des vélos partout !
Mais côté annonces, on restait sur sa faim. Le passage éclair de Jean-Baptiste Djebbari, le nouveau secrétaire d’Etat aux Transports (obsèques de Jacques Chirac oblige) n’a pas aidé à y voir clair sur les perspectives d’un secteur qui se dit étranglé financièrement alors que la fréquentation des transports publics est en pleine croissance.
Pas de réponse claire sur les financements
« La mobilité est devenue un enjeu politique de fond au plan local, régional, national. Le Gart et l’UTP en sont heureux car c’est le résultat de nos travaux. La Loi mobilités très attendue contient des dispositifs pour mieux organiser la mobilité », a rappelé Jean-Pierre Farandou, qui s’exprimait sous son éphémère casquette de président de l’UTP (lire ici), tandis que Louis Nègre, président du Gart, prenait le relais pour réclamer des ressources pérennes dans la prochaine loi de finances.
En réponse, Jean-Baptiste Djebbari s’est contenté d’indiquer que « la LOM sanctuarise le versement transport devenu versement mobilité » et que le gouvernement allait proposer une « TVA dynamique » dont les collectivités pourraient disposer. Pour Louis Nègre, également maire (LR) de Cagnes-sur-Mer, c’est insuffisant pour couvrir les coûts de fonctionnement de transport des collectivités. Selon l’élu, la diminution des ressources du VT (qui s’impose désormais aux entreprises de plus de 11 salariés contre 9 salariés auparavant) n’est pas compensée entièrement dans le projet de loi de finances pour 2020 contrairement aux engagements de l’Etat : cette compensation s’établirait à 48 millions d’euros alors qu’il en faudrait 91 millions.
Le risque de la gratuité des transports
Dans ce contexte, est-il raisonnable pour les collectivités de se laisser tenter par une politique de gratuité des transports ? Très présente pour cette édition des RNTP à six mois des municipales, cette question devrait tenir une place majeure dans la campagne électorale. Pour Frédéric Baverez, directeur exécutif France de Keolis, la gratuité est potentiellement destructrice pour les transports publics. Les derniers rapports publiés sur la question sont d’ailleurs plus que mitigés : un rapport sénatorial présenté fin septembre montrait un report très limité des automobilistes vers les transports publics mais un abandon plus massif de la marche et du vélo. Avec un risque très élevé d’engorgement des transports en commun dans les grandes métropoles.
Pendant les RNTP, le Gart a présenté un autre rapport sur ce sujet sensible (lire ici), concluant notamment à un risque d’insoutenabilité financière et de bouleversement d’un équilibre déjà fragile.
Enfin, au cours de ces Rencontres, il a aussi été beaucoup question de petites lignes ferroviaires. Le rapport commandé sur la question au préfet Philizot se fait attendre mais on sait déjà, comme l’a indiqué le Premier ministre Edouard Philippe le 2 octobre au Congrès des Régions de Bordeaux, que la décision de maintenir – ou pas – les lignes se ferait au cas par cas, en fonction des besoins. Ce qui est sûr, c’est que les collectivités devront encore mettre la main à la poche. L’éternel débat.
Marie-Hélène Poingt