Le concessionnaire Lisea inaugure le site de la région bordelaise, qui assurera des services de maintenance ferroviaires pour ses clients opérateurs, dont Velvet.
Le ballet des engins mécaniques a déjà commencé, mais Lionel Epely, président de Lisea, concessionnaire de la ligne à grande vitesse Tours-Bordeaux, tenait à une cérémonie symbolique de pose de la première pierre. Les projets ferroviaires de l’envergure de celui de Marcheprime, célébré ce 15 juillet, sont bien trop rares dans l’Hexagone : il va offrir au rail français une infrastructure inédite. Le site de maintenance et de remisage (SMR) de Lisea, qui sera opérationnel en 2028, fournira des prestations de service aux nouveaux opérateurs de l’axe Atlantique.
« L’offre ferroviaire sur le Paris-Bordeaux est très insuffisante. On estimait l’an dernier à deux millions le nombre de passagers qui sont restés à quai faute de places, sur un total de 22 millions transportés », rappelle le patron de Lisea, filiale du groupe Vinci. Si plus de capacités, de trains, de fréquences sont réclamés par les collectivités et les passagers, l’arrivée de nouvelles compagnies ferroviaires a eu du mal à se concrétiser.
Lisea a donc décidé de s’attaquer aux « barrières à l’entrée » qui freinaient l’ouverture à la concurrence. Après avoir levé des financements et trouvé du matériel neuf (faute de matériel d’occasion disponible), les nouvelles compagnies doivent régler le problème de la maintenance de leurs équipements. Les technicentres sont rares en France et surtout, tous détenus par la SNCF. Décidée à lancer ses trains entre Paris et Bordeaux, Velvet, première compagnie à concurrencer la SNCF dans l’Ouest, trouve la solution, avec Lisea, à Marcheprime, près de Bordeaux.
Un démarrage en 2028
Il y a un an, concessionnaire et transporteur signent un contrat. Velvet prévoit la réception de son matériel, une douzaine de rames Avelia Horizon Alstom, début 2028 pour un début d’exploitation dans le courant de l’année. Il sera basé à Marcheprime.
En 2011, quand il remporte le contrat de concession du tronçon grande vitesse Tours-Bordeaux, Lisea n’a pas pour projet de se lancer dans les équipements de maintenance. « Notre plan d’affaires initial ne prévoyait pas d’ouverture à la concurrence, rappelle Lionel Epely, La décision d’ouvrir la ligne à de nouveaux opérateurs n’est intervenue que quelques années plus tard. Mais nous avons rapidement compris que l’absence d’infrastructures de maintenance était un frein majeur à leur arrivée ».
Après une phase de réflexion sur la conception du projet, la première étape pour Lisea va constituer à chercher un terrain disponible. Le périmètre de sa concession ne prévoyait pas de réserve foncière pour ce type d’infrastructures. Le site doit être adjacent au réseau ferré national, mais aussi relié de façon correcte à la route et bien sûr, au réseau électrique. En termes d’urbanisme mais aussi de respect de l’environnement, le développement d’un site industriel de cette envergure nécessite la maîtrise de plusieurs paramètres. Le gestionnaire du Tours-Bordeaux va identifier 14 hectares de terrain sur la commune de Marcheprime, à 15 minutes de Bordeaux et entamer les discussions avec son maire. Après un cycle de concertations, l’affaire sera conclue en juin 2024. Le projet est supervisé par plusieurs cabinets d’ingénierie dont Egis. Les sociétés Spie et Colas remportent l’appel d’offres de construction qui échappe donc à Vinci. « On ne peut pas prôner l’ouverture à la concurrence et ne pas se l’appliquer à soi-même… », philosophe le patron de Lisea.
L’impact écologique du projet « compensé » sur 64 hectares
Côté industriel, le site abritera 28 000 m2 d’atelier et comportera une dizaine de voies de service, de remisage et un tour en fosse, équipement indispensable pour rectifier les roues. Côté nature, il est implanté sur une zone boisée, notamment de chênes roux d’Amérique. Après des fouilles archéologiques et des études d‘impact, des travaux de mesures compensatoires sont entrepris sur un total de 64 hectares pour permettre à des zones humides, de devenir des milieux propices à l’accueil de certaines espèces.
Sur le chantier, les effectifs monteront à 400 personnes. Le futur technicentre rassemblera ensuite 200 emplois industriels, spécialisés dans le ferroviaire mais pouvant aussi assurer des services pour l’aéronautique. Le calendrier est serré, mais Lionel Epely compte sur une mise en service fin 2027. Le patron de Lisea, en poste depuis septembre, était précédemment en charge du financement des infrastructures chez Vinci. Il est intervenu lors de la conférence de financement Ambition France Transports pour témoigner des vertus du financement privé dans le ferroviaire. Il entend en faire, à Marcheprime, la démonstration.