
L’arrêt du trafic ferroviaire, dans le Sud, en début de semaine, attribué à un incendie volontaire et à un vol de câble, a une nouvelle fois rappelé les points de fragilité du réseau ferré français en matière de sûreté. Depuis quelques années déjà, et en perspective des JO de Paris 2024, SNCF Réseau a pourtant remis à plat sa politique vis-à-vis de tous les incidents qui peuvent perturber l’exploitation et entrainer du retard. Leurs causes « internes » et « externes » sont recueillies, analysées et tracées dans un rapport de sécurité annuel que VRT a consulté. Les incendies et les actes de malveillance, qui représentent la majorité des causes « externes », ont bénéficié ces dernières années d’investissements en progression, notamment dans la perspective des JO de Paris 2024. Mais la culture sûreté au sein du groupe, doit encore être améliorée.
Dans sa démarche sécurité, le gestionnaire a décidé de prêter une attention toute particulière aux événements pour lesquels « aucune barrière évitant l’accident » n’a fonctionné. Depuis 2023, il a ainsi mis en place un nouvel indicateur d’incidentologie pour les faits particulièrement graves ayant un fort impact sur la régularité des trains. Cette année-là, il en dénombre 332. La majorité a pour origine des problèmes de maintenance, de conception, de gestion de la circulation. 42% sont liées à des causes externes : phénomènes météorologiques et actes de malveillance. Ces 137 incidents, dont 36 incendies, représentent un nombre sensiblement identique par rapport à 2022.
Une meilleure culture incendie
En 2024, les incendies sont en nette diminution. SNCF Réseau l’explique par une forte progression de la culture incendie, de l’expertise des agents, mais aussi de l’adoption de nouvelles actions sur les freins serrés des matériels roulants d’entreprises ferroviaires à l’origine de nombreux incidents. En revanche, l’année des JO sera marqué par une nouvelle augmentation des actes de malveillance, avec des conséquences importantes sur les installations techniques et les circulations ferroviaires. On retrouve dans ces tristes statistiques la conséquence des actes de sabotage coordonnés sur LGV le 26 juillet.
Dans la perspective de Paris 2024, SNCF Réseau a pourtant redoublé d’efforts. Il a consacré 150 millions d’euros à l’amélioration de la sécurité sur le réseau ferré national, un chiffre en hausse de 12 % par rapport à 2023, et le plus gros investissement depuis dix ans. Entre 2018 et 2023, le niveau moyen s’établissait en effet à 133 millions d’euros.
Ce budget vise en particulier une meilleure protection des sites les plus exposés des 47 000 kms de voies dont 28 000 qualifiés de vulnérables : sous-stations d’alimentation électrique de traction, centres d’exploitation, postes d’aiguillage, triages, câbles. Dans le rapport, deux actions sont particulièrement mises en avant : le déploiement d’alarmes mobiles et la pose de clôtures.
Mais pour obtenir une protection du réseau ferré « adaptée au monde d’aujourd’hui », objectif affiché par SNCF Réseau, deux points sont indispensables : un recensement précis des faits de malveillance, ce qui nécessite la mobilisation des agents de l’entreprise. Leur implication est déterminante… mais encore insuffisante selon la direction.
Son constat se fonde sur le nombre de signalements réalisés par des agents, invités à faire remonter les informations sûreté dans une base de données baptisée CEZAR. Or, ces signalements ne représentaient l’an dernier que 40% des incidents recensés. L’objectif de 45 % n’est pas atteint. Pis, ce résultat reste stable au fil des années. Renforcer la culture sûreté reste donc une priorité, souligne le rapport 2024. Il préconise aussi que les projets d’investissements ferroviaires intègrent systématiquement la culture sûreté. En attendant, l’impact des actes de malveillance sur l’exploitation ferroviaire en minutes perdues reste autour de 740 000 minutes par an, sans nette amélioration.
Une nouvelle procédure pour l’enjeu cyber
Une autre menace est prise très au sérieux : la sécurité de l’information. Le cyber est devenu chez SNCF Réseau un enjeu présenté comme « stratégique et régalien ». Ces dernières années, et une fois de plus dans la perspective des JO, le groupe a mis en place une nouvelle procédure de « gouvernance par les risques ». Elle a débuté par un inventaire des actifs du patrimoine informationnel SNCF Réseau, des menaces auxquelles ils peuvent être soumis et passe par la sensibilisation des responsables. A fin 2023, 77 % des agents du groupe avaient été sensibilisés au sujet. Le taux monte à 85% l’année suivante, tandis que la construction d’un data center homologué s’est terminée en mai.
Cette anticipation n’a pas été vaine. En effet, SNCF Réseau a subi dès le mois de juin 2024, un « fort accroissement de la pression malveillante sur ses systèmes », avec un pic de l’ordre de 20 à 30 fois la pression normale pendant les Jeux Olympiques. Le nombre d’attaques subies a explosé, sollicitant des équipes pourtant doublées pour la circonstance. Il a fallu attendre le mois de décembre pour constater une baisse significative des attaques.
Pour 2025, la feuille de route du gestionnaire comporte une étape plus pragmatique : la poursuite d’efforts sur l’utilisation de l’alerte radio. A la fin 2024, sept établissements étaient dotés de la possibilité d’émettre des alertes radio (Île-de-France, Hauts-de-France, Rhône-Alpes et Bretagne-Pays-de-la-Loire sur sa partie Pays-de-Loire). Les projets d’extension auprès de nouveaux établissements continuent mais surtout, de nouveaux types d’incidents pourront faire l’objet de ce type d’alerte, via un signal sonore envoyé à tous les trains du secteur.








