Le trafic ferroviaire est redevenu normal lundi matin 4 décembre, gare Montparnasse à Paris, après un dimanche chaotique lié à une panne informatique. La gare avait été totalement fermée du samedi soir 20 heures au dimanche midi dans le cadre d’un chantier de modernisation. « Pour la troisième fois consécutive, nous avons fermé la gare durant un week-end, pour continuer à mettre en service les nouvelles installations, notamment les nouveaux aiguillages, liées à la mise en circulation des LGV SEA et Bretagne – Pays de la Loire. Ce week-end, on déployait le logiciel permettant de les rendre opérationnels. Ces nouvelles installations doivent permettre d’augmenter de 20 % la capacité de la gare Montparnasse », explique un porte-parole de SNCF Mobilités.
A 12h15, le chantier s’achevant, les opérations de remise en service ont été effectuées. Mais dix minutes plus tard, c’était le bug, qui a nécessité d’interrompre les circulations. Cette panne informatique a touché le poste d’aiguillage de la gare Montparnasse, bloquant la signalisation et donc tous les trafics. « Le seul test qui vaille pour voir si tout fonctionne, c’est celui qui se passe en conditions réelles. Or, une panne informatique s’est produite. C’est pourquoi nous avons maintenu le dispositif mis en place durant le chantier : les trains ont continué à arriver et à partir de la gare d’Austerlitz », poursuit le porte-parole.
Pour améliorer les liaisons avec la gare d’Austerlitz, la RATP avait renforcé le service de la ligne de bus 91. Dimanche, le principal problème n’était pas de recevoir les trains en gare d’Austerlitz mais surtout d’en faire partir en nombre suffisant vers la Province. Près de 50 TGV n’ont pas pu circuler sur les 250 prévus ce dimanche. 25% des clients n’ont finalement pas pu être acheminés, et ont dû reporter leur voyage au lendemain.
Les TGV qui ont tout de même circulé ont affiché en moyenne plus de deux heures de retard. La SNCF, qui recommandait aux voyageurs de différer leurs déplacements dans la mesure du possible, leur a proposé de changer leurs billets sans frais et de les rembourser totalement en cas de retard supérieur à 3 heures. 400 chambres d’hôtel ont également été mis à disposition des voyageurs. Quant aux banlieusards et aux utilisateurs des trains Corail, ils devaient s’arrêter à Versailles-Chantiers puis prendre le RER C pour rejoindre ou quitter la capitale.
A la différence de la grande panne survenue en gare de Montparnasse cet été, en plein chassé-croisé des juillettistes et des aoûtiens, et qui avait duré trois jours, sans plan B pour éviter la gigantesque pagaille qui s’en était suivie, un plan, prévu en amont, a cette fois-ci pu être mis en place. Même si la panne a été résolue en trois heures (une centaine d’experts étaient sur place côté SNCF Réseau), il a été décidé, conformément à ce plan B, de maintenir les circulations de trains au départ et à l’arrivée à Austerlitz jusqu’au lundi matin. « Nous avons appliqué la consigne de notre président Guillaume Pepy, expliquant que désormais on ne propose un train que si on est capable d’informer correctement les voyageurs à son sujet », explique-t-on encore côté SNCF Mobilités.
Les leçons ont été tirées mais, à entendre les commentaires sévères des voyageurs ce week-end, l’information reste largement à améliorer. Un plan baptisé Rob.In (pour Robustesse Information) a été lancé pour unifier les informations (qui arrivent aujourd’hui en ordre dispersé), les authentifier et les apporter aux voyageurs, essentiellement via une application, dès le début de l’année prochaine.
Les commentaires de la ministre des Transports ont aussi été durs, estimant que, même s’il y a eu des améliorations de procédures depuis cet été, « ce nouvel incident ne pouvait être toléré alors que les travaux étaient prévus de longue date ». Après avoir « convoqué » Patrick Jeantet, Elisabeth Borne a demandé au PDG de SNCF Réseau « de lui présenter d’ici la fin de la semaine une nouvelle organisation et un nouveau management de la gestion des grands travaux et de l’ingénierie, qui permette de fiabiliser la réalisation de ces programmes de travaux et la reprise des circulations ». SNCF Réseau a aussi décidé de lancer un audit de ses programmes de tests et de remise en service à la fin des grands chantiers.
D’ores et déjà, l’enquête lancée pour mieux comprendre la cause de cet incident a permis de montrer que le protocole de test utilisé avant la remise en service n’avait pas permis de déceler une erreur de paramétrage informatique due à un mauvais chargement de données. En clair, il y a eu un manque de rigueur dans la préparation de cette opération de modifications de la signalisation de la gares « têtes de ligne ».
L’époque étant à la multiplication des grands travaux de modernisation ferroviaire, le risque est grand de connaître pareils dysfonctionnements lors des « rendus » de chantier. L’année prochaine, par exemple, il est prévu de mettre en service le poste d’aiguillage à grand rayon d’action de Saint-Denis. Pour éviter ces mauvaises surprises et renforcer notamment le pilotage des grands projets, Patrick Jeantet va accélérer son projet de réorganisation de Réseau. Quant à la gare Montparnasse, théâtre de ces dysfonctionnements à répétition et d’une « saturation structurelle » selon SNCF Mobilités, un dirigeant opérationnel unique sera nommé en 2018 pour mieux coordonner toutes les entités qui interviennent sur le site.
Marie-Hélène Poingt
Photo : Elisabeth Borne lors de sa visite gare Montparnasse le dimanche 3 décembre.