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Ewa

De nouvelles priorités pour les chemins de fer britanniques

Train Southeastern à London Bridge
Londres

Dans son discours pour l’ouverture du parlement britannique, deux semaines après la victoire des Travaillistes aux élections générales, le roi Charles III a annoncé le programme législatif de la nouvelle session, décrivant les priorités du nouveau gouvernement pour l’année à venir. Et parmi ces priorités figurent les orientations énoncées dans le programme électoral travailliste.

C’est ainsi que Charles III a annoncé une législation qui conduira à la création de l’organisme Great British Railways (GBR), qui sera entre autres chargé de reprendre les trains de voyageurs aux actuels opérateurs privés à l’expiration de leurs contrats respectifs. Moins visible du grand public sera la reprise par GBR du réseau ferré, actuellement géré par un autre acteur public, Network Rail.

L’objectif affiché de GBR est de rendre plus efficace l’exploitation des chemins de fer par une simplification de leur organisation, qui devrait en outre permettre des économies du fait d’un nombre réduit d’acteurs. Mais il ne faudra pas moins qu’une législature pour que les résultats des changements annoncés se concrétisent.

Parallèlement, les Travaillistes ont inscrit un projet de loi visant à revitaliser les dessertes par bus et car, fortement dérèglementés dans les années 1980. Dans le cadre de ce projet de loi, les collectivités locales pourraient reprendre le contrôle des transports publics par route dans leurs périmètres respectifs, en direct ou par délégation de service public. La restriction sur la création de nouveaux opérateurs d’autobus publics sera également levée.

P. L.

Ewa

Sandrine Le Feur à la tête de la commission du développement durable à l’Assemblée nationale

Le Feur

Réélue députée du Finistère aux législatives, Sandrine Le Feur (Ensemble pour la République), 33 ans, agricultrice, s’installe dans le fauteuil de présidente de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire à l’Assemblée. Elle a été élue le 20 juillet. Le fauteuil était précédemment occupé par Jean-Marc Zulesi, un autre Ensemble, battu face au Rassemblement national le 7 juillet dans la 8e circonscription des Bouches-du-Rhône, et fin connaisseur des transports. Il est à l’origine de la proposition de la loi sur les RER métropolitains, votée en décembre 2023

Presque entièrement renouvelée, la commission parlementaire chargée de préparer les projets ou propositions de loi relatives aux transports (entre autres) compte quatre vice-présidents : le socialiste Gérard Leseul, qui lors de la précédente législature avait proposé le gel des tarifs des transports publics pendant les JO et signé un rapport sur les zones à faible émissions avec le Modem Bruno Millienne (battu le 7 juillet), Mickaël Cosson (Les Démocrates), Jean-Pierre Taite (Droite Républicaine) et Emmanuel Blairy (Rassemblement national). Un cheminot siège au sein de la commission, Bérenger Cernon, député LFI de la 8e circonscription de l’Essonne qui a battu Nicolas Dupont-Aignant, conducteur de RER sur les lignes D et R du RER, et délégué CGT.

Parmi les propositions de loi en suspens suite à la dissolution de l’Assemblée nationale le 9 juin dernier, le renforcement des pouvoirs des agents de sûreté de la SNCF et de la RATP (Suge et GPSR) initiée par le Sénat, l’‘interdiction des grèves dans les transports publics pendant les périodes de grande mobilité. Quant au financement des projets de RER métropolitains dont la liste des projets labellisés par le gouvernement avait été publiée juste avant le deuxième tour des législatives et qui devait faire l’objet d’une conférence du financement, son sort se jouera avec le nouveau gouvernement, quand il sera nommé. La préparation du projet de loi de Finances pour 2025 a démarré avec le gouvernement démissionnaire qui gère les affaires courantes, et avec un objectif budgétaire de 20 milliards d’économies supplémentaires.

N.A

Ewa

L’Assemblée nationale perd deux de ses meilleurs connaisseurs des transports

Jean-Marc Zulesi et David Valence

Ils étaient considérés comme faisant partie des élus connaissant le mieux le secteur des transports : Jean-Marc Zulesi (Ensemble) a perdu son siège dans la 8e circonscription des Bouches du Rhône à l’issue du second tour des élections législatives face au RN Romain Tonussi qui l’emporte de justesse avec 50,24 % des voix. C’est aussi le cas du député sortant David Valence (Ensemble) qui échoue dans la 2e circonscription des Vosges face au RN Gaëtan Dussausaye (52,77 % des suffrages).

Le premier, député depuis 2017, était président de la commission du Développement durable depuis juin 2022. Il a été notamment rapporteur du volet innovation de la loi d’orientation des mobilités (LOM), rapporteur du volet transport de la loi Climat-Résilience ou encore auteur d’un rapport sur les mobilités actives. Plus récemment, il a été à l’origine de la proposition de loi sur les services express métropolitains, un sujet qui lui tenait particulièrement à coeur.

De son côté David Valence, ancien maire de Saint-Dié-des-Vosges entre 2014 et 2022, également président de la commission Transports, mobilités et infrastructures de la région Grand Est, a été président du conseil d’orientation des infrastructures.

Enfin, parmi d’autres éliminations symboliques, citons Clément Beaune, l’ancien ministre des Transports, battu à Paris face à Emmanuel Grégoire qui l’emporte dès le premier tour sous la bannière Nouveau Front Populaire. Ou Laurianne Rossi, qui a travaillé à partir de 2016 à SNCF Réseau jusqu’à son élection en 2017 à l’Assemblée nationale (elle a travaillé sur la réforme ferroviaire en 2018), puis après avoir échoué à se faire ré-élire en 2022 a réintégré la SNCF en tant que conseillère de Jean-Pierre Farandou et a ensuite rejoint le cabinet de Gabriel Attal : l’ancienne conseillère s’incline devant Aurélien Saintoul (NFP), vainqueur dès le premier tour. Enfin, Bruno Millienne (MoDem), qui avait mené en 2022 une « mission flash » sur les Zones à faibles émissions, s’était désisté à l’issue du premier tour pour faire face au RN dans les Yvelines.

En revanche, l’ancienne Première ministre Elisabeth Borne (qui a également été PDG de la RATP et ministre des Transports) remporte son duel face au RN Nicolas Calbrix dans la 6e circonscription du Calvados. Notons aussi l’arrivée, au Palais Bourbon, d’un nouveau venu issu de la SNCF : le cégétiste Béranger Cernon élu sous l’étiquette NFP bat dans la 8e circonscription de l’Essonne Nicolas Dupont-Aignan (DLF) et François Durovray, président LR de ce département depuis 2015 (et grand promoteur des cars express).

 

Ewa

Levée de bouclier contre la directive sur les méga-camions

Malgré le report modal voulu par la Commission européenne, le transport routier de marchandises a continué sa progression au détriment des autres modes.

Alors le feu vert du Parlement européen à la révision de la directive sur les poids et dimensions des camions en Europe, les opérateurs de fret ferroviaire s’inquiètent. « La directive propose d’augmenter les limites actuelles, en permettant le passage pour les flux transfrontaliers des camions de 40 à 44 tonnes, et en autorisant les megatrucks à passer les frontières, des mastodontes de plus de 25 mètres de long et pesant jusqu’à 60 tonnes, interdits même aux États-Unis », souligne l’Alliance 4 F, l’association qui représente les acteurs du du fret ferroviaire français.

Pour l’UIC (Union internationale des chemins de fer), même si « l’intention est de rendre les transports plus verts en autorisant davantage de poids et d’espace pour les batteries, en fait, cela va compromettre les objectifs du Pacte vert pour l’Europe, car cette décision ne fait qu’optimiser le transport routier tout en ne tenant pas compte de l’énorme impact que cela ne manquera pas d’avoir sur l’ensemble du secteur des transports ».

Même tonalité du côté de la députée européenne Karima Delli, qui rappelle que cette augmentation va aussi profiter aux véhicules diesel jusqu’en 2035. La présidente de la commission Transport et tourisme du Parlement européen, qui juge que ce vote va à l’encontre des objectifs fixés par le Green deal, s’interroge : « Qui peut sérieusement imaginer que des méga-camions diesel de 60 tonnes nous permettront de réduire les émissions de CO2 des poids lourds de 90 % d’ici 2050? »

Frédéric Delorme, Président de Rail Logistics Europe et de Fret SNCF, estime aussi incompréhensible « cette préférence » par rapport au rail alors que le secteur routier « consomme sept fois plus d’énergie que le ferroviaire »…

Pour le moment, la France n’autorise pas ces camions. Karima Delli explique qu’avec ce texte, un État membre devra autoriser la circulation de méga-camions étrangers sur son territoire, dès lors qu’il l’autorise pour le trafic domestique. Ce n’est pas le cas de la France. Mais entourée par l’Allemagne, l’Espagne et la Belgique, notre pays pourrait être mis sous pression par ses voisins, craint la députée européenne qui « appelle la France à se positionner fermement contre les méga-camions ».

Le Conseil n’a pas encore pris position. « Ce texte sera négocié en trilogue lors de la prochaine mandature« , précise encore l’élue.

MH P

Les partisans de la directive donnent aussi de la voix

Face aux critiques, les acteurs du transport routier sont montés au créneau. « Avoir des camions plus grands, c’est aussi l’assurance de baisser très significativement l’empreinte carbone par produit transporté car la consommation énergétique du véhicule est répartie sur un plus grand nombre de marchandises », a assuré Eric Hémar, le président de TLF (Union des entreprises de transport et de logistique de France). Selon lui, c’est également « participer à la compétitivité des entreprises industrielles françaises pour les aider à mieux exporter leurs produits ou importer leur matière première sans laisser nos seuls voisins bénéficier de ce nouvel avantage prix« .  C’est enfin la possibilité de desservir tous les territoires, jusqu’au dernier kilomètre, puisque le train ou le fleuve ne peuvent pas aller partout et qu’ils « ont déjà fort à faire pour garder leurs trafics là où leur pertinence est avérée« .  Surtout si on ajoute des avantages à la route!

 

 

 

Ewa

Les dossiers qui attendent Patrice Vergriete, le nouveau ministre des Transports

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Lorsqu’il avait défendu sa candidature face au Parlement il y a quasiment un an (le 17 janvier 2023), pour prendre la présidence de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France), Patrice Vergriete s’était dit « passionné par les mobilités ». Nommé le 8 février ministre délégué aux Transports, il va pouvoir le prouver en remplaçant Clément Beaune, parti sous les louanges d’un secteur qui a apprécié sa connaissance des dossiers et sa volonté d’avancer. 

Agé de 55 ans, polytechnicien et ingénieur des Ponts et Chaussées, Patrice Vergriete connaît déjà bien les difficultés de financements des transports, étant resté six mois à la tête de l’Afit France (soit trois mois de plus que son prédécesseur Jean Castex parti à la RATP), avant d’être nommé ministre du Logement.

Lorsqu’il était maire de Dunkerque, il s’est aussi intéressé aux transports publics, décidant en 2018 de les rendre gratuits et faisant alors de sa ville « la première agglomération d’Europe à proposer la gratuité pour tous dans ses transports publics« , avait-il expliqué dans une interview à VRT. Avec l’ambition de lutter contre la pollution et de redonner, précisait-il, « du pouvoir d’achat à la population« .

Ancien du parti socialiste, qu’il a quitté en 2013, il représente aujourd’hui l’aile gauche au sein de Renaissance, un peu à l’image de son prédécesseur Clément Beaune. Celui-ci s’était  attaqué à des sujets de fond, nouant ici un accord pour financer les transports publics franciliens, promettant le même traitement aux collectivités de province, et annonçant là une taxe sur les secteurs routier et aérien au bénéfice des modes non polluants au nom de la transition écologique. En janvier, l’ancien ministre attendait un rapport sur les péages ferroviaires, prévoyait le lancement d’un plan d’Etat pour des liaisons en cars express et promettait la diffusion d’une liste de projets d’autoroutes à abandonner. Sans oublier la poursuite du plan de transformation de Fret SNCF sous le radar de Bruxelles ou, sujet phare de l’année,  la préparation des JO…

Depuis, une crise sociale couve à la SNCF, qu’il va falloir éteindre….

Passage en revue de quelques grands dossiers emblématiques qui attendent le nouveau ministre.

Les JO Paris 2024

Vingt-neuf jours de compétition, des millions de spectateurs, 200 000 accrédités, dont 15 000 athlètes. Le réseau francilien devra absorber entre 600 000 et 800 000 voyageurs supplémentaires chaque jour pendant les JO. Jamais l’organisation d’Olympiades n’auront autant souligné l’enjeu des transports collectifs.

Maillons essentiels de la réussite des épreuves, les opérateurs de transport public se veulent rassurants, les politiques aussi. Interrogé, début décembre 2023 sur Franceinfo, sur une lettre que lui avait adressé le préfet d’Île-de-France et dans laquelle ce dernier relevait l’impréparation des transports en commun franciliens à l’approche des JO, Clément Beaune avait reconnu : « il y a encore des lignes, des navettes supplémentaires à organiser, du renforcement d’offres à organiser ».

A certains endroits, le plan de transport ne permettrait pas d’acheminer les spectateurs à cause de la saturation des lignes de métro et RER en dépit « des renforts envisagés » par Île-de-France Mobilités (IDFM) avec des bus de substitution, pointait le courrier révélé par le Canard Enchaîné. « A certains endroits, le plan transport [tel qu’il est prévu durant les JOP] ne permet d’acheminer les spectateurs que si tous les autres voyageurs étaient dissuadés ou presque » de se déplacer, y était-il écrit. Clément Beaune invitait les Franciliens à « s’organiser un peu différemment durant la période » des JOP avec « plus de télétravail » et des « congés ». Et prévoyait « une campagne d’information précise à partir du mois de janvier… ».

Le passe Rail

Inspiré du Deutschland Ticket en Allemagne (transports régionaux à volonté pour 49 euros par mois), le passe Rail à la française – sans les TGV ni les transports urbains – verra-t-il le jour à l’été comme Emmanuel Macron l’avait demandé à son ex-ministre des Transports congédié début 2024 ? Outre-Rhin, le dispositif a mobilisé des engagements financiers exceptionnels de l’Etat fédéral (5 milliards d’euros annuels).

En France, pas sûr que le verrou de Bercy saute si aisément. Il faut aussi trouver un consensus avec les régions, autorités compétentes pour les TER. Si les Français ont fortement plébiscité le train en 2023, le prix des billets reste un sujet crispant.

Les RER métropolitains

La loi encadrant le développement des Services express régionaux métropolitains (Serm), communément appelés RER métropolitains, a été votée en décembre dernier.

Voulus par Emmanuel Macron qui en avait fait l’annonce surprise fin 2022 sur Youtube, plusieurs projets sont à l’étude ou en cours de développement : Lille, Lyon, Grenoble, Marseille, Nantes, Rennes, Rouen, Strasbourg, Bordeaux, Toulouse.

Les premiers projets retenus pour obtenir un soutien de l’État devaient être connus au printemps 2024, avait annoncé en octobre Christophe Béchu, le ministre de la Transition écologique. Avec quelle enveloppe budgétaire pour les financer ?

Les péages ferroviaires

C’est un sujet qui fâche : SNCF Réseau doit augmenter de 7,6 % en moyenne ses redevances d’utilisation des voies ferroviaires en 2024. Et d’autres augmentations devraient suivre les années suivantes. Les régions, autorités organisatrices des TER, les contestent. Et les usagers, qui se plaignent du prix du train, les subissent également, le péage représentant près de 40 % du tarif du billet.

Face à la bronca, Clément Beaune avait demandé à l’automne dernier le lancement d’une enquête conjointe à l’Inspection générale des finances et à l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable. Faudrait-il baisser les péages ? Mais dans ce cas, l’Etat est-il prêt à subventionner davantage les travaux des infrastructures ferroviaires ?

Des financements pérennes pour la mobilité locale

« L’Etat doit être cohérent avec ses objectifs de décarbonation », plaident les élus du Groupement des autorités organisatrices du transport (Gart). S’inquiétant d’un traitement inéquitable entre l’Île-de-France et les autres territoires, depuis que Valérie Pécresse a arraché un accord avec l’Etat pour sécuriser le financement des transports publics d’Ile-de-France, les élus des autres territoires en voudraient bien autant.

Quand on n’est ni francilien, ni éligible à un RER métropolitain, comment financer le choc d’offre sans pouvoir augmenter le versement mobilité ?, demandent-ils en substance. « Il ne peut pas y avoir une France à deux vitesses », martèle Louis Nègre à chaque occasion. « Ce qui s’est passé en Ile-de-France ouvre des perspectives pour le pays tout entier », lui avait répondu Clément Beaune. Quelle sera la réponse du nouveau ministre ?

N. A. et M.-H. P.

Ewa

Sauvetage d’urgence de la ligne des Causses et de l’Aubrac

Viaduc de Garabit, ligne des Causses et train de l'Aubrac

L’épisode estival du feuilleton de la ligne des Causses et de l’Aubrac devrait bien se terminer, comme le laissaient entendre plusieurs spoilers dès le mois de juin. Il y avait eu l’annonce, par le ministre Clément Beaune, que l’Etat devrait débloquer quelque 40 millions d’euros pour la réfection de 25 km de la ligne de Béziers à Neussargues, puis sa confirmation par Jean-Luc Gibelin, vice-président Transport d’Occitanie. Mais sur le montant nécessaire (41 millions d’euros, selon SNCF Réseau), seuls 13,7 millions d’euros sont effectivement financés pour engager un renouvellement des rails, vue « l’urgence avérée », selon les termes de la réponse apportée fin août par le même ministre à Pierre Morel-À-l’Huissier, député de Lozère. De quoi engager une réfection qui, si elle n’était pas entreprise, mettrait en péril la continuité de la liaison ferroviaire entre Clermont-Ferrand et la Méditerranée par Neussargues, indispensable à la desserte du site ArcelorMittal de Saint-Chély-d’Apcher.

Une liaison hautement symbolique, car la section de 25 km à renouveler, encore équipée de rail double champignon remontant à l’époque de la Compagnie du Midi, emprunte le célèbre viaduc de Garabit, réalisé par Gustave Eiffel. Et son éventuelle fermeture aurait entraîné de fait la coupure de la ligne de l’Aubrac sur 55 km entre Neussargues et Saint-Chély-d’Apcher, c’est-à-dire sa section la plus au nord, dès le mois de décembre prochain pour les voyageurs et fin 2024 pour le fret.

Pour garantir l’avenir de la ligne, les financements étaient ces dernières années répartis en trois tiers, entre l’Etat et les deux régions concernées, Auvergne-Rhône-Alpes (où se situent les 25 km à renouveler) et Occitanie (en général plutôt volontaire pour assurer la réfection des infrastructures ferroviaires). Sauf que cette fois, les deux régions ont, d’un commun accord, refusé de financer l’opération nécessaire sur une section faisant partie du réseau TET. En effet, malgré les apparences, le train de voyageurs au sud de Neussargues, qui est techniquement assuré par des rames du parc TER d’Occitanie, est un Intercités ! Quant au fret, pour lequel la ligne est indispensable, il n’est pas du ressort des régions. Restait donc comme solution à l’Etat, par ailleurs propriétaire de l’infrastructure, d’en financer seul la réfection. Pour ce qui est du tiers à sa charge, soit 13,7 millions d’euros, c’est chose faite. Pour les deux autres tiers, le financement reste à confirmer.

Alors, sauvée, la ligne des Causses et de l’Aubrac ? Oui quand même, mais dans l’urgence et « jusqu’à la prochaine fois ». Même lorsque l’on aura vu la couleur des 41 millions demandés par SNCF Réseau, il restera à s’attaquer rapidement à la réfection d’autres sections de cet itinéraire, sans oublier d’apporter tous les soins nécessaires au maintien en exploitation du viaduc de Garabit, qui va sur ses 140 ans d’existence… C’est dans cette perspective, alors que le volet Mobilités du CPER 2023-2027 est en cours de discussion, que Carole Delga, présidente de la région Occitanie, et son homologue Laurent Wauquiez, pour Auvergne-Rhône-Alpes, ont appelé ensemble le gouvernement à revoir son investissement pour les lignes de l’Aubrac et des Cévennes (Nîmes – Clermont-Ferrand), estimant que « le financement de 100 millions d’euros prévu aujourd’hui par l’Etat, très loin des travaux estimés à 600 millions d’euros par SNCF Réseau, sera clairement insuffisant pour sauvegarder les deux lignes ».

P. L.

Ewa

Rencontres de Clermont-Ferrand : « Affirmer une position commune sur les besoins de financement du transport public »

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Marc Delayer préside le GIE Objectif Transport Public qui organise les Rencontres nationales du transport public (RNTP) du 17 au 19 octobre, à Clermont-Ferrand.

Ville, Rail & Transports : Dans tous les salons professionnels consacrés aux transports collectifs, les bus électriques sont portés au pinacle.  Et si le tout électrique n’était pas la seule solution pour décarboner le transport ? Aux prochaines RNTP, vous allez poser la question. Réponse ?

Marc Delayer : Avant toute chose, remettons les chiffres en perspective : seulement 2,7% des 30% de émissions de gaz à effet de serre (GES) du secteur des transports routiers sont le fait des bus et des cars. Et globalement, moins de 1% de GES en France sont émis par le transport collectif de voyageurs. Les opérateurs et les collectivités locales ont plutôt une approche de mix-énergétique, avec différentes filières qui ont chacune des avantages et des inconvénients. Certes, l’électrique est la réponse la plus naturelle, c’est la solution la plus poussée en Europe avec la filière hydrogène, même si elle n’est pas encore mature et pose encore la question de sa production. Il y a aussi le biogaz avec des formes de méthanisation qui commencent à être plus vertueuses. Pour autant, nous sommes isolés en Europe sur la filière biogaz, et quand la Commission européenne souhaite qu’­­à partir de 2030, on ne produise plus de véhicules thermiques, ça interroge… Le biogaz doit être intégré d’une façon ou d’une autre dans la transition énergétique, il doit trouver sa place pour, au minimum, pouvoir répondre aux besoins des collectivités qui ont investi dans la filière pour leurs flottes d’autobus. Elle ne doit pas être complètement condamnée à court terme. Quant aux biocarburants, les carburants de synthèse issus d’autres sources que les énergies fossiles, ce sont des évolutions à interroger dans le cadre d’un mix énergétique.

En France on a condamné rapidement les dernières motorisations diesel et pourtant on aurait sans doute plus vite vu baisser les émissions si on avait laissé les bus avec une motorisation Euro 6 renouveler tranquillement les anciennes générations de bus. Car aujourd’hui, compte tenu du mur d’investissement que représentent les motorisations électriques, pour un bus électrique acheté, on laisse deux ou trois vieilles générations de bus sur le carreau. On aurait été plus vite si on avait accompagné la sortie du diesel plus doucement.

VRT : L’association des paralysés de France pointe les difficultés de déplacement pour les personnes handicapées qui viendraient suivre les épreuves des JO en 2024. D’autres associations militant pour les droits des malvoyants réclament des annonces vocales pour annoncer les arrêts, notamment à Paris. Où en est-on ? 

Marc Delayer : Le sujet est vaste et large, il concerne l’accès dans les véhicules et l’accès aux points d’arrêt. L’information voyageurs aussi. De larges progrès ont été réalisés, notamment en province. Aujourd’hui les parcs de bus et de tramways sont tous accessibles. Ce qui pose problème, ce sont les métros historiques, ceux de Paris et Marseille notamment.  Il reste des lignes non accessibles et sans perspective de le devenir, car c’est techniquement très difficile.

Pour les JO de Paris, il est clair que cela posera un problème. En dehors des lignes de tram, de RER et de bus, ll y aura des navettes dédiées aux personnes en situation de handicap pour compléter la desserte. Quant aux annonces sonores, elles ne seront pas en place pour les JO, mais en 2036. Les lois de 2005 puis de 2015 sur le handicap n’ont pas encore permis de combler les trous dans la raquette. En milieu rural, c’est l’accès aux arrêts par la voirie qui pose encore problème. Parfois, les services de transport de substitution peuvent être une réponse pragmatique même si, en première intention, ce n’est l’objectif recherché. A Cholet, nous avons récemment recruté un conducteur sourd, une fois que les médecins de préfecture l’ont laissé passer le permis de construire. Il a ensuite fallu adapter tous nos équipements intérieurs à un fonctionnement spécifique, tout en restant dans le fonctionnement collectif. On peut le faire, ça montre bien qu’il y a des perspectives mais cela prend du temps et arrive progressivement.

VRT : Le boom des modes actifs (vélos, trottinettes, marche) aiguise les problèmes de cohabitation sur la voirie, et surtout sur les trottoirs : 60 millions de piétons sonne l’alerte. Quelles sont les pistes pour apaiser les différentes mobilités ?

Marc Delayer : La mobilité est une forme de schizophrénie. On peut être est tour à tour piéton, automobiliste, cycliste ou usager des transports collectifs, et à chaque fois, on change de comportement en fonction du mode de transport. Au-delà des déplacements, c’est le respect de l’autre qui est en question, il va bien falloir faire de la pédagogie, mettre en place des actions – le code de la rue en est une – auprès de tous les publics, pour parler des règles de cohabitation. Cela passe aussi par l’aménagement de l’espace public pour laisser de la place à chacun. Et on ne pourra pas se passer de la coercition. Car c’est juste scandaleux de voir des vélos et trottinettes débouler sur les trottoirs ou de ne pas s’arrêter aux feux rouges.

VRT : De l’Ile-de-France à la province, le modèle économique des transports publics se cherche toujours. Allez-vous de nouveau interpeller le gouvernement sur ce sujet aux RNTP ? Sous quelle forme ?

Marc Delayer : L’UTP comme le Gart ont récemment mis en avant un certain nombre de pistes de financement, le rapport sénatorial sur le sujet, publié aujourd’hui, en apportera peut-être d’autres. Au débat organisé par le Gart le 28 juin, le sénateur Hervé Maurey (co-rapporteur avec Stéphane Sautarel, ndlr) n’a voulu lâcher aucune information. Louis Nègre a annoncé sa volonté de tenter de réunir toutes les associations d’élus impliqués dans la gestion urbaine, autour de dix solutions de financement pérennes pour le transport public. Les RNTP seront le moment d’affirmer cette position commune. On est face à un mur et face à un paradoxe : d’un côté, il faut un choc d’offre de transport car c’est la seule voie pour inciter au report modal et décarboner les déplacements du quotidien. Et pour cela, il faut de l’argent. Or, les collectivités, malgré ce qu’en dit le gouvernement, n’ont pas les moyens de décarboner leur flotte et de la renouveler rapidement. Il va bien falloir prendre conscience qu’il est nécessaire de protéger le modèle économique du transport collectif urbain et de mettre en avant toutes les solutions financières pour accompagner l’intelligence et l’agilité locale. Clément Beaune est invité aux RNTP, mais d’ici à octobre, sera-t-il encore ministre des Transports ? Quoi qu’il en soit, les Rencontres de Clermont-Ferrand seront le moment pour porter tous ensemble ce discours, être entendus, et peut être écoutés.

Propos recueillis par Nathalie Arensonas

Ewa

« Ne pas se servir de la Société du Grand Paris comme d’un cheval de Troie »

Gilles Savary

Fin connaisseur du transport ferroviaire, Gilles Savary, ancien député socialiste de Gironde, salue le modèle de la Société du Grand Paris pour externaliser la maîtrise d’ouvrage de grandes infrastructures, et les financer. Mais il met en garde contre la pression fiscale, « fabrique à gilets jaunes », comme s’intitule son essai paru en début d’année (1).

Ville, Rail & Transports : Le gouvernement veut placer la Société du Grand Paris en orbite pour la réalisation des RER métropolitains et de leurs gares. Qu’en pensez-vous ?
Gilles Savary : C’est plutôt une bonne idée. Avec le Grand Paris Express, le plus grand chantier d’infrastructure européen, la SGP a fait ses preuves dans deux registres : un financement innovant et une maîtrise d’ouvrage complexe. Dotée d’une fiscalité propre (notamment la taxe sur les bureaux, ndlr), elle peut se refinancer sur les marchés financiers au rythme de la construction des projets. En France, l’offre ferroviaire est insuffisante par rapport à la demande, il y a des goulets d’étranglement sur le réseau, et c’est d’ailleurs pour les désengorger que l’on fait des RER métropolitains. Le chantier est énorme, les recettes de péage et les subventions sont à peine suffisantes pour maintenir le réseau ferré en état. La SGP peut amener des fonds plus rapidement mobilisables que des financements budgétaires.

Ce ne serait pas dévoyer le modèle SGP ?
G. S : Je connais les réticences extrêmes de SNCF Réseau et de Gares & Connexions devant la possible arrivée d’un nouvel acteur, immédiatement compétent. D’autant que SNCF Réseau sait qu’il n’a pas les capacités de production industrielle pour accomplir les RER métropolitains. Nous allons affronter une crise d’insuffisance de l’offre ferroviaire : la SGP, qui s’appellera autrement, est donc la bienvenue pour atteindre nos objectifs environnementaux et de report modal. Toutefois, la loi lui interdit d’intervenir là où le réseau ferré existant est exploité : ce qui l’exclut de la plupart des projets de RER métropolitains. Elle pourrait intervenir sur les lignes du Grand Est que la région veut remettre en exploitation. Ailleurs, elle aura des queues de cerises. Sauf à ce que SNCF Réseau en fasse un maître d’ouvrage délégué, ou un maître d’œuvre.
Mais la grande difficulté pour la SGP sera de mobiliser des ressources propres en levant de nouvelles taxes, car dans de nombreuses régions, c’est déjà fait pour les nouvelles lignes à grande vitesse ! Sud, Occitanie et Nouvelle-Aquitaine se sont fait piéger dans des sociétés de projets qui lèvent des impôts locaux, des taxes spéciales d’équipements et des taxes additionnelles aux taxes de séjour pour financer les LGV Bordeaux-Dax-Toulouse, Montpellier-Perpignan, Provence Côte d’Azur.
Dans les Hauts-de-France, Xavier Bertrand est très intéressé pour un RER métropolitain entre Lille et Hénin Beaumont. La SGP est partante, SNCF Réseau n’y voit pas d’inconvénient puisque ce sont des ouvrages ferroviaires nouveaux, mais pas question de créer de nouvelles taxes locales, avertit le patron de la région qui lève déjà des impôts pour la Société de projet du canal Seine-Escaut. Après ce siphonnage fiscal des territoires pour financer des infrastructures ferroviaires nationales, il n’y a plus d’argent !
On ferait mieux d’avoir des recettes fiscales claires et précises et de ne pas se servir de la SGP comme d’un cheval de Troie. Financer des LGV, dont la plupart des gens n’ont pas besoin dans des territoires qui sont en déficit de transports collectifs, par de la fiscalité locale impalpable mais qui a vocation a augmenter, c’est une bombe à retardement. Une fabrique de gilets jaunes ou de bonnets rouges, au choix… Exactement comme pour l’écotaxe ou la taxe carbone. Il aurait donc été bien plus judicieux de garder ces ressources pour les RER métropolitains.

Dans ces conditions, la SGP ne pourrait mettre qu’un pied dans la porte…
G. S : Elle construira peut-être des RER métropolitains si les élus mettent carte sur table et instaurent une taxe juste, pas en catimini, pour combler le déficit de transports collectifs. La SGP construira aussi peut-être des pôles d’échanges multimodaux, des gares. Mais par corporatisme, Gares & Connexions n’a pas très envie de voir débouler un nouveau maître d’ouvrage sur ce marché.

Propos recueillis par Nathalie Arensonas

La Ville inaccessible. Essai sur une fabrique des gilets jaunes. Ed. le Bord de l’eau, 290 p., 18 euros.

Ewa

La Société du Grand Paris pourrait devenir la Société des Grands Projets pour réaliser les RER métropolitains

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Les députés de la commission développement durable et aménagement du territoire de l’Assemblée nationale ont commencé à examiner le 30 mai la proposition de loi sur les services régionaux express métropolitains (SERM) portée par le député Renaissance Jean-Marc Zulesi. Elle fait suite à l’idée lancée en 2022 par Emmanuel Macron de développer « des RER dans dix grandes métropoles françaises ». Objectif : doter ces RER métropolitains d’un cadre juridique et surtout, pouvoir les financer.

Lors d’un séminaire de presse organisé mi-mai par Gares & Connexions, en présence des cadres dirigeants, le sujet n’était pas au programme mais il s’y est invité. Stéphane Lerendu, directeur Grands projets de la société gestionnaire des gares ferroviaires, intervenait à distance, retenu par une audition devant la commission parlementaire chargée d’analyser la proposition de loi (PPL) sur les services express métropolitains (SERM). L’autre dénomination des RER métropolitains appelés de ses vœux par Emmanuel Macron.

L’une des dispositions de la PPL portée par Jean-Marc Zulesi n’est pas vraiment du goût de Gares & Connexions : la possibilité pour la Société du Grand Paris (SGP) de se transformer en Société des Grands Projets. Sans changer d’acronyme, l’établissement public chargé de construire et d’assurer le financement des 200 km de métro automatique et des 68 gares du Grand Paris Express pourrait élargir ses compétences aux futurs RER métropolitains. Elle pourrait en assurer la maîtrise d’ouvrage directe ou déléguée, y compris celle des gares. La pilule serait amère pour Gares & Connexions, la filiale de SNCF Réseau qui gère les gares du réseau ferré national et assure habituellement la maîtrise d’ouvrage de leur construction et rénovation.

La proposition de loi défend l’idée que la SGP présidée par Jean-François Monteils pourrait monter des Groupements d’intérêts publics avec les collectivités locales pour mettre leur RER métropolitain sur les rails et construire ou transformer des gares en pôle d’échanges multimodaux. Car si les collectivités territoriales pourraient, comme l’envisage la PPL, lever de nouvelles taxes pour financer leur RER, elles ne seront pas en capacité, toutes seules, d’en boucler le budget. Outre la mise à niveau de l’infrastructure ferroviaire, les régions devront acheter en effet du matériel roulant pour assurer des services cadencés. La SGP peut lever de la dette, comme elle le fait pour le métro du Grand Paris.

Tout le monde, ou presque, semble tomber d’accord. De la Première ministre Elisabeth Borne à Jean-Marc Zulesi qui préside la commission parlementaire, en passant par Valérie Pécresse, la présidente d’Ile-de-France Mobilités qui se dit « très satisfaite de la proposition de loi sur l’avenir de la SGP, à condition qu’elle livre avant tout le métro du Grand Paris ». Le patron de SNCF Réseau, Matthieu Chabanel, estime que  » la SGP peut tout à fait construire des lignes nouvelles (et des gares, ndlr) puis les reverser dans le réseau ferré national « , SNCF Réseau restant, selon la loi, le gestionnaire unique des infrastructures en exploitation. Tout comme Gares & Connexions pour les gares existantes.

Outre la compétence de la SGP éprouvée sur le chantier du métro du Grand Paris, l’établissement public a l’avantage de pouvoir s’endetter alors que SNCF Réseau qui doit remettre d’équerre le réseau ferré existant est tenu dans sa politique d’investissement par une règle d’or qui limite ses possibilités d’endettement.

Inscrit dans une procédure accélérée, la proposition de loi de Jean-Marc Zulesi sera examinée dans l’Hémicycle de l’Assemblée nationale à partir du 12 juin.

Nathalie Arensonas

Ewa

Frédéric Delorme réclame un « plan Marshall » pour le réseau ferroviaire

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Frédéric Delorme, président de Rail Logistics Europe, est un ardent défenseur du transport ferroviaire de marchandises. Invité du Club Ville Rail & Transports le 17 février, il a plaidé pour des investissements massifs en faveur du rail pour réussir la transition énergétique. Il a aussi annoncé les premiers résultats positifs pour Fret SNCF, porté par une reprise d’activité, dans un contexte où la décarbonation des transports commence à être prise en compte très sérieusement par les clients.

« Les planètes n’ont jamais été aussi alignées pour une relance du transport ferroviaire de marchandises », assure avec optimisme Frédéric Delorme, le président de Rail Logistics Europe, invité du Club VRT le 17 février. Il estime que, face à l’enjeu environnemental, la route, qui reste le principal mode de transport de marchandises, a encore beaucoup à faire pour réaliser sa transition énergétique et réduire ses émissions, tandis que le fret ferroviaire est un moyen efficace pour répondre immédiatement aux besoins de l’industrie de notre pays, tout en réduisant les externalités des transports.

Nouveau nom, nouvelles ambitions

Il y a deux ans, TFMM (Transport ferroviaire et multimodal de marchandises) devenait Rail Logistics Europe. « Plus qu’un changement de nom, il s’agissait de clarifier notre offre, d’affirmer notre ambition d’être reconnu comme un partenaire de fret ferroviaire et de logistique, et de faire savoir que nous proposons tous les services de fret dans 10 pays européens », explique Frédéric Delorme. Rail Logistics Europe regroupe Fret SNCF, VIIA, Captrain, Naviland Cargo et Forwardis, le tout assurant 1,6 milliard d’euros de CA, dont la moitié réalisée par Fret SNCF. « Nous sommes la première entreprise ferroviaire en France, et VIIA est un opérateur de transport combiné exploitant des autoroutes ferroviaires. En Europe, nous sommes troisième en commission avec Forwardis et cinquième pour le combiné avec Naviland. Nous sommes un acteur clé de la décarbonisation en Europe », détaille Frédéric Delorme, en rappelant qu’une tonne de marchandises transportée par le train, c’est six fois moins d’énergie consommée, huit fois moins d’émissions de particules nocives et 14 fois moins d’émissions de CO2 que par la route.

En 2021, Fret SNCF a renoué avec les bénéfices pour la première fois depuis longtemps. En 2020, l’entreprise avait enregistré 105 millions d’euros de pertes. « Tous les résultats de nos filiales sont dans le vert, y compris pour nos filiales étrangères », précise-t-il.

Cette amélioration des comptes de Fret SNCF s’explique par la hausse de l’activité, mais aussi par des efforts de productivité (avec notamment l’augmentation du nombre des rotations) liés à la réduction des frais de structures. Le secteur a également bénéficié de l’aide financière des pouvoirs publics pour les péages et les wagons isolés. « Le wagon isolé est structurellement déficitaire. Sans coup de pouce de l’Etat, cette activité serait amenée à disparaître », rappelle-t-il.

 » LE WAGON ISOLÉ EST STRUCTURELLEMENT DÉFICITAIRE. SANS COUP DE POUCE DE L’ETAT, CETTE ACTIVITÉ SERAIT AMENÉE À DISPARAÎTRE « 

Politique de reconquête

« Nous sommes dans une politique de reconquête », souligne Frédéric Delorme. Fret SNCF a déjà augmenté son trafic de 10 % en 2021, davantage que la moyenne européenne (le volume devrait revenir cette année au niveau d’avant-crise), Naviland a vu son activité progresser de 25 % l’an passé, tandis que VIIA enregistrait une progression de 38 % par rapport à 2020. Parmi les autres nouvelles positives, l’entreprise a gagné le marché pour lancer une cinquième autoroute ferroviaire entre Sète et Calais en 2023, comme le rappelle le dirigeant , qui ajoute : « Cette nouvelle liaison permettra d’éviter 43 000 camions sur les routes et de réduire de 40 000 tonnes le CO2 rejeté dans l’atmosphère chaque année. »

Frédéric Delorme se félicite d’avoir repris des trafics à la route. Et donne quelques exemples comme le transport de containers entre Grand Est et Gennevilliers pour les ciments Vicat. Ou encore le gain par Novatrans de nouveaux trafics entre la France et l’Italie, qui permettront de supprimer 12 000 camions sur les routes. La société de combiné a également lancé une relation hebdomadaire entre la France et l’Espagne pour la société Cristalco, qui a choisi le report modal afin d’éviter de mettre 3 600 camions aller/retour sur la route, ce qui permet de réduire de 5 000 tonnes ses émissions de CO2. Captrain a rouvert des lignes en Allemagne pour transporter des déchets… « De nouveaux clients reviennent de la route vers le fer, poussés par la volonté d’être plus verts », constate le président de Rail Logistics Europe, qui se souvient : « Il y a 15 ans, lorsque j’étais à Fret SNCF, on parlait prix et qualité. Désormais, nos clients font passer leur bilan carbone au rang de leurs principales priorités. » Frédéric Delorme poursuit : « Des entreprises soucieuses de leur image s’intéressent à l’autoroute ferroviaire ou achètent des trains complets », et cite Amazon, groupe ô combien symbolique.

Ecolabels

Même si le coût du transport routier va augmenter, en raison notamment de la pénurie de routiers, permettant à l’écart de compétitivité de se réduire progressivement, il faut continuer à soutenir le fret ferroviaire pour lui permettre d’être dans le marché. Frédéric Delorme se dit favorable à une politique incitative plutôt que punitive.

Il préfère ainsi des mécanismes de défiscalisation ou de sur-amortissement qui pourraient être mis en place par exemple au bénéfice d’investissements qui ne nuisent pas à la santé.

Si Fret SNCF utilise encore quelques locomotives diesel, 90 % des tonnes-km transportées par Fret SNCF le sont sous caténaires, avec une énergie nucléaire décarbonée, alors que pour le transport routier, 95 % de la transition énergétique reste à faire. « Notre solution de transport, qui émet 14 fois moins de CO2 que par la route, est disponible immédiatement », souligne Frédéric Delorme qui propose une autre idée : la mise en place de certificats verts et blancs, vertueux pour la planète et la santé, ou encore la création d’écolabels pour que les consommateurs puissent faire leurs choix en toute connaissance de cause.

« 1 000 km réalisés sur autoroute ferroviaire, c’est 800 euros de valeur sociétale, si on prend en compte la moindre accidentologie, la décarbonisation et la dépollution, par rapport à un transport par camion », précise Frédéric Delorme.

Partie prenante de l’alliance 4F

Pour aller plus loin, la SNCF participe à l’alliance 4F (Fret Ferroviaire Français du Futur), mise en place en 2020 par les acteurs de la filière pour proposer une série d’investissements. Evalués à plus de 10 milliards d’euros, ils doivent permettre de doubler en dix ans la part modale du ferroviaire en la faisant passer à 18 %. C’était le niveau du fret ferroviaire il y a 30 ans.

Cette régression du fret ferroviaire au fil du temps s’explique, selon Frédéric Delorme, par la désindustrialisation de notre pays, la moindre compétitivité des ports français face à ses grands concurrents européens, et par le fait que les trains de fret passent toujours après ceux transportant des voyageurs.

De plus, ces dernières années, la part des subventions dédiée au fret en France a été la moins forte d’Europe, à égalité avec l’Espagne. Le président de Rail Logistics Europe y voit une corrélation avec cette part modale qui ne dépasse pas 9 % en France, contre 14 % en Italie, 18 % en Allemagne, 32 % en Autriche ou 35 % en Suisse. La France ne consacre que 49 euros par an et par habitant au réseau, soit neuf fois moins que la Suisse, cinq fois moins que l’Autriche et deux fois moins que l’Allemagne ou l’Italie.

Pour que le fret ferroviaire regagne des parts de marché, le dirigeant insiste sur la nécessité de subventions publiques afin de compenser l’inégalité avec la route qui ne paye pas ses infrastructures, ni ses émissions. D’où un déséquilibre de compétitivité et l’idée d’instaurer le principe du pollueur-payeur. « Mais on a vu ce que cela donnait avec les bonnets rouges… », rappelle-t-il.

De son côté, l’alliance 4F a transmis une liste de 72 mesures au gouvernement. Celui-ci a déjà lancé un plan de relance de plus de quatre milliards d’euros en faveur du ferroviaire (principalement ciblés sur les infrastructures), auquel s’ajoute le soutien au fret ferroviaire via une aide annuelle de 170 millions d’euros jusqu’en 2024. « S’il est satisfaisant d’avoir une vision pluriannuelle avec cet engagement, il faudra aller au-delà, car cela ne suffira pas. Il faudra continuer à investir au-delà de cette date », prévient Frédéric Delorme qui, avec 4F, appelle le prochain président de la République à poursuivre les efforts au cours des dix prochaines années et à « oser une mutation écologique et technologique, porteuse de sens ».

Et de rappeler que, grâce à son activité, Rail Logistics Europe a permis d’éviter 1,4 milliard d’euros d’externalités : émissions de CO2 et de particules. « Presque l’équivalent de notre CA, ce qui, en ces temps d’urgence climatique, où la pollution cause 50 000 morts prématurées par an, doit être pris en compte. »

Plan de relance

« La relance ferroviaire ne sera efficace que si on raisonne globalement », insiste le président de Rail Logistics Europe. Pour tenir les objectifs de doublement du fret ferroviaire, il faudra tripler le transport combiné. Ce qui nécessite de pouvoir bénéficier de sillons de qualité, permettant d’assurer la ponctualité. « Il faut un plan Marshall pour le réseau ferroviaire », martèle Frédéric Delorme. Plan qui profitera non seulement au fret mais aussi à l’acheminement des voyageurs.

Il estime en effet que le principal frein du ferroviaire est de ne pas disposer de sillons pour répondre aux besoins du marché, et met en garde : « Si on ne lance pas un plan Marshall en investissant 10 milliards comme le préconise 4F, nous aurons de plus en plus de difficultés. »

 » SI ON NE LANCE PAS UN PLAN MARSHALL EN INVESTISSANT 10 MILLAIRDS, NOUS AURONS DE PLUS EN PLUS DE DIFFICULTÉS « 

Selon Frédéric Delorme il faut gérer différemment les plannings de chantiers, afin de ne plus pénaliser le fret qui circule souvent de nuit, moment choisi pour réaliser les travaux. C’est dans ce but que 200 millions ont été engagés jusqu’à 2024 pour permettre à SNCF Réseau de réorganiser différemment des travaux en vue d’assurer de bons sillons au fret. « Sur le long terme, il y a un énorme enjeu pour le réseau », insiste-t-il, car si, globalement, la réponse actuelle en sillons est satisfaisante en qualité et en quantité pour le trafic conventionnel qui sert notamment l’industrie sidérurgique, le papier et la chimie, le transport combiné souffre d’un manque de qualité : 70 % des sillons proposés pour les autoroutes ferroviaires ne répondent pas aux besoins du marché. « Il faut du cadencement, avec des horaires précis et de la fréquence pour faire venir les transporteurs routiers. D’où la nécessité de continuer à investir de manière massive pour régénérer le réseau entre 2024 et 2030 ».

Les décisions qui seront prises au cours du prochain quinquennat présidentiel seront donc déterminantes. Après les premières décisions de ce gouvernement en faveur du fret ferroviaire, Frédéric Delorme attend un « acte II ». A court terme, il exprime le souhait que le fret ne soit plus pénalisé face au transport de voyageurs et que des sillons soient sacralisés. « On a besoin de capacités réservées permettant d’assurer des temps de transport dans le marché, afin de répondre à des commandes de dernière minute », plaide-t-il.

Dans l’attente du rapport du conseil d’orientation des infrastructures

« Nous attendons la remise du rapport du conseil d’orientation des infrastructures (COI) sur la stratégie de développement du fret ferroviaire, mais il va falloir être créatif et aller vite. Nous avons besoin d’une loi de programmation pour doubler le fret ferroviaire, comme c’est écrit dans la loi Climat », continue le dirigeant. « Ce qui sera décidé sur la saturation des nœuds ferroviaires et sur les lignes capillaires, qui acheminent 50 % des trafics de fret, sera déterminant. Si on le rate, nous risquons d’être largués par le reste de l’Europe. Notre industrie patinera, et les objectifs de réduction de CO2 ne seront pas atteints », prévient-il, avant d’ajouter que « le cap fixé est réalisable, à condition de sacrément se remuer ».

Tous bords politiques confondus, tout le monde veut du fret ferroviaire, et une pression citoyenne s’exerce. Or, au rythme actuel, on prend déjà du retard, poursuit-il. Les 10 milliards d’euros d’investissements préconisés par l’Alliance 4F apporteront à terme des économies bien supérieures, puisqu’ils pourraient générer de 25 à 30 milliards de bénéfices en valeur sociétale. « Il faut que les politiques les intègrent », insiste Frédéric Delorme.

Valérie Chrzavzez